Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-6, 26 mars 2021, n° 18/01165

  • Ceca·
  • Salarié·
  • Forfait annuel·
  • Travail·
  • Horaire·
  • Rémunération·
  • Honoraires·
  • Rupture conventionnelle·
  • Expert·
  • Cadre

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4-6, 26 mars 2021, n° 18/01165
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 18/01165
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Toulon, 17 décembre 2017, N° F16/00702
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-6

ARRÊT AU FOND

DU 26 MARS 2021

N° 2021/ 143

Rôle N° RG 18/01165 – N° Portalis DBVB-V-B7C-BBZ5W

Y X

C/

SARL CABINET D’EXPERTISE CONSTRUCTION ET ASSISTANCE – C ECA

Copie exécutoire délivrée

le : 26/03/2021

à :

Me Sandrine GUIDICELLI, avocat au barreau de TOULON

Me Martine PANOSSIAN, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULON en date du 18 Décembre 2017 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F16/00702.

APPELANT

Monsieur Y X, né le […] à […], demeurant […]

Représenté par Me Sandrine GUIDICELLI, avocat au barreau de TOULON

INTIMEE

SARL CABINET D’EXPERTISE CONSTRUCTION ET ASSISTANCE – CECA, demeurant […]

Représentée par Me Martine PANOSSIAN, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

Les parties ont été avisées de ce que l’affaire serait jugée selon la procédure sans audience prévue par l’article 6 de l’ordonnance n°2020-1400 du 18 novembre 2020 et ne s’y sont pas opposées dans le délai de quinze jours.

COMPOSITION DE LA COUR

Madame Christine LORENZINI, Présidente de Chambre

Monsieur Thierry CABALE, Conseiller

Mme Solange LEBAILE, Conseiller

qui en ont délibéré.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Mars 2021,

Signé par Madame Christine LORENZINI, Présidente de Chambre et Mme Suzie BRETER, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Aux termes d’un contrat de travail à durée indéterminée en date du 19 septembre 2005, Monsieur Y X a été engagé par la Sarl CECA, cabinet d’expertise en construction, à compter du 1er janvier 2006, en tant qu’expert auprès des compagnies d’assurance, statut cadre, moyennant une rémunération variable. Le contrat de travail a été rompu le 4 juin 2016 à la suite de la signature d’une rupture conventionnelle.

Le 15 septembre 2016, le salarié a saisi de diverses demandes salariales et indemnitaires le conseil de prud’hommes de Toulon qui, par jugement en date du 18 décembre 2017, l’a débouté de toutes ses demandes et condamné à verser à la Sarl CECA la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Le 19 janvier 2018, dans le délai légal, le salarié a relevé appel de ce jugement.

Par dernières conclusions du salarié du 16 octobre 2018, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions, il est demandé de :

Dire et entendre juger que la référence à l’emploi de Monsieur Y X dans le cadre d’un forfait jours apparaissait explicitement sur les bulletins de salaire établis par la sarl CECA depuis plusieurs années et en tout état de cause sur les trois dernières années ayant précédé la rupture conventionnelle de son contrat de travail;

Dire et entendre juger qu’en vertu de l’article 4.1 de l’accord du 22 juin 1999 sur la durée du travail annexé à la convention collective nationale «bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs-conseils et sociétés de conseil'', seuls les salariés relevant au minimum de la position 3 de la grille de classification des cadres peuvent être soumis à un tel forfait;

Dire et entendre juger que les mentions des bulletins de paie font foi jusqu’à preuve contraire, en l’absence de toute référence horaire sur le contrat de travail initial de Monsieur X, la société CECA n’établissant en aucune manière qu’il aurait travaillé de manière effective selon une durée moindre;

Dire et entendre juger que celui-ci aurait donc du être classé, a minima, en position 3.1, coefficient 170, de la grille des cadres et bénéficier de l’application de la rémunération annuelle minimale correspondant à ce niveau, majorée de 20 % en application de l’article 4.4 de l’accord du 22 juin 1999;

Dire et entendre juger que Monsieur X, injustement classé par la Société CECA en position 2.1, peut donc prétendre à une revalorisation de son niveau de qualification et à des rappels de salaires sur la base de la position 3.1, majorés de 20% du fait de son emploi dans le cadre d’un forfait jours, outre l’indemnité de congés payés afférente;

Dire et entendre juger que cette revalorisation et ces rappels de salaires doivent également entraîner les conséquences de droit en terme de calcul de son indemnité spécifique de rupture conventionnelle;

Dire et entendre juger qu’en violation des dispositions du contrat de travail de Monsieur X, la Sarl CECA a injustement pratiqué des retenues sur ses commissions en imputant le montant de ses frais de déplacement en Corse sur l’assiette de ces commissions, constituée par le chiffre d’affaires facturé sur les dossiers d’expertise qui lui étaient confiés.

En conséquence,

En tout état de cause:

Réformer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Toulon en date du 18 décembre 2017 dans l’ensemble de ses dispositions;

Condamner la sarl CECA à payer à Monsieur Y X les sommes suivantes :

—  9.688,60 € bruts à titre de rappel de rémunération conventionnelle garantie sur l’année 2013,

—  10.745,47 € bruts au titre de rappel de rémunération conventionnelle garantie sur l’année 2014,

—  10.115,34 € bruts à titre de rappel de rémunération conventionnelle garantie sur l’année 2015,

—  7.708,50 € bruts à titre de rappel de rémunération conventionnelle garantie de janvier à mai 2016,

—  3.825,79€ bruts à titre d’indemnité de congés payés sur les rappels de rémunération conventionnelle,

—  2779,29 € à titre de rappel d’indemnité de rupture conventionnelle,

Condamner la sarl CECA à remettre à Monsieur X un bulletin de salaire de régularisation ainsi qu’une attestation Pôle Emploi rectifiée conformément aux termes du jugement, cette attestation devant nécessairement comporter les mentions relatives aux droits à congés acquis et non pris à la date de rupture du contrat (nombre de jours de congés et montant de l’indemnité correspondante);

Ordonner la remise de ces documents sous astreinte de 50 € par jour de retard à l’expiration d’un délai de huit jours suivant la notification de l’arrêt à intervenir, en se réservant la liquidation éventuelle d’une telle astreinte;

Condamner la société CECA à payer à Monsieur Y X une indemnité de 2.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile;

Condamner la sarl CECA aux entiers dépens de l’instance, en ce compris les éventuels frais d’exécution du jugement à intervenir;

A titre subsidiaire,

Condamner la sarl CECA à payer à Monsieur X une somme de 2.252,96 € bruts à titre de rappel de commissions pour déductions injustifiées au titre des frais professionnels;

Condamner la sarl CECA à remettre à Monsieur X un bulletin de salaire de régularisation ainsi qu’une attestation Pôle Emploi rectifiée conformément aux termes du jugement, cette attestation devant nécessairement comporter les mentions relatives aux droits à congés acquis et non pris à la date de rupture du contrat (nombre de jours de congés et montant de l’indemnité correspondante);

Ordonner la remise de ces documents sous astreinte de 50 € par jour de retard à l’expiration d’un délai de huit jours suivant la notification de l’arrêt à intervenir, en se réservant la liquidation éventuelle d’une telle astreinte;

Condamner la société CECA à payer à Monsieur Y X une indemnité de 2.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile;

Condamner la sarl CECA aux entiers dépens de l’instance, en ce compris les éventuels frais d’exécution du jugement à intervenir.

Le salarié fait valoir que : ses demandes découlant d’un forfait de deux cent dix-huit jours travaillés sur l’année ne pouvaient être rejetées par le premier juge quand celui-ci, dans le cadre d’une répartition de la charge de la preuve, aurait dû déduire son existence de sa mention sur les bulletins de paie durant plusieurs années, et se prononcer sur l’inopposabilité de toute autre référence horaire et l’adéquation d’un tel forfait aux conditions d’exercice de sa mission d’expert; l’absence de toute référence à un horaire ou une durée du travail précise dans son contrat de travail, dont l’employeur ne peut se prévaloir, interdit tout passage d’un horaire libre à un horaire imposé par la seule signature d’ un courrier non daté, ainsi ne pouvant contredire les mentions portées sur les bulletins de paie de mars 2007 à décembre 2015, et sans respecter la procédure de l’article L 1222-6 du code du travail; le temps de travail de trente-cinq heures dont se prévaut l’employeur n’est pas adapté à ses missions qui étaient techniquement complexes et quantitativement élevées, devant se déplacer sur plusieurs départements, jusqu’en Corse, nécessitant des rendez-vous, des échanges écrits, des réponses à dires, du travail d’analyse, du travail de rédaction de comptes rendus intermédiaires et/ou des rapports définitifs, outre diverses tâches de gestion administrative accomplies en collaboration avec les secrétaires; les copies d’agendas faisant mention de ses seuls rendez-vous ne peuvent attester de l’ensemble des temps durant lesquels il se trouvait effectivement à la disposition de son employeur; la classification minimale conventionnelle pour être soumis à un forfait en jours doit lui être appliquée avec ses incidences salariales et indemnitaires; à titre subsidiaire, l’employeur ne pouvait déduire de l’assiette de calcul de ses droits à commission, en violation des stipulations contractuelles, les frais professionnels qui lui étaient remboursés sur justificatifs pour ses missions en Corse; il doit lui être réglé le montant de cette retenue à hauteur de 33% du montant total de ces frais.

Par dernières conclusions du 16 juillet 2018, auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et prétentions, la société CECA demande à la cour de:

— confirmer en tous points le jugement entrepris,

en conséquence,

— constater l’absence de conclusion d’une convention de forfait en jours entre les parties,

— constater que Monsieur X n’a de plus, dans les faits, jamais été soumis à un tel forfait,

— constater en conséquence que la demande en revalorisation de la classification conventionnelle de Monsieur X est injustifiée;

— constater que les frais professionnels ont été valablement déduits de l’assiette de commissionnement de Monsieur X;

dans ces conditions,

— débouter Monsieur X de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions;

— condamner Monsieur X au paiement d’une somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;

— condamner Monsieur X aux entiers dépens.

La société fait valoir que : la convention de forfait en jours ne se présume pas et doit résulter de la commune volonté des parties formalisée dans le cadre d’une convention écrite et détaillée; le salarié n’a jamais été soumis à un tel forfait qui n’a été prévu par aucun écrit et dont la mention sur les bulletins de paie procède d’une simple erreur matérielle confirmée par l’expert comptable qui les a établis à compter de 2009 à la suite d’un premier prestataire; le salarié n’en a revendiqué l’existence qu’en mars 2016 à un moment où il souhait obtenir une rupture conventionnelle; le contrat de travail n’impose aucun horaire en raison de la nature même des missions d’un expert soumis aux aléas des expertises sans pour autant envisager un dépassement de la durée légale du travail dont le respect est rappelé au salarié par un courrier remis en main propre qui remonte nécessairement à une période antérieure à juillet 2008, date à laquelle elle a cessé toute collaboration avec le cabinet RASE dont le nom y est mentionné en entête; l’article L.1222-6 invoqué n’est pas applicable au cas d’espèce puisqu’il ne s’agit pas d’une modification pour un motif économique; le temps de travail effectif du salarié, ne pouvant inclure les trajets ni des astreintes, ni du travail administratif réalisé par des secrétaires, n’a jamais excédé trente-cinq heures hebdomadaires, ce qui se déduit des agendas du salarié de 2013 à 2016 qui font état par ailleurs d’autres occupations au service de sa seconde activité professionnelle dans le cadre d’une société que ce dernier a créée en mai 2015, ce qui a motivé sa demande d’une modification de ses horaires à la baisse, l’échec dans ce contexte de ses tentatives de modification des jours travaillés étant à l’origine de sa demande d’une rupture conventionnelle; l’horaire forfaitaire, adapté aux fonctions de l’expert, n’était pas extensible au bon vouloir de ce dernier qui n’a jamais formulé de demande à ce titre en raison de l’adéquation entre le temps de travail prévu et les missions confiées qui ne justifiaient pas de tels dépassements eu égard notamment aux heures facturées quant à la rédaction des rapports; la demande subsidiaire n’est pas plus fondée puisque le salarié a perçu ce à quoi il avait droit au titre de sa rémunération variable qui a été calculée sur les honoraires hors taxes facturés et ce, dans le strict respect des stipulations contractuelles qui n’envisageaient en rien d’y inclure des frais facturés, fussent-ils soumis à la taxe sur la valeur ajoutée.

L’instruction a été déclarée close par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 08 janvier 2021.

Par courrier en date du 09 Décembre 2020, la Présidente de la chambre a fait application des dispositions de l’article 6 de l’ordonnance n°2020-1400 du 18 novembre 2020, sans opposition des avocats des parties dans le délai de quinze jours suivant ce courrier.

MOTIFS:

Sur le principal:

Il résulte des stipulations claires et dépourvues d’ambiguïté du contrat de travail conclu le 19 septembre 2005 que Monsieur X, qui sera classé suivant la Convention collective Syntec en tant qu’ingénieur statut cadre position 1.1, puis 2.1, coefficient 115, à compter de janvier 2009, devait percevoir une rémunération constituée d’un 'salaire brut mensuel fixé à 30% des honoraires émis HT + 3% des honoraires émis HT au titre des congés payés, soit un total de 33% des honoraires émis HT sans pouvoir être inférieur au minimum de la convention collective.', cette rémunération étant qualifiée de 'forfaitaire’ et tenant compte 'notamment des éventuels dépassements d’honoraires

inhérents à la nature des fonctions et des responsabilités exercées.'

Alors que l’absence de validité d’une telle clause prévoyant une rémunération variable n’est pas invoquée au regard du fait qu’elle doit être fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de l’employeur, ne peut faire peser le risque de l’entreprise sur le salarié ni avoir pour effet de réduire la rémunération du salarié en dessous des minima légaux et conventionnels, le salarié soutient qu’il a été soumis à un forfait annuel de deux cent dix-huit jours qui ne résulterait ni de cette même clause qui n’est pas l’expression d’une volonté commune de soumettre le salarié à un forfait et ne comporte pas les mentions, ne serait-ce que le nombre de jours, exigées par les dispositions légales et l’accord Syntec applicable, non argué de nullité, ni d’aucun autre écrit signé par les parties, mais de la mention ' Forfait annuel: 218.00 jours', nombre maximum fixé pour un tel forfait, portée sur ses bulletins de paie jusqu’au mois de décembre 2015, lesquels indiquent, en tant que salaire de base:'commission sur honoraires'.

Si un employeur ne peut se prévaloir de sa propre turpitude et ainsi déduire l’absence de forfait annuel en jours du non-respect des règles légales et conventionnelles qu’il est tenu d’appliquer, il ne résulte pas des éléments d’appréciation que le salarié était effectivement soumis à un forfait annuel en jours. Ainsi, alors qu’auparavant, ce dernier n’avait jamais revendiqué un droit, par exemple un contrôle de sa charge de travail, ou un avantage, notamment l’obtention et la prise de jours de récupération du temps de travail qui n’étaient inscrits nulle part, attachés à un forfait annuel en jours, ce n’est qu’à partir de sa lettre du 18 mars 2016 qu’il a commencé à invoquer le respect d’une rémunération conventionnelle minimale qu’il déduisait de l’application d’un tel forfait, soit à un moment où il lui était de demandé de faire un choix entre son emploi et une autre activité professionnelle récente, dès lors qu’en raison de sa volonté d’imposer la répartition des jours travaillés sur la semaine, les échanges avec l’employeur ne pouvaient aboutir à la formalisation d’un temps partiel qu’il avait lui même sollicité pour pouvoir poursuivre sa double activité. Or, selon l’attestation de l’expert comptable en charge depuis l’année 2009 de la comptabilité de la société CECA et de l’établissement des bulletins de salaire des experts, ce n’est qu’à la suite d’une erreur dans la rédaction des bulletins de salaire de Monsieur X qu’un forfait y a été mentionné, cet expert comptable précisant que la mention d’un forfait n’avait pas lieu d’être puisque les contrats n’avaient pas été modifiés, ce qui s’entend par comparaison avec ce qui existait avant la reprise de la comptabilité et de la rédaction des bulletins, situation antérieure dont la logique voulait qu’il en ait connaissance dans le cadre du transfert des prestations comptables. Au surplus, alors que les fonctions du salarié, comme indiqué dans son contrat de travail, ne se résumaient pas à celles donnant lieu à l’émission d’honoraires, ce même contrat ne mentionnant de forfait que pour la détermination de sa rémunération variable devant être calculée en fonction des honoraires émis hors taxe sans pouvoir y inclure des dépassements d’honoraires, le salarié a, de surcroît, signé un document plus précis sur le temps de travail auquel il était soumis sans emporter de modification de celui-ci, encore moins pour un motif économique, qui mentionne, en substance : ' Je vous prie de bien vouloir accusé de réception de la présente note relative à votre décompte d’heures et à l’exécution de vos horaires. Il convient que votre horaire soit établi comme nous vous l’avons demandé de façon à ce que vous restiez dans la limite des trente cinq heures hebdomadaires. Sur le fondement de l’horaire qui est le votre, il conviendrait d’organiser votre travail de façon à ne pas faire dans la même semaine plus de 35 heures. Tout dépassement d’horaire doit être autorisé par la Direction ainsi que faire l’objet d’une information préalable. Les heures supplémentaires ne peuvent ainsi être réalisées qu’après autorisation auprès de la Direction. En ce qui concerne votre décompte d’heures, nous vous demandons de prendre l’engagement d’adresser régulièrement la feuille d’horaire que je vous remercie d’établir selon le modèle ci-joint.' Le salarié prétend, sans offre de preuve, avoir signé ce document au mois de janvier 2016 sans avoir prêté attention à ce qu’il renfermait, quand pourtant dans le même temps il se montrait particulièrement attentif, précis et pointilleux dans les échanges écrits, dans lesquels jamais il n’évoque, même implicitement, un forfait annuel en jours, afin d’obtenir de son employeur, qui lui-même ne fait jamais allusion à un tel forfait, la concrétisation d’un accord sur une réduction de son temps de travail. Or, si aucune date n’y est mentionnée, l’employeur justifie, sans être utilement contredit, de l’ancienneté de ce document, non

contesté dans sa validité ou sa sincérité, qui comportait encore en son entête la mention d’un partenaire qui a disparu des documents plus récents, dont certains lui sont concomitants.

Au demeurant, l’existence d’un horaire de travail excédant trente-cinq heures hebdomadaires ne peut être déduit du seul constat de l’existence de missions habituellement dévolues à un expert, alors qu’il résulte des plannings du salarié remontant à l’année 2013 que le nombre moyen de ses rendez-vous hebdomadaires, dont la durée variait très majoritairement entre une et deux heures du lundi au vendredi, n’atteignait pas la dizaine, ce qui laisse penser que même en intégrant d’autres temps de travail effectifs liés à ces rendez-vous, l’ensemble des missions invoquées par le salarié, d’analyse, de rédaction, d’échanges écrits, de gestion administrative, pouvait s’insérer dans un horaire de trente cinq heures par semaine.

Au surplus, pour réclamer un rappel de salaire à hauteur du coefficient 170 correspondant à la position 3.1 des cadres Syntec, et à la majoration annuelle de 20% prévue par l’accord du 22 juin 1999, étendu, relatif à la durée du travail, le salarié soutient pouvoir être soumis à un forfait annuel en jours pour réunir en tant que cadre les conditions prévues par cet accord, en ce qu’il justifierait de l’ensemble de ces conditions, notamment de la seconde condition exigée par ce texte, soit, indépendamment d’une rémunération annuelle supérieure au plancher fixé ou d’une qualité de mandataire social qui permettaient également l’application d’un tel forfait, un positionnement devant être porté à hauteur du point 3.1 de la grille de classification des cadres de la convention collective Syntec. Or, le salarié, qui ne prétend donc à une reclassification qu’en raison de sa soumission alléguée à un forfait annuel en jours qui dans les faits n’existait pas, n’entend même pas justifier qu’à compter de l’année 2013, il a effectivement exercé des fonctions permettant de l’élever à la position 3.1, soit d’avoir exercé, en tant qu’ingénieur ou cadre, des fonctions dans lesquelles il mettait en oeuvre non seulement des connaissances équivalant à celles sanctionnées par un diplôme, mais aussi des connaissances pratiques étendues sans assurer, toutefois, dans ses fonctions, une responsabilité complète et permanente qui revenait en fait à son chef. En tout état de cause, Monsieur X ne justifie pas d’un tel positionnement.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments qu’aucun forfait annuel en jours n’a été prévu ni appliqué par les parties, que les fonctions du salarié s’enchâssaient dans un horaire hebdomadaire de trente-cinq heures, et que ce dernier ne justifie pas de la classification qu’il revendique. Monsieur X sera donc débouté de l’ensemble de ses demandes formées de ce chef.

Sur le subsidiaire:

S’appuyant sur des tableaux de dépenses comparées qui présentent des données chiffrées dont il déduit un différentiel à son profit pour la seule période de janvier à décembre 2015, le salarié sollicite le paiement d’un rappel de rémunération en ce que des frais remboursés auraient été déduits de l’assiette de ses droits à commissions, en définitive non comptabilisés dans l’assiette, en faisant valoir essentiellement que ces frais calculés de manière forfaitaire entraient dans la base de facturation hors taxe des clients et se trouvaient ainsi soumis à la taxe sur la valeur ajoutée. Cependant, il résulte des éléments soumis à l’appréciation de la cour que la rémunération du salarié était entièrement variable et variait bien d’un mois à l’autre tel qu’en attestent ses bulletins de paie, et que s’y ajoutaient des frais professionnels dont il n’est pas contesté qu’ils lui ont été remboursés sur justificatifs conformément à l’article 7 du contrat de travail. Ce même contrat ne prévoit d’inclure, dans l’assiette de calcul de la rémunération, que des honoraires hors taxe, et il ne se déduit d’aucun élément que les parties auraient eu la volonté d’y ajouter des frais, quand il ressort en revanche des éléments d’appréciation, notamment de factures destinées aux clients, que de tels frais ne correspondraient pas à l’activité personnellement déployée par l’expert qui exprimée en honoraires émis hors taxe correspondait aux réunions, déplacements, étude et rédaction, alors que les frais facturés en sus aux clients étaient forfaitaires et de nature administrative puisqu’ils étaient relatifs à l’ouverture du dossier, aux ' frais administratifs’ et aux 'frais exceptionnels', tous frais que l’expert ne justifie pas avoir produits, et si des frais de déplacement facturés aux clients peuvent avoir été

générés par des déplacements effectués par Monsieur X, celui-ci n’en justifie pas précisément sur la période objet de sa réclamation salariale, pas plus qu’il ne démontre pouvoir prétendre à leur intégration dans l’assiette de calcul de sa rémunération pour la partie qui excéderait en tant que 'marge', en l’état non déterminée dans son existence et son montant, ce qui lui a été remboursé.

La demande subsidiaire du salarié en paiement de rappel de rémunération variable pour la période réclamée, de janvier 2015 à décembre 2015, n’est dès lors pas fondée puisqu’il ressort des éléments produits aux débats qu’en conformité avec les données contractuelles, il a perçu ce à quoi il avait droit. La demande subséquente en rectification de documents sera donc en voie de rejet.

En conséquence, par substitution de motifs, le jugement sera confirmé en ce qu’il déboute le salarié de toutes ses demandes.

Sur les frais irrépétibles:

En équité, il y a lieu d’allouer à l’employeur la somme supplémentaire de 2000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel.

Sur les dépens:

Le salarié, partie succombante, sera condamné aux entiers dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière prud’homale et par mise à disposition au greffe:

Confirme le jugement entrepris.

Y ajoutant,

Condamne Monsieur Y X à payer à la société CECA la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel.

Déboute les parties pour le surplus.

Condamne Monsieur Y X aux entiers dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-6, 26 mars 2021, n° 18/01165