Tribunal Judiciaire de Strasbourg, 4 novembre 2020, n° 20/01085

  • Fournisseur·
  • Sociétés·
  • Gaz·
  • Électricité·
  • Économie·
  • Astreinte·
  • Contrats·
  • Facture·
  • Prestation·
  • Référé

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
TJ Strasbourg, 4 nov. 2020, n° 20/01085
Numéro(s) : 20/01085

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL JUDICIAIRE RÉPUBLIQUE FRANÇAISE DE STRASBOURG AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS […]

ORDONNANCE du 04 Novembre 2020 Greffe des Référés Commerciaux 03.88.75.27.81

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Lors des débats à l’audience publique du 21 Octobre 2020 : Président : D E, Première Vice-Présidente, Greffier : Sophie DUCH N° RG 20/01085 – N° Portalis DB2E-W -B7E-J4RG ORDONNANCE :

- mise à disposition au greffe le 04 Novembre 2020,

- contradictoire et en premier ressort, N° de minute : 20/00150

- signée par D E, et par B C, Greffier lors de la mise à disposition ;

Copie exécutoire délivrée DEMANDERESSES : le 04/11/2020 à : l’ASSOCIATION S.A.S SOCIETE EUROPEENNE DE PROMOTION, EPSA ET BUY A-LEVY-KAHN-BRAU N & ASSOCIES, vestiaire 70 PRO, prise en la personne de son représentant légal Me X Y, vestiaire […] représentée par Me X Y, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat postulant

S.A.S. 7PARTNERS, société par actions simplifiée, prise en la personne de son représentant légal […] représentée par Me X Y, avocat au barreau de STRASBOURG, avocat plaidant

DEFENDERESSE :

S.A.S. ISRI, prise en la personne de son représentant légal 1 rue Willenbach 67250 MERKWILLER-PECHELBRONN représentée par Maître Z A de l’ASSOCIATION A-LEVY-KAHN-BRAUN & ASSOCIES, avocats au barreau de STRASBOURG, avocats plaidant/postulant

Par assignation signifiée le 29 juillet 2020, la SOCIETE EUROPEENNE DE PROMOTION SAS (EPSA) et la société 7PARTNERS ont fait citer la société ISRI FRANCE devant le président de la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Strasbourg statuant en référé afin de voir, sur le fondement des articles 145 et 835 alinéa 2 du code de procédure civile :

- ordonner à la société ISRI-FRANCE d’avoir à produire et à communiquer à la société EPSA l’ensemble des justificatifs nécessaires à la détermination du montant des économies réalisées au titre des ajustements de puissance et de la renégociation avec son fournisseur d’électricité, la société UNIPER, notamment (i) ses factures d’électricité avec ce fournisseur mais également avec tout autre fournisseur éventuel d’électricité sur la période du 1er janvier 2018 au 1er juillet 2020 (ii), ses balances fournisseurs avec le fournisseur UNIPER et tout éventuel autre fournisseur d’électricité (iii) tout avenant signé avec la société

1/5 N° RG 20/01085



UNIPER et:ou tout nouveau contrat signé avec un autre fournisseur d’électricité sur cette période, sous astreinte de 1 000 € par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de 15 jours suivant la signification de l’ordonnance à intervenir;

- se réserver la liquidation de l’astreinte;

- ordonner à la société ISRI-FRANCE d’avoir à produire et à communiquer à la société EPSA l’ensemble des justificatifs nécessaires à la détermination du montant des économies réalisées sur ses dépenses de gaz, notamment (i) ses factures avec le fournisseur TOTAL GAZ mais également avec tout autre fournisseur éventuel de gaz sur la période du 1er janvier 2018 au 1er juillet 2020 (ii), ses balances fournisseurs avec le fournisseur TOTAL GAZ et tout éventuel autre fournisseur de gaz (iii) tout avenant signé avec la société TOTAL GAZ et/ou tout nouveau contrat signé avec un autre fournisseur de gaz sur cette période, sous astreinte de 1 000 € par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de 15 jours suivant la signification de l’ordonnance à intervenir;

- se réserver la liquidation de l’astreinte;

- ordonner à la société ISRI-FRANCE d’avoir à produire et à communiquer à la société 7PARTNERS l’ensemble des justificatifs nécessaires à la détermination du montant des économies réalisées sur l’optimisation de la contribution au service public de l’électricité, et notamment les liasses fiscales pour les exercices 2016, 2017, 2018 et 2019 ainsi que les déclarations 1329-DEF ou 1330-CVAE-SD pour ces mêmes années, sous astreinte de 1000

€ par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de 15 jours suivant la signification de l’ordonnance à intervenir;

- se réserver la liquidation de l’astreinte

- condamner la société ISRI FRANCE à payer à la société EPSA la somme de 12 240 € à titre de provision au titre des factures 1710054 du 31 octobre 2017, 1901122 du 31 janvier 2019 et 1906085 du 30 juin 2019, minorées par les avoirs 1909002 et 1909003 du 30 septembre 2019;

- condamner la société ISRI FRANCE à payer aux société EPSA et 7PARTNERS la somme de 5 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

- condamner la société ISRI FRANCE aux entiers dépens.

Les demanderesses exposent que le 14 juin 2017, la société ISRI FRANCE, équipementier automobile qui exploite deux usines en France, a conclu avec la société EPSA un contrat de prestations de services aux termes duquel elle a confié à EPSA une mission d’analyse de certaines de ses dépenses d’énergie en électricité et en gaz dans le but de réaliser des économies. Ce contrat prévoit au bénéfice d’EPSA une rémunération correspondant à 25 % des gains réalisés ou récupérations sur une période de deux ans, ainsi qu’une clause pénale en cas de manquement du client à ses obligations résultant du contrat.

Par une seconde convention du 14 juin 2017, la société ISRI FRANCE a conclu avec la société 7PARTNERS une convention d’optimisation de la fiscalité de l’énergie pour une durée de deux ans, aux termes de laquelle elle a confié à la société 7PARTNERS une mission d’identification des optimisations possibles, de proposition et de mise en œuvre de préconisations concernant notamment la TCFE, la TICFE ou CSPE, la TICGN et la TICPE. Cette convention est bâtie sur les mêmes mécanismes que la convention de prestations de service conclue avec la société EPSA.

Le 26 juin 2019, les sociétés EPSA et 7PARTNERS ont sollicité auprès d’ISRI les divers documents nécessaires pour mener à bien leur mission. La société ISRI FRANCE n’a communiqué qu’une partie de ces documents, et ce tardivement, après le délai contractuellement fixé pour cette communication.

2/5 N° RG 20/01085



Malgré cette carence, la société EPSA a remis le 24 août 2017 son rapport contenant un certain nombre de mesures permettant à ISRI FRANCE de réaliser des économies sur les tarifs d’électricité pour un montant estimé à 17 000 € par an. La société ISRI a mis en œuvre cette préconisation en sollicitant son fournisseur UNIPER.

EPSA a facturé sa prestation conformément aux termes du contrat, sur la base des économies d’électricité pour un montant de 17 000 €.

ISRI n’a jamais contesté ces factures avant le 09 octobre 2019, date à compter de laquelle elle a développé une série d’arguments pour s’opposer au paiement.

Le 14 mai 2018, la société EPSA a encore préconisé des ajustements concernant la puissance électrique souscrite par ISRI auprès de UNIPER. ISRI n’a officiellement pas donné suite à cette demande, mais a contacté son fournisseur hors de la vue d’EPSA pour appliquer cette recommandation.

La société 7PARTNERS pour sa part a conclu que la société ISRI FRANCE n’était pas éligible à un taux réduit de la CSPE pour l’année 2017, et a souhaité procéder à une analyse par site. Elle a alors sollicité la communication de la comptabilité analytique qu’elle n’a toutefois jamais reçue. Elle a revanche découvert que la société ISRI avait mis en œuvre ses préconisations et bénéficiait depuis le 1er avril 2019 d’une exonération partielle de CSPE.

Ainsi, non seulement ISRI FRANCE n’a pas payé les factures d’ores et déjà établies, mais elle n’a jamais communiqué les documents nécessaires à l’établissement de la rémunération d’EPSA et de 7PARTNERS, de sorte que celles-ci sont contraintes d’engager une action sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile.

Les demanderesses précisent que les clause attributives de compétence juridictionnelle contenues dans les contrats ont été stipulées dans leur intérêt exclusif, ce qui leur permet d’y renoncer. Elle ajoutent que ces clauses ne sont pas opposables à la partie qui saisit le juge des référés.

Elle ajoutent que le succès d’une demande formulée sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile n’est pas conditionné par l’absence de contestation sérieuse, il suffit pour la partie qui s’en prévaut de formuler sa demande avant tout procès au fond et de justifier que la mesure d’instruction qu’elle sollicite est indispensable au succès de ses prétentions.

La société EPSA ajoute que sa demande en paiement d’une provision n’est pas sérieusement contestable dans la mesure où la société ISRI s’est reconnue débitrice de la demande d’acompte du 31 octobre 2017 et a reconnu avoir renégocié son contrat avec son fournisseur d’électricité ainsi que cela lui avait été recommandé par EPSA. Elle ajoute que la nullité dont se prévaut ISRI ne concerne pas le contrat conclu avec EPSA ; elle considère que la nullité alléguée par ISRI et fondée sur le défaut d’objet cache en réalité un argument lié à un prétendu défaut d’équivalence des prestations qui ne constitue pas une cause de nullité du contrat. Elle conteste le préjudice dont se prévaut ISRI.

La société ISRI FRANCE pour sa part demande au juge des référés de :

- déclarer les demandes des sociétés demanderesses mal fondées ;

- dire et juger que la demande de condamnation au titre d’une provision se heurte à des contestations sérieuses :

- dire et juger que la demande de production des pièces ne repose pas sur un motif légitime ;

- débouter les sociétés demanderesses de leurs fins et conclusions ;

- dire en tout état de cause n’y avoir lieu à référé ;

- condamner les sociétés demanderesses aux dépens ainsi qu’à un montant de 5 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

3/5 N° RG 20/01085



Elle expose que les prestations annoncées par les sociétés EPSA et 7PARTNERS étaient totalement illusoires en ce sens qu’il s’agissait de possibilités d’économies qui ne nécessitaient aucun réel travail d’audit. La société ISRI s’en est aperçue lorsque son fournisseur d’énergie lui a transmis ses brochures. Aussi, si elle a initialement envisagé le paiement de la facture d’acompte en 2018, le constat de l’absence de prestations réelles (l’unique rapport d’EPSA ne correspondant pas à un audit mais n’étant qu’un rappel du contexte) et l’accès direct aux informations l’a conduite à changer d’avis.

Sur le fond, elle soulève la nullité de la convention portant sur des économies liées à la fiscalité, tout conseil en matière de législation fiscale relevant du monopole des avocats. Elle soulève la nullité des deux conventions pour défaut d’objet sur le fondement de l’article 1169 du code civil, les économies potentielles relevant de simples démarches mécaniques sans le moindre travail de réflexion ou d’investigation. Elle ajoute que pour tenter de justifier de l’existence de prestations, les demanderesses ont retardé l’engagement des démarches et lui ont fait perdre le bénéfice des économies pour les années 2016 et 2017.

Elle considère enfin que compte-tenu des contestations qu’elle formule sur la validité des contrats, les demanderesses ne justifient pas d’un intérêt légitime à obtenir la production forcée des documents réclamés.

MOTIFS DE LA DECISION

Vu les actes de la procédure et les pièces produites aux débats;

Il résulte des pièces versées aux débats et des déclarations des parties qu’elles sont liées en vertu de contrats de prestations de service conclus le 14 juin 2017.

Il n’appartient pas au juge des référés de caractériser l’existence d’une cause de nullité de ces contrats ni de caractériser un engagement de responsabilité.

Aussi, en l’état des débats, ces contrats existent et leur exécution est à l’origine d’un litige pour lequel aucune procédure n’a encore été engagée, et dont la solution repose pour partie sur le quantum de l’économie réalisée, la preuve de cette économie n’étant pas contestée.

En conséquence, les conditions de l’article 145 du code de procédure civile, étant réunies il y a lieu de faire droit à la demande formulée sur ce fondement conformément aux modalités précisées au dispositif.

D’autre part, en application des dispositions de l’article 873 du code de procédure civile, dans tous les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier.

Quelle que soit la facilité avec laquelle tout opérateur économique peut accéder aux informations relatives aux économies réalisables en matière d’énergie, force est de constater qu’aucune démarche en ce sens n’a été réalisée par la société ISRI FRANCE avant, non seulement la signature du contrat avec la société EPSA, mais également l’établissement du document qu’elle conteste être un rapport d’audit. Dans ces conditions, ses contestations relatives à l’absence d’objet ne sont pas sérieuses.

Il sera donc fait droit à la demande en paiement de la provision.

Les dépens de l’instance seront supportés par la société ISRI FRANCE qui succombe et qui participera aux frais irrépétibles exposés par les demanderesses à hauteur de 2 000 €.

4/5 N° RG 20/01085


PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par ordonnance de référé contradictoire et en premier ressort,

ENJOIGNONS à la société ISRI FRANCE de communiquer à la société EPSA ses factures d’électricité avec le fournisseur UNIPER et /ou tout autre fournisseur éventuel d’électricité sur la période du 1er janvier 2018 au 1er juillet 2020, ses balances fournisseurs avec le fournisseur UNIPER et tout éventuel autre fournisseur d’électricité sur la même période et tout avenant signé avec la société UNIPER et/ou tout nouveau contrat signé avec un autre fournisseur d’électricité sur cette période, sous peine d’une astreinte de 1 000 € (mille euros) par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de 15 jours suivant la signification de cette ordonnance, et pour une durée de deux mois;

Nous RÉSERVONS la compétence pour connaître de la liquidation de cette astreinte;

ENJOIGNONS à la société ISRI FRANCE de communiquer à la société EPSA ses factures avec le fournisseur TOTAL GAZ mais également avec tout autre fournisseur éventuel de gaz sur la période du 1er janvier 2018 au 1er juillet 2020), ses balances fournisseurs avec le fournisseur TOTAL GAZ et tout éventuel autre fournisseur de gaz sur la même période et tout avenant signé avec la société TOTAL GAZ et/ou tout nouveau contrat signé avec un autre fournisseur de gaz sur cette période, sous astreinte de 1 000 € (mille euros) par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de 15 jours suivant la signification de cette ordonnance, et pour une durée de deux mois ;

Nous RÉSERVONS la compétence pour connaître de la liquidation de cette astreinte ;

ENJOIGNONS à la société ISRI FRANCE de communiquer à la société 7PARTNERS les liasses fiscales pour les exercices 2016, 2017, 2018 et 2019 ainsi que les déclarations 1329-DEF ou 1330-CVAE-SD pour ces mêmes années, sous astreinte de 1 000 € (mille euros) par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de 15 jours suivant la signification de cette ordonnance, et pour une durée de deux mois ;

Nous RÉSERVONS la compétence pour connaître de la liquidation de cette astreinte ;

CONDAMNONS la société ISRI FRANCE à payer à la société EPSA une provision de 12 240 € (douze mille deux cent quarante euros) avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;

CONDAMNONS la société ISRI FRANCE aux dépens ;

CONDAMNONS la société ISRI FRANCE à payer aux société EPSA et 7PARTNERS indivisément une indemnité de 2 000 € (deux mille euros) en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Juge des Référés Commerciaux,

B C D E

5/5 N° RG 20/01085

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal Judiciaire de Strasbourg, 4 novembre 2020, n° 20/01085