Tribunal correctionnel de Seine, 9 juillet 1954, n° 9999

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Sur la décision

Référence :
T. corr. Seine, 9 juill. 1954, n° 9999
Numéro(s) : 9999

Texte intégral

TRIBUNAL CORRECTIONNEL DE LA SEINE, 9 juillet 1954

FAUX EN ÉCRITURE, ATTESTATIONS CERTIFICATS, RAPPORT DB POLICE.

Pour tomber sous le coup de l’art. 161, al. 3-3c c. pén., réprimant l’usage de fausses attestations ou certificats, il n’est pas nécessaire que le document incriminé soit rédigé en la forme brève et concise habituellement donnée aux certificats ; il peut revêtir des formes différentes, telles qu’une lettre ou un rapport (1);

Il suffit que le doctement apporte, comme toute attestation, avec autorité, des affirmations ou des dénégations de nature à influer sur le résultat recherché (2) ;

Il n’est pas nécessaire qu’il soit signé, alors qu’il est donné comme venant d’une administration (3); Par suite, constitue une attestation au sens de l’art. 161, a/. 3-35, c. pén., le rapport présenté en justice comme émanant d’un service de renseignements de la police (4).

(Min. publ. C. C… et B…) — JUGEMENT

LE TRIBUNAL ; A. En fait :

Attendu que les nommés C… et B…, par ordonnance de M. le juge d’instruction en date du 24 févr. 1954, ont été renvoyés devant le tribunal de police correctionnelle de la Seine, sous la prévention : 1° C…,

d’avoir à Paris, notamment en juin 1952, fait usage d’une attestation inexacte et falsifiée ; 2° B…, de

s’être à Paris, notamment dans le deuxième trimestre 1951 et en juin 1952, rendu complice, par aide donnée et en fournissant le moyen de commettre le délit, de l’usage d’attestation inexacte ou falsifiée commis par C… ; délits prévus et punis par les art. 161 (loi du 27 août 1948), 59, 60, 164 c. pén. ; que de l’information et des débats de l’audience, résultent les faits suivants :

Attendu que la société civile Institut technique des salaires ayant pour administrateurs les sieurs B… et

D…, ont par exploit du 6 oct. 1950, pour concurrence déloyale, assigné le Centre des jeunes Patrons, et

C… pris tant en son nom personnel que comme délégué général dudit organisme, en payement de la somme de 2 000 000 de francs à titre de dommages-intérêts, devant le tribunal civil de la Seine ( lre chambre) ; que cette assingation était fondée principalement sur une lettre de C… en date du 9 juin 1950

à laquelle était annexée une note anonyme, datée du 26 avr. 1950, contenant des renseignements sur

l’Institut technique des salaires et les sieurs B… et D… ; qu’au cours de cette procédure les défendeurs susnommés. le 11 juin 1952, déposaient des conclusions dans lesquelles ils affirmaient « que les renseignements dont ils faisaient état pour soutenir leur thèse étaient le résumé d’une enquête des renseignements généraux de la Sûreté nationale sur l’Institut technique salaires et ses directeurs, rapportés dans une note de ce service du 25 janvier 1951, ajoutant qu’ils avaient le devoir de diffuser parmi leurs adhérents intéressés les renseignements ainsi recueillis, dont la source garantissait la parfaire authenticité » ;

Attendu que l’enquête administrative ordonnée, d’accord des parties, par le tribunal civil, faisait ressortir, pour reprendre les termes mêmes du jugement rendu le 7 janvier 1953 par ce tribunal, « que le document sur lequel étaient basées les accusations portées contre le demandeur ne provenait ni de la

Sûreté, ni de la préfecture de police que la forme comme le fond dudit document laissait présumer qu’il émanait pas d’un service » ; que dans ses motifs, le tribunal, tout en constatant que la prétendue origine sérieuses des renseignements donnés par le Centre des jeunes patrons s’était révélée mensongère, soulignait que, sur une simple protestation de l’Institut technique des salaires, C…, en tant que délégué général du Centre des jeunes patrons, avait adressé aux onze destinataires de la lettre du 9 juin 1950, une lettre en date du 22juill. 1950 annulant purement et simplement sa précédente lettre et le document

l’accompagnant ; qu’enfin, le tribunal civil, tout en mettant hors de cause C…, qui n’avait pas agi en son nom personnel, condamnait le Centre des jeunes patrons à verser à l’Institut technique des salaires 50

000 fr. à titre de dommages et intérêts et ordonnait l’insertion du jugement dans la Revue des jeunes patrons ;



Attendu qu’à la suite de cette instance était ouverte une information pour usage de faux certificats visant le document du 25 janv. 1951, versé aux débats de la 1re chambre du tribunal et affirmé par les défendeurs

C… et le Centre des jeunes patrons comme le résumé d’une enquête des Renseignements généraux de la

Sûreté nationale ;

Attendu qu’au cours de l’information, C… a adressé, le 29 oct. 1953, au magistrat instructeur une lettre dans laquelle il précise que sur la pièce dactylographiée du 25 janv. 1951 (faisant l’objet de la poursuite actuelle) la mention manuscrite à l’encre note des. Renseignements généraux » a été ajoutée par Me

Amiel, collaborateur de M. le bâtonnier Ribet, sur ses propres indications, d’après l’origine qu’il croyait pouvoir attribuer à cette pièce ;

Attendu que tous ces éléments permettent incontestablement de retenir la mauvaise foi de C… qui avait pour premier devoir, avant d’en assurer la diffusion, de s’assurer de l’authenticité de la note du 26 avr.

1950 (annexée à sa lettre circulaire du 9 juin 1950) ; qu’en effet, C… connaissait tellement bien l’origine suspecte de ladite note que, par lettre du 22 juill. 1950, il l’annulait, ainsi que la lettre d’envoi susvisée ; que la note anonyme du 25 janv. 1951, reprenant les accusations contenues dans celle du 26 avr. 1950, ne pouvait que l’inciter à la prudence ; que cependant il l’a versée aux débats et fait affirmer son authenticité dans des conclusions écrites ; qu’il est donc mal venu à prétendre avoir produit devant le tribunal civil la note du 25 janv. 1951 pour provoquer la vérification de son caractère officiel, alors qu’eh réalité, son seul but, par cette production, était de démontrer sa bonne foi ;

Attendu, en ce qui concerne B…, qu’il n’apparaît pas que celui-ci puisse être retenu dans les liens de la prévention ; qu’en effet: s’il est établi que B… a bien remis à C… la note dactylographiée du 25 janv.

1951, en partageant lui-même l’impression que ce document pouvait émaner d’un service de police, il convient tout d’abord de retenir que B… ne figurait pas dans l’instance civile Institut technique des salaires et Centre des jeunes patrons ; qu’en outre B… a affirmé avoir mis en garde C… sur l’authenticité des renseignements contenus dans la note par lui remise ; qu’il était entendu avec lui « que ce n’était pas un document qui pouvait être produit en justice »; que C…, lui-même, a admis, à l’information, qu’il ne pouvait affirmer d’une façon formelle que B… l’ait autorisé à produire le document en justice (C. 40) ; qu’enfin, il ne semble pas que C… ait fait part à B… de l’envoi de sa lettre du 9 juin 1950 à onze personnes, accompagnée de la note anonyme du 26 avr. 1950 ; que de toute manière, un doute subsiste dont B… doit bénéficier ; B.

En droit :

Attendu que le document versé aux débats de l’instance civile par le prévenu C…, comme s’il était un rapport émanant d’un service de renseignements de la police, est incontestablement une attestation au sens de l’art. 161, al. 3, e. pén., tel qu’il résulte de la loi du 27 août 1948 ;

Attendu, en effet, que pour tomber sous le coup de la loi, il n’est pas nécessaire que le document incriminé soit rédigé on la forme brève et concise habituellement donnée aux certificats ; qu’il peut revêtir des formes différentes, telles qu’une lettre ou qu’un rapport (Garçon, Code pénal annoté, 2e éd., par MM. X, Y et Z, sous art. 159 à 162, no 68) ; qu’il suffit que le document apporte, comme toute attestation, avec autorité, des affirmations ou des dénégations de nature à influer sur le résultat recherché ;

Attendu que tel est le cas en l’espèce, puisque le document a été présenté comme un rapport de police

Attendu qu’il n’est pas non plus nécessaire que le document soit signé, alors qu’on allègue qu’il émane

d’une administration ;

Attendu qu’il n’est pas contestable que l’attestation incriminée a fait état « de faits matériellement inexacts » que le prévenu C…, en la versant aux débats du tribunal civil, en a fait sciemment usage ; -

Attendu que tous les éléments de fait et de droit sont réunis pour retenir la responsabilité pénale de C… pour le délit d’usage d’une attestation inexacte ou falsifiée qui lui est imputé ;



Attendu que les sieurs B. et D…, administrateurs de l’Institut technique des salaires, se sont constitués partie civile à l’audience du 11 juin 1954 et ont déposé des conclusions tendant à la condamnation conjointe et solidaire de C… et B… au payement de la somme de un franc en réparation du préjudice subi par eux du fait des prévenus ;

Attendu que cette constitution est régulière en la forme et justifiée au fond à l’égard. de C…, seul retenu par le tribunal dans les liens de la prévention ; qu’il convient d’y faire droit ; Par ces motifs, relaxe au bénéfice de doute B…, du chef de complicité de l’usage d’attestation inexacte ou falsifiée commis par

C…, et le renvoie des fins de la poursuite sans peine ni dépens ;

Vu l’art. 161, al. 3-3., c. pén. (loi du 27 août 1948), 164 du même code, déclare le prévenu C… coupable

d’avoir sciemment fait usage d’une attestation inexacte ou falsifiée ; faisant application du texte précité, le condamne à la peine de 40 000 fr d’amende ; statuant sur les conclusions de B… et D…, reçoit leur constitution de partie civile comme régulière en la forme ; au fond, la déclare justifiée à l’égard de C… seul ; le condamne en conséquence à leur payer la somme de un franc à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par eux de son fait ;

Du 9 juill. 1954. – Trib. torr. de la Seine, 13. ch. -MM. A, pr. – Ribet et B, av. NOTE. -

(1 à 4) V. conf. Garçon, Code pénal annoté, […], par X, Y et Z, art. 155 à 102, no 68.

Comp. observ. L. Hugueney à la Rev. science Cri,. 1046. 567; Vouis, Précis de droit pénal spécial, n° 347. •

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