Décision de la Commission des sanctions du 17 novembre 2016 à l'égard de la société LMBO et de MM. A et B

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Sur la décision

Référence :
AMF, 17 nov. 2016, n° SAN-2016-14
Numéro : SAN-2016-14
Identifiant AMF : SAN-2016-14

Sur les parties

Texte intégral

La Commission des sanctions

DECISION DE LA COMMISSION DES SANCTIONS À L’ÉGARD DE LA SOCIÉTÉ LMBO ET DE MM. A ET B

La 1ère section de la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (ci-après « AMF ») ;

Vu le code monétaire et financier, notamment ses articles L. 532-9, L. 533-10, L. 533-10-1 ;

Vu le règlement général de l’AMF, notamment ses articles 311-3, 312-3, 312-4, 313-1, 313-54, 313-55, 313-59, 313-59-1, 314-3-1 ;

Vu les notifications de griefs adressées par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 17 novembre 2015 à la société LMBO ainsi qu’à MM. A et B;

Vu la lettre du président de l’AMF du 17 novembre 2015 transmettant au président de la Commission des sanctions, en application de l’article R. 621-38 du code monétaire et financier, copie des notifications de griefs précitées ;

Vu la décision du président de la Commission des sanctions du 26 novembre 2015 désignant Mme Edwige Belliard, membre de cette Commission, en qualité de rapporteur ;

Vu les lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 2 décembre 2015 informant la société LMBO et MM. A et B de la nomination de Mme Edwige Belliard en qualité de rapporteur et leur rappelant la faculté d’être entendus, à leur demande, conformément au I de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier ;

Vu les lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 4 décembre 2015 informant la société LMBO et MM. A et B de la faculté qui leur était offerte de demander la récusation du rapporteur dans le délai d’un mois ;

Vu les observations en réponse à la notification de griefs formulées par la société LMBO par lettre du 17 décembre 2015 ;

Vu les pièces complémentaires transmises par la société LMBO le 7 janvier et le 19 février 2016 ;

Vu le procès-verbal d’audition du 21 mars 2016 du commissaire aux comptes de la société LMBO ;

Vu les procès-verbaux des auditions de la société LMBO, de MM. A et B du 13 juin 2016 ;

Vu le rapport du rapporteur du 12 septembre 2016 ;

Vu les lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 12 septembre 2016 auxquelles était joint le rapport du rapporteur, convoquant la société LMBO ainsi que MM. A et B à la séance de la Commission des

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sanctions du 19 octobre 2016 et les informant du délai de quinze jours dont ils disposaient pour présenter des observations en réponse, conformément aux dispositions du III de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier, ainsi que de leur droit à se faire assister de tout conseil de leur choix, selon les dispositions du II de l’article R. 621-40 du même code ;

Vu les lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 21 septembre 2016 informant la société LMBO et MM. A et B de la composition de la Commission des sanctions lors de la séance, ainsi que du délai de quinze jours dont ils disposaient pour demander la récusation d’un ou plusieurs de ses membres, en application des articles R. 621-39-2 à R. 621-39-4 du code monétaire et financier ;

Vu la réponse de la présidente de la Commission des sanctions du 30 septembre 2016 à la lettre de la société LMBO du 22 septembre 2016 sollicitant que le nom des mis en cause ne soit mentionné ni lors de la séance de la Commission des sanctions, ni « dans les documents liés à cette procédure, publication, documentation ou publication ultérieure » et le courrier électronique adressé en réplique par M. A le 13 octobre 2016 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Après avoir entendu au cours de la séance publique du 19 octobre 2016 :

— Mme le Rapporteur en son rapport ;

- M. Pierre-Eliot Rozan, représentant la Directrice générale du Trésor, qui a indiqué ne pas avoir d’observations à formuler ;

- M. Xavier Jalain, représentant le Collège de l’AMF ;

- la société LMBO, représentée par son président, M. A ;

- M. A ;

- M. B;

Les personnes mises en cause ayant eu la parole en dernier.

FAITS ET PROCÉDURE

1. Les faits

La société LMBO (ci-après « LMBO »), constituée sous la forme de société par actions simplifiée à capital variable, est une société de gestion agréée depuis le 1er décembre 2005 pour la gestion sous mandat et la gestion collective à destination d’investisseurs qualifiés.

Elle assure la gestion de plusieurs Fonds Communs de Placement à Risque (ci-après « FCPR ») investissant majoritairement dans des sociétés non cotées. Entre septembre 2011 et avril 2015, quatre FCPR ou compartiments de FCPR, créés en 2009, étaient en activité.

LMBO connaît depuis plusieurs années une baisse de son activité qui l’a conduite à réduire ses frais de fonctionnement : entre 2010 et 2014, le montant des encours gérés a diminué de 97,4 à 58,8 millions d’euros et les charges d’exploitation comptables ont été ramenées de 2,3 à 0,4 millions d’euros.

M. A en est, par l’intermédiaire d’une société dont il détient l’intégralité du capital, l’actionnaire principal, le président et l’un des gérants financiers. Son neveu, son fils ainé et son fils cadet y ont exercé ou y exercent des fonctions de gérant financier ou de responsable conformité et contrôle interne (ci-après « RCCI »). En particulier, son fils Best RCCI.

Au mois de juin 2016, l’effectif de LMBO était de quatre personnes.

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2. La procédure

En application de l’article L. 621-9 du code monétaire et financier, le secrétaire général de l’AMF a décidé, le 28 septembre 2014, de procéder au contrôle du respect par LMBO de ses obligations professionnelles.

Le contrôle a donné lieu à l’établissement d’un rapport du 27 avril 2015, qui a fait l’objet d’observations en réponse de LMBO par lettre du 8 juin 2015.

Lors de sa séance du 15 septembre 2015, le Collège de l’AMF a décidé de notifier des griefs à LMBO ainsi qu’à MM. A et B, notifications auxquelles il a été procédé par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 17 novembre 2015.

Il est reproché à la société LMBO :

— une insuffisance de moyens matériels, humains et financiers mettant en évidence un non-respect de ses conditions d’agrément, en violation de l’article L. 532-9 du code monétaire et financier et des articles 311- 3, 312-3, 312-4, 313-54, 313-55 et 313-59 du règlement général de l’AMF précisés pour partie par la position-recommandation AMF n° 2012-19 du 18 décembre 2012 prise notamment en application des articles 312-3 et 313-54 du même règlement ;

— un processus de valorisation des actifs de ses fonds présentant de nombreuses lacunes, en violation des articles L. 533-10 et L 533-10-1 du code monétaire et financier et des articles 313-1, 313-59-1 et 314-3-1 du règlement général de l’AMF.

Les mêmes griefs ont été notifiés à MM. A et B, en leur qualité de dirigeant au sens de l’article L. 532-9 II 4° du code monétaire et financier et au titre de la responsabilité prévue par l’article 313-6 du règlement général de l’AMF.

Conformément aux dispositions de l’article R. 621-38 du code monétaire et financier, une copie des notifications de griefs a été transmise le 17 novembre 2015 à la présidente de la Commission des sanctions qui a désigné Mme Edwige Belliard en qualité de rapporteur le 26 novembre suivant.

Par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 2 décembre 2015, LMBO et MM. A et Bont été informés de la nomination du rapporteur et de ce qu’ils disposaient de la faculté d’être entendus par lui en application des dispositions du I de l’article R. 621-39 du code précité.

Par lettre du 17 décembre 2015, LMBO a présenté des observations en réponse à la notification de griefs.

Le 21 mars 2016, le rapporteur a entendu le commissaire aux comptes de LMBO et de ses fonds. Le 13 juin 2016, il a entendu successivement LMBO, M. A et M. B. Au cours de leur audition, ces deux derniers ont indiqué qu’ils se prévalaient pour leur défense personnelle des observations présentées par LMBO en réponse à la notification de griefs.

Le 12 septembre 2016, Mme Edwige Belliard a déposé son rapport.

Par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du même jour auquel était joint le rapport du rapporteur, LMBO et MM. A et B ont été convoqués à la séance de la Commission des sanctions du 19 octobre 2016.

Par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 21 septembre 2016, LMBO et MM. A et B ont été informés de la composition de la Commission des sanctions lors de la séance et de la faculté qui leur était offerte de demander la récusation d’un ou plusieurs de ses membres, en application des articles R. 621-39-2 à R. 621-39-4 du code monétaire et financier.

Par lettre du 22 septembre 2016, LMBO a demandé à la présidente de la Commission des sanctions que le nom des mis en cause ne soit mentionné ni lors de la séance de la Commission des sanctions, ni « dans les documents liés à cette procédure, publication, documentation ou publication ultérieure ».

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Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 30 septembre 2016, la présidente de la Commission des sanctions a répondu qu’il y aurait lieu d’apprécier lors de la séance si l’interdiction ponctuelle de l’accès de la salle au public se justifiait, que l’anonymisation de la décision serait examinée par la formation saisie de l’affaire au moment du délibéré et que la demande ne pouvait être satisfaite pour le surplus.

Par courrier électronique du 13 octobre 2016, M. A a fait valoir que l’évocation précise des griefs notifiés lors de la séance devrait conduire à évoquer des informations couvertes par le secret des affaires.

Au cours de la séance, aucun des mis en cause n’a invoqué le secret des affaires ni demandé l’interdiction ponctuelle de l’accès de la salle.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I. Sur les griefs relatifs aux moyens matériels, humains et financiers de LMBO

Les notifications de griefs reprochent à LMBO l’insuffisance généralisée de moyens matériels, humains et financiers ainsi que le non-respect de ses conditions d’agrément et de l’obligation d’informer l’AMF des modifications des informations figurant dans le dossier d’agrément initial, en violation des dispositions de l’article L. 532-9 du code monétaire et financier et des articles 311-3, 312-3, 312-4, 313-54, 313-55 et 313-59 du règlement général de l’AMF, précisées pour partie par la position-recommandation AMF n° 2012-19 du 18 décembre 2012 prise notamment en application des articles 312-3 et 313-54 du même règlement.

Sur les moyens matériels

Pour retenir une insuffisance des moyens matériels, en violation des articles 313-54 et 313-55 du règlement général de l’AMF, et un non-respect des conditions d’agrément contrevenant à l’article L. 532-9 du code monétaire et financier, les notifications de griefs relèvent qu’en exerçant son activité au domicile de

M. A à compter du mois de janvier 2014, LMBO s’est trouvée dépourvue de locaux à usage professionnel et n’a plus exercé son activité de manière indépendante et sécurisée. Elles soulignent, à titre de « circonstance aggravante », que cette situation a fait obstacle à l’accès des agents de l’AMF aux locaux professionnels.

Elles reprochent en outre à LMBO d’avoir attendu le 24 septembre 2014 pour communiquer à l’AMF la nouvelle domiciliation de son siège social, intervenue au mois de janvier 2014 et, ainsi, d’avoir manqué à l’obligation de déclaration à l’AMF prévue par l’article 311-3 du règlement général de l’AMF.

LMBO soutient que l’appartement dans lequel elle s’est installée à compter du mois de janvier 2014 lui a permis d’exercer son activité dans des locaux indépendants, vastes et sûrs, et précise que son président n’habitait pas à cette adresse mais dans un autre appartement dont il disposait à Paris.

M. B a fait valoir lors de son audition par le rapporteur que le délai pris pour communiquer à l’AMF la nouvelle adresse du siège social de LMBO ne procédait pas d’une volonté de dissimulation puisque la société avait fait figurer son adresse sur des courriers électroniques envoyés à l’AMF.

Le I de l’article 313-54 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur à compter du 31 mars 2008 et non modifiée sur ce point depuis, dispose que « La société de gestion de portefeuille utilise en permanence des moyens, notamment matériels, […] adaptés et suffisants ».

L’article 313-55 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur au 1er novembre 2007 et non modifiée depuis, prévoit que « La société de gestion de portefeuille établit et maintient opérationnels des systèmes et procédures permettant de sauvegarder la sécurité, l’intégrité et la confidentialité des informations de manière appropriée eu égard à la nature des informations concernées ».

Le dernier alinéa du II de l’article L. 532-9 du code monétaire et financier, dans sa rédaction en vigueur au 3 août 2011 non modifiée depuis sur ce point, dispose que « Les sociétés de gestion de portefeuille doivent satisfaire à tout moment aux conditions de leur agrément ».

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L’article 311-3 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur au 21 décembre 2013 et non modifiée depuis, indique : « Les modifications des informations figurant dans le dossier d’agrément de la société de gestion de portefeuille en application de l’article 311-1 font l’objet, selon les cas, d’une déclaration, notification ou demande d’autorisation préalable à l’AMF. […] Les modalités d’application du présent article sont précisées par une instruction de l’AMF ».

Le dossier d’agrément de LMBO mentionne que cette dernière a son siège social « 23 place Vendôme 75001 PARIS », que ses locaux professionnels « sont répartis sur 3 niveaux » et que « les sociétés du groupe qui emploient des salariés […] se trouvent à un étage différent […], afin d’assurer toute la sécurité et la confidentialité nécessaires aux dossiers d’investissements » et « chaque salarié de [LMBO] a un profil particulier d’autorisations d’accès au serveur de fichiers, ce qui permet d’assurer un bon niveau de confidentialité ».

Cependant, il résulte des constatations des contrôleurs les éléments suivants :

LMBO a quitté les locaux de la place Vendôme le 28 janvier 2014 pour installer son personnel, ses dossiers et son matériel bureautique dans un appartement situé dans le 5e arrondissement de Paris. Elle a parallèlement conclu, le 1er janvier 2014, un contrat de domiciliation au 5 rue de Castiglione dans le 1er arrondissement de Paris, décidé de transférer son siège social à cette adresse le 22 janvier 2014 et informé les services de l’AMF de cette modification le 24 septembre 2014.

L’appartement dans lequel LMBO a exercé son activité à compter du 28 janvier 2014 était, pour partie, à usage d’habitation, M. A, son président, y ayant sa résidence principale, ainsi que certains de ses proches. Il était, de surcroît, utilisé par une autre entité juridique, sans que la partie des locaux affectés à cette dernière ait été précisée. La séparation entre les différents usages de l’appartement n’était pas clairement établie. L’occupation de l’appartement par LMBO n’a fait l’objet d’un contrat écrit, stipulant une mise à disposition gracieuse, qu’après l’établissement du rapport de contrôle.

Ainsi, les locaux utilisés par LMBO pour exercer son activité ne présentaient pas des garanties suffisantes en termes d’indépendance et de confidentialité et, en l’absence de contrat formalisé avant juin 2015, leur occupation avait un caractère précaire.

LMBO a donc manqué, à compter du 28 janvier 2014 et au moins jusqu’au 27 avril 2015, date du rapport de contrôle, à son obligation d’utiliser en permanence des moyens matériels adaptés lui permettant notamment de sauvegarder la sécurité, l’intégrité et la confidentialité de ses informations, en violation des dispositions des articles 313-54, ainsi qu’à son obligation de se conformer à tout moment aux conditions de son agrément, en violation des dispositions de l’article L. 532-9 du code monétaire et financier. En revanche, l’article 313-55 du règlement général de l’AMF relatif aux systèmes et procédures est inapplicable aux faits retenus.

Par ailleurs, l’AMF n’a été informée de la nouvelle adresse du siège social de LMBO que par l’envoi d’un formulaire le 24 septembre 2014, soit près de huit mois après le changement de domiciliation, effectif depuis le 22 janvier 2014.

La mention des nouvelles coordonnées dans plusieurs courriers électroniques adressés aux services de l’AMF avant le 24 septembre 2014, dont M. B s’est prévalu lors de son audition par le rapporteur, ne vaut pas déclaration régulière à l’AMF et constitue une circonstance indifférente pour caractériser le manquement reproché, qui n’exige pas d’établir une volonté de dissimulation.

Il s’ensuit que LMBO a contrevenu à l’obligation de déclaration prévue par l’article 311-3 du règlement général de l’AMF.

Sur les moyens humains

Pour retenir une insuffisance de moyens humains, en violation de l’article 313-54 du règlement général de l’AMF, et un non-respect des conditions d’agrément contrevenant à l’article L. 532-9 du code monétaire et financier, les notifications de griefs relèvent que LMBO n’a employé qu’un seul gérant financier entre le 15 octobre 2013 et le 30 décembre 2014 dès lors que la deuxième personne présentée comme tel ne disposait pas des compétences requises et que la troisième n’avait pas été recrutée. Elles reprochent en outre à LMBO d’avoir contrevenu à

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l’obligation de déclaration à l’AMF prévue par l’article 311-3 du règlement général de l’AMF en notifiant à cette dernière le recrutement à temps plein d’un gérant financier dont l’embauche n’était pas intervenue et en l’informant en décembre 2013 de l’exercice à temps plein de la fonction de gérant financier alors qu’il lui avait été signifié que ce dernier n’avait pas les qualités requises pour exercer une telle fonction.

La société LMBO objecte que l’aptitude de la personne désignée pour exercer les fonctions de gérant financier a été validée par l’obtention de la certification AMF en février 2014 et explique le malentendu concernant l’embauche de l’autre personne présentée comme gérant financier, d’une part, par le libellé des formulaires déclaratifs, qui se réfèrent à l’« arrivée » et non au recrutement définitif, et, d’autre part, par une évolution des besoins de la société qui ont conduit à décider, à la fin de l’année 2014, de ne pas intégrer la personne concernée.

L’article 313-54 du règlement général de l’AMF dispose en son I, dans sa version en vigueur à compter du 31 mars 2008 et non modifiée sur ce point depuis, que « La société de gestion de portefeuille utilise en permanence des moyens, notamment […] humains, adaptés et suffisants ». Aux termes du V du même article, dans la même version, également non modifiée depuis, la société de gestion de portefeuille « emploie un personnel disposant des qualifications, des connaissances et de l’expertise requises pour exercer les responsabilités qui lui sont confiées ».

L’article L. 532-9 du code monétaire et financier, dont les dispositions pertinentes ont déjà été reproduites lors de l’examen des moyens matériels, font obligation aux sociétés de gestion de portefeuille de satisfaire à tout moment aux conditions de leur agrément.

L’article 311-3 du règlement général de l’AMF, dans sa version applicable du 1er novembre 2007 au 20 décembre 2013, disposait : « La société de gestion de portefeuille informe l’AMF, selon des modalités précisées dans une instruction de l’AMF, des modifications portant sur les éléments caractéristiques qui figuraient dans le dossier d’agrément initial, concernant notamment l’actionnariat direct ou indirect, la direction, l’organisation et les éléments mentionnés à la section 2 du chapitre II. L’AMF fait connaître au déclarant, par écrit, les conséquences éventuelles de ces modifications sur l’agrément délivré ».

Le dossier d’agrément de LMBO mentionne que tous les salariés sont à temps plein et que le personnel comprend trois gérants financiers. Ce nombre a par la suite été réduit à deux.

Il résulte cependant du rapport de contrôle les faits suivants :

Le 15 octobre 2013, l’AMF a été informée du départ le même jour de l’un des deux gérants financiers et de son remplacement par le fils cadet de M. A.

Au moment de son embauche par LMBO en octobre 2013, le nouveau gérant financier, né en 1991, étudiant en licence de sciences politiques, avait effectué deux stages, au sein d’un cabinet d’audit et au sein d’un groupe de médias pour le compte duquel il avait réalisé une étude de marché. Il a obtenu de l’AMF la certification professionnelle des acteurs de marchés en février 2014. Il était inscrit en Master 1 de sciences politiques lorsque l’ancien RCCI de LMBO lui a succédé dans le poste de gérant financier.

Ainsi, eu égard à sa formation en cours et à sa très faible expérience professionnelle, et nonobstant l’obtention de la certification AMF, qui se borne à consacrer une réussite à un examen théorique destiné à vérifier l’acquisition par les collaborateurs de prestataires de services d’investissement d’un niveau de connaissances minimales dans douze domaines relatifs à l’environnement réglementaire et déontologique et aux techniques financières, le fils cadet de M. A ne disposait pas des qualifications, des connaissances et de l’expertise requises pour exercer la fonction de gérant financier.

Le 29 novembre 2013, l’AMF a adressé à LMBO un courrier relevant que l’intéressé était encore étudiant, exprimant en conséquence des interrogations sur sa présence à temps plein et le respect par LMBO de l’obligation d’employer « un personnel disposant des qualifications, des connaissances et l’expertise requises pour exercer les responsabilités qui lui sont confiés », et invitant cette dernière à indiquer dans les plus brefs délais les mesures prises pour se conformer aux exigences réglementaires relatives aux moyens humains.

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LMBO a informé le 11 décembre 2013 l’AMF de l’embauche d’un troisième gérant financier à temps plein à compter du 6 décembre 2013 en indiquant que les deux autres gérants financiers, également à temps plein, étaient M. A et son fils cadet. Le 30 décembre 2014, elle a fait part à l’AMF d’une permutation de fonctions entre le RCCI et son fils cadet, le premier devenant gérant financier et le second RCCI.

Le troisième gérant financier prétendument recruté à compter du 6 décembre 2013 n’a jamais été salarié de LMBO, ni n’a disposé d’un poste de travail dans les locaux de cette dernière. S’il a déclaré à la mission de contrôle avoir signé en novembre 2013 « une forme de contrat [qui] indiquait que pendant six mois, [il] ne [serait] pas rémunéré et que M. B pourrait faire appel à [ses] services en tant que besoin », une telle convention, d’ailleurs non versée au dossier de la procédure, n’est pas de nature à lui conférer des fonctions de gérant financier au sein d’une société de gestion. En outre, il a précisé n’avoir jamais été sollicité par LMBO pour accomplir des prestations et avoir eu très peu de contacts avec cette dernière au cours de l’année 2014.

Il s’ensuit qu’entre le 15 octobre 2013 et le 30 décembre 2014, LMBO n’a disposé que d’un seul gérant financier ayant les qualifications, les connaissances et l’expertise requises pour exercer ces fonctions, M. A.

Le non-respect de l’obligation, énoncée par l’article 313-54 du règlement général de l’AMF, d’utiliser en permanence des moyens humains adaptés et suffisants et de celle de se conformer à tout moment aux conditions de son agrément, prévue par l’article L. 532-9 du code monétaire et financier, est donc établi.

En revanche, la déclaration inexacte du 11 décembre 2013 à l’AMF et la mention dans cette déclaration du fils cadet de M. A parmi les gérants financiers alors que l’AMF avait fait part de l’inaptitude de ce dernier à exercer de telles fonctions, ne constituent pas une violation de l’obligation d’avertir l’AMF de tout changement concernant les conditions d’exercice de son activité. Le manquement aux dispositions de l’article 311-3 du règlement général de l’AMF, qui vise l’omission de déclaration, ne peut donc être retenu.

Sur les moyens financiers

Pour reprocher à LMBO une insuffisance de moyens financiers, en violation des articles 312-3, 312-4, 313-54 et 313-59 du règlement général de l’AMF, ainsi qu’un non-respect des conditions d’agrément contrevenant à l’article L. 532-9 du code monétaire et financier, les notifications de griefs relèvent que le niveau des fonds propres règlementaires de LMBO n’atteignait pas le minimum requis au 31 décembre des années 2011, 2012 et 2013, que les sommes venant en représentation de ces fonds n’avaient pas été placées de façon prudente et que le commissaire aux comptes de la société a refusé de certifier les comptes annuels de l’exercice 2013.

LMBO soutient avoir utilisé des moyens financiers adaptés et suffisants et conteste les éléments relevés par la poursuite.

Elle fait valoir en ce sens qu’elle a émis des obligations remboursables en actions ou échangeables (ci-après « ORAE ») qui ont été, à tort, exclues des fonds propres réglementaires par la mission de contrôle alors qu’il s’agit de titres de « quasi-capital », et invoque à l’appui de son analyse les positions de la « Compagnie des Commissaires aux comptes » et de la COB ainsi que la validation par son commissaire aux comptes du classement de ces obligations en fonds propres.

Elle ajoute que les sommes représentatives de ses fonds propres réglementaires étaient placées, de manière sûre et liquide, en créances détenues sur les fonds gérés et que le refus de certification des comptes procède d’une erreur commise par le commissaire aux comptes sur la méthode choisie pour évaluer des actifs incorporels.

L’article 313-54 du règlement général de l’AMF dispose en son I, dans sa version en vigueur à compter du 31 mars 2008 et non modifiée sur ce point depuis, que « La société de gestion de portefeuille utilise en permanence des moyens, notamment […] financiers, adaptés et suffisants ».

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Sur le respect du niveau minimum des fonds propres réglementaires

Le II de l’article 312-3 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur au 28 août 2008 non modifiée sur ce point depuis dans un sens moins sévère, dispose : « Lors de l’agrément et au cours des exercices suivants, la société de gestion de portefeuille doit pouvoir justifier à tout moment d’un niveau de fonds propres au moins égal au plus élevé des deux montants mentionnés aux 1° et 2° ci-après : / 1° 125 000 euros complété d’un montant égal à 0,02% du montant de l’actif géré par la société de gestion de portefeuille excédant 250 millions d’euros. / Le montant des fonds propres requis n’excède pas 10 millions d’euros. […] ; / 2° Le quart des frais généraux annuels de l’exercice précédent […] ».

Avant sa suppression par l’arrêté du 6 avril 2016, le dernier alinéa du III du même article précisait que « Les éléments composant les frais généraux, les fonds propres et les portefeuilles d’une société de gestion sont précisés dans une instruction de l’AMF ».

L’instruction AMF n° 2008-03, prise en application du III de l’article 312-3 du règlement général de l’AMF, dans ses versions successives applicables entre le 24 juin 2011 et le 17 décembre 2012, précisait, au I de son article 10, que : « Les fonds propres règlementaires des sociétés de gestion de portefeuille comprennent exclusivement : / 1° Les fonds propres de base qui sont constitués par la somme des postes suivants du bilan : / a) Le capital ; / b) Les réserves, à l’exception des réserves de réévaluation ; / c) Les primes d’émission ou de fusion ; / d) Le report à nouveau créditeur ; / e) Le résultat du dernier exercice clos dans l’attente de son affectation, net d’impôt ; / Dont sont déduits : / a) Le montant du dividende au titre de l’exercice précédent […] ; / b) La part non libérée du capital ; / c) Les actions propres détenues évaluées à leur valeur comptable ; / d) Le report à nouveau débiteur ; / e) Les actifs incorporels, y compris les frais d’établissement ; / f) Le cas échéant, le résultat déficitaire déterminé à des dates intermédiaires ». Ces dispositions ont été reprises dans la position recommandation AMF n°2012-19 du 18 décembre 2012, dans sa version applicable entre le 18 décembre 2012 et le 3 février 2015.

Il résulte des éléments recueillis par les contrôleurs que LMBO a comptabilisé dans ses fonds propres règlementaires les ORAE qu’elle a émises.

Les ORAE ne sont pas des instruments prédéfinis mais des titres hybrides dont les caractéristiques sont décrites dans les contrats d’émission proposés par LMBO. Elles pouvaient, soit être échangées le 31 décembre de chaque année civile contre d’autres ORAE sur décision de l’émetteur, soit, à tout moment, faire l’objet d’un rachat ou encore, avec l’accord du souscripteur, d’un remboursement par l’attribution d’actions. Au vu des pièces versées au dossier, LMBO a toujours fait usage, à chaque échéance de fin d’année, de la faculté d’échanger les ORAE contre d’autres ORAE.

LMBO a fait valoir qu’une position de la « Compagnie des Commissaires aux comptes » permettrait de considérer les ORAE comme des titres de quasi-capital classables en autres fonds propres. Sans autre précision et sans production de la position, il n’est pas possible d’apprécier son contenu ni sa valeur.

La position de la COB publiée dans le Bulletin mensuel d’information de décembre 2003, elle aussi invoquée par LMBO, ne porte pas sur les ORAE mais sur les obligations remboursables en actions (ORA) et concerne la comptabilisation dans les comptes consolidés, et non le calcul des fonds réglementaires, de sorte qu’il ne peut en être tiré aucun enseignement en l’espèce.

On notera cependant que la COB relève que « la multiplication des instruments hybrides « sur mesure » nécessite une grande prudence dans l’analyse des contrats d’émission » et que « seul l’examen détaillé des clauses [permet]

de qualifier l’instrument comme une dette, une composante des capitaux propres, ou de les inscrire dans une rubrique intermédiaire ».

Il convient de constater, d’abord, que les ORAE ne figurent pas dans la liste des postes entrant dans le calcul des fonds propres règlementaires dressée par l’instruction n° 2008-03 dans ses versions applicables à la cause.

Il sera relevé, ensuite, qu’interrogés par LMBO sur la possibilité de prendre en considération l’émission des ORAE pour satisfaire aux exigences en matière de fonds propres réglementaires minimum, les services de l’AMF ont répondu par courrier du 2 octobre 2012 que « la qualification des titres de « Quasi Capital » en fonds propres

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réglementaires [était] douteuse dans la mesure où ces titres ne sont jamais convertis en actions de la société et ne constituent donc jamais ce gage pour les créanciers mais constituent, au contraire, pour la société une dette ».

Enfin, lors de leur audition par le rapporteur, le commissaire aux comptes de LMBO a déclaré ne pas avoir pris position sur le classement comptable des ORAE retenu dans les comptes annuels, et indiqué qu’il s’agissait de produits hybrides, de « quasi fonds propres », dont le placement au bilan n’était pas aisé.

Il résulte de ce qui précède que les ORAE émises par LMBO ne devaient pas être prises en compte dans le calcul des fonds propres règlementaires.

C’est donc à juste titre que la mission de contrôle a considéré que ces fonds s’élevaient, au 31 décembre des années 2011, 2012 et 2013, respectivement, à – 3 920 494 euros, – 420 486 euros et 317 957 euros, et retenu leur insuffisance aux mêmes dates à concurrence de, respectivement, 4 316 517 euros, 718 932 euros et 88 955 euros par rapport au minimum requis.

Sur le placement prudent des fonds propres

L’article 312-4 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur du 1er novembre 2007 au 20 octobre 2011, disposait : « Les placements réalisés pour les besoins de la gestion des fonds propres ne doivent pas être de nature à mettre en cause le respect des dispositions relatives aux fonds propres minimum définies à l’article 312-3. Pour la part relevant des fonds propres minimum, ces placements doivent être prudents et ne peuvent comporter des positions spéculatives dans des conditions précisées dans une instruction de l’AMF ».

Dans sa version en vigueur du 21 octobre 2011 au 20 décembre 2013, il énonçait que « Les fonds propres doivent être placés dans des actifs dont la détention assure à tout moment la capacité de la société de gestion de portefeuille à respecter le montant minimum de fonds propres auquel elle est soumise ».

Dans sa version applicable du 21 décembre 2013 au 16 avril 2016, non modifiée sur ce point dans un sens mois sévère par l’arrêté du 6 avril 2016, il prévoyait que « Les fonds propres, y compris les fonds propres supplémentaires, doivent être placés dans des actifs liquides ou des actifs aisément convertibles en liquidités à court terme et ne comportant pas de positions spéculatives ».

L’application des règles relatives au placement des fonds propres minimum, prévues par l’article 312-4 du règlement général de l’AMF, suppose que ces fonds existent. Or comme il a été dit lors de l’examen du point précédent, les fonds propres réglementaires de LMBO étaient négatifs au 31 décembre des années 2011 et 2012, de sorte que le non-respect des règles en cause ne peut être retenu pour les exercices 2011 et 2012.

Dans son dossier d’agrément du 26 octobre 2005, LMBO s’était engagée à « gérer les Fonds en « bon père de famille » et à utiliser des placements prudents (SICAV de trésorerie, etc.) ».

Les pièces recueillies lors du contrôle établissent que LMBO avait très peu de trésorerie et qu’elle ne plaçait pas de fonds sur des supports tels que des comptes à terme, des fonds monétaires ou des SICAV de trésorerie.

La détention de créances de LMBO sur les commissions de gestion non réglées par les FCPR gérés ne s’analyse pas en un placement. D’ailleurs, le commissaire aux comptes de LMBO et des FCPR a indiqué au rapporteur qu’« à partir du moment où les fonds de LMBO n’[avaient] pas réussi à vendre les lignes qu’ils détenaient, ils n’avaient plus de liquidités pour payer leurs dettes et notamment les commissions de gestion », de sorte que les créances en cause ne peuvent être considérées comme « des actifs dont la détention assure à tout moment la capacité de la société de gestion de portefeuille à respecter le montant minimum de fonds propres auquel elle est soumise » ou des « actifs liquides ou des actifs aisément convertibles en liquidités à court termes » au sens de l’article 312-4 du règlement général de l’AMF.

Il s’ensuit que le non-respect par LMBO de son obligation de placer ses fonds de manière prudente est établi pour les exercices 2013 et 2014.

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Sur le refus du commissaire aux comptes de certifier les comptes de l’exercice 2013

La certification des comptes annuels est prévue par l’article 313-59 du règlement général de l’AMF qui, dans sa version en vigueur du 21 octobre 2011 au 20 décembre 2013, disposait : « Les comptes annuels de la société de gestion de portefeuille sont certifiés par un contrôleur légal des comptes. La société de gestion de portefeuille adresse à l’AMF, dans les six mois suivant la clôture de l’exercice, une copie du bilan, du compte de résultat et de ses annexes, du rapport annuel de gestion et de ses annexes, ainsi que les rapports général et spécial du contrôleur légal. Le cas échéant, la société produit des comptes consolidés ». En remplaçant les mots « contrôleur légal des comptes » par les mots « commissaire aux comptes », l’arrêté du 11 décembre 2013 n’a pas modifié ce texte dans un sens plus favorable.

Le commissaire aux comptes a refusé de certifier les comptes annuels de l’exercice clos au 31 décembre 2013 de LMBO en raison, d’une part, d’une « incertitude sur la capacité de la société à réaliser ses actifs, régler ses dettes et par là même, à poursuivre son activité » et, d’autre part, d’interrogations « quant à la valeur du fonds commercial figurant à l’actif pour 4,3 millions d’euros et à l’absence de dépréciation résultant de la méthode d’évaluation retenue ».

L’article 313-59 du règlement général de l’AMF précité ne vise que l’obligation de soumettre ses comptes annuels à un commissaire aux comptes. Le refus du commissaire aux comptes de certifier les comptes annuels de l’exercice 2013 de LMBO ne peut donc constituer le sous-grief invoqué. En séance, le représentant du Collège a d’ailleurs précisé qu’il s’agissait plutôt d’une circonstance aggravante.

Il résulte de l’ensemble des éléments qui précèdent que LMBO n’a pas satisfait aux exigences relatives au niveau des fonds propres réglementaires pour les exercices 2011, 2012 et 2013 et n’a pas placé ses fonds propres de manière prudente pour les exercices 2013 et 2014, circonstances qui caractérisent un manquement à l’obligation d’utiliser en permanence des moyens financiers adaptés et suffisants prévue par les articles 313-54, 312-3 et 312- 4 du règlement général de l’AMF ainsi qu’à l’obligation de satisfaire à tout moment aux conditions de son agrément énoncée l’article L. 532-9 du code monétaire et financier.

II. Sur les griefs relatifs au processus de valorisation des actifs détenus par les FCPR

Les notifications de griefs relèvent l’insuffisance de la procédure de valorisation établie par LMBO, le défaut de traçabilité et de justification des paramètres et informations retenus ainsi que des carences dans la mise en œuvre de la méthode de valorisation. Elles en déduisent que LMBO n’a pas respecté ses obligations relatives au processus de valorisation des actifs détenus par les FCPR gérés et, ainsi, a méconnu les dispositions des articles L. 533-10 et L. 533-10-1 du code monétaire et financier et des articles 313-1, 313-59-1 et 314-3-1 du règlement général de l’AMF.

L’article L. 533-10 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur du 1er novembre 2007 au 28 juillet 2013, disposait : « Les prestataires de services d’investissement doivent : / 1. Mettre en place des règles et procédures permettant de garantir le respect des dispositions qui leur sont applicables » ; que cet article dans sa version applicable à compter du 28 juillet 2013 prévoit que « Les prestataires de services d’investissement doivent : / 1. Mettre en place des règles et procédures permettant de garantir le respect des dispositions qui leur sont applicables, y compris celles prévues à l’article 11 du règlement (UE) n° 648/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012 sur les produits dérivés de gré à gré, les contreparties centrales et les référentiels centraux ».

L’article 313-1 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur au 1er novembre 2007 et non modifiée depuis, énonce : « Le prestataire de services d’investissement établit et maintient opérationnelles des politiques, procédures et mesures adéquates visant à détecter tout risque de non-conformité aux obligations professionnelles mentionnées au II de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier ainsi que les risques en découlant et à minimiser ces risques. / Pour l’application de l’alinéa précédent, le prestataire de services d’investissement tient compte de la nature, de l’importance, de la complexité et de la diversité des services d’investissement qu’il fournit et des activités qu’il exerce ».

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Le 2° de l’article L. 533-10-1 du code monétaire et financier, dans sa version applicable au 3 août 2011 et non modifiée depuis sur ce point dans un sens plus favorable, prévoit que les sociétés de gestion de portefeuille emploient « Une méthode permettant une évaluation précise et indépendante des positions et opérations du portefeuille géré […] » ;

L’article 313-59-1 du règlement général de l’AMF, dans sa version en vigueur du 21 octobre 2011 au 20 décembre 2013, disposait : « Pour l’activité de gestion d’OPCVM, la société de gestion de portefeuille : / 2° Met en place des procédures appropriées pour assurer l’évaluation correcte et précise de l’actif et du passif de l’OPCVM, dans le respect des dispositions de l’article L. 214-17-1 du code monétaire et financier ».

Dans sa version applicable à compter du 21 décembre 2013 et non modifiée depuis, cet article prévoit que « Pour l’activité de gestion d’un placement collectif mentionné à l’article 311-1 A, la société de gestion de portefeuille : / 2° Met en place des procédures appropriées pour assurer l’évaluation correcte et précise de l’actif et du passif du placement collectif mentionné à l’article 311-1 A, dans le respect des dispositions de l’article L. 214-17-1 ou L. 214-24-50 du code monétaire et financier ».

L’article 314-3-1 du règlement général de l’AMF, dans sa version applicable du 21 octobre 2011 au 20 décembre 2013, énonçait : « Pour l’activité de gestion d’OPCVM, le prestataire de services d’investissement : / 4° Garantit l’utilisation de modèles de formation des prix et de systèmes d’évaluation justes, corrects et transparents pour les OPCVM qu’il gère afin de respecter son obligation d’agir au mieux des intérêts des porteurs de parts ou actionnaires. Il doit pouvoir démontrer que les portefeuilles des OPCVM ont été évalués avec précision ». Cet article n’a pas été modifié dans un sens moins sévère sur ce point par l’arrêté du 11 décembre 2013 qui a remplacé le terme « OPCVM » par « placements collectifs mentionnés à

l’article 311-1 A ».

Sur l’insuffisance de la procédure de valorisation établie par LMBO

La procédure établie par LMBO prévoyait une valorisation trimestrielle des investissements qui recourait à la méthode dite des flux futurs actualisés.

Comme l’ont constaté les contrôleurs, cette procédure ne précisait ni la formule de calcul utilisée, ni le taux d’actualisation appliqué, ni la nature exacte des flux à actualiser, ni l’horizon de projection des flux de trésorerie, ni l’origine des données servant à déterminer ces projections, ni les modalités de conservation des informations utilisées.

LMBO n’a pas contesté les lacunes de sa procédure et s’est prévalue des ajustements qu’elle y a apportés en juin 2015.

Ainsi, les carences de la procédure de valorisation des actifs détenus par les fonds gérés par LMBO sont établies pour la période précédant sa mise à jour en juin 2015.

Sur le défaut de traçabilité et de justification des paramètres et informations utilisés

La mission de contrôle a constaté que les feuilles de calcul utilisées pour valoriser les participations intégraient des données dont il n’était pas possible d’identifier la source. Elle a relevé, lors de son examen de la valorisation de deux participations présentes en proportion importante dans au moins un FCPR géré au 31 décembre des années 2011 à 2013 et au 30 juin 2014, que les hypothèses sous-jacentes aux projections de flux de trésorerie n’étaient ni « tracées » ni justifiées.

LMBO n’a pas contesté que certains paramètres utilisés pour les valorisations n’étaient étayés par aucune pièce ou analyse justificative, se bornant à indiquer, d’une part, qu’en l’absence de données fiables en provenance des entreprises évaluées, elle devait parfois « modifier ou élaborer » certains paramètres intégrés à ses calculs et, d’autre part, que la valorisation d’une société non cotée était délicate, notamment dans un contexte d’incertitude économique.

Il résulte de ce qui précède que l’absence de traçabilité et de justification des données utilisées par LMBO pour valoriser les actifs des fonds gérés est établie.

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Sur les carences dans la mise en œuvre de la méthode de valorisation

Lors de son examen de la valorisation des deux participations évoquées plus haut, la mission de contrôle a relevé que la méthode de valorisation n’était pas appliquée de manière constante, notamment que l’horizon des projections de flux de trésorerie était fixé selon les cas à huit, dix ou onze années sans aucune logique apparente, et que les feuilles de calculs comportaient de nombreuses erreurs de formules ayant, par exemple, conduit, pour l’un des FCPR, à des écarts de valorisation allant de 0,7% à 69,5% de l’actif net de celui-ci.

Elle a souligné que, de manière générale, la méthode de valorisation utilisée par LMBO aboutissait à une très forte variabilité des valorisations des participations des fonds. Par exemple, une baisse de 47 points de base du taux d’intérêt entre les mois de juin et de septembre 2012 a conduit à une hausse de 80% de la valorisation d’une participation détenue par l’un des FCPR.

LMBO n’a pas contesté les erreurs de calcul relevées par les contrôleurs et a reconnu dans ses observations en réponse à la notification de griefs que le taux d’actualisation qu’elle utilisait, égal à deux fois le taux d’intérêt des obligations assimilables du trésor français (OAT) à 10 ans, avait progressivement perdu sa pertinence à partir de 2008 et conduit à des écarts importants de valorisation, raison pour laquelle le choix avait été fait, à partir du 31 décembre 2014, de le déconnecter de celui des OAT à 10 ans pour le fixer à 5%.

Il est en conséquence établi que LMBO a manqué de rigueur et de précision dans son travail de valorisation.

Il résulte de l’ensemble des éléments qui précèdent que LMBO n’a pas mis en place « des procédures appropriées pour assurer l’évaluation correcte et précise de l’actif […] du placement collectif », méconnaissant ainsi les dispositions de l’article 313-59-1 du règlement général de l’AMF, n’a pas employé « une méthode permettant une évaluation précise […] des positions et opérations du portefeuille géré […] », en violation de l’article L. 533-10-1 du code monétaire et financier, et n’a pas utilisé des « systèmes d’évaluation justes, corrects et transparents pour les placements collectifs […] qu’[elle] gère afin de respecter son obligation d’agir au mieux des intérêts des porteurs de parts ou actionnaires » et de « démontrer que les portefeuilles des placements collectifs […] [avaient] été évalués avec précision », en violation de l’article 314-3-1 du règlement général de l’AMF.

Ces manquements caractérisent également une méconnaissance des obligations générales de LMBO relatives à son devoir de « mettre en place des règles et procédures permettant de garantir le respect des dispositions qui leur sont applicables » ainsi que d’établir et maintenir « opérationnelles des politiques, procédures et mesures adéquates visant à détecter tout risque de non-conformité aux obligations professionnelles mentionnées au II de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier […] » prévues, respectivement, par les articles L. 533-10 du code monétaire et financier et 313-1 du règlement général de l’AMF.

Les griefs notifiés relatifs au processus de valorisation des actifs détenus par les FCPR gérés par LMBO sont donc caractérisés.

III. Sur l’imputabilité des manquements

En sa qualité de société de gestion de portefeuille, LMBO est débitrice, au premier chef, des obligations professionnelles édictées par les dispositions qui fondent les manquements relevés.

Entre septembre 2011 et avril 2015, M. A, président de LMBO, avait la qualité de dirigeant au sens des articles L. 532-9, II 4° du code monétaire et financier et 312-6 du règlement général de l’AMF et, à ce titre, était soumis à l’obligation faite aux « dirigeants » en application de l’article 313-6 du règlement général de l’AMF de s’assurer que « le prestataire de services d’investissement se conforme à ses obligations professionnelles ». Les manquements relevés à l’encontre de LMBO lui sont donc également imputables.

Au cours de la même période, M. B avait la qualité de dirigeant au sens des mêmes textes. Les manquements relevés à l’encontre de LMBO lui sont donc également imputables, peu important qu’il n’en ait pas été le mandataire social.

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SANCTIONS ET PUBLICATION

L’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010, inchangée depuis la date des faits sur les points applicables à LMBO et ses dirigeants, dispose en son II : « La Commission des sanctions peut, après une procédure contradictoire, prononcer une sanction à l’encontre des personnes suivantes : a) Les personnes mentionnées aux 1° à 8° et 11° à 17° du II de l’article L. 621-9, au titre de tout manquement à leurs obligations professionnelles définies par les règlements européens, les lois, règlements et règles professionnelles approuvées par l’Autorité des marchés financiers en vigueur […] ; b) Les personnes physiques placées sous l’autorité ou agissant pour le compte de l’une des personnes mentionnées aux 1° à 8° et 11° à 17° du II de l’article L. 621-9 au titre de tout manquement à leurs obligations professionnelles définies par les lois, règlements et règles professionnelles approuvées par l’Autorité des marchés financiers en vigueur […] ».

Le III du même article énonce : « Les sanctions applicables sont : a) Pour les personnes mentionnées au 1° à 8°, 11°, 12°, 15° à 17° du II de l’article L. 621-9, l’avertissement, le blâme, l’interdiction à titre temporaire ou définitif de l’exercice de tout ou partie des services fournis, la radiation du registre mentionné à l’article L. 546-1 ; la commission des sanctions peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 100 millions d’euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés ; les sommes sont versées au fonds de garantie auquel est affiliée la personne sanctionnée ou, à défaut, au Trésor public ; b) Pour les personnes physiques placées sous l’autorité ou agissant pour le compte de l’une des personnes mentionnées au 1° à 8°, 11°, 12°, 15° à 17° du II de l’article L. 621-9, l’avertissement, le blâme, le retrait temporaire ou définitif de la carte professionnelle, l’interdiction à titre temporaire ou définitif de l’exercice de tout ou partie des activités ; la commission des sanctions peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 15 millions d’euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés en cas de pratiques mentionnées aux c et d du II ou à 300 000 euros ou au quintuple des profits éventuellement réalisés dans les autres cas ; les sommes sont versées au fonds de garantie auquel est affiliée la personne morale sous l’autorité ou pour le compte de qui agit la personne sanctionnée ou, à défaut, au Trésor public ». Le montant de la sanction doit être fixé en fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits éventuellement tirés de ces manquements. Il doit aussi être tenu compte de la situation patrimoniale des personnes mises en cause.

Les manquements sont graves par nature. Ils sont multiples et ont persisté même après que l’attention de LMBO a été attirée sur la nécessité d’y mettre fin. Ils caractérisent une légèreté et un manque de respect de la règlementation blâmables.

M. A, président de LMBO et gérant financier, expérimenté, n’a admis que tardivement la nécessité de régulariser la situation de la société en matière de procédures, de moyens matériels et humains et de valorisation des actifs détenus par les FCPR. Il doit lui être infligé une sévère sanction administrative.

Le chiffre d’affaires de LMBO pour l’exercice 2015 a été de 1 million d’euros et son résultat opérationnel de l’ordre de 700 000 euros.

Interrogés par le rapporteur sur leur situation financière personnelle, M. A et M. B se sont bornés à indiquer, pour le premier, qu’il détenait des actifs mobiliers et immobiliers et n’avait pas de dettes et, pour le second, qu’il possédait très peu d’actifs et aucun bien immobilier et que ses revenus se limitaient au salaire versé par la société Leviers de Contrôle-LC. En séance, ils n’ont fourni aucune autre précision.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, il sera prononcé à l’encontre de LMBO une sanction pécuniaire de 150 000 euros et un blâme, de M. A une sanction pécuniaire de 60 000 euros et une interdiction d’une année d’exercer dans une société de gestion, ni une activité de dirigeant, ni celle de gérant financier, et de M. B une sanction pécuniaire de 20 000 euros et un avertissement.

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Aux termes de l’article L. 621-15 V du code monétaire et financier « La décision de la commission des sanctions est rendue publique dans les publications, journaux ou supports qu’elle désigne, dans un format proportionné à la faute commise et à la sanction infligée. Les frais sont supportés par les personnes sanctionnées. Toutefois, lorsque la publication risque de perturber gravement les marchés financiers ou de causer un préjudice disproportionné aux parties en cause, la décision de la commission peut prévoir qu’elle ne sera pas publiée ».

La publication de la présente décision ne risque ni de perturber gravement les marchés financiers ni de causer un préjudice disproportionné aux mis en cause. Elle sera donc ordonnée sans anonymisation.

PAR CES MOTIFS,

Et après en avoir délibéré sous la présidence de Mme Marie-Hélène Tric, Présidente de la Commission des sanctions, et par, MM. Bernard Field, Bruno Gizard, Mme Sophie Schiller et M. Miriasi Thouch, membres de la Commission des sanctions, en présence du secrétaire de séance,

PRONONCE à l’encontre de :

— la société LMBO un blâme et une sanction pécuniaire de 150 000 € (cent cinquante mille euros) ;

- M. A une interdiction d’exercer dans une société de gestion, ni une activité de dirigeant, ni celle de gérant financier, pendant une année et une sanction pécuniaire de 60 000 € (soixante mille euros) ;

- M. B un avertissement et une sanction pécuniaire de 20 000 € (vingt mille euros) ;

DIT que la présente décision sera publiée sur le site Internet de l’Autorité des marchés financiers.

Fait à Paris, le 17 novembre 2016

Le Secrétaire de séance,

La Présidente,

Marc-Pierre Janicot

Marie-Hélène Tric

Cette décision peut faire l’objet d’un recours dans les conditions prévues à l’article R. 621-44 du code monétaire et financier.

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  • 1. Les faits
  • La société LMBO (ci-après « LMBO »), constituée sous la forme de société par actions simplifiée à capital variable, est une société de gestion agréée depuis le 1er décembre 2005 pour la gestion sous mandat et la gestion collective à destination d’inve…
  • Elle assure la gestion de plusieurs Fonds Communs de Placement à Risque (ci-après « FCPR ») investissant majoritairement dans des sociétés non cotées. Entre septembre 2011 et avril 2015, quatre FCPR ou compartiments de FCPR, créés en 2009, étaient en …
  • LMBO connaît depuis plusieurs années une baisse de son activité qui l’a conduite à réduire ses frais de fonctionnement : entre 2010 et 2014, le montant des encours gérés a diminué de 97,4 à 58,8 millions d’euros et les charges d’exploitation comptable…
  • M. A en est, par l’intermédiaire d’une société dont il détient l’intégralité du capital, l’actionnaire principal, le président et l’un des gérants financiers. Son neveu, son fils ainé et son fils cadet y ont exercé ou y exercent des fonctions de géran…
  • Au mois de juin 2016, l’effectif de LMBO était de quatre personnes.
  • 2. La procédure
    • I. Sur les griefs relatifs aux moyens matériels, humains et financiers de LMBO
  • Le chiffre d’affaires de LMBO pour l’exercice 2015 a été de 1 million d’euros et son résultat opérationnel de l’ordre de 700 000 euros.

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Décision de la Commission des sanctions du 17 novembre 2016 à l'égard de la société LMBO et de MM. A et B