Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre, 7 juin 2018, n° 2016/00463

  • Atteinte à la valeur patrimoniale de la marque·
  • Préjudice économique ou commercial·
  • Identité des produits ou services·
  • Consommateur d'attention moyenne·
  • Fonction d'indication d'origine·
  • Usage dans la vie des affaires·
  • Absence de droit privatif·
  • Similitude intellectuelle·
  • Concurrence parasitaire·
  • Dénomination nutrilogic

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

La contrefaçon par imitation de la marque NUTRILOGIE est constituée par la vente de produits cosmétiques sous la dénomination Nutrilogic. Les produits incriminés (baumes) sont identiques à ceux visés au dépôt de la marque invoquée (crèmes) et il importe peu que les uns soient destinés aux femmes et les autres aux hommes, ni qu’ils soient commercialisés dans des réseaux différents ou soient composés différemment puisque seul est pertinent le caractère identique ou similaire du produit, c’est-à-dire de sa catégorie. Les signes opposés, très similaires visuellement, phonétiquement et intellectuellement, sont bien utilisés à titre de marque même si les produits sont vendus sous une marque ombrelle (Vichy pour le demandeur et Guinot pour la société poursuivie). En revanche, le dépôt des marques française et de l’Union européenne NUTRILOGIC ne constitue pas la contrefaçon de la marque antérieure NUTRILOGIE. La jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne dit que le titulaire d’une marque ne peut interdire l’usage par un tiers d’un signe identique que si cet usage a lieu dans la vie des affaires et est susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque. Or le dépôt n’est qu’un acte préparatoire à l’usage de la marque dans la vie des affaires. Il n’est pas fait en relation avec des produits et services dont l’origine commerciale a à être garantie auprès du public avec lequel le signe n’est pas en contact. Il n’est ainsi pas un acte de contrefaçon et ne cause pas le moindre préjudice au titulaire de la marque. Les marques HYDRA SENSITIVE et DERMOLISS sont dépourvues de caractère distinctif pour désigner des « cosmétiques, notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage ». Si les deux locutions constituent des néologismes, les termes qui les composent sont compris aisément par les consommateurs de ces produits. Elles peuvent servir à désigner une caractéristique d’un produit cosmétique en l’espèce sa capacité à hydrater la peau, pour l’une, et sa capacité à nettoyer ou soigner la peau pour la rendre lisse, pour l’autre. En conséquence, ces deux marques sont totalement descriptives et ne remplissent pas leur fonction d’identification de l’origine des produits visés au dépôt.

Commentaire1

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www.alain-bensoussan.law · 27 avril 2020

Les nouvelles procédures de l'Institut national de la propriété industrielle issues de la réforme du droit des marques sont entrées en vigueur le 1er avril 2020. La réforme entrée en vigueur le 11 décembre dernier est sans nul doute la plus importante dans le domaine de la protection et de la défense des marques depuis de nombreuses années. Elle a un impact juridique significatif pour les titulaires de marques françaises, tant en droit matériel qu'en droit procédural. Le présent article, qui poursuit celui en date du 16 janvier 2019 (1) présente les autres principales modifications …

 
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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch., 7 juin 2018, n° 16/00463
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 2016/00463
Publication : Propriétés intellectuelles, 70, janvier 2019, p. 61-64, notes de Julien Canlorbe ; Propriété industrielle, 2, février 2019, p. 35-37, note de Pascale Tréfigny, Comparaison Nutrilogie c. Nutrilogic : assez logique... ; PIBD 2018, 1106, IIIM-773
Décision(s) liée(s) :
  • Cour d'appel de Paris, 13 décembre 2013, 2016/00463
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : NUTRILOGIE ; HYDRA SENSITIVE ; HYDRA SENSITIVE ; DERMOLISS ; NUTRILOGIC
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 96615889 ; 3614425 ; 7435431 ; 3101658 ; 4163994 ; 013814157 ; 007435431
Classification internationale des marques : CL03
Référence INPI : M20180351
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Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS JUGEMENT rendu le 07 juin 2018

3e chambre 1re section N° RG 16/00463

Assignation du 11 janvier 2016

DEMANDERESSE SA. L’OREAL […] 75008 PARIS représentée par Maître Michel-Paul ESCANDE de la SELEURL CABINET M-P E, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #R266

DÉFENDERESSE Société GUINOT […] 75002 PARIS représentée par Maître Gilles MENGUY de la SELEURL GM AVOCAT, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C0438

COMPOSITION DU TRIBUNAL Marie-Christine C. Vice-Présidente Gilles BUFFET, Vice-président Aurélie JIMENEZ, Juge assistée de Maud JEGOU, Greffier,

DÉBATS À l’audience du 10 avril 2018 tenue en audience publique devant Marie-Christine C, Gille BUFFET, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seuls l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe Contradictoire en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE Les parties et leurs droits

La société L’OREAL est notamment titulaire de :

*la marque française « NUTRILOGIE » déposée le 13 mars 1996 et, enregistrée sous le numéro 96/615.889, régulièrement renouvelée, qui désigne les produits suivants de la classe 3 de la Classification de Nice (Pièces n° 3 et 3b) : « Parfums, eaux de toilette ; gels et sels pour

le bain et la douche ; savons de toilette ; déodorants corporels ; cosmétiques notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage, le corps et les mains ; laits, gels et huiles de bronzage et après-soleil ; produits de maquillages ; shampoings ; gels, mousses et baumes, produits sous la forme d’aérosol pour le coiffage et le soin des cheveux ; colorants et produits pour la décoloration des cheveux ; produits pour l’ondulation et la mise en plis de cheveux ; huiles essentielles ; dentifrices ». *la marque française « HYDRA SENSITIVE », déposée le 28 novembre 2008, enregistrée sous le numéro 08/3614425, *la marque communautaire « HYDRA SENSITIVE », déposée le 2 décembre 2008 et enregistrée sous le numéro 007435431, pour désigner toutes deux en classe 3 : « cosmétiques, notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage » *la marque française « DERMOLISS », déposée le 22 mai 2001 et enregistrée sous le numéro 01 3 101 658, régulièrement renouvelée, pour désigner notamment les produits suivants en classe 3 : « cosmétiques, notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage ».

La société GUINOT exerce depuis 40 ans des activités de recherche au sein de ses laboratoires afin de développer des produits de beautés qui sont exclusivement commercialisés dans son réseau international d’instituts de beautés.

Les parties ont signé le 27 mai 2007 un engagement de confidentialité dans la perspective de la mise en place d’un partenariat commercial, voire d’acquisition.

Naissance du litige Les négociations de partenariat et/ou d’acquisition entre les parties ont pris fin en 2013. Découvrant début 2015 une enquête non commanditée par la société GUINOT et portant sur les produits GUINOT réalisée par des sociétés tierces à la présente procédure (WR CONSEIL et PRONEA), la société GUINOT a obtenu, par deux ordonnances du tribunal de commerce de Paris du 18 février 2015, des mesures d’instructions lui permettant de se rendre dans ces sociétés tierces. Elle découvrait ainsi le 6 mars 2015 que ces enquêtes auraient été réalisées à la demande de la société L’OREAL. Après le refus de cette dernière de répondre à sommation interpellative demandée par la société GUINOT, et après l’échec de la tentative de médiation devant le Centre de Médiation et d’Arbitrage de Paris, le Président du tribunal de commerce de PARIS a, par ordonnance du 26 novembre 2015, fait droit à la demande de mesure d’instruction in futurum de GUINOT. Les faits allégués de ccd du fait

d’espionnage industriel font actuellement l’objet d’une procédure au fond devant le tribunal de commerce de Paris.

Parallèlement, fin 2015, la société L’OREAL s’apercevait :

- que la société GUINOT avait déposé, le 11 mars 2015, une marque française et de l’Union Européenne « NUTRILOGIC » désignant les " cosmétiques ; produits pour le soin de la peau" et exploitée à compter du 1 er janvier 2016 pour un baume. Ces actes argués de contrefaçon ont été constatés par constat d’huissier du 8 février 2016 sur le site internet www.guinot.com, ainsi que par procès-verbal d’achat du 9 février 2016 auprès de l’institut […].

- que sa marque « HYDRA SENSITIVE » était reprise à l’identique par la société GUINOT pour commercialiser une gamme de produits de soin, et ce depuis 2010. Ces actes argués de contrefaçon ont été constatés par constat d’huissier du 30 décembre 2015 sur le site internet www.guinot.com, ainsi que par procès-verbal d’achat du même jour de trois produits « hydra sensitive » auprès d’un institut parisien Guinot
- que la société GUINOT offrait à la vente et commercialisait des produits cosmétiques sous la dénomination « DERMA LISS ». Ces actes argués de contrefaçon ont été constatés par constat d’huissier du 19 janvier 2016 sur le site internet www.guinot.com, ainsi que par constat d’achat du 20 janvier 2016 d’une crème « derma liss » auprès de boutique AQUATERMES à Paris. Estimant que la société GUINOT commettait des actes de contrefaçon de ses marques françaises et communautaires « HYDRA SENSITIVE » et autorisée par ordonnance présidentielle, la société L’OREAL a fait réaliser, le 14 janvier 2016, une saisie contrefaçon au siège social de NEUILLY-SUR-SEINE et dans l’usine de DAMMARIES-LES-LYS de la société GUINOT. D’autres saisies ont été effectuées les 20 janvier 2016 et 18 février 2016, autorisées par deux ordonnances rendues sur requête le 21 janvier 2016, pour établir des faits de ctf des marques françaises « NUTRILOGIE » et « DERMOLISS »

À la suite de ces opérations de saisie contrefaçon, la société L’OREAL a fait délivrer à la société GUINOT trois assignations :

-Le 11 janvier 2016, en nullité de la marque française « NUTRILOGIC ». Cette procédure a été enrôlée sous le numéro RG 16/00463 ;

- Le 12 février 2016, en contrefaçon de la marque française « HYDRA SENSITIVE ». Cette procédure a été enrôlée sous le numéro RG 16/02180 ;

- Le 12 février 2016, en contrefaçon de la marque française « DERMOLISS ». Cette procédure a été enrôlée sous le numéro RG 16/02180.

Les 2 et 16 février 2016, la société GUINOT a assigné la société L’OREAL en nullité et déchéance des marques françaises « HYDRA SENSITIVE » et « DERMOLISS ». Ces deux procédures ont été enrôlées sous les numéros RG 16/02180 et 16/02889. Ces procédures ont été jointes par ordonnance du juge de la mise en état du 29 mars 2016 sous le numéro 16/00463.

Les prétentions des parties Dans ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 27/03/18 auxquelles il sera renvoyé pour un exposé de leurs moyens conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la société L’OREAL demande au tribunal au visa des articles L. 711-4-a, L. 713- 2, 713-3, L. 714-3 et L.716-15 du code de la propriété intellectuelle, des articles 1382 et suivants et code civil tels qu’en vigueur au moment des faits et de la délivrance de l’assignation, des articles 699 et 700 du code de procédure civile, du Règlement (CE) n°207/2009 du 26 février 2009 sur la marque communautaire, de :

DECLARER la société L’OREAL recevable et bien fondée en ses demandes ;

DEBOUTER la société GUINOT de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

1/ DIRE ET JUGER qu’en déposant la marque française « NUTRILOGIC » n° 15/4163994 le 11 mars 2015, la société GUINOT a porté atteinte aux droits de la société L’OREAL sur sa marque antérieure « NUTRILOGIE » n° 96/615889 ;

Par conséquent :

PRENDRE ACTE du retrait total par la société GUINOT de la marque « NUTRILOGIC » n° 15/4163994 et de la marque communautaire « NUTRILOGIC » n° 013814157 ; 21 DIRE ET JUGER que la société L’ OREAL n’a commis aucun dépôt frauduleux en déposant ses marques françaises « HYDRA SENSITIVE » n° 08/3614425 et communautaire « HYDRA SENSITIVE » n°007435431; DIRE ET JUGER que la marque française « HYDRA SENSITIVE » n° 08/3614425 est distinctive et n’encourt aucune déchéance ; DIRE ET JUGER que la marque communautaire « HYDRA SENSITIVE » n° 007435431 est distinctive et n’encourt aucune déchéance ;

DIRE ET JUGER que la marque française « DERMOLISS » n° 01 3 101 658 est distinctive et n’encourt aucune déchéance ;

3/ DIRE ET JUGER qu’en fabricant, détenant, offrant à la vente et vendant des produits de cosmétiques sous la marque NUTRILOGIC, la société GUINOT a commis des actes de contrefaçon de la marque « NUTRILOGIE » n° 96/615889 au détriment de la société L’OREAL, au sens de l’article L.713-3 et L.716-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle; DIRE ET JUGER qu’en fabricant, détenant, offrant à la vente et vendant des produits de cosmétiques sous la dénomination « HYDRA SENSITIVE », la société GUINOT a commis des actes de contrefaçon des marques « HYDRA SENSITIVE » française n° 08/3614425 et communautaire n°007435431 au détriment de la société L’OREAL au sens des articles L. 713-2, 713-3, L. 716-1, L. 716-9 et suivants et L.717-1 du code de la propriété intellectuelle et 9 du Règlement (CE) n°207/2009 du 26 février 2009 sur la Marque communautaire ; DIRE ET JUGER qu’en fabricant, détenant, offrant à la vente et vendant des produits de cosmétiques sous la dénomination DERMA LISS, la société GUINOT a commis des actes de contrefaçon de la marque française « DERMOLISS » n° 01 3 101 658 au détriment de la société L’OREAL au sens des articles 713-3, L. 716-1, L. 716-9 et suivants du code de la propriété intellectuelle ;

Par conséquent : CONDAMNER la société GUINOT, sous astreinte de 1.000 euros par jour à compter de la signification du jugement à intervenir, à cesser la commercialisation en France des produits litigieux NUTRILOGIC et DERMA LISS, à rappeler des circuits commerciaux et enfin à détruire à leurs frais l’ensemble des produits jugés contrefaisants rappelés et en stock ; CONDAMNER la société GUINOT, sous astreinte de 1.000 euros par jour à compter de la signification du jugement à intervenir, à cesser la commercialisation en France et sur l’ensemble du territoire européen des produits litigieux « HYDRA SENSITIVE », à rappeler des circuits commerciaux et enfin à détruire à leurs frais l’ensemble des produits jugés contrefaisants rappelés et en stock ; INTERDIRE à la société GUINOT, sous astreinte de 1.000 euros par jour ou par infraction constatée à compter de la signification du jugement à intervenir, de faire usage de tout signe identique ou similaire susceptible de créer un risque de confusion avec les marques « NUTRILOGIE » n° 96/615889, « HYDRA SENSITIVE » n° 08/3614425 etn°007435431 et « DERMOLISS » n° 01 3 101 658 ; CONDAMNER la société GUINOT à payer la somme de 120.000 euros à la société L’OREAL en réparation de l’atteinte portée à la valeur patrimoniale des marques « NUTRILOGIE » n° 96/615889 (pour 70.000 €), « HYDRA SENSITIVE » n° 08/3614425 et

n°007435431 (pour 40.000 €) et « DERMOLISS » n° 01 3 101 658 (pour 10.000 €) ; CONDAMNER la société GUINOT à payer à la société L’OREAL la somme de 4.715.460,66 euros au titre du préjudice commercial qui découle directement des actes de contrefaçon desdites marques, constituée de la façon suivante :

- 1.200.000 € pour la marque « NUTRILOGIE » ;

—  2.945.827,31 € pour la marque « HYDRA SENSITIVE » ;

—  569.633,35 € pour la marque « DERMOLISS ». À TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE, DIRE ET JUGER que la société GUINOT a calculé elle-même une perte de marge brute de la société L’OREAL d’un montant total de 2.760.422,34 € constituée de la façon suivante :

- 103.744,90 € pour la marque « NUTRILOGIE » ;

- 2.645.438,24 € pour la marque « HYDRA SENSITIVE » ;

- 110.239,20 € pour la marque « DERMOLISS ».

ET LA CONDAMNER à verser cette somme à la société L’OREAL au titre du préjudice commercial découlant des actes de contrefaçon desdites marques. 4/ DIRE ET JUGER que l’offre en vente et la vente en France, par la société GUINOT de produits cosmétiques imitant les marques française « NUTRILOGIE » n°96/615889, « HYDRA SENSITIVE » n° 08/3614425 et « DERMOLISS » n° 01 3 101 658 et la marque communautaire « HYDRA SENSITIVE » n°007435431, qui révèle un choix de reprise systématique et de détournement de la renommée internationale de la société L’OREAL, constitue un comportement déloyal et/ou parasitaire fautif.

Par conséquent : CONDAMNER la société GUINOT à payer à la société L’OREAL, sauf à parfaire, la somme de 1.200.000 euros au titre du préjudice résultant des faits de concurrence déloyale et parasitaire ; En tout état de cause :

5/ ORDONNER la publication du jugement à intervenir dans cinq journaux ou revues au choix de la société L’OREAL, intégralement ou par extrait, sans que le coût de chaque insertion ne soit inférieur à quatre mille euros (4.000 euros), aux frais de la société GUINOT, aux besoins à titre de dommages et intérêts complémentaires ; ORDONNER également l’inscription par extraits du jugement à intervenir sur la page d’accueil du site internet www.guinot.com en lettres noires sur fond blanc de type Arial de taille 14, et ce, pendant

une durée de 3 mois à compter de la signification du jugement à intervenir, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard. DIRE ET JUGER qu’en application de l’article L. 131-3 du Code des procédures civiles d’exécution, les astreintes prononcées seront liquidées, s’il y a lieu, par le Tribunal ayant statué sur la présente demande. DEBOUTER la société GUINOT de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions. ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir en toutes ses dispositions, nonobstant appel et sans constitution de garantie.

CONDAMNER la société GUINOT à payer à la société L’OREAL la somme de 80.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNER la société GUINOT aux entiers dépens, comprenant les Procès-verbaux de constat des 30 décembre 2015 (constat internet « HYDRA SENSITIVE » et constat d’achat « HYDRA SENSITIVE »), 9 janvier 2016 (constat d’achat NUTRILOGIC), 19 janvier 2016 (constat internet DERMA LISS), 20 janvier 2016 (constat d’achat DERMA LISS) et 8 février 2016 (constat internet NUTRILOGIC) et les Procès-verbal de saisie-contrefaçon dressés les 14 janvier 2016 (« HYDRA SENSITIVE »), 27 janvier 2016 (DERMA LISS) et 18 février 2016 (NUTRILOGIC), dont distraction au profit de la SELARL M-P E Avocats, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile. En réplique, dans leurs dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 27/03/18 auxquelles il sera renvoyé pour un exposé de leurs moyens conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la société GUINOT demande au tribunal au visa des articles L. 711-1, L. 711-2, L. 712-6, L. 713-1, L. 713-2, L. 713-3, L. 714-3, L. 714-5, L714-6, L. 714-16, L, 716-5 et L. 716-14 du code de la propriété intellectuelle, des articles 1382 et suivants [Ancienne rédaction] du code civil, Vu les articles 32-1, 138, 143, 282, 699 et 700 du code de procédure civile, du Règlement (CE) n° 207/2009 du 26 février 2009 sur la marque communautaire, du principe fraus omnia corrumpit de : - DECLARER la demande de la société GUINOT recevable et bien fondée ;

SUR LES ACTES DE CONTREFAÇON

A. Concernant la contrefaçon alléguée de la marque « NUTRILOGIE » - PRENDRE ACTE du retrait total par la société GUINOT le 21 février 2016 de la marque française « NUTRILOGIC » numéro

4163994 et de la marque communautaire « NUTRILOGIC » numéro 013814157;

- JUGER que la société L’OREAL est mal fondée dans son action en contrefaçon de marques française « NUTRILOGIE » numéro 615889 ;

- JUGER que :

- Les produits de la société GUINOT commercialisés sous les marques « NUTRILOGIC » et ceux de la société L ' OREAL commercialisés sous la marque «NUTRILOGIE» n’étaient ni identiques ni similaires ;

- L’exploitation par la société GUINOT des marques « NUTRILOGIC » n’a porté aucune atteinte à la marque « NUTRILOGIE » de la société L’OREAL, et ;

- La clientèle ne pouvait croire que les produits de la société GUINOT provenaient de la société L’OREAL ou que ces deux entreprises étaient liées économiquement ;

- JUGER que la société GUINOT n’a commis aucun acte de contrefaçon par imitation de la marque « NUTRILOGIE » numéro 615 889 de la société L ' OREAL, et que cette dernière, quand bien même elle disposerait d’un droit exclusif, ne pouvait interdire à la société GUINOT d’exploiter ses marques ;

En conséquence,

DEBOUTER la société L’OREAL de l’intégralité de ses demandes ;

B. Concernant la contrefaçon alléguée de la marque « HYDRA SENSTITIVE »

1. À titre principal JUGER que le dépôt des marques française n° 3614425 et européenne n° 007435431 « HYDRA SENSITIVE » par la société L’OREAL ont été faits en fraude des droits de la société GUINOT ;

En conséquence : PRONONCER la nullité de la marque française « HYDRA SENSITIVE » numéro 3614425 et communautaire « HYDRA SENSITIVE » n°007435431 ;

DEBOUTER la société L’OREAL de l’intégralité de ses demandes ;

2. À titre subsidiaire

JUGER que les marques française n° 08/3614425 et européenne n° 007435431 « HYDRA SENSITIVE » sont descriptives ;

En conséquence : PRONONCER la nullité de la marque française « HYDRA SENSITIVE » numéro 3614425 et communautaire « HYDRA SENSITIVE » n°007435431 ;

DEBOUTER la société L’OREAL de l’intégralité de ses demandes ;

3. À titre très subsidiaire - JUGER que depuis leur dépôt les 28 octobre et 2 décembre 2008, la société L’OREAL n’a jamais fait un usage sérieux des marques de ses marques « HYDRA SENSITIVE » française n°08/3614425 et européenne n° 007435431 ;

En conséquence :
- DIRE ET JUGER que la société L’OREAL est déchue de ses droits sur les marques « HYDRA SENSITIVE » française n°08/3614425 et européenne n° 007435431 à compter du 28 octobre 2008 pour la marque française et du 2 décembre 2008 pour la marque européenne, pour les produits suivants de la Classe 3 de la Classification de Nice : parfums, eaux de toilette ; gels et sels pour le bain et la douche non à usage médical ; savons de toilette ; déodorants corporels ; cosmétiques notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage, le corps et les mains ; laits, gels et huiles de bronzage et après-soleil (cosmétiques) ; produits de maquillage ; shampooings ; gels, mousses, baumes et produits sous la forme d’aérosol pour le coiffage et le soin des cheveux ; laques pour les cheveux ; colorants et produits pour la décoloration des cheveux ; produits pour l’ondulation et la mise en plis des cheveux ; huiles essentielles ;

- DEBOUTER la société L’OREAL de l’intégralité de ses demandes ;

4. À titre infiniment subsidiaire

- JUGER qu’en application du principe de spécialité, la société L’OREAL ne peut revendiquer la moindre atteinte à son droit privatif sur ses marques « HYDRA SENSITIVE » française n°08/3614425 et européenne n° 007435431 ;

- JUGER que les produits des sociétés GUINOT et L’OREAL ne sont ni identiques ni similaires, que l’exploitation par la société GUINOT du signe « HYDRA SENSITIVE » ne porte pas atteinte aux marques « HYDRA SENSITIVE » française n° 08/3614425 et européenne n° 007435431 de la société L’OREAL et qu’aucun risque de confusion dans l’esprit du public n’est possible entre le signe «HYDRA SENSITIVE» de la société GUINOT et les marques « HYDRA SENSITIVE » française n°08/3614425 et européenne n° 007435431 de la société L’OREAL ;

En conséquence :

- JUGER que la société GUINOT n’a donc commis aucun acte de contrefaçon par reproduction ou imitation des marques « HYDRA SENSITIVE» française n° 08/3614425 et européenne n° 007435431 de la société L’OREAL, et cette dernière, quand bien même elle disposerait d’un droit exclusif, ne peut interdire à la société GUINOT d’exploiter son signe éponyme ;

- DEBOUTER la société L’OREAL de l’intégralité de ses demandes ;

C. Concernant la contrefaçon alléguée de la marque « DERMOLISS »

1. À titre principal - JUGER que depuis son dépôt le 22 mai 2001, la société L’OREAL n’a jamais fait un usage sérieux de sa marque française n°3101658 « DERMOLISS » ;

En conséquence :
- DIRE ET JUGER que la société L’OREAL est déchue de ses droits sur sa marque française n°3101658 « DERMOLISS » à compter du 22 mai 2001 pour les produits suivants de la Classe 3 de la Classification de Nice : parfums, eaux de toilette ; gels et sels pour le bain et la douche non à usage médical ; savons de toilette ; déodorants corporels ; cosmétiques notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage, le corps et les mains ; laits, gels et huiles de bronzage et après-soleil (cosmétiques) ; produits de maquillage ; shampooings ; gels, mousses, baumes et produits sous la forme d’aérosol pour le coiffage et le soin des cheveux ; laques pour les cheveux ; colorants et produits pour la décoloration des cheveux ; produits pour l’ondulation et la mise en plis des cheveux ; huiles essentielles ;

- DEBOUTER la société L’OREAL de l’intégralité de ses demandes ;

2. À titre subsidiaire

- JUGER que la marque française n° 3101658 « DERMOLISS » de la société L’OREAL est descriptive ;

En conséquence :
- PRONONCER la nullité de la marque française n° 3101658 « DERMOLISS » de la société L’OREAL ;

— DEBOUTER la société L’OREAL de l’intégralité de ses demandes ;

3. À titre très subsidiaire

- JUGER qu’en application du principe de spécialité, la société L’OREAL ne peut revendiquer la moindre atteinte à son droit privatif sur la marque française n° 3101658 « DERMOLISS » - JUGER que les produits des sociétés GUINOT et L’OREAL ne sont ni identiques ni similaires, que l’exploitation par la société GUINOT du signe « DERMA LISS » ne porte pas atteinte à la marque française n° 3101658 « DERMOLISS » de la société L’OREAL, et qu’aucun risque de confusion dans l’esprit du public n’est possible entre le signe « DERMA LISS » de la société GUINOT et à la marque française n° 3101658 « DERMOLISS » de la société L’OREAL En conséquence :

- JUGER que la société GUINOT n’a donc commis aucun acte de contrefaçon par reproduction ou imitation de la marque française n° 3101658 « DERMOLISS » de la société L’OREAL, et cette dernière, quand bien même elle disposerait d’un droit exclusif, ne peut interdire à la société GUINOT d’exploiter son signe « DERMA LISS » ;

— DEBOUTER la société L’OREAL de l’intégralité de ses demandes ;

II. SUR LE PREJUDICE

1. A titre principal - JUGER que la société L’OREAL n’a subi aucun préjudice subi du fait de la société GUINOT ;

- JUGER que la société L’OREAL demande le versement de dommages-intérêts ne correspondant pas au préjudice qu’elle aurait réellement subi mais à une indemnisation punitive En conséquence :

- DEBOUTER la société L’OREAL de l’intégralité de ses demandes 2. À titre subsidiaire

- JUGER que la société L’OREAL n’apporte pas la preuve tant du principe que de l’étendue de son préjudice ; En conséquence :

- DEBOUTER la société L’OREAL de l’intégralité de ses demandes

3. À titre très subsidiaire

— JUGER que si la société L’OREAL a subi un préjudice, le fixer à :

— Concernant les produits de la marque « NUTRILOGIC », un euro ;

— Concernant les produits du signe « HYDRA SENSITIVE », un euro ;

— Concernant les produits du signe « DERMA LISS », un euro ; 4. À titre infiniment subsidiaire

DIRE ET JUGER que si la société L’OREAL a subi un préjudice, le fixer à :

— Concernant les produits de la marque « NUTRILOGIC », un euro ;

— Concernant les produits du signe « HYDRA SENSITIVE », un euro ;

— Concernant les produits du signe « DERMA LISS », un euro ;

5. En tout état de cause

NOMMER, afin de lui permettre de statuer sur le litige qui lui est soumis, tel expert qui lui plaira afin :

- De déterminer si la société L’OREAL a effectivement subi un préjudice commercial (gain manqué et perte subie) et moral causé par l’atteinte à la valeur distinctive de ses marques « NUTRILOGIE », « HYDRA SENSITIVE » et « DERMOLISS » en raison de l’exploitation par la société GUINOT des signes et marques « NUTRILOGIC », « HYDRA SENSITIVE » et « DERMA LISS » ;

— D’établir : Le préjudice commercial de la société L’OREAL (gain manqué et pertes subies) pour chacune de ses marques « NUTRILOGIE », « HYDRASENSITIVE » et « DERMOLISS », et à cet effet, de se faire remettre par la société L’OREAL tous les éléments, certifiés par son Commissaire aux Comptes, de nature à justifier des quantités produites, commercialisées, livrées, reçues ou commandées, ainsi que le chiffre d’affaires, les bénéfices réalisés et le taux de marge brute :
- Pour les produits de la marque « NUTRILOGIE », pour les années 2014, 2015 et 2016 pour la France ;
- Pour les produits de la marque « HYDRA SENSITIVE », pour les années 2011 à 2016 incluse, et ce pour l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, la Bulgarie, la Croatie, Chypre, le Danemark, l’Espagne, l’Estonie, la Finlande, la France, la Grèce, la Hongrie, l’Italie, la

Lettonie, la Lituanie, Malte, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la Roumanie, le Royaume-Uni, la Slovaquie et la Suède ;
- Pour les produits de la marque « DERMOLISS », pour les années 2014, 2015 et 2016, pour la France.
- L’atteinte à la valeur distinctive des marques « NUTRILOGIE », « HYDRASENSITIVE » et « DERMOLISS » de la société L’OREAL, et à cet effet, de se faire remettre par la société L’OREAL tous les éléments de nature à justifier :
- La valeur des marques « NUTRILOGIE », « HYDRA SENSITIVE » et « DERMOLISS » ;
- Le montant des dépenses de communication supplémentaires que la société L’OREAL aurait engagées pour compenser les répercussions des actes de la société GUINOT et reconstituer l’image des marques précitées ; - La dépréciation des investissements passés pour les marques précitées ;
- Si nécessaire, entendre tous témoins et tous sachant et rassembler les parties ;
- Si nécessaire, se faire assister par tous sapiteurs de son choix ;
- Consigner les observations et explications des parties et répondre à leurs questions, du tout, dresser rapport.

SUR LES ACTES DE PARASITISME ET DE CONCURRENCE DELOYALE JUGER que la société GUINOT n’a commis aucun acte de concurrence déloyale et de parasitisme ;

En conséquence : DEBOUTER la société L’OREAL de l’intégralité de ses demandes quant à son action en contrefaçon ;

DEBOUTER la société L’OREAL de toutes ses demandes d’indemnisation ;

JUGER que la société L’OREAL n’a subi aucun préjudice subi par la société L’OREAL ;

En conséquence :

DEBOUTER la société L’OREAL de l’intégralité de ses demandes

2. À titre subsidiaire DIRE ET JUGER que la société L’OREAL n’apporte pas la preuve tant du principe que de l’étendue de son préjudice ; En conséquence :

DEBOUTER la société L’OREAL de l’intégralité de ses demandes ;

SUR LES DEMANDES RECONVENTIONNELLES DE LA SOCIETE GUINOT
- CONDAMNER la société L’OREAL à payer à la société GUINOT la somme de 300 000 € à titre de dommages et intérêts en raison de son abus de droit ;

- CONDAMNER la société L’OREAL à payer à la société GUINOT la somme de 3 000 € en application de l’article 32-1 du Code de procédure civile ;

EN TOUT ETAT DE CAUSE

FAIRE INJONCTION à la société L’OREAL de produire sous astreinte tous les éléments suivants qui permettront d’établir la réalité et l’étendue de ses préjudices, à savoir :

- Concernant son préjudice commercial (gain manqué et pertes subies) en raison des actes de contrefaçon alléguées de la société GUINOT, tous les éléments, certifiés par son Commissaire aux Comptes, de nature à justifier des quantités produites, commercialisées, livrées, reçues ou commandées, ainsi que le chiffre d’affaires, les bénéfices réalisés et le taux de marge brute :

- Pour les produits de la marque «NUTRILOGIE », pour les années 2014,2015 et 2016 pour la France ;

- Pour les produits de la marque « HYDRA SENSITIVE », pour les années 2011 à 2016 incluse, et ce pour l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, la Bulgarie, la Croatie, Chypre, le Danemark, l’Espagne, l’Estonie, la Finlande, la France, la Grèce, la Hongrie, l’Italie, la Lettonie, la Lituanie, Malte, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la Roumanie, le Royaume-Uni, la Slovaquie et la Suède ; Pour les produits de la marque « DERMOLISS », pour les années 2014,2015 et 2016, pour la France ;

- Concernant l’atteinte à la valeur distinctive de ses marques en raison des actes de contrefaçon allégués de la société GUINOT : La valeur des marques « NUTRILOGIE », « HYDRA SENSITIVE » et « DERMOLISS » ;

Le montant des dépenses de communication supplémentaire que la société L’OREAL aurait engagées pour compenser les répercussions des actes de la société GUINOT et reconstituer l’image des marques précitées ;

La dépréciation des investissements passés pour les marques précitées ;

- Concernant l’atteinte à la valeur distinctive de ses marques en raison des actes allégués de parasitisme et de concurrence déloyale de la société GUINOT : L’impact sur les ventes des produits GUINOT : baisse des quantités vendues ou baisse des prix ;

Le montant de ses bénéfices perdus ;

La perte de parts de marché ;

La valeur de ses marques et la dépréciation de ces valeurs ;

Les ventes perdues, la baisse des prix de ses produits ; Le coût de la publicité supplémentaire pour compenser les répercussions des faits de la société GUINOT et reconstituer l’image de ses marques à travers les dépenses de communication ;

La dépréciation des investissements passés ;

- ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir en toutes ses dispositions, nonobstant appel ;

- CONDAMNER la société L’OREAL à payer à la société GUINOT la somme de 60 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNER la société L’OREAL aux entiers dépens. L’ordonnance de clôture a été rendue le 10 avril 2018. Les parties ayant régulièrement constitué avocat, le présent jugement, rendu en premier ressort, sera contradictoire en application de l’article 467 du code de procédure civile.

MOTIFS Sur l’atteinte à la marque française « NUTRILOGIE »n° 96/615.889 de la société L’OREAL

La société L’OREAL a formé une demande de nullité de la marque française n° 15/4136994 NUTRILOGIC et de la marque européenne n° 013814157 NUTRILOGICde la société GUINOT, demande qu’elle a abandonnée dans ses dernières écritures en raison du retrait définitif par celle-ci de ses deux marques. En revanche, elle a maintenu ses demandes en contrefaçon par imitation de sa marque NUTRILOGIE du fait de la commercialisation par la société GUINOT des produits cosmétiques (baumes pour le corps) sous la dénomination NUTRILOGIC de janvier 2015 jusqu’au jour du retrait de la marque. La société GUINOT a répondu que les 21 et 25 janvier 2016, elle a fait procéder au retrait total de la marque française n° 15/4136994 auprès de l’INPI et de la marque européenne n° 013814157 auprès de l’EUIPO ; que les baumes pour le corps vendus sous la dénomination NUTRILOGIC étaient destinés à des peaux très sèches et agressées, et utilisés en réparation plutôt qu’en soin quotidien, à la différence des laits corporels ou des crèmes pour le corps ; qu’ils ont été mis sur le marché à compter du 1er janvier 2016 et sont aujourd’hui écoulés sous la marque « NUTRISCIENCE » qui a fait l’objet des deux enregistrements suivants :

- la marque française n° 4240548, enregistrée le 14 janvier 2016 pour désigner les produits suivants de classe 3 de la Classification de Nice : savons ; parfums ; cosmétiques ; maquillages ; huiles essentielles ; préparations et crèmes non médicamenteuses pour le soin de la peau, du visage et du corps ; lotions pour les cheveux ;

-la marque européenne n° 15002082, enregistrée le 14 janvier 2016 pour désigner les produits suivant de classe 3 de la Classification de Nice : savons ; parfums ; cosmétiques ; maquillages ; huiles essentielles ; préparations et crèmes non médicamenteuses pour le soin de la peau, du visage et du corps ; lotions pour les cheveux ;

Elle conteste l’existence d’une contrefaçon au motif d’une part qu’il ne peut y avoir de confusion car les produits vendus par la société L’OREAL sous la marque NUTRILOGIE le sont d’abord sous la marque ombrelle VICHY, que les produits commercialisés sous la marque NUTRILOGIC n’étaient ni identiques ni similaires car leur destination, leur usage, leur utilisation, leur clientèle (les produits de la société L’OREAL sont destinés à un public exclusivement masculin alors que les produits de la société GUINOT s’adressent à un public exclusivement féminin), leur fabrication et distribution, leur emballage/packaging sont différents. Elle ajoute que le signe NUTRILOGIE n’est pas utilisé comme une marque et qu’il n’y a donc pas d’atteinte à la fonction essentielle de la marque. sur ce

Il sera donné acte à la société L’OREAL de ce qu’elle a abandonné sa demande de nullité de la marque française NUTRILOGIC n° 15/4163994 et européenne n° 013814157 de la société GUINOT qui les a retirées des registres des marques, conformément à l’article l’article 753 alinéa 2 du code de procédure civile qui dispose que : "Les parties doivent reprendre dans leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. À défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et le tribunal ne statue que sur les dernières conclusions déposées, "du code de procédure civile. Conformément au Règlement (UE) 2017/1001 du parlement européen et du conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l’Union européenne, applicable à compter du 1er octobre 2017, qui a codifié et abrogé le règlement (CE) n°207/2009 du conseil et ses modifications successives, la marque européenne confère à son titulaire un droit exclusif opposable aux tiers à compter de la publication de l’enregistrement de la marque. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires, d’un signe identique à la marque communautaire pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée. En vertu des dispositions combinées des articles 17 « application complémentaire du droit national en matière de contrefaçon », 129 « droit applicable » et 130 « sanctions » de ce règlement, si les effets de la marque européenne sont exclusivement déterminés par les dispositions du règlement, les atteintes à une marque communautaire et leurs sanctions sont régies par le droit national concernant les atteintes à une marque nationale. Et, conformément à l’article L 716-1 du code de la propriété intellectuelle, l’atteinte portée au droit du propriétaire de la marque constitue une contrefaçon, qui peut être prouvée par tout moyen en vertu de l’article L 716-7 du même code, engageant la responsabilité civile de son auteur. Constitue une atteinte aux droits de la marque la violation des interdictions prévues aux articles L 713-2, L 713-3 et L 713-4 du même code. En vertu de l’article 713-2 du code de la propriété intellectuelle, Sont interdits, sauf autorisation du propriétaire : a) La reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, même avec l’adjonction de mots tels que : « formule, façon, système, imitation, genre, méthode », ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l’enregistrement ; b) La suppression ou la modification d’une marque régulièrement apposée.

Enfin, aux termes de l’article L 713-3 du code de propriété intellectuelle, sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s’il peut en résulter un risque de confusion dans l’esprit du public : a) La reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque, ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l’enregistrement ; b) L’imitation d’une marque et l’usage d’une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement. En application du droit interne interprété à la lumière de la directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres conformément au principe posé par l’arrêt Von Colson et Kamann c. Land Nordhein-Westfalen du 10 avril 1984 comme en application directe du droit communautaire, le risque de confusion doit faire l’objet d’une appréciation abstraite par référence au dépôt d’une part en considération d’un public pertinent correspondant au consommateur des produits et services concernés normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, et d’autre part par comparaison entre le signe litigieux utilisé et la marque protégée par référence à son enregistrement indépendamment de ses conditions d’exploitation mais également par comparaison des services et produits visés dans l’enregistrement et des produits et services commercialisés sous le signe litigieux. Le risque de confusion est en outre analysé globalement : tous les facteurs pertinents, dont la notoriété de la marque et l’importance de sa distinctivité, doivent être pris en considération, l’appréciation globale de la similitude de la marque et du signe litigieux devant être fondée sur l’impression d’ensemble qu’ils produisent au regard de leurs éléments distinctifs et dominants. La société L’OREAL est titulaire de la marque française n° 96/615889 « NUTRILOGIE », enregistrée le 13 mars 1996 et renouvelée depuis, désignant les produits suivants de la classe 3 de la Classification de Nice : « parfums, eaux de toilette ; gels et sels pour le bain et la douche non à usage médical ; savons de toilette ; déodorants corporels ; cosmétiques notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage, le corps et les mains ; laits, gels et huiles de bronzage et après-soleil ; produits de maquillage ; shampooings ; gels, mousses, baumes et produits sous la forme d’aérosol pour le coiffage et le soin des cheveux ; laques pour les cheveux ; colorants et produits pour la décoloration des cheveux ; produits pour l’ondulation et la mise en plis des cheveux ; huiles essentielles ; dentifrice ».

La société GUINOT a commercialisé des baumes pour le corps sous la dénomination NUTRILOGIC.

Ainsi et contrairement à ce que soutient la société GUINOT, les produits qu’elle a commercialisés sous la marque NUTRILOGIC sont identiques à ceux visés au dépôt de la marque NUTRILOGIE de la

société L’OREAL car il s’agit de cosmétiques et notamment aux « crèmes, laits, lotions, gels pour le corps ». Il importe peu dans une analyse de contrefaçon de marque que les produits de la société L’OREAL soient destinées à des femmes et ceux de la société GUINOT à des hommes, ni qu’ils soient commercialisés dans des réseaux différents ou soient composés différemment puisque seul est pertinent le caractère identique ou similaire du produit c’est-à-dire de sa catégorie et ce sans tenir compte des spécificités de chaque produit.

S’agissant de produit de consommation courante, tels des soins pour la peau, le consommateur de référence est censé être d’attention moyenne et normalement informé.

Du point de vue de la comparaison des signes, il apparaît là encore que les signes sont très semblables sur le plan visuel puisque le terme « NUTRILOGIC » reprend les 8 premières lettres du mot NUTRILOGIE, et n’en diffère que par sa dernière lettre « C ». Sur le plan phonétique, la prononciation des deux mots sera la même sauf à la toute dernière fin du mot.

Enfin, sur le plan conceptuel, les deux dénominations sont composées des deux mêmes termes NUTRI et LOGIC ou LOGIE. Le terme NUTRI pour des cosmétiques fait référence à une fonction d’entretien ou de réparation de la peau et le terme LOGIC ou LOGIE fait référence à un caractère scientifique. Le consommateur d’attention moyenne et normalement informé comprendra les deux termes de la même façon, même si le second a une forme plus anglophone que le premier. Ainsi, les deux signes ayant très similaires et apposés pour déterminer l’origine de produits identiques, le risque de confusion est important. Contrairement encore aux prétentions de la société GUINOT, le signe NUTRILOGIE de la société L’OREAL est bien utilisé à titre de marque sur les produits de beauté même s’il est placé sous une marque ombrelle VICHY ; il identifie au sein de cette marque plus large une gamme de produits comme la société GUINOT le fait pour ses produits vendus sous la marque ombrelle GUINOT sous les dénominations LOGIC. Le consommateur est habitué à identifier les produits avec une double référence c’est-à-dire avec une marque ombrelle et une marque de la gamme. Et le fait que les deux marques ombrelle soient différentes GUINOT vs L’OREAL n’atténue pas le risque de confusion.

En conséquence, la contrefaçon par imitation de la marque NUTRILOGIE de la société L’OREAL par la dénomination NUTRILOGIC de la société GUINOT pour vendre des produits cosmétiques pour la peau est constituée. En revanche, le dépôt d’une marque n’est qu’un acte préparatoire à l’usage du signe la constituant dans la vie des affaires. Il n’est pas fait en relation avec des produits et services dont l’origine commerciale a à être garantie auprès du public avec lequel le signe n’est pas un contact. Il n’est ainsi pas un acte de contrefaçon et ne cause quoi qu’il en soit pas le moindre préjudice au titulaire de la marque. Ainsi, dans son arrêt Arsenal Football Club du 12 novembre 2002, la CJUE alors CJCE a précisé que le titulaire d’une marque enregistrée ne peut, en application de l’article 5§1 a) de la directive 89/104/COMMUNAUTÉ ÉCONOMIQUE EUROPÉENNE du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des États membres sur les marques devenue la directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008, interdire l’usage par un tiers d’un signe identique à sa marque que si cet usage a lieu dans la vie des affaires sans le consentement du titulaire de la marque et porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque et notamment à sa fonction essentielle qui est de garantir aux consommateurs la provenance des produits ou des services. sur les mesures réparatrices. La société L’OREAL sollicite à titre principal le paiement de la somme de 40.000 euros en réparation de l’atteinte à la valeur de la marque, la somme 1.200.000 euros représentant la marge réalisée par la société GUINOT du fait de la vente des différents types de baume NUTRILOGIC ou à titre subsidiaire la somme de 103.744,90 € HT qui correspond au montant total des bénéfices réalisés par la société GUINOT, outre des mesures d’interdiction, de retrait, de publication judiciaire.

La société GUINOT répond que les chiffres retenus par la société L’OREAL sont exagérés, que les stocks n’ont pas été tous écoulés, que certaines ventes ont eu lieu en direction des instituts Guinot, que les notices étuis ne doivent pas être pris en compte. sur ce

.L’article L 716-14 du code de la propriété intellectuelle dispose que « Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement : I °) les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée, 2°) le préjudice moral causé à cette dernière,

3°) les bénéfices réalisés par le contrefacteur y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui- ci a retirés de la contrefaçon. Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée. » II ressort des pièces versées au débat que la société GUINOT a commercialisé ses baumes pour le corps sous différents formats à compter de janvier 2015 et qu’elle a déclaré avoir l’intention d’écouler tous les stocks avant d’apposer la nouvelle dénomination sur les produits. En conséquence, l’ensemble des stocks 2015 et 2016 des baumes NUTRILOGIC seront pris en compte et il est ici précisé que la société L’OREAL n’a pas calculé son préjudice commercial en incluant les étuis et les notices.

Il importe peu qu’une partie des stocks ait été destinée à l’exportation puisque l’apposition d’une marque sur des produits fabriqués en France et destinés à l’exportation constitue une contrefaçon de la marque sur le territoire français et que cette atteinte doit également être réparée.

De la même façon, le fait que certains produits aient été vendus à des instituts travaillant sous l’enseigne Guinot ne limite pas la matérialité des faits, la société GUINOT ne donnant aucun élément sur le montant des ventes ainsi réalisées et la marge brute qu’elle réalisé lors de ces ventes.

En conséquence, la société GUINOT sera condamnée à payer à la société L’OREAL la somme de 1.200.000 euros au titre de la marge brute réalisée sur les ventes des stocks pour les années 2015 et 2016, l’atteinte à la valeur de la marque étant inclue dans cette évaluation. Il sera fait droit à la demande d’interdiction du signe NUTRILOGIC mais seulement en tant que de besoin, du fait de l’existence reconnue d’actes de contrefaçon et sans qu’il soit utile de prononcer une astreinte, les produits ayant cessé d’être commercialisés sous cette dénomination ; En revanche, il ne sera pas fait droit à la demande de retrait des circuits puisque tous les produits ont été vendus, ni à la demande de publication judiciaire, l’indemnité allouée plus haut suffisant à réparer entièrement le préjudice subi par la société L’OREAL. sur la validité des marques « HYDRA SENSITIVE » (française n° 08/3614425 et communautaire n° 007435431)

La société GUINOT prétend que la marque HYDRA SENSITIVE de la société L’OREAL est nulle pour avoir été déposée en fraude de ses droits, pour défaut de distinctivité et que la déchéance des droits de la société L’OREAL sur cette marque doit être prononcée.

La société L’OREAL conteste que ses marques HYDRA SENSITIVE ont été déposées frauduleusement au regard des droits de la société GUINOT car celle-ci ne démontre aucunement avoir exploité le signe « HYDRA SENSITIVE » antérieurement aux dépôts des marques de la société L’OREAL. Elle répond que la marque HYDRA SENSITIVE est distinctive et s’inscrit dans une famille de marques HYDRA et que la société GUINOT est elle-même titulaire de 7 marques intégrant le terme HYDRA, que l’association « HYDRA SENSITIVE » n’est nullement indispensable ni nécessaire à la description des qualités des produits visés au dépôt de la marque en cause, qu’elle est un néologisme arbitraire qui n’était ni générique ou usuel ni indispensable ou nécessaire à la description des produits visés au dépôt de la marque, au moment du dépôt et que même dans le langage professionnel, cette association n’est pas communément employée. Elle conteste que les droits sur ses marques soient déchus car elle exploite bien cette dénomination sur les produits visés au dépôt et peu importe que cette exploitation se fasse sous la marque ombrelle L’OREAL PARIS.

Sur ce En vertu de l’article 7 « motifs absolus de refus » du Règlement (UE) 2017/1001 du parlement européen et du conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l’Union européenne, applicable à compter du 1er octobre 2017sur la marque européenne, sont notamment refusés à l’enregistrement: a) les signes qui ne sont pas conformes à l’article 4 visant les signes susceptibles de représentation graphique et propres à distinguer les services ou les produits d’une entreprise de ceux d’une autre entreprise ; b) les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif ; c) les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ; e) les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature même du produit.

Et, conformément à l’article 59 « causes de nullité absolue » du règlement : 1. La nullité de la marque de l’Union européenne est déclarée, sur demande présentée auprès de l’Office ou sur demande reconventionnelle dans une action en contrefaçon:

a) lorsque la marque de l’Union européenne a été enregistrée contrairement aux dispositions de l’article 7; b) lorsque le demandeur était de mauvaise foi lors du dépôt de la demande de marque. 2. Lorsque la marque de l’Union européenne a été enregistrée contrairement à l’article 7, paragraphe 1, point b), c) ou d), elle ne peut toutefois être déclarée nulle si, par l’usage qui en a été fait, elle a acquis après son enregistrement un caractère distinctif pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée. 3. Si la cause de nullité n’existe que pour une partie des produits ou des services pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée, la nullité de la marque ne peut être déclarée que pour les produits ou les services concernés. À ce titre, conformément à l’article 127 « présomption de validité – Défenses au fond », les tribunaux des marques communautaires considèrent la marque communautaire comme valide, à moins que le défendeur n’en conteste la validité par une demande reconventionnelle en déchéance ou en nullité. À cet égard, la cour de justice de l’union européenne a rappelé dans son arrêt Develey Holding GmbH & Co. Beteiligungs KG du 25 octobre 2007 qu’en cas de contestation, il appartient à la partie qui se prévaut du caractère distinctif de sa marque de fournir des indications concrètes et étayées établissant que la marque demandée est dotée soit d’un caractère distinctif intrinsèque, soit d’un caractère distinctif acquis par l’usage. Enfin, en vertu de l’article 62 « effets de la déchéance et de la nullité » : « 1. La marque de l’Union européenne est réputée n’avoir pas eu, à compter de la date de la demande en déchéance ou de la demande reconventionnelle, les effets prévus au présent règlement, selon que le titulaire est déclaré déchu de ses droits en tout ou en partie. Une date antérieure, à laquelle est survenue l’une des causes de la déchéance, peut être fixée dans la décision, sur demande d’une partie. » Conformément à l’article L 714-3 du code de la propriété intellectuelle, est déclaré nul par décision de justice l’enregistrement d’une marque qui n’est pas conforme aux dispositions des articles L 711-1 et à L 711-4, la décision d’annulation ayant un effet absolu et étant, une fois devenue définitive, transmise à l’INPI pour inscription sur ses registres par le greffe ou l’une des parties en application de l’article R 714-3 du même code. En application de l’article L 711-1 du code de la propriété intellectuelle, la marque de fabrique, de commerce ou de service est un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale. Et, en vertu de l’article L 711-2 du code de la propriété intellectuelle, le caractère distinctif d’un signe de nature à constituer une marque s’apprécie à l’égard des produits ou services désignés.

Ainsi que l’a précisé la cour de justice de l’union européenne alors cour de justice des communautés européennes dans un arrêt Von Colson et Kamann c. Land Nordhein-Westfalen du 10 avril 1984, le juge judiciaire, juge communautaire de droit commun, est tenu d’interpréter dans toute la mesure du possible les dispositions internes conformément au texte des directives communautaires transposées ou non pour atteindre le résultat qu’elles visent. En application du droit interne interprété à la lumière de la directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008 rapprochant les législations des États membres, les signes susceptibles de représentation graphique ne peuvent constituer des marques qu’à condition qu’ils soient intrinsèquement aptes à identifier le produit pour lequel est demandé l’enregistrement comme provenant d’une entreprise déterminée et propres à distinguer les produits ou services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises ainsi que l’a précisé la CJUE alors CJCE dans un arrêt du 18 juin 2002 Koninklijke Philips Electronics NV c. Remington Consumer Products Ltd. Le public pertinent doit immédiatement et certainement percevoir le signe comme identifiant l’origine commerciale du produit. Aussi, pour remplir sa fonction essentielle d’identification, une marque doit être distinctive, caractère indépendant de l’originalité ou de la nouveauté qui suppose que les éléments entrant dans sa composition soient arbitraires par rapport aux produits ou services qu’elle désigne et soient d’emblée perçus par le consommateur comme pouvant identifier l’origine du produit en le rattachant à une entreprise spécifique. La société L’OREAL est titulaire de la marque française « HYDRA SENSITIVE », déposée le 28 novembre 2008, enregistrée sous le numéro 08/3614425, et, la marque communautaire « HYDRA SENSITIVE », déposée le 2 décembre 2008 et enregistrée sous le numéro 007435431, pour désigner toutes deux en classe 3, les produits suivants : « cosmétiques, notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage ». Le public pertinent est le consommateur français d’attention moyenne acheteur de produits cosmétiques et le consommateur européen acheteur des mêmes produits. Ces produits étant destinés au grand public et se différenciant essentiellement dans un secteur très concurrentiel, aujourd’hui comme au jour du dépôt, par leurs marques le consommateur sera attentif à leur origine. La marque européenne délivrée bénéficiant d’une présomption de validité, la charge de la preuve du défaut de distinctivité du signe ou de son inaptitude à être immédiatement perçu comme une marque par le public pertinent, qui doit être apprécié au jour du dépôt soit le 2 décembre 2008, incombe à la société GUINOT.

Il importe peu pour l’appréciation du caractère distinctif de la marque en litige que celle-ci appartienne à une famille de marques débutant toutes par le terme HYDRA ni que la société GUINOT dispose elle- même de marques débutant elles aussi par ce terme. L’appréciation de la distinctivité d’un signe se faisant au regard du signe lui-même, sans faire référence à d’autres marques déjà enregistrées, aux produits ou services visés à l’enregistrement au regard des habitudes des consommateurs de ces produits ou services.

Si la locution «hydra sensitive » est effectivement un néologisme, puisqu’elle est constituée du mot HYDRA qui fait référence à l’eau et du mot anglais SENSITIVE qui signifie « sensible », ces deux termes sont compris aisément des consommateurs de produits cosmétiques qui utilisent souvent le terme « hydrater » Pour vanter les mérites d’un soin pour la peau et le terme « sensitive » pour indiquer que le produit est destiné soit aux peaux sensibles soit aux peaux qui ont besoin d’hydratation. Ainsi, et quand bien même la locution serait un néologisme, sa signification est immédiate pour le consommateur défini plus haut. En conséquence, la locution « hydra sensitive » est totalement descriptive pour désigner produits suivants de la classe 3 : « cosmétiques, notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage » car elle emploie des termes qui peuvent servir à désigner une caractéristique du produit, en l’espèce sa capacité à hydrater la peau s’agissant d’un cosmétique. La locution Hydra sensitive ne peut de ce fait remplir sa fonction d’identification de l’origine des produits visés au dépôt de la marque. La marque française « HYDRA SENSITIVE », déposée le 28 novembre 2008, enregistrée sous le numéro 08/3614425, et, la marque communautaire « HYDRA SENSITIVE », déposée le 2 décembre 2008 et enregistrée sous le numéro 007435431, pour désigner toutes deux en classe 3, les produits suivants : « cosmétiques, notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage » seront en conséquence annulées, sans qu’il soit nécessaire de statuer sur les deux autres moyens opposés à la marque par la société GUINOT.

La société L’OREAL est donc irrecevable en sa demande de contrefaçon des marques française et européenne HYDRA SENSITIVE. sur la validité de la marque française « DERMOLISS », déposée le 22 mai 2001 et enregistrée sous le numéro 01 3 1 01 658.

La société GUINOT prétend que la marque DERMOLISS de la société L’OREAL est nulle pour avoir été déposée en fraude de ses droits, pour défaut de distinctivité et que la déchéance des droits de la société L’OREAL sur cette marque doit être prononcée. La société L’OREAL conteste que sa marque française DERMOLISS a été déposée frauduleusement au regard des droits de la société GUINOT car celle-ci ne démontre aucunement avoir exploité le signe « DERMALISS» antérieurement aux dépôts de la marque de la société L’OREAL. Elle répond que la marque DERMOLISS est distinctive car l’association « DERMO et LISS » n’est nullement indispensable ni nécessaire à la description des qualités des produits visés au dépôt de la marque en cause, qu’elle est un néologisme arbitraire qui n’était ni générique ou usuel ni indispensable ou nécessaire à la description des produits visés au dépôt de la marque, au moment du dépôt et que même dans le langage professionnel, cette association n’est pas communément employée. Elle conteste les documents mis au débat par la société GUINOT pour monter que ces termes sont utilisés par les professionnels car ils sont postérieurs au dépôt de sa marque. Elle conteste que les droits sur ses marques soient déchus car elle exploite bien cette dénomination sur les produits visés au dépôt et peu importe que cette exploitation se fasse sous la marque ombrelle L’OREAL PARIS.

Sur ce La société L’OREAL est titulaire de la marque française « DERMOLISS », déposée le 22 mai 2001 et enregistrée sous le numéro 01 3 101 658, régulièrement renouvelée, pour désigner notamment les produits suivants en classe 3 : « cosmétiques, notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage ». Le public pertinent est le consommateur français d’attention moyenne acheteur de produits cosmétiques. Ces produits étant destinés au grand public et se différenciant essentiellement dans un secteur très concurrentiel, aujourd’hui comme au jour du dépôt, par leurs marques le consommateur sera attentif à leur origine. L’appréciation de la distinctivité d’un signe se faisant au regard du signe lui-même, sans faire référence à d’autres marques déjà enregistrées, aux produits ou services visés à l’enregistrement au regard des habitudes des consommateurs de ces produits ou services. Si la locution «Dermoliss » est effectivement un néologisme, puisqu’elle est constituée du mot DERMO qui fait référence à la peau et de l’adjectif LISSE ; ces deux termes sont compris aisément par les consommateurs de produits cosmétiques qui sont familiers du terme « dermo » et de l’adjectif lisse.

Il comprendra que le produit proposé est destiné au soin de la peau et a pour but de favoriser une peau sans imperfections ou impuretés. Ainsi, et quand bien même la locution serait un néologisme, sa signification est immédiate pour le consommateur défini plus haut. En conséquence, la locution « dermoliss » est totalement descriptive pour désigner produits suivants de la classe 3 : « cosmétiques, notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage » car elle emploie des termes qui peuvent servir à désigner une caractéristique du produit, en l’espèce sa capacité à nettoyer ou soigner une peau pour la rendre lisse, s’agissant d’un cosmétique. La locution dermoliss ne peut de ce fait remplir sa fonction d’identification de l’origine des produits visés au dépôt de la marque. La marque française « DERMOLISS », déposée le 22 mai 2001 et enregistrée sous le numéro 01 3 101 658, régulièrement renouvelée, pour désigner notamment les produits suivants en classe 3 : « cosmétiques, notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage », sera en conséquence annulée, sans qu’il soit nécessaire de statuer sur les deux autres moyens opposés à la marque par la société GUINOT. La société L’OREAL est donc irrecevable en sa demande de contrefaçon de la marque française DERMOLISS.

sur les actes de concurrence déloyale et parasitaire La société L’OREAL forme une demande en concurrence déloyale au motif que la société GUINOT aurait volontairement copié plusieurs de ses marques ce qui lui cause un préjudice particulier, différent de celui résultant de la contrefaçon de chacune de ses marques, montrant la volonté de cette dernière de se placer dans son sillage et de profiter des investissements réalisés par la société L’OREAL pour développer ses produits et sa clientèle. La société GUINOT conteste avoir copié les marques de la société L’OREAL, indique que l’action de la société L’OREAL est la conséquence de l’échec des négociations intervenues entre les deux sociétés en vue de l’achat de la défenderesse par la demanderesse. Elle fait valoir qu’elle a développé un circuit de distribution différent de celui de la société L’OREAL et qu’elle réalise depuis longtemps de nombreux investissements pour faire connaître et développer sa propre marque et ses lignes de produits. Sur ce

La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce qui implique qu’un signe ou un produit qui ne fait pas l’objet de droits de propriété intellectuelle, puisse être

librement reproduit, sous certaines conditions tenant à l’absence de faute par la création d’un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit, circonstance attentatoire à l’exercice paisible et loyal du commerce. L’appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d’une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l’imitation, l’ancienneté d’usage, l’originalité, la notoriété de la prestation copiée. Le parasitisme est constitué lorsqu’une personne physique ou morale, à titre lucratif et de façon injustifiée, copie une valeur économique d’autrui, individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d’un savoir-faire, d’un travail intellectuel et d’investissements. La société L’OREAL ayant été déclarée irrecevable à agir en contrefaçon du fait de l’annulation de ses marques HYDRA SENSITIVE et DERMOLISS, elle est mal fondée à soutenir que la société GUINOT aurait copié plusieurs de ses marques pour profiter de ses investissements. De plus, il est constant que la société GUINOT a développé une marque, des lignes de produits et un circuit de distribution spécifique, et ce de façon suffisamment importante et renommée pour que la société L’OREAL souhaite l’acquérir, sans qu’il soit besoin de connaître les raisons de l’échec de cette opération. Enfin, si la renommée internationale de la société L’OREAL n’est pas contestée par la société GUINOT, il apparaît que la société demanderesse n’explique en quoi le comportement de la société défenderesse aurait porté atteinte à sa renommée du fait de l’usage de termes dermaliss et hydra sensitive qui sont libres de droit. En conséquence, la société L’OREAL sera déboutée de sa demande en concurrence déloyale et parasitaire.

sur les autres demandes

La société GUINOT sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive puisqu’elle succombe à une des demandes de la société L’OREAL, de sorte que la procédure intentée par la société L’OREAL n’est pas abusive. L’équité ne commande d’allouer de somme sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, chacune des parties succombant pour une partie de ses demandes. Conformément à l’article 515 du code de procédure civile, chaque partie ayant succombé pour partie à ses demandes, elles conserveront à leur charge leurs frais et dépens.

L’exécution provisoire n’est pas nécessaire et ne sera pas ordonnée.

PAR CES MOTIFS Statuant publiquement par remise au greffe le jour du délibéré, par jugement contradictoire et en premier ressort, PREND ACTE de l’abandon de la demande de nullité des marques NUTRILOGIC française n° 15/4163994 et européenne n° 013814157 de la société GUINOT formée par la société L’OREAL. DIT qu’en fabricant, détenant, offrant à la vente et vendant des produits de cosmétiques sous la marque NUTRILOGIC, la société GUINOT a commis des actes de contrefaçon de la marque « NUTRILOGIE » n° 96/615889 au détriment de la société L’OREAL, au sens de l’article L.713-3 et L.716-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle. DÉBOUTE la société L’OREAL de sa demande de contrefaçon du fait du dépôt des marques NUTRILOGIC par la société GUINOT. En conséquence, CONDAMNE la société GUINOT à payer la somme de 1.200.000 (UN MILLION DEUX CENTS MILLE) euros à la société L’OREAL en réparation totale de l’atteinte portée à la valeur patrimoniale de sa marque « NUTRILOGIE » n° 96/615889 et du préjudice commercial subi du fait des actes de contrefaçon de la marque. INTERDIT, en tant que de besoin, à la société GUINOT de commercialiser à cesser la commercialisation en France des produits litigieux NUTRILOGIC. DÉBOUTE la société L’OREAL de sa demande d’astreinte, de sa demande de retrait des produits NUTRILOGIC des circuits commerciaux, de publication judiciaire. DÉCLARE nulles les marques française « HYDRA SENSITIVE » n° 08/3614425 et européenne «HYDRASENSITIVE» n° 007435431, pour désigner notamment les produits suivants en classe 3 : « cosmétiques, notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage », pour défaut de distinctivité.

DÉCLARE nulle la marque française « DERMOLISS » n°01 3 101 658 pour désigner notamment les produits suivants en classe 3 : « cosmétiques, notamment crèmes, laits, lotions, gels et poudres pour le visage », pour défaut de distinctivité.

En conséquence,

DÉCLARE la société L’OREAL irrecevable en ses demandes de contrefaçon formées à l’encontre de la société GUINOT sur le fondement de ces marques. Dit que le présent jugement une fois devenu définitif, sera notifié, à la requête de la partie la plus diligente, à l’INPI et à l’EUIPO pour transcription au registre des marques. DÉCLARE la société L’OREAL irrecevable en ses demandes de contrefaçon formées à l’encontre de la société GUINOT sur le fondement de ces marques. DÉBOUTE la société L’OREAL de sa demande en concurrence déloyale et parasitaire à l’encontre de la société GUINOT. DÉBOUTE la société GUINOT de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et de ses demandes de production de pièces. DÉBOUTE la société L’OREAL et la société GUINOT de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile. DIT que chaque partie supportera ses propres dépens.

DIT n’y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision.

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Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre, 7 juin 2018, n° 2016/00463