Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 3e section, 16 décembre 2003

  • Action en concurrence déloyale·
  • Exploitation par un tiers·
  • Faible pouvoir attractif·
  • Dénomination tsarine·
  • Exploitation limitée·
  • Qualité pour agir·
  • Produits opposés·
  • Intérêt à agir·
  • Usage sérieux·
  • Interdiction

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 3e sect., 16 déc. 2003
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : TSARINE
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 96637295
Classification internationale des marques : CL14
Référence INPI : M20030768
Télécharger le PDF original fourni par la juridiction

Texte intégral

Monsieur W est titulaire de la marque « TSARINE » déposée le 2 août 1996 et enregistrée sous le n° 6 637 295 pour désigner les produits de la classe 14 de la classification internationale et notamment: « joaillerie, bijouterie et pierres précieuses ». Cette marque est exploitée pour désigner une bague en or, saphir et diamants qui est offerte à la vente par correspondance dans les catalogues diffusés auprès des titulaires des cartes de crédit American Express et Diners Club. Ayant découvert que la société SERPIE diffusait et offrait à la vente par le biais d’un catalogue et sur internet des bijoux sous la dénomination « tzarine » ou « tsarine », Monsieur W après avoir fait dresser un constat d’huissier relatif à l’offre de vente de ces bijoux sur internet, a, par acte en date du 18 mars 2002, saisi ce tribunal des chefs de contrefaçon de sa marque et de concurrence déloyale et parasitaire aux fins d’obtenir, outre les mesures d’interdiction, de confiscation et de publication usuelles en pareille matière, l’indemnisation de son préjudice. Dans le dernier état de ses écritures en date du 2 octobre 2003, la société SERPE soulève la déchéance de la marque « TSARINE » pour les produits de la classe 14 et à tout le moins pour la joaillerie, la bijouterie et les pierres précieuses, faute d’exploitation permanente et suivie. Elle demande de déclarer Monsieur W irrecevable à agir sous le nom de « Louis M » dont il n’établit pas qu’il s’agit de son pseudonyme de créateur. A titre subsidiaire, elle conclut au mal fondé de la demande en contrefaçon en faisant valoir que le terme « tsarine » n’a pas été utilisé à titre de marque et à l’irrecevabilité de Monsieur W à agir en concurrence déloyale en ce qu’il ne justifie pas exploiter lui-même la marque dont il est titulaire. Elle conclut en tout état de cause au débouté de la demande de ce chef en soulignant qu’elle n’a pas eu connaissance des documents publicitaires afférents au produit vendu sous la marque de sorte qu’elle n’a pu chercher à détourner la clientèle qui y est attachée, que son réseau de distribution est différent et ne touche pas la même clientèle et qu’il ne peut exister aucun risque de confusion entre des bijoux authentiques et les bijoux de fantaisie qu’elle commercialise nécessairement vendus à un prix très inférieur. Elle s’oppose à la demande de confiscation et de destruction des produits en relevant que les bijoux ne portent pas la marque « tsarine » qui ne figurait que sur les catalogues lesquels ne sont plus en circulation depuis l’été 2002. Elle relève enfin le caractère excessif des indemnités et des mesures de publicité sollicitées à titre de réparation. Elle sollicite l’allocation de la somme de 4 700 euros au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Monsieur W, dans le dernier état de ses conclusions signifiées le 26 septembre 2003, demande de débouter la société SERPIE de sa demande reconventionnelle en déchéance et de rejeter les exceptions d’irrecevabilité. Il demande de :

- dire que la société SERPIE a commis des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale et parasitaire à son préjudice,
- ordonner la confiscation des produits « TSARINE » de la société SERPIE et leur destruction devant huissier aux frais de la défenderesse,
- interdire à la société SERPIE d’importer, d’exposer , d’offrir en vente, de fabriquer, de faire importer, de faire exposer, de faire offrir en vente, de faire vendre et de faire fabriquer des produits portant la marque « TSARINE » sous astreinte de 530 euros par infraction constatée,
- condamner la société SERPIE à lui payer la somme de 228 000 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels du chef de contrefaçon et la somme de 151 514 euros

à titre de dommages et intérêts provisionnels du chef de concurrence déloyale et parasitaire,
- ordonner une mesure d’expertise afin d’évaluer l’importance de la diffusion des catalogues de la société SERPIE,
- ordonner la publication de la décision à intervenir dans sept revues ou périodiques à son choix et aux frais de la défenderesse dans la limite d’un coût de 4 545 euros par insertion,
- lui allouer la somme de 1 640 euros au titre de ses frais non taxables, le tout sous le bénéfice de l’exécution provisoire, et de condamner la société défenderesse aux entiers dépens dont distraction au profit de son conseil. L’ordonnance de clôture est intervenue le 6 octobre 2003.

I – Sur la demande reconventionnelle en déchéance de la marque « TSARINE » : Attendu qu 'aux termes des dispositions de l’article L 714-5 du Code de la Propriété Intellectuelle: « Encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n’en a pas fait un usage sérieux pour les produits et services visés dans l’enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans… La déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée… La preuve de l’exploitation incombe au propriétaire de la marque dont la déchéance est demandée. Elle peut être apportée par tous moyens.. » ; Attendu que la société SERPIE n’a d’intérêt à poursuivre la déchéance de la marque que pour les produits de « bijouterie, de joaillerie et pierres précieuses » opposés dans le cadre de l’action en contrefaçon à l’exclusion des autres produits désignés à l’enregistrement pour lesquels elle ne justifie d’aucune activité commerciale; Attendu que la société SERPIE vise expressément la période comprise entre le dépôt, soit le 2 août 1996 et le 2 août 2001; que Monsieur W est mal fondé à soutenir que seule la date de publication de l’enregistrement devrait être prise en compte dès lors que la propriété de la marque est acquise à compter du dépôt de celle-ci; Attendu que Monsieur W verse aux débats deux « mailings »en date des 2 février et 17 juillet 1999 correspondant à des actions de vente par correspondance auprès des titulaires de la carte American Express; que ces correspondances, accompagnées d’un bon de commande et d’une plaquette en couleurs, présentent la bague « TSARINE » crée par Louis M, vendue au prix de 9 980 francs; Qu’il produit également un exemplaire du magazine « Signature », magazine des membres du Diners Club, édition Bénélux de mai-juin 2001 lequel présente en pages 30 et 31 la bague « TSARINE » -Louis MARGAUX- accompagnée d’un bon de souscription à retourner à "Artefact (JSW) […]" ; Attendu qu’il est établi d’une part que Monsieur W est le titulaire de la marque « LOUIS MARGAUX » déposée le 18 juillet 1986 et enregistrée sous le n° 136 4119 pour les produits de la classe 14, marque régulièrement renouvelée, et d’autre part qu’il est directeur général et administrateur de la SA JSW dont le siège est […] 75 008 ainsi qu’il résulte de l’extrait du registre du commerce et des sociétés;

Qu’il ne saurait dès lors être sérieusement contesté que la marque « TSARINE » a fait l’objet d’un usage sérieux en France et pour l’exportation pendant la période considérée, étant précisé que le mode de commercialisation choisi, à savoir l’offre de souscription à tirage limité, présenté comme une « offre exceptionnelle » exclut la possibilité de multiplier et de renouveler les envois aux adhérents d’un même réseau; Qu’en conséquence, la société SERPIE sera déboutée de sa demande de déchéance. II – Sur la contrefaçon: Attendu que l’article L 713-2 du Code de la Propriété Intellectuelle dispose que « Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, la reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, même avec l’adjonction de mots tels que »formule, façon, système, imitation, genre, méthode« , ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l’enregistrement » ; Attendu qu’en l’espèce les catalogues et le site internet de la société SERPIE présentent des bijoux, à savoir une parure comprenant collier, bracelet et boucles d’oreilles sous la dénomination « TSARINE », qui, contrairement à ce qu’elle affirme, a bien pour objet de désigner les produits considérés et non d’évoquer seulement « les fastes de la Cour de Russie » ; qu’il ne s’agit pas davantage d’une reproduction partielle au motif que cette dénomination accompagnerait les termes « collier », « bracelet » ou « parure », l’association des termes ne faisant au contraire que renforcer la désignation précise du produit; Attendu que la circonstance que la marque n’ait, le cas échéant, qu’un faible pouvoir attractif du fait du caractère relativement banal de l’association entre un bijou et les joyaux d’une cour impériale est sans incidence sur la réalité de la contrefaçon, constituée par la reproduction du signe protégé pour désigner des produits identiques; III – Sur la concurrence déloyale: Attendu qu’il résulte des pièces versées aux débats que la commercialisation de bijoux sous la marque « TSARINE » est réalisée notamment par la société JSW; qu’en réplique à l’exception d’irrecevabilité soulevée par la société SERPIE, Monsieur W se borne à invoquer ses droit sur la marque « TSARINE » ainsi que sur la marque « Louis MARGAUX » et la réalité de l’exploitation de celles-ci sans soutenir et a fortiori justifier que cette exploitation serait, au moins pour partie, effectuée sous son nom et pour son compte; qu’il est dès lors irrecevable à agir de ce chef; IV – Sur les mesures réparatrices: Attendu que la demande de confiscation et de destruction des produits de la défenderesse n’a pas lieu d’être ordonnée dès lors que la dénomination « tsarine » n’a été utilisée que dans les documents de présentation et ne se trouvent pas reproduits sur les bijoux; qu’en revanche il sera fait droit à la demande d’interdiction selon les modalités précisées au dispositif; Attendu que l’entier préjudice de Monsieur W sera réparé par l’allocation de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts, sans qu’il soit nécessaire ni d’ordonner une mesure d’expertise ni d’ autoriser la publication du jugement; Attendu qu’il convient d’ordonner l’exécution provisoire de la présente décision, exécution provisoire qui n’est en l’espèce contraire à aucune disposition légale; Attendu que le demandeur a engagé pour la présente procédure des frais non taxables

dont il serait inéquitable qu’ils restent à sa charge; qu’il lui sera alloué la somme de 1640 euros sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure civile; Attendu que la société SERPIE sera condamnée aux entiers dépens de l’instance, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du même code. Par ces motifs Le Tribunal, Statuant publiquement, contradictoirement et en premier ressort, Dit qu’en offrant à la vente et en commercialisant sur catalogue et par le biais d’internet des bijoux sous la dénomination « TSARINE », la société SERPIE a commis des actes de contrefaçon par reproduction de la marque « TSARINE » n° 96 637 295 dont est titulaire Monsieur W, En conséquence, Fait interdiction à la société SERPIE de faire usage de la dénomination « TSARINE » sous quelque forme que ce soit pour désigner des « bijoux, pierres précieuses et objets de joaillerie », sous astreinte de 500 euros par infraction constatée à compter de la signification de la présente décision, Condamne la société SERPIE à payer à Monsieur W la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts, Dit n’y avoir lieu à confiscation, ni à publication de la présente décision, Déclare Monsieur W irrecevable en sa demande fondée sur la concurrence déloyale faute de commercialiser lui même les produits désignés sous la marque « TSARINE », Ordonne l’exécution provisoire du jugement, Condamne la société SERPIE à payer à Monsieur W la somme de 1640 euros en application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure civile , Condamne la société SERPIE aux entiers dépens et dit qu’ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du même code.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 3e section, 16 décembre 2003