Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10e chambre, 1er décembre 2016, n° 15/17742

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 10e ch., 1er déc. 2016, n° 15/17742
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 15/17742
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Marseille, TGI, 7 septembre 2015, N° 14/00107
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

10e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 01 DECEMBRE 2016

N°443/2016

Rôle N° 15/17742

X Y

C/

MINISTERE PUBLIC AIX EN PROVENCE

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES D’ACTES DE TERRORIS
ME

Grosse délivrée

le :

à :

Me Z A

Me B C

Décision déférée à la Cour :

Décision rendue le 08 Septembre 2015 par la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions Pénales près le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE, enregistré au répertoire général sous le n° 14/00107.

APPELANT

Monsieur X Y

né le XXX à XXX,

demeurant XXX

représenté par Me Z
A, avocat au barreau de
MARSEILLE

INTIMES

FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES TERROSME ET
D’AUTRES
INFRACTIONS,

dont le siège social est : 64 rue Defrance – 94300
VINCENNES

représentée par Me B
C de la SCP C & ASSOCIES, avocat au barreau

d’AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Raphaëlle MAHE
DES PORTES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 18 Octobre 2016 en chambre du conseil en vertu des articles 433 du code de procédure civile et 706-7 du code de procédure pénale. Conformément à l’article 785 du Code de
Procédure Civile, Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER,
Conseiller , a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier GOURSAUD, Président

Madame Françoise GILLY-ESCOFFIER,
Conseiller

Madame Anne VELLA, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame Sylvaine
MENGUY.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 01 Décembre 2016.

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l’affaire a été régulièrement communiquée.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 01
Décembre 2016.

Signé par Monsieur Olivier GOURSAUD, Président et Madame Sylvaine MENGUY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA
PROCÉDURE

Le 2 mai 2011 à Marseille M. D E a tiré par arme à feu sur Antoine Y âgé de 15 ans ; ce dernier est décédé.

Par arrêt du 10 octobre 2014 la cour d’assises des
Bouches-du-Rhône a condamné M. F pour violences volontaires avec arme ayant entraîné la mort sans intention de la donner.

Par requête enregistrée le 28 janvier 2014 M. X Y, Mme G H veuve
Y, Mme I Y, M. J Y et Mme G Y ont saisi la commission d’indemnisation des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions (CIVI) du tribunal de grande instance de Marseille pour obtenir l’indemnisation de leur préjudice d’affection subi à la suite du décès de leur neveu, petit-fils, fils et frère.

Par jugement du 8 septembre 2015 la CIVI a :

— dit que Antoine Y a commis une faute de nature à réduire de moitié l’indemnisation de ses ayants droit,

— débouté M. X
Y (oncle de la victime), de sa demande,

— alloué les sommes suivantes à :

° Mme G H veuve Y (grand-mère) : 10'000

° Mme I Y (mère) : 15'000

° M. J Y (frère) : 7 000

° Mme G Y (s’ur) : 7 000

— dit que ces sommes seront directement versées par le
Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI) selon les modalités prévues par l’article R. 50-24 du code de procédure pénale,

— dit que les dépens resteront à la charge de l’État.

Pour statuer ainsi la CIVI a considéré qu’il était incontestable que le jour des faits Antoine Y s’était rendu à trois reprises sur le terrain de la société GSM et fait un cambriolage, qu’il avait ainsi commis une faute à l’origine de son dommage puisque les tirs avaient été effectués par M. F en raison de ce cambriolage, que toutefois il n’était pas établi qu’il avait vu cette arme lorsqu’il avait pénétré dans les lieux de sorte qu’il avait pu ne pas avoir conscience du danger réellement encouru, d’autant qu’il n’avait que 14 ans.

Elle a estimé par ailleurs que M. X Y oncle de la victime ne justifiait pas de liens d’affection particuliers avec son neveu.

Par déclaration du 8 octobre 2015, M. Y a interjeté appel partiel de cette décision limité en ses dispositions ayant retenu que Antoine Y a commis une faute de nature à réduire de moitié l’indemnisation de ses ayants droits et l’ayant débouté de sa demande.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES
PARTIES

M. Y demande dans ses conclusions du 8 janvier 2016, en application des articles 706-3 et suivants du code de procédure pénale, infirmant la décision, de :

— ordonner le versement à la charge du FGTI de la somme de 50'000 au titre de son préjudice d’affection,

— statuer ce que de droit sur les dépens.

Il fait valoir que l’imprévisibilité de l’infraction commise par M. F, étranger à l’infraction d’origine, soit le vol dans un local non occupé au moment des faits, exclut toute conscience par
Antoine Y des risques encourus d’autant qu’il était très jeune et que par conséquent sa faute ne peut pas être retenue pour limiter ou exclure l’indemnisation de ses ayants droit.

Il indique par ailleurs que la famille Y est très soudée, que le père d’Antoine Y a quitté le domicile familial peu de temps après sa naissance, qu’ainsi plus qu’un oncle il était un père

de substitution pour cet enfant, qu’Antoine Y se rendait tous les jours à son domicile, qu’ils étaient très proches et que des liens d’affection particuliers les unissaient, que d’ailleurs son préjudice d’affection a été reconnu par la cour d’assises.

Le FGTI demande dans ses conclusions du 17 février 2016, en application des articles 706-3 et suivants du code de procédure pénale, confirmant le jugement, de :

— débouter M. Y de ses demandes,

— laisser les dépens à la charge de l’État.

Il soutient que la CIVI est une juridiction autonome qui doit apprécier le comportement de la victime et non celui de l’auteur de l’infraction et que la solidarité nationale doit bénéficier aux victimes d’infractions et à leurs ayants droit et non aux personnes qui se placent par leur activité délictuelle dans une situation à risque, qu’en l’espèce Antoine
Y a été blessé mortellement alors qu’il ressortait d’un local dans lequel il était entré par effraction pour y dérober du matériel informatique, qu’il s’était déjà rendu sur les lieux à deux reprises pour un repérage dans le cadre duquel il avait été surpris par M. F qui était armé, qu’ainsi en retournant dans ce local pour un vol, alors qu’il savait qu’une personne armée qui l’avait repéré surveillait et protégeait celui-ci, il s’est lui-même placé, par ses choix dangereux et inconscients, dans une situation dans laquelle il a concouru à son propre dommage.

Il ajoute que M. Y ne rapporte pas la preuve de la réalité des liens d’affection particuliers qu’il aurait partagés avec Antoine Y.

Le Ministère Public à qui l’affaire a été communiquée le 25 février 2016 a déposé un avis le 6 avril 2016, porté à la connaissance des parties, par lequel il conclut à la confirmation du jugement.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En vertu de l’article 706-3 du code de procédure pénale toute personne ayant subi un préjudice résultant de faits, volontaires ou non, présentant le caractère matériel d’une infraction peut obtenir la réparation intégrale des dommages qui résultent des atteintes à la personne notamment lorsqu’elles ont entraîné la mort, une incapacité permanente ou une incapacité totale de travail personnel égale ou supérieure à un mois ; cette réparation peut être refusée ou son montant réduit à raison de la faute de la victime.

En l’espèce, il ressort du procès-verbal d’interrogatoire de M. F par le juge d’instruction de
Marseille en date du du 23 mars 2012 et de l’ordonnance de mise en accusation devant la cour d’assises de M. E de ce même magistrat du 28 novembre 2013, que :

— le jour des faits entre 16 et 17 heures deux jeunes dont
Antoine Y sont venus à deux reprises à proximité du local de la société GSM en escaladant un grillage, que lors du deuxième passage M. F depuis sa fenêtre leur a dit 'partez partez’ en leur montrant une arme,

— lors du troisième passage Antoine Rodrigue et son camarade ont défoncé la porte du local et au moment où ils repartaient et passaient le grillage avec un objet dans les mains, M. F a tiré,

— Abdelmajid Mahmoudi ami de Antoine Rodrigue a déclaré avoir pris la place de Eddy Taboubi qui n’avait pas voulu faire le cambriolage car lors d’un repérage il avait vu un homme avec une carabine qui les visait en leur enjoignant de partir et Antoine Y tout en le sollicitant lui avait exprimé sa réticence.

Il résulte de ces éléments que Antoine
Y qui a cambriolé un local en sachant de surcroît que

celui-ci était situé à proximité du lieu d’habitation d’un voisin qui l’avait remarqué à l’occasion de chacun de ses deux repérages et lui avait enjoint de partir en lui montrant une arme, a commis une faute en lien de cause à effet certain et direct avec l’infraction dont il a fait l’objet, l’usage de son arme par M. E ne pouvant être considéré, eu égard au comportement qu’il avait adopté lors des repérages, comme totalement imprévisible.

Compte tenu de sa nature et de sa gravité cette faute si elle n’est pas de nature à exclure tout droit à indemnisation de ses ayants droit doit le réduire dans une proportion qu’il convient de fixer à 50 %.

En revanche M. Y n’a communiqué aucune pièce de nature à établir la réalité du préjudice d’affection dont il fait état, le seul lien de parenté, non contesté, avec Antoine Y, n’étant pas suffisant à cet égard.

M. Y doit en conséquence être débouté de ses demandes.

Les dépens d’appel seront supportés par le
Trésor Public en application des dispositions des articles
R 91 et 93 II 11° du code de procédure pénale.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant dans les limites de sa saisine,

— Confirme le jugement déféré,

— Dit que les dépens d’appel sont laissés à la charge du Trésor Public.

Le greffier Le président

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