Tribunal Judiciaire de Paris, 11 avril 2023, n° RG 17/06841

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TJ Paris, 11 avr. 2023, n° RG 17/06841
Numéro(s) : RG 17/06841

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL

JUDICIAIRE

DE PARIS 1

1/4 social

N° RG 17/06841 N° Portalis 352J-W-B7B-CKPG C

N° MINUTE :

DEBOUTE C.D

Assignation du : 20 Avril 2017

Expéditions exécutoires délivrées le :

JUGEMENT rendu le 11 Avril 2023

DEMANDERESSE

Association CONSOMMATION, LOGEMENT ET CADRE DE VIE (CLCV) […]

représentée par Me Erkia X, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #G0060

DÉFENDERESSE

Société C LLC. […], […]

représentée par Me Alexandra NERI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #J0025

PARTIE INTERVENANTE

Société C D LIMITED Gordon House, […]

représentée par Me Alexandra NERI, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #J0025

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Décision du 11 Avril 2023 1/4 social N° RG 17/06841 N° Portalis 352J-W-B7B-CKPGC

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Catherine DESCAMPS, 1er Vice-Président Agnès HERZOG, Vice-Présidente Aurélie GAILLOTTE, Vice-Présidente

assistées de Véronique BABUT, Greffier, lors des débats et de Elisabeth ARNISSOLLE, Greffier, lors de la mise à disposition

DÉBATS

A l’audience du 24 Janvier 2023 tenue en audience publique devant Aurélie GAILLOTTE, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition Contradictoire En premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

La Confédération de la Consommation, du Logement et du Cadre de vie (ci-après CLCV) est une association de consommateurs fondée en 1952 sous le régime de la loi du 1 juillet 1901.er

Elle a essentiellement pour objet de promouvoir et d’appuyer les actions individuelles ou collectives des consommateurs et usagers tendant à garantir la reconnaissance et le respect de leurs droits ainsi que la défense de leurs intérêts individuels et collectifs. Elle est ainsi agréée pour exercer sur le plan national les droits reconnus aux associations de consommateurs en application des articles L.811-1 et suivants du code de la consommation.

Le service C Flights, accessible en France depuis l’adresse internet https://www.C.fr/flights/, référence les offres de prestations de transport aérien de personnes proposées par une multitude de compagnies aériennes et d’agences de voyage en ligne.

Il a été exploité par la société C LLC jusqu’en janvier 2019, puis par la société C D LTD à compter du 22 janvier 2019.

Estimant que la société C ne respectait pas son obligation légale d’information des consommateurs résultant des dispositions de l’article L.111-6 du code de la consommation, la CLCV l’a fait citer devant le tribunal par acte d’huissier délivré le 20 avril 2017 aux fins suivantes et au visa des articles L.621-1 et suivants, L.111-6, D.111-6 et suivants du code de la consommation et 1240 du code civil :

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Décision du 11 Avril 2023 1/4 social N° RG 17/06841 N° Portalis 352J-W-B7B-CKPGC

Dire et juger recevable et bien fondée l’action de l’association CLCV à l’encontre de la société C Inc.,

En conséquence,

Dire et juger que le site internet « https://www.C.fr/flights/ » est soumis à la règlementation applicable aux sites de comparaison en ligne,

Dire et juger que le site internet « https://www.C.fr/flights/ » exploité par la société C Inc. n’est pas conforme à la règlementation applicable aux sites de comparaison en ligne,

En conséquence,

Ordonner la cessation des pratiques illicites de la société C Inc. sous astreinte de 300 € par jour de retard, postérieurement à l’expiration d’un délai de 8 jours à compter de la signification du jugement à intervenir.

Ordonner, aux frais de la société C Inc., la diffusion du communiqué judiciaire dans trois quotidiens nationaux au choix de la CLCV, sans que le coût de chaque insertion puisse être inférieur à 15.000 € :

« COMMUNIQUE JUDICIAIRE :

Par décision en date du…, le Tribunal de Grande Instance de Paris, à la requête de l’Association CLCV, a condamné la société C Inc. en raison de ses manquements à la réglementation applicable aux sites de comparaison de produits et services en ligne.

Le Tribunal a ordonné en conséquence la cessation de ces pratiques illicites et octroyé une réparation de l’atteinte ainsi portée à l’intérêt collectif des consommateurs.

Vous pouvez prendre connaissance de l’intégralité de cette décision sur la page d’accueil du site internet exploité par la société C Inc., « https://www.C.fr/flights/ ».

Ce communiqué judiciaire est diffusé pour informer les consommateurs

».

Ordonner, aux frais de la société C Inc., la publication de la décision au moyen d’un lien activable figurant sur la page d’accueil du site internet exploité par la société C Inc. « https://www.C.fr/flights/ », dans un délai d’un mois à compter de la signification du jugement à intervenir, et devant y être accessible pendant un délai de six mois.

Ordonner la mise en place de ce lien sur la page d’accueil de ce site, précédé du titre en rouge « COMMUNIQUE JUDICIAIRE » sous le contrôle d’un huissier qu’il plaira au Tribunal de céans de désigner, à peine d’astreinte de 10.000 € par jour de retard une fois expiré le délai d’un mois à compter de la signification du jugement à intervenir.

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Décision du 11 Avril 2023 1/4 social N° RG 17/06841 N° Portalis 352J-W-B7B-CKPGC

Condamner la société C Inc. à payer à l’association CLCV la somme de 100.000 € en réparation du préjudice causé à l’intérêt collectif des consommateurs.

Condamner la société C Inc. à payer à l’association CLCV la somme de 10.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

En tout état de cause, débouter la société C Inc. de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir,

Condamner la société C Inc. aux dépens dont distraction au profit de Maître X en application de l’article 699 du Code de Procédure Civile.

La société C D LTD est intervenue volontairement à l’instance.

Aux termes de ses dernières consclusions signifiées le 28 juin 2022, la CLCV demande au tribunal de :

- Vu les articles L.621-1 et suivants Code de la Consommation,

- Vu L’article 31 du Code de procédure civile

- Vu l’article L.111-6 du Code de la consommation

- Vu les articles D-111-6 et suivants du Code de la consommation

- Vu l’article 1240 du Code civil

- Vu l’article L.211-1 du Code de la consommation

- Vu l’article L.212-1 du Code de la consommation

- Vu l’article R.212-1 du Code de la consommation

- Vu les articles L. 121-1 et suivants du Code de la Consommation,

- Vu la loi n°94-665 du 4 août 1994

A titre principal

Déclarer recevable et bien fondée l’action de l’association CLCV à l’encontre de la société C LLC, et la société C D LIMITED

En conséquence,

Déclarer que le site internet « https://www.C.fr/flights/ » est soumis à la règlementation applicable aux sites de comparaison en ligne,

Déclarer que le site internet « https://www.C.fr/flights/ » exploité par la société C LLC et C D LIMITED n’est pas conforme à la règlementation applicable aux sites de comparaison en ligne,

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Décision du 11 Avril 2023 1/4 social N° RG 17/06841 N° Portalis 352J-W-B7B-CKPGC

Déclarer illicites et abusives les stipulations suivantes :

< « Vous pouvez afficher les résultats en fonction des Meilleurs vols (l’ordre par défaut qui offre le meilleur compromis entre le prix et le confort, sur la base de critères tels que la durée, le nombre d’escales et les changements d’aéroport durant les escales), du Prix, de la Durée et de l’Heure de départ » ;

< « Il se peut que C soit rémunéré lorsqu’un utilisateur clique sur une option de réservation de vol spécifique et qu’il est redirigé vers le site Web de la compagnie aérienne ou de l’agence de voyages. Étant donné qu’un partenariat avec C doit être établi pour faire apparaître les vols dans les résultats de recherche, toutes les compagnies aériennes et tous les vols disponibles ne sont pas inclus » ;

Déclarer ces clauses non écrites dans le document intitulé « A propos de C Flight » puis renommé « Comment fonctionne C Flight

»

Déclarer illicites l’ensemble des stipulations rédigées en langue étrangère relatives aux conditions de transport et aux prix du transport des bagages des compagnies dont les vols peuvent être comparés sur le site « https://www.C.fr/flights/ »

En conséquence,

Ordonner la cessation des pratiques illicites de la société C LLC et la société C D LIMITED sous astreinte de 10.000

€ par jour de retard, postérieurement à l’expiration d’un délai de 8 jours à compter de la signification du jugement à intervenir.

Ordonner, aux frais de la société C LLC et de la société C D LIMITED la diffusion du communiqué judiciaire dans trois quotidiens nationaux au choix de la CLCV, sans que le coût de chaque insertion puisse être inférieur à 15.000 € :

« COMMUNIQUE JUDICIAIRE :

Par décision en date du…, le Tribunal Judiciaire de Paris, à la requête de l’Association CLCV, a condamné la société C LLC et la société C D LIMITED en raison de leurs manquements à la réglementation applicable aux sites de comparaison de produits et services en ligne et de la commission de pratiques commerciales trompeuses au détriment des consommateurs

Le Tribunal a ordonné en conséquence la cessation de ces pratiques illicites et octroyé une réparation de l’atteinte ainsi portée à l’intérêt collectif des consommateurs.

Vous pouvez prendre connaissance de l’intégralité de cette décision sur la page d’accueil du site internet « https://www.C.fr/flights ».

Ce communiqué judiciaire est diffusé pour informer les consommateurs

».

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Décision du 11 Avril 2023 1/4 social N° RG 17/06841 N° Portalis 352J-W-B7B-CKPGC

Ordonner aux frais de la société C LLC. et la société C D LIMITED la diffusion de ce communiqué judiciaire en haut et au milieu de la page d’accueil du site internet « https://www.C.fr/flights/ », dans un délai d’un mois à compter de la signification du jugement à intervenir, et devant y être accessible pendant un délai de six mois.

Ordonner que ce texte soit publié dans une taille de caractère qui ne soit pas inférieure à la police 14, et que l’intitulé « Communiqué Judiciaire » devra apparaître en majuscules, en gras et en rouge,

Ordonner que cette publication intervienne dans un délai d’un mois à compter de la signification de la décision à intervenir, à peine d’une astreinte de 10.000 € par jour de retard constaté,

Ordonner que ce communiqué judiciaire soit publié pendant un délai de 6 mois minimum.

Ordonner la publication de ce même communiqué judiciaire sur les pages d’accueil de des applications mobiles des défenderesses, sur la page d’accueil de leurs réseaux sociaux (Facebook, Instagram, Twitter, LinkedIn et tout autre réseau qu’il plaira au Tribunal de désigner) en tant que publication épinglée (ou le cas échéant tweet épinglé), pendant une période de trois mois consécutifs.

Ordonner, aux frais de la société C LLC, et la société C D LIMITED la publication de la décision au moyen d’un lien activable figurant en haut et au milieu de la page d’accueil du site internet « https://www.C.fr/flights/ », dans un délai d’un mois à compter de la signification du jugement à intervenir, et devant y être accessible pendant un délai de six mois.

Ordonner la mise en place de ce lien sur la page d’accueil de ce site, précédé du titre en rouge « COMMUNIQUE JUDICIAIRE » sous le contrôle d’un huissier qu’il plaira au Tribunal de céans de désigner, à peine d’astreinte de 10.000 € par jour de retard une fois expiré le délai d’un mois à compter de la signification du jugement à intervenir.

A titre subsidiaire,

Déclarer que les manquements invoqués par la CLCV au titre de la règlementation relative aux sites comparateurs telle que prévue par les articles L.111-7 et D111-10 et suivants du Code de la consommation constituent également des pratiques commerciales trompeuses commises par la société C LLC. et la société C D LIMITED

Condamner solidairement la société C LLC et la société C D LIMITED à payer à l’association CLCV la somme de 100.000 € en réparation du préjudice causé à l’intérêt collectif des consommateurs.

Condamner la société C LLC et la société C D LIMITED à payer à l’association CLCV la somme de 30.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

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Décision du 11 Avril 2023 1/4 social N° RG 17/06841 N° Portalis 352J-W-B7B-CKPGC

En tout état de cause, débouter la société C LLC et la société C D LIMITED de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir,

Condamner la société C Inc. aux dépens dont distraction au profit de Maître X en application de l’article 699 du Code de Procédure Civile.

Suivant leurs dernières écritures communiquées le 12 avril 2022 les sociétés défenderesses demandent au tribunal de :

- ÉCARTER des débats, les pièces mentionnées au bordereau des conclusions de l’association CLCV sous les numéros 10 à 12 ;

- PRONONCER l’irrecevabilité des demandes de l’association CLCV sur le fondement des articles L.111-6, D.111-6 à D.111-10 du Code de la consommation dans leur rédaction en vigueur jusqu’au 31 décembre

2017 ou des articles L.111-7, D.111-10 à D111-14 du Code de la consommation dans leur rédaction en vigueur depuis le 1er janvier

2018 ;

- PRONONCER la nullité du procès-verbal de constat d’huissier du 7 avril 2017, dressé par Me A Y ou, à tout le moins, l’écarter des débats et le dire dépourvu de force probante ;

- DÉBOUTER l’association CLCV de toutes ses demandes, y compris sa demande tendant à voir prononcer l’exécution provisoire des éventuelles condamnations ;

- LA CONDAMNER aux dépens de l’instance ainsi qu’au versement aux sociétés C LLC et C D LTD de la somme de 125.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, comme il est équitable.

A l’appui de ses demandes la CLCV fait valoir

Sur la recevabilité de ses demandes, qu’elle a qualité pour agir en cessation d’agissements illicites même non pénalement sanctionnés, et que les agissements illicites commis par C procédent d’atteintes portées aux dispositions issues de la transposition en droit interne de la Directive 2000/31/CE sur le commerce électronique, soit la loi 2004-575 du 21 juin 2004 dite “ Loi pour la confiance dans l’économie numérique ” et la loi 2016-1321 du 7 octobre 2016 dite “ Loi pour une République numérique ” ;

Sur le fond, à titre principal, que C a violé la réglementation relative à l’activité de comparaison (D.111-7 et suivants anciens et D.111-10 et suivants nouveaux du code de la consommation) en commettant divers manquements portant sur les points suivants :

* absence de matérialisation d’une rubrique spécifique, et plus particulièrement absence de définition des critères de classement, formulée de façon illicite et abusive, absence de précision sur l’existence de relations ou de liens entre C

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et les professionnels référencés selon une stipulation illicite et abusive, absence d’information sur la rémunération du site, et sur le caractère exhaustif ou non des offres publiées,

* absence des informations devant figurer en haut de chaque page d’affichage de résultat de la comparaison avant classement,

* absence d’informations sur les caractéristiques principales des produits et services comparés, tenant à l’emploi de langues étrangères pour décrire les conditions d’utilisation des bagages.

Sur le fond, à titre subsidiaire, que les manquements listés au titre de la réglementation relative aux sites comparateurs, telle que prévue par les articles L.111-7 et D.111.10 et suivants du code de la consommation, constituent également des pratiques commerciales trompeuses car ils conduisent les consommateurs à souscrire à des offres de vente de billet d’avion sur la base d’informations trompeuses et de nature à les induire en erreur.

En défense C fait valoir

A titre liminaire, que le procès-verbal de constat sur lequel repose les demandes est nul et dépourvu de force probante ;

En réponse à la demande principale de la CLCV,

Que l’action de la CLCV est irrecevable faute de qualité pour agir en cessation d’agissements qui ne sont pas constitutifs d’infractions pénales et ne sont pas illicites au regard des directives européennes visées par l’article L.621-7 du code de la consommation ;

Sur le fond, à titre subsidiaire, Que l’action engagée sur le fondement des articles L.111-7 et suivants du code de la consommation est mal fondée car :

- C ne peut être soumis à des exigences plus strictes que celles qui sont applicables en Irlande, pays de son principal établissement au sein de l’Union, qui a transposé la directive sur les pratiques commerciales déloyales sans prévoir d’obligations spécifiques à l’égard des comparateurs en ligne ;

- La réglementation française lui est inopposable car la France n’a pas notifié à l’Irlande, ni à la Commission, son intention de soumettre les opérateurs irlandais à ces dispositions ;

- Les dispositions invoquées sont contraires à l’article 4 de la Directive 2005/29/CE du 11 mai 2005.

Sur le fond, à titre plus subsidiaire, Qu’elle a respecté la lettre de ces dispositions et que la CLCV n’apporte aucun élément permettant d’établir en quoi les pratiques reprochées à C auraient un caractère déloyal au sens de la directive 2005/29/CE du 11 mai 2005.

S’agissant du fondement invoqué par la CLCV au titre des articles L.211-1 et R.212-1-4 du code de la consommation, elle fait valoir que les stipulations critiquées ne sont pas des clauses de nature contractuelle mais de simples mentions informatives, qu’au demeurant elles sont suffisamment claires et que l’une de ces énonciations (“ il est possible que nous soyons indemnisés ”) n’est pas issue du site C Flight.

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S’agissant du grief tiré de l’emploi de langues étrangères, elle rétorque que les faits dénoncés concernent des mentions figurant sur les sites tiers des compagnies aériennes et ne lui sont donc pas imputables, que même sur ces sites tiers ces informations sont également disponibles en français, et que les mentions figurant sur son propre site sont rédigées en français.

En réponse à la demande subsidiaire de la CLCV,

Que ces demandes, tardivement formulées par conclusions du 19 octobre 2020 sur le fondement des articles L.121-2 et L.121-3 du code de la consommation relatifs aux pratiques commerciales trompeuses, sont mal fondées, que le moyen invoqué manque en fait puisque les informations prévues par les articles L.111-7 et D.111-10 du code de la consommation n’ont pas été omises, et en droit car la seule omission de ces informations ne peut pas ipso facto constituer une omission trompeuse.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens développés par les parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 11 octobre 2022.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient d’indiquer que conseil de C a déclaré à l’audience renoncer à sa demande tendant à voir écarter des débats les pièces 10 à 12 adverses qui ont été communiquées.

Sur la recevabilité de la demande principale tendant à faire déclarer que le site internet « https://www.C.fr/flights/ » exploité par la société C LLC et C D LIMITED n’est pas conforme à la règlementation applicable aux sites de comparaison en ligne, et déclarer illicites et abusives certaines stipulations du site

L’article 122 du code de procédure civile dispose que « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ».

En application de l’article 31 du code de procédure civile, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

C expose que les associations de consommateurs ont seulement la possibilité d’introduire deux types d’actions dans l’intérêt collectif des consommateurs devant la juridiction civile :

- soit l’action leur permettant de faire cesser ou interdire certains agissements illicites au regard de certaines dispositions limitativement énumérées transposant les directivres

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européennes spécialement édictées pour la protection des consommateurs, selon l’article L.621-7 du code de la consommation ;

- soit l’action civile leur permettant d’exercer les droits reconnus à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif des consommateurs, selon les articles L.621-1 et L.621-2 du code de la consommation.

C fait valoir qu’en l’ocurrence les articles L.111-7 et D.111-10 à D.111-14 (anciennement L.111-6 et D.111-10 et suivants) du code de la consommation :

- ne découlent pas de la transposition d’une directive européenne en matière de protection des consommateurs , mais d’un amendement déposé au Sénat au cours des débats sur la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, qui reposait sur des considérations purement nationales ;

- n’ont pas pour objet de créer des infractions pénalement sanctionnées.

En réponse à la CLCV, qui soutient que les articles en question constituent une transposition de la directive de l’Union 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur, elle fait valoir :

- que l’article 22 de la Directive 2000/31 prévoit que les dispositions adoptées par les États-membres pour se conformer à celle-ci « contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d’une telle référence lors de leur publication officielle » ; Or, ni la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, ni la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique, ni le Décret n°2016-884 du 29 juin 2016, dont sont issues les articles du code de la consommation en cause, ne comportent la moindre référence à la directive 2000/31 sur le commerce électronique;

- que les obligations relatives à l’information des consommateurs prévues par la directive 2000/31 figurent à l’article 6 de celle-ci, lequel est intégralement et fidèlement transposé par l’article 19 de la Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, et non par les dispositions en cause du code de la consommation ;

- que les dispositions de l’article 19 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique ne sont pas invoquées par la CLCV et ne contiennent aucune règle spécifique relative à la transparence des plateformes de comparaison. C ajoute, s’agissant des actions engagées sur le fondement des articles L.621-1 et L.621-2 du code de la consommation, que les associations agréées de consommateurs ne peuvent agir que pour faire réparer ou cesser le préjudice résultant d’infractions pénalement sanctionnées ; qu’en effet ces textes visent l’action civile, c’est à dire l’action en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention, selon l’article 2 du code de procédure pénale, et se rapportent exclusivement à l’exercice des droits reconnus à la partie civile.

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La CLCV rétorque qu’elle est recevable à agir, tant sur le fondement de L.621-7 qu’en application des dispositions combinées des articles L.621-1, L.621-2 du code de la consommation et 1240 du code civil.

S’agissant du fondement constitué par l’article L.621-7, elle rappelle que l’agissement illicite est l’agissement du professionnel qui contrevient au droit européen de la consommation, c’est à dire aux textes transposés en droit interne de l’une des directives visées par l’article 1 de la directive 2009/22/CE du 23 avril 2009.er

Or, cette liste inclut des directives dont les textes transposés en droit interne trouvent application en l’espèce car le service mis en place par C s’analyse comme un contrat de fourniture d’un service exploité par un opérateur via une plateforme en ligne.

Elle cite à cet effet :

- la Directive sur le commerce électronique 2000/31/CE du 8 juin 2000, relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information et notamment du commerce électronique dans le marché intérieur : loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 dite « Loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) » et loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 dite “ Loi pour une République numérique ” ;

- la Directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur (JO L 149 du 11.6.2005, p. 22) et transposée en droit interne par les articles L.121-1 et suivants du code de la consommation ;

- la Directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, transposée en droit interne au sein des articles L.212-1 et suivants du Code de la consommation.

Elle en conclut que dès lors qu’il est également reproché aux sociétés C la commission de pratiques commerciales trompeuses au sens des articles L.121-1 et suivants du code de la consommation et l’insertion de clauses abusives au sens des articles L.212-1 et suivants du Code de la consommation, son action est parfaitement recevable.

En réponse à l’argument de C selon lequel son action ne serait pas recevable au motif que la réglementation invoquée n’est pas pénalement sanctionnée, elle invoque la jurisprudence de la première chambre civile de la Cour de Cassation, qui a clairement précisé dans un arrêt du 25 mars 2010 que la notion d’agissements illicites vise des faits non nécessairement constitutifs d’une infraction pénale, solution réitérée dans un arrêt du 26 avril 2017 rendu entre l’UFC et AIR FRANCE, et considère que C fait une interprétation erronée des arrêts de la Cour de Cassation du 21 février et 30 mai 2006, 30 janvier 2007 et 27 novembre 2008.

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Sur ce :

Les actions en justice des associations de défense des consommateurs exercées dans l’intérêt collectif des consommateurs sont réglementées par le chapitre I du Titre II Livre VI du code de la consommation, qui distingue d’une part l’action civile (section 1) en ses articles L.621-1 à L.621-6, et d’autre part l’action en cessation d’agissements illicites (section 2) en ses articles L.621-7 et L.621-8, ci-après partiellement reproduits :

Art. L. 621-1

Les associations régulièrement déclarées ayant pour objet statutaire explicite la défense des intérêts des consommateurs peuvent, si elles ont été agréées à cette fin en application de l’article L.811-1, exercer les droits reconnus à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif des consommateurs. Les organisations définies à l’article L.211-2 du code de l’action sociale et des familles [union nationale et unions départementales des associations familiales] sont dispensées de l’agrément pour agir en justice dans les conditions prévues au présent article.

Art. L. 621-2

Les associations de consommateurs mentionnées à l’article L.621-1 et agissant dans les conditions précisées à cet article peuvent demander à la juridiction civile, statuant sur l’action civile ou à la juridiction répressive, statuant sur l’action civile, d’ordonner au défendeur ou au prévenu, le cas échéant sous astreinte, toute mesure destinée à faire cesser des agissements illicites ou à supprimer une clause illicite dans le contrat ou le type de contrat proposé aux consommateurs ou dans tout contrat en cours d’exécution.

Elles peuvent également demander, selon le cas, à la juridiction civile ou à la juridiction répressive de déclarer que cette clause est réputée non écrite dans tous les contrats identiques en cours d’exécution conclus par le défendeur ou le prévenu avec des consommateurs et de lui ordonner d’en informer à ses frais les consommateurs concernés par tous moyens appropriés.

Art. L. 621-7 Les associations mentionnées à l’article L.621-1 et les organismes justifiant de leur inscription sur la liste publiée au Journal officiel de l’Union européenne en application de l’article 4 de la directive 2009/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 modifiée [art. 5 de la Dir. (UE) 2020/1828 du 25 nov. 2020, à compter du 25 juin 2023] relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs, peuvent agir devant la juridiction civile pour faire cesser ou interdire tout agissement illicite au regard des dispositions transposant les directives mentionnées à l’article 1er de la directive précitée.

Il résulte de ces dispositions que les associations agréées sont habilitées d’une part à exercer les droits reconnus à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif des consommateurs, et peuvent à cette occasion demander à la juridiction saisie d’ordonner toute mesure afin de faire cesser un agissement illicite, d’autre part à agir devant les juridictions civiles en cessation, interdiction, ou réparation de tout agissement illicite au regard des dispositions transposant les directives mentionnées à l’article 1er de la

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directive 2009/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 modifiée relative aux actions en cessation en matière de protection des intérêts des consommateurs.

Dans un arrêt récent du 30 mars 2022 (Civ. 1re, 30 mars 2022, no 21-13.970 B), la 1 chambre civile de la Cour de cassation a jugéère qu’une association qui n’invoquait ni l’existence d’une infraction, ni la méconnaissance d’une disposition issue de la transposition d’une directive du droit de l’Union (dans le cas d’espèce, l’action en cessation engagée par l’association était fondée sur la méconnaissance alléguée de dispositions du code des assurances relatives à l’obligation des maîtres d’ouvrage, ayant la qualité de consommateurs, de souscrire une assurance de dommages-ouvrage), n’était pas recevable à agir sur le fondement des articles L.621-1, L.621-2 et L.621-7 du code de la consommation.

En l’espèce, l’assignation introductive d’instance de la CLCV visait à obtenir la cessation de pratiques illicites au regard des dispositions des articles L.111-6 et suivants et D.111-6 et suivants du code de la consommation et à obtenir la réparation du préjudice causé à l’intérêt collectif des consommateurs par la commission de ces pratiques.

Elle visait les articles L.621-1 et suivants du code de la consommation, ainsi que l’article L.111-6 et les articles D.111-6 et suivants du même code dans leurs versions alors applicables, ci-après reproduits :

Ancien art. L.111-6 (Abrogé par L. no 2016-1321 du 7 oct. 2016, art. 49-II, à compter du 1er janv. 2018) Sans préjudice des obligations d’information prévues à l’article 19 de la loi no 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique [V. ce texte App., vo Commerce électronique], toute personne dont l’activité consiste en la fourniture d’informations en ligne permettant la comparaison des prix et des caractéristiques de biens et de services proposés par des professionnels est tenue d’apporter une information loyale, claire et transparente, y compris sur ce qui relève de la publicité au sens de l’article 20 de la même loi.

Les modalités et le contenu de ces informations sont fixés par décret.

— [C. consom., art. L. 111-5.] — V. art. D. 111-6 s.

Art. D.111-6 (Décr. no 2016-505 du 22 avr. 2016, en vigueur le 1er juill. 2016) Toute personne exerçant l’activité mentionnée à l’article L.111-6 [actuel art. L.111-5] précise dans une rubrique spécifique le fonctionnement du service de comparaison. Cette rubrique est directement et aisément accessible sur toutes les pages du site et est matérialisée par une mention ou un signe distinctif. Elle comporte les mentions suivantes :

1° Les différents critères de classement des offres de biens et de services ainsi que leur définition ;

2° L’existence ou non d’une relation contractuelle ou de liens capitalistiques entre le site de comparaison et les professionnels référencés ;

3° L’existence ou non d’une rémunération du site par les professionnels référencés et, le cas échéant, l’impact de celle-ci sur le classement des offres ;

4° Le détail des éléments constitutifs du prix et la possibilité que des frais supplémentaires y soient ajoutés ;

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5° Le cas échéant, la variation des garanties commerciales selon les produits comparés ;

6° Le caractère exhaustif ou non des offres de biens ou de services comparées et du nombre de sites ou d’entreprises référencés ;

7° La périodicité et la méthode d’actualisation des offres comparées.

Art. D.111-7 (Décr. no 2016-505 du 22 avr. 2016, en vigueur le 1er juill. 2016) Toute personne exerçant l’activité mentionnée à l’article L.111-6 [actuel art. L.111-5] fait apparaître, de manière lisible et compréhensible, en haut de chaque page de résultats de comparaison et avant le classement des offres, les informations suivantes :

1° Le critère de classement des offres utilisé par défaut ainsi que la définition de ce critère, sauf si le critère de classement utilisé par défaut est le prix. La définition est indiquée, à proximité du critère, par tout moyen approprié ;

2° Le caractère exhaustif ou non des offres de biens ou de services comparées et du nombre de sites ou d’entreprises référencés ;

3° Le caractère payant ou non du référencement.

Art. D.111-8 (Décr. no 2016-505 du 22 avr. 2016, en vigueur le 1er juill. 2016) Sans préjudice des obligations d’information prévues aux articles L.221-5 et L.222-5 [actuels art. L.121-17, I, et L.121-27] applicables aux vendeurs à distance de produits et de services, toute personne exerçant l’activité mentionnée à l’article L.111-6 [actuel art. L.111-5] fait apparaître, de manière lisible et compréhensible, à proximité de chaque offre de produit ou de services dont elle propose la comparaison, les informations suivantes :

1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service ;

2° Le prix total à payer par le consommateur ;

3° Lorsqu’elles existent, les garanties commerciales, régies par les articles L.217-15 et L.217-16 [actuels art. L.211-15 et L.211-16], comprises dans le prix. Le prix inclut, le cas échéant, tous les frais, notamment de dossier, de gestion, de réservation, d’annulation, les frais de livraison, les frais d’intermédiation, les intérêts ainsi que les commissions et les taxes. Il mentionne les éventuelles conditions particulières d’application du prix annoncé et sa base de calcul lorsqu’un prix exact ne peut être indiqué.

Art. D.111-9 (Décr. no 2016-505 du 22 avr. 2016, en vigueur le 1er juill. 2016) En application de l’article 20 de la loi no 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique [V. ce texte, App., vo Commerce électronique] et dans le cadre de l’exercice de l’activité définie à l’article L.111-6[actuel art. L.111-5], seules les offres de biens ou de services référencées à titre payant, et dont le rang de classement dépend de cette rémunération, font apparaître leur caractère publicitaire par la mention du mot « Annonces » sur la page d’affichage de résultats du site comparateur.

L’article L.111-6 en vigueur à la date de l’introduction de l’instance était la transposition à l’identique de l’ancien article L.111-5 issu de la loi 2014-344 du 17 mars 2014 qui a été abrogé par l’ordonnance 2016- 301 du 14 mars 2016.

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Il s’est appliqué du 1 juillet 2016 au 1 janvier 2018.er er Il a été abrogé à compter de l’entrée en vigueur des mesures réglementaires nécessaires à l’application de l’art. L.111-7, dans sa rédaction résultant du 1° du I de l’art. 49 de la L. n° 2016-1321 du 7 oct. 2016 (L. préc., art. 49-II). — V. Décr. no 2017-1434 du 29 sept. 2017, art. 2. Le nouvel article L.111-7 reprend en son II les dispositions de l’ancien article L.111-6 en les complétant.

Tant l’assignation introductive d’instance que les conclusions ultérieures de la CLCV inscrivent la demande dans le cadre de l’action en cessation de pratiques illicites prévues par les articles L.621-6 et L.621-7 de la section 2, et non pas dans le cadre de l’action civile consécutive à une action pénale. En effet, C n’a pas été poursuivi pénalement pour la commission d’infractions en relation avec les agissements qui lui sont reprochés. Dès lors, le débat sur la portée qu’il convient de donner à l’arrêt rendu le 25 mars 2010 par la Cour de cassation, notamment sur le point de savoir si dans le cadre de l’action civile une association agréée peut ou pas demander au juge pénal ou au juge civil la cessation d’agissements illicites ne constituant pas une infraction pénalement sanctionnée, est en l’espèce sans objet.

Dans cet arrêt, la Cour de Cassation, au visa des articles L.421-2 et L.421-6 du code de la consommation (devenus L.611-2 et L.611-7), a jugé que l’agissement illicite, au sens des articles L.421-2 et L.421-6 du code de la consommation, n’est pas nécessairement constitutif d’une infraction pénale. Cette décision doit être interprétée dans son contexte, à savoir l’existence d’une condamnation antérieure du professionnel pour publicité trompeuse, agissement qui entrait de surcroît dans le champ de dispositions transposant les directives visées par l’article 1 de laer directive 2009/22/CE. La société en cause soutenait que le juge ne pouvait lui interdire de poursuivre une pratique litigieuse qui ne constituait pas en elle-même une infraction et qui n’avait pas été qualifiée de publicité trompeuse par le juge pénal.

La Cour de cassation en visant L.421-2 et L.421-6 a jugé que la cessation d’un agissement illicite pouvait être ordonnée, sans que cet agissement constitue nécessairement une infraction, et ce tant dans le cadre de l’action civile consécutive à l’action pénale (L.421-2) que de l’action civile en cessation de pratiques illicites (L.421-6).

S’il résulte de cette décision que la demande en cessation d’agissements illicites, prévue tant par l’article L.421-2 que par l’article L.421-6 anciens du code de la consommation, devenus L.621-2 et L.621-7, peut être indifféremment formée devant la juridiction pénale ou devant la juridiction civile indépendamment de toute action pénale antérieure, il n’en reste pas moins que l’illicéité de l’agissement visé dans le cadre de l’action engagée au titre de L.621.7 (anciennement L.421-6) doit s’apprécier au regard des dispositions transposant les directives mentionnées à l’article 1er de la directive précitée.

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Or, en l’espèce, les dispositions de l’ancien article L.111-5 devenu L.111-6 invoquées par la CLCV ne résultent pas de la transposition d’une directive de l’Union, mais d’un sous-amendement déposé au Sénat au cours des débats sur le projet de loi dite loi consommation aux fins de création d’un article au chapitre Ier du titre I du Livre I du code de la consommation. Ce sous-amendement visait à encadrer les conditions de l’information délivrée aux consommateurs par les sites comparateurs de prix, et notamment à faire apparaître le statut des sites et leurs liens de subordination avec les entreprises qu’ils comparent, afin d’apporter aux futurs acheteurs un éclaircissement sur le degré d’objectivité de l’information diffusée.

L’article L.111-6 ancien a été abrogé à compter de l’entrée en vigueur des dispositions réglementaires prises pour l’application de la loi du 7 octobre 2016 et remplacé par l’article L.111-7.

La CLCV, qui ne le conteste pas, a fait évoluer son argumentation en cours de procédure en réponse au moyen d’irrecevabilité soulevé par C.

Alors que son assignation introductive d’instance ne visait que les dispositions des articles L.111-6 et D.111-6 et suivants du code de la consommation, elle soutient désormais agir en cessation, interdiction, ou réparation d’agissements illicites au regard des dispositions transposant trois directives, Directive 2000/31/CE transposée par la loi du 21 juin 2004 et celle du 7 octobre 2016, Directive 2005/29/CE transposée aux articles L.121-1 et suivants du code de la consommation, relatifs aux pratiques commerciales trompeuses, et enfin Directive 93/13/CE transposée aux articles L.212-1 et suivants du code de la consommation relatifs aux clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs.

Elle estime que, dès lors qu’ il est également reproché aux sociétés C la commission de pratiques commerciales trompeuses au sens des articles L.121-1 et suivants du code de la consommation et l’insertion de clauses abusives au sens des articles L.212-1 et suivants du Code de la consommation, son action est parfaitement recevable.

Le tribunal entend toutefois rappeler que l’existence de pratiques commerciales trompeuses est invoquée par la CLCV dans une demande subsidiaire, dont l’irrecevabilité n’est pas soulevée par les sociétés C, qui n’ont développé à cet égard qu’une argumentation en défense au fond. En conséquence, cette référence ne peut fonder la recevabilité de la demande principale.

L’article 22 de la Directive 2000/31 CE du Parlement Européen et du Conseil dite “ directive sur le commerce électronique ” dispose que lorsque les Etats membres adoptent les dispositions législatives réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à ladite directive, celles-ci contiennent une référence à la directive ou sont accompagnés d’une telle référence lors de leur publication officielle.

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Or, la loi 2016-1321 du 7 octobre 2016 dite loi pour une République numérique (pas plus que celle du 17 mars 2014) ne contient aucune référence à la directive 2000/31 et ne résulte pas de la transposition d’une directive.

Il est intéressant à cet égard de rappeler que la Commission européenne a émis un avis circonstancié (TRIS/2016 00504) à la suite de la notification par les autorités françaises en novembre 2015 du projet de loi pour une République numérique (dans le cadre de la procédure de notification prévue par la directive UE 2015/1535). La Commission, après avoir constaté que ce projet donne une définition des plateformes en ligne, impose d’informer sur les conditions d’utilisation du service d’intermédiation qu’elles proposent et sur les modalités de référencement classement et déférencement des contenus biens ou services auxquels ce service permet d’accéder et impose également aux plateformes de faire apparaître clairement l’existence ou non d’une relation contractuelle ou de liens capitalistiques avec les personnes référencées, l’existence ou non d’une rémunération par les personnes référencées et le cas échéant l’impact de celle-ci sur le classement des contenus et services proposés, a souhaité rappeler aux autorités françaises l’existence de sa consultation publique concernant l’environnement réglementaire des plateformes et intermédiaires en ligne et a fait observer que, dans la mesure où une action pourrait s’avérer nécessaire dans ces domaines et pourrait différer de l’initiative française, il semblait prématuré d’imposer dès maintenant une législation nationale stricte, au risque de fragmenter le marché unique du numérique dans L’UE. Il n’y a pas lieu d’entrer dans les détails de cet avis, que le tribunal cite à l’appui de son analyse suivant laquelle, contrairement à la thèse soutenue par la CLCV, la loi du 7 octobre 2016 ne résulte pas de la transposition de directives mais de dispositions purement nationales que la Commission avait estimées prématurées.

Les obligations relatives à l’information des consommateurs sont prévues par l’article 6 de la directive 2000/31, transposé en droit interne à l’article 19 de la loi du 21 juin 2004.

Cet article (cité dans le corps de l’article L.111-6 ancien et L.111-7 nouveau) dispose que :

« Sans préjudice des autres obligations d’information prévues par les textes législatifs et réglementaires en vigueur, toute personne qui exerce l’activité définie à l’article 14 est tenue d’assurer à ceux à qui est destinée la fourniture de biens ou la prestation de services un accès facile, direct et permanent utilisant un standard ouvert aux informations suivantes :

1° S’il s’agit d’une personne physique, ses nom et prénoms et, s’il s’agit d’une personne morale, sa raison sociale ;

2° L’adresse où elle est établie, son adresse de courrier électronique, ainsi que des coordonnées téléphoniques permettant d’entrer effectivement en contact avec elle ;

3° Si elle est assujettie aux formalités d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, le numéro de son inscription, son capital social et l’adresse de son siège social ;

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4° Si elle est assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée et identifiée par un numéro individuel en application de l’article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d’identification ;

5° Si son activité est soumise à un régime d’autorisation, le nom et l’adresse de l’autorité ayant délivré celle-ci ;

6° Si elle est membre d’une profession réglementée, la référence aux règles professionnelles applicables, son titre professionnel, l’Etat membre dans lequel il a été octroyé ainsi que le nom de l’ordre ou de l’organisme professionnel auprès duquel elle est inscrite.

Toute personne qui exerce l’activité définie à l’article 14 doit, même en l’absence d’offre de contrat, dès lors qu’elle mentionne un prix, indiquer celui-ci de manière claire et non ambiguë, et notamment si les taxes et les frais de livraison sont inclus. Le présent alinéa s’applique sans préjudice des dispositions régissant les pratiques commerciales trompeuses prévues à l’article L.121-1 du code de la consommation, ni des obligations d’information sur les prix prévues par les textes législatifs et réglementaires en vigueur.

Les infractions aux dispositions du présent article sont recherchées et constatées par les agents mentionnés aux articles L.511-3 et L.511-21 du code de la consommation dans les conditions prévues à l’article L.511-7 du même code. »

Force est de constater que ces dispositions ne traitent pas de l’exigence de transparence des plateformes et ne sont pas invoquées par la CLCV dans l’exposé de son argumentation sur les pratiques arguées d’illicites.

Dans ses dernières conclusions, la CLCV invoque à titre principal la violation des dispositions relatives à l’activité de comparaison de produits et services en ligne, sur le fondement de l’article L.111-6 du code de la consommation.

A ce titre, elle demande au tribunal de déclarer que le site internet C Flight n’est pas conforme à la réglementation applicable aux sites de comparaison en ligne et de déclarer illicite et abusive les stipulations suivantes :

« Vous pouvez afficher les résultats en fonction des Meilleurs vols (l’ordre par défaut qui offre le meilleur compromis entre le prix et le confort, sur la base de critères tels que la durée, le nombre d’escales et les changements d’aéroport durant les escales), du Prix, de la Durée et de l’Heure de départ » ;

et

« Il se peut que C soit rémunéré lorsqu’un utilisateur clique sur une option de réservation de vol spécifique et qu’il est redirigé vers le site Web de la compagnie aérienne ou de l’agence de voyages. Étant donné qu’un partenariat avec C doit être établi pour faire apparaître les vols dans les résultats de recherche, toutes les compagnies aériennes et tous les vols disponibles ne sont pas inclus »;

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Les premières en ce qu’elles ne sont pas conformes aux dispositions de l’article D.111-7 1° car elles ne définissent pas précisément le principal critère de classement et n’informent en rien le consommateur sur ces critères, et les secondes en ce qu’elle ne répondent pas à l’obligation d’information portant sur l’existence ou non d’une relation contractuelle et/ ou de liens capitalistiques entre le site de comparaison et les professionnels ou les sites référencés, prévues par l’article D.111-6.

La référence faite par la CLCV à l’article L.211-1 du code de la consommation, alors qu’elle s’appuie sur les dispositions relatives à l’obligation de transparence faite au comparateur, est ainsi purement artificielle et par ailleurs inadaptée, dans la mesure où cet article et les suivants qui définissent les clauses abusives, concernent les contrats conclus entre un professionnel et un consommateur. Or, la société qui gère une plateforme référençant des offres de produits et services proposés par des professionnels permettant au consommateur de rechercher et comparer ces offres, ne conclut pas un contrat avec la personne qui consulte le site aux fins d’information et de comparaison de prestations et de prix.

En conséquence, la CLCV sera déclarée irrecevable en sa demande principale faute de qualité pour agir.

Sur la demande subsidiaire tendant à voir déclarer que les manquements invoqués par la CLCV au titre de la règlementation relative aux sites comparateurs telle que prévue par les articles L.111-7 et D111-10 et suivants du Code de la consommation constituent également des pratiques commerciales trompeuses commises par la société C LLC. et la société C D LIMITED

A titre subsidiaire, la CLCV fait valoir que les manquements listés au titre de la réglementation relative aux sites comparateurs telle que prévue par les articles L.111-7 et D.111-10 constituent également des pratiques commerciales trompeuses et de nature à induire en erreur sur les caractéristiques principales de ces offres puisqu’elles sont proposées sur la base de critères dont la définition est obscure, d’autant que le site internet de C renvoie à des pages entièrement rédigées en anglais.

Il convient de rappeler que l’association CLCV a la charge d’établir la preuve des faits qu’elle allègue et pour lesquels elle fait état de griefs au nom de l’intérêt collectif des consommateurs, en application des dispositions de portée générale des articles 6 et 9 du code de procédure civile. Cette preuve peut être apportée par tout moyen en application des dispositions de l’article 1358 du code civil.

Elle produit à cette fin un constat dressé le 7 avril 2017 par Maître Y, huissier de justice, dont C soutient qu’il est nul et dépourvu de force probante car, d’une part l’huissier a manqué à son devoir d’objectivité en se livrant à une appréciation juridique, d’autre part ce procès-verbal ne permet pas de s’assurer que les impressions des pages web consultées par l’huissier et placées en annexe reproduisent fidèlement l’aspect visuel de ces pages avec l’ensemble des informations et mentions effectivement fournies à l’internaute.

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Il convient de bien distinguer ces deux griefs, différents tant par leur nature que par leurs effets.

L’huissier de justice qui dresse un constat doit s’abstenir d’exprimer son opinion sur les faits pour lesquels son concours est requis, y compris un avis juridique.

En l’espèce, Maître Y a outrepassé son rôle de constatant en notant dans son rapport “ Je constate à l’issue de mes constatations que les dispositions des articles D.111-6 à D.111-10 du code de la consommation ne sont pas respectées et que le site https://www.C.fr/fligts/ ne répond pas à son obligation d’information conformément à ces dispositions. ”

L’huissier de justice, en formulant cette appréciation d’ordre juridique qui n’engage que lui et ne peut avoir d’effet sur la propre analyse du tribunal, a manqué à l’évidence de neutralité.

Pour autant, il n’est pas démontré que cette prise de position a eu pour effet de vicier les constatations matérielles effectuées. Il appartient au tribunal d’examiner l’ensemble des éléments contenus par le constat et de dire s’ils sont de nature à apporter la preuve de faits susceptibles de recevoir la qualification de pratiques commerciales trompeuses.

En conséquence, C sera déboutée de sa demande de nullité du constat de Maître Y.

C demande au tribunal, à défaut de prononcer la nullité de ce constat, de l’écarter des débats en ce qu’il est dépourvu de force probante, en raison de la méthode adoptée par l’huissier, qui indique avoir utilisé le logiciel “PDF Converter 8“ au lieu d’un logiciel de capture d’écran et a donc converti les pages web de leur format “html” original vers un format pdf, opération qui peut altérer la résolution des données. Il cite en exemple l’impression de la page d’accueil du site (annexe 2), qui ne présente pas en haut à gauche de l’écran le symbole signalant la possibilité d’ouvrir un menu déroulant, qui existe et qui apparaît dans certaines captures d’écrans insérées dans le corps du constat. Elle fait remarquer que l’huissier n’a pas cliqué sur l’ensemble des liens figurant sur la page d’accueil et n’a donc pu vérifier l’ensemble des informations accessibles depuis cette page.

Ces critiques, quelque soit leur pertinence, ne peuvent cependant avoir pour effet d’écarter cette pièce des débats. Le tribunal, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, déterminera si les faits allégués par la CLCV sont établis ou pas par les constatations de l’huissier et les écartera si elles ne lui apparaissent pas suffisamment probantes pour les raisons invoquées par C.

En conséquence, C sera débouté de sa demande tendant à écarter le constat de Maître Y (pièce 5 de la CLCV) des débats.

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L’article L.121-1 du code de la consommation, résultant de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, dispose que :

« Les pratiques commerciales déloyales sont interdites. Une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère ou est susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service. Le caractère déloyal d’une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d’une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s’apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe. Constituent, en particulier, des pratiques commerciales déloyales les pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L.121-2 à L.121-4 et les pratiques commerciales agressives définies aux articles L.121-6 et L. 121-7. » ;

Selon l’article L.121-2 :

« Une pratique commerciale est trompeuse si elle est commise dans l’une des circonstances suivantes :

1° Lorsqu’elle crée une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commercial ou un autre signe distinctif d’un concurrent;

2° Lorsqu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur l’un ou plusieurs des éléments suivants :

a) L’existence, la disponibilité ou la nature du bien ou du service ;

b) Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, à savoir : ses qualités substantielles, sa composition, ses accessoires, son origine (L. no 2021-1104 du 22 août 2021, art. 4) «, notamment au regard des règles justifiant l’apposition des mentions « fabriqué en France » ou « origine France » ou de toute mention, signe ou symbole équivalent, au sens du code des douanes de l’Union sur l’origine non préférentielle des produits », sa quantité, son mode et sa date de fabrication, les conditions de son utilisation et son aptitude à l’usage, ses propriétés et les résultats attendus de son utilisation, (L. no 2021-1104 du 22 août 2021, art. 10) « notamment son impact environnemental, » ainsi que les résultats et les principales caractéristiques des tests et contrôles effectués sur le bien ou le service ;

c) Le prix ou le mode de calcul du prix, le caractère promotionnel du prix (Ord. no 2021-1734 du 22 déc. 2021, art. 3, en vigueur le 28 mai 2022) « [,] notamment les réductions de prix au sens du I de l’article L. 112-1-1, les comparaisons de prix » et les conditions de vente, de paiement et de livraison du bien ou du service ;

d) Le service après-vente, la nécessité d’un service, d’une pièce détachée, d’un remplacement ou d’une réparation ;

e) La portée des engagements de l’annonceur (L. no 2021-1104 du 22 août 2021, art. 10) « , notamment en matière environnementale », la nature, le procédé ou le motif de la vente ou de la prestation de services;

f) L’identité, les qualités, les aptitudes et les droits du professionnel ;

g) Le traitement des réclamations et les droits du consommateur ; 3° Lorsque la personne pour le compte de laquelle elle est mise en œuvre n’est pas clairement identifiable ;

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(Ord. no 2021-1734 du 22 déc. 2021, art. 3, en vigueur le 28 mai 2022) « 4° Lorsqu’un bien est présenté comme étant identique à un bien commercialisé dans un ou plusieurs autres États membres alors qu’il a une composition ou des caractéristiques différentes. » — [C. consom., art. L.121-1, I.] » ;

Selon l’article L.121-3 :

« Une pratique commerciale est également trompeuse si, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l’entourent, elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu’elle n’indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte.

Lorsque le moyen de communication utilisé impose des limites d’espace ou de temps, il y a lieu, pour apprécier si des informations substantielles ont été omises, de tenir compte de ces limites ainsi que de toute mesure prise par le professionnel pour mettre ces informations à la disposition du consommateur par d’autres moyens.

Dans toute communication commerciale constituant une invitation (L. no 2017-203 du 21 févr. 2017, art. 5) « à l’achat » et destinée au consommateur mentionnant le prix et les caractéristiques du bien ou du service proposé, sont considérées comme substantielles les informations suivantes :

1° Les caractéristiques principales du bien ou du service ;

2° L’adresse et l’identité du professionnel ;

3° Le prix toutes taxes comprises et les frais de livraison à la charge du consommateur, ou leur mode de calcul, s’ils ne peuvent être établis à l’avance ;

(Ord. no 2021-1734 du 22 déc. 2021, art. 3, en vigueur le 28 mai 2022) « 4° Les modalités de paiement, de livraison et d’exécution, dès lors qu’elles sont différentes de celles habituellement pratiquées dans le domaine d’activité professionnelle concerné [ancienne rédaction: 4o Les modalités de paiement, de livraison, d’exécution et de traitement des réclamations des consommateurs, dès lors qu’elles sont différentes de celles habituellement pratiquées dans le domaine d’activité professionnelle concerné]; »

5° L’existence d’un droit de rétractation, si ce dernier est prévu par la loi ;

(Ord. no 2021-1734 du 22 déc. 2021, art. 3, en vigueur le 28 mai 2022) « 6° La qualité de professionnel ou non du vendeur qui propose des produits sur une place de marché, telle qu’elle a été déclarée à l’opérateur de la place de marché en ligne.»

« Lorsque le consommateur peut rechercher des produits offerts par différents professionnels ou par des particuliers à partir d’une requête consistant en un mot clé, une phrase ou la saisie d’autres données, sont réputées substantielles les informations mises à sa disposition concernant les principaux paramètres qui déterminent le classement des produits qui lui sont présentés et leur ordre d’importance. Ces informations doivent figurer dans une rubrique spécifique de l’interface en ligne, directement et aisément accessible à partir de la page sur laquelle les résultats de la requête sont présentés. »

« Lorsqu’un professionnel donne accès à des avis de consommateurs sur des produits, les informations permettant d’établir si et comment le professionnel garantit que les avis publiés émanent de consommateurs ayant effectivement utilisé ou acheté le produit sont réputées substantielles.» — [C. consom., art. L. 121-1, II.] » ;

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En lecture des dispositions législatives qui précèdent, la notion de pratique commerciale trompeuse, qui s’intègre dans la notion plus large de pratique commerciale déloyale (de même que celle de pratique commerciale agressive), répond à un double critère cumulatif portant, d’une part sur la contrariété aux exigences des obligations de diligence du professionnel concerné, et d’autre part sur le fait d’altérer ou susceptible d’altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service, conformément aux dispositions précitées de l’article L-121-1 du code de la consommation.

Ces dispositions résultent de la transposition de la Directive 2005/29/CE relative aux pratiques commerciales déloyales dite DPCD.

Cette directive, dont le champ d’application est très large, a vocation à s’appliquer au référencement d’offres commerciales tel que celui pratiqué par C Flight.

La CLCV, déclarée irrecevable à agir sur le fondement des dispositions des articles L.111-6 ancien ou L.111-7 nouveau, ne peut les invoquer pour caractériser des pratiques commerciales trompeuses.

Il lui appartient de démontrer que l’information fournie par la plateforme caractérise la commission de pratiques commerciales trompeuses indépendamment de toute référence aux obligations spécifiques imposées par la loi du 17 mars 2014 puis par celle du 7 octobre 2016.

En effet, ainsi que l’a rappelé la Commission dans son avis précité (TRIS/(2016) 00504), la DPCD fournit déjà une base légale adéquate afin d’obliger les plateformes en ligne à fournir une information pertinente sur les services qu’elles offrent aux consommateurs.

La CLCV a ainsi la charge d’établir que C s’est livrée :

- soit à une pratique commerciale commise dans l’une des circonstances prévues par l’article L.121-2, et plus précisément au vu de son argumentation à une pratique reposant sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur deux éléments, les caractéristiques essentielles du bien et son prix ;

- soit à une pratique commerciale commise dans les conditions fixées par l’article L.121-3, c’est à dire une pratique, qui, compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l’entourent, omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ;

En effet, la loi distingue ainsi les pratiques commerciales trompeuses par action relevant de l’erreur (article L.121-2 du code de la consommation), des pratiques commerciales trompeuses par omission d’informations substantielles ou dissimulation de véritable intention commerciale (article L.121-3 du code de la consommation).

Les mêmes faits ou agissements ne peuvent ainsi constituer à la fois une pratique commerciale trompeuse par action et une pratique commerciale trompeuse par omission.

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Le tribunal examinera cependant l’argumentation soutenue par la CLCV sous ces deux angles.

Sur l’allégation de pratiques commerciales trompeuses par action relevant de l’article L.121-2 du code de la consommation :

La CLCV expose que les manquements listés au titre de la réglementation relative aux sites comparateurs, telle que prévue par les articles L.111-7 et D.111-10 et suivants du code de la consommation, constituent des pratiques commerciales trompeuses, car la définition des critères est obscure, de sorte que les consommateurs sont induits en erreur sur les caractéristiques essentielles des contrats de vente de billets et sur le prix de la prestation de transport des bagages puisqu’il est exprimé en anglais et non en français pour de nombreuses compagnies.

Outre que la CLCV se réfère à des dispositions du code de la consommation sur le fondement desquelles elle est irrecevable à agir, elle ne précise pas quelles sont les caractéristiques essentielles des offres qui seraient l’objet d’allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur.

S’agissant des conditions tarifaires d’utilisation des bagages, qui ne seraient pas mentionnées en français mais en anglais pour certaines compagnies, il résulte du constat de Maître Z, huissier de justice à Neuilly-sur-Seine du 4 octobre 2021 (pièce 14 de la CLCV, pages 30 à 45), que la CLCV ne fait pas ici référence aux informations données par le site C Flight, mais par les sites des compagnies aériennes concernées accessibles depuis C Flight, et donne comme exemple les sites des compagnies Turkish Airlines et Austrian. Or, il résulte du constat dressé le 13 janvier 2022 à la demande de C par Maître LEGRAIN, huissier à Paris, que ces compagnies proposent une version en français des mêmes informations.

Il résulte, en outre, de ce même constat que l’utilisateur du site C Flight, lorsqu’il a renseigné la destination souhaitée, est préalablement informé que des frais facultatifs et des frais de bagages peuvent s’appliquer, et qu’il retrouve ensuite pour chacun des vols sélectionnés la mention relative à la nature des bagages enregistrés gratuitement ou faisant l’objet d’un supplément. Si le montant de ce supplément n’est pas indiqué, il ne s’agit pas là d’une information essentielle, dont l’utilisateur peut en tout état de cause avoir connaissance en consultant le site de la compagnie.

En conséquence, la CLCV, ne caractérise pas l’existence d’allégations, indications ou présentations fausses de nature à induire l’utilisateur du site en erreur.

Sur l’allégation de pratiques commerciales trompeuses par omission, soit une pratique qui compte tenu des limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances qui l’entourent, omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle

La CLCV considère que les mêmes agissements “ … constituent pareillement des omissions trompeuses dès lors qu’ils ont pour effet de dissimuler et de fournir de façon ambiguë des informations

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Décision du 11 Avril 2023 1/4 social N° RG 17/06841 N° Portalis 352J-W-B7B-CKPGC

essentielles portant sur les caractéristiques principales des offres présentées selon le critère dit du « Meilleur Vol » et sur leur prix et sur les conditions d’utilisation des bagages et dont les consommateurs ont pourtant besoin pour prendre une décision d’achat en toute connaissance de cause.

Elle ne précise pas, cependant, de quelles informations essentielles portant sur les caractéristiques principales des offres il s’agit. Quant au prix indiqué, au regard des conditions d’utilisation des bagages, le tribunal renvoie à l’analyse effectuée ci-avant dont il résulte que le grief n’est pas fondé.

Il résulte de cette analyse que la CLCV échoue à démontrer la commission par C de pratiques commerciales trompeuses au travers de son site C Flight. La CLCV sera dès lors déboutée de sa demande subsidiaire en paiement de dommages et intérêts.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

L’association CLCV qui succombe en ses demandes sera condamnée aux dépens et à payer aux sociétés défenderesses, eu égard à la durée de la procédure pour partie consécutive à l’évolution de ses propres demandes, la somme de 20.000 euros en compensation de leurs frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire rendu en premier ressort, par mise à disposition au greffe :

Déclare l’association Consommation Logement et Cadre de Vie irrecevable en sa demande principale ;

Déboute les sociétés C LLC et C D Limited de leurs demandes tendant à annuler le constat d’huissier dressé par Maître Y le 7 avril 2017 ou à l’écarter des débats ;

Déboute l’association Consommation Logement et Cadre de Vie de ses demandes subsidiaires ;

Condamne l’association Consommation Logement et Cadre de Vie aux dépens et à payer aux sociétés C LLC et C D Limited la somme de 20.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Fait et jugé à Paris le 11 Avril 2023

Le Greffier Le Président

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Tribunal Judiciaire de Paris, 11 avril 2023, n° RG 17/06841