Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Retention administrative, 27 décembre 2022, n° 22/01597

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, retention administrative, 27 déc. 2022, n° 22/01597
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 22/01597
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Nice, 24 décembre 2022
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 14 janvier 2023
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Rétention Administrative

CHAMBRE 1-11 RA

ORDONNANCE

DU 27 DECEMBRE 2022

N° 2022/1597

Rôle N° RG 22/01597 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BKQY4

Copie conforme

délivrée le 27 Décembre 2022 par courriel à :

— l’avocat

— le préfet

— le CRA

— le JLD/TJ

— le retenu

— le MP

Signature,

le greffier

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 25 Décembre 2022 à 12h59.

APPELANT

Monsieur X se disant [O] [K]

né le 01 janvier 2000 à [Localité 1] (MAROC)

de nationalité marocaine

comparant en personne

assisté par Me Shéhérazade BENGUERRAICHE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, avocat commis d’office et de Mme [W] [B], interprète en langue arabe, non inscrit sur la liste des experts de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, ayant préalablement prêté serment.

INTIME

Monsieur le préfet des ALPES MARITIMES

représenté par M. [J]

MINISTÈRE PUBLIC :

Avisé et non représenté

DEBATS

L’affaire a été débattue en audience publique le 27 Décembre 2022 devant Madame Catherine LEROI, Conseiller à la cour d’appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Mme Elodie BAYLE, Greffière,

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 27 Décembre 2022 à 16h25,

Signée par Madame Catherine LEROI, Conseiller et Mme Elodie BAYLE, Greffier,

PROCÉDURE ET MOYENS

Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) ;

Vu l’arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 15 octobre 2022 par le préfet des ALPES MARITIMES , notifié le même jour à 18h45 ;

Vu la décision de placement en rétention prise le 23 décembre 2022 par le préfet des ALPES MARITIMES notifiée le même jour à 12h15 ;

Vu l’ordonnance du 25 décembre 2022 à 12h59 rendue par le Juge des libertés et de la détention de NICE décidant le maintien de Monsieur X se disant [O] [K] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire et ayant rejeté la contestation de l’arrêté de placement en rétention ;

Vu l’appel interjeté le 25/12/2022 à 12H15 par Monsieur X se disant [O] [K];

Monsieur X se disant [O] [K] a comparu et a été entendu en ses explications ; il déclare : ' je suis né en novembre 2005 et je suis mineur. J’ai deux frères : 10 ans le plus petit et 20 ans le grand. Je n’ai pas d’autres pièces d’identité avec photo. Je peux demander un certificat de scolarité. Je n’ai pas dit que j’étais majeur lors de la procédure pénale. Je suis venu seul en France, il y a un an et demi. Je n’ai pas de justificatif d’hébergement mais je peux en produire un. Donnez-moi une chance et je quitte la France. C’est la première fois que je suis au centre de rétention '.

Son avocat a été régulièrement entendu ; se référant à l’acte d’appel, il soutient que le juge judiciaire doit, aux termes de l’arrêt rendu le 8 novembre 2022 par la cour de justice de l’Union Européenne, examiner d’office la légalité de la rétention sur la base des éléments du dossier portés à sa connaissance, dans le respect des règles du contradictoire, tant en ce qui concerne la légalité de l’arrêté de placement en rétention que la régularité de la procédure aux fins de prolongation de la rétention et qu’en l’occurrence, un tel examen ne résulte pas de la décision rendue par le juge des libertés et de la détention de Nice.

Au fond, il précise qu’étant âgé de 17 ans, M. [K] ne peut faire l’objet d’une obligation de quitter le territoire conformément aux dispositions de l’article L 511-4 du CESEDA et que le préfet s’est uniquement fondé pour considérer que M. [K] comme majeur sur les résultats d’un test osseux lequel n’est pas fiable alors qu’il ressort de son livret de famille qu’il est né en 2005, qu’ en outre, il n’a fait l’objet d’aucune évaluation sociale ni n’a pu s’entretenir avec un personnel qualifié dans le cadre d’une approche pluridisciplinaire et qu’il existe donc un sérieux doute sur sa majorité.

Il sollicite donc l’infirmation de la décision déférée et la remise en liberté de M. [K].

Le représentant de la préfecture sollicite la confirmation de la décision déférée. Il expose que M. [K] aurait pu contester la validité de l’OQTF, ce qu’il n’a pas fait, qu’il ne produit qu’une photocopie de son livret de famille pour justifier de sa minorité, ce qui est insuffisant , et que sa majorité a été reconnue par le tribunal correctionnel de Marseille.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La recevabilité de l’appel contre l’ordonnance du juge des libertés et de la détention n’est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d’irrégularité.

I Sur le défaut de vérification d’office par le juge des libertés et de la détention de la régularité de l’arrêté de placement en rétention et de la procédure de rétention :

Il résulte d’un arrêt rendu le 8 novembre 2022 par la CJUE, au visa des articles 6 et 47 de la Charte des Droits Fondamentaux de l’Union Européenne, que le contrôle par l’autorité judiciaire du respect des conditions de légalité de la rétention qui découlent du droit de l’Union, doit la conduire à relever d’office, sur la base des éléments du dossier portés à sa connaissance tels que complétés ou éclairés par la procédure contradictoire devant elle, l’éventuel non-respect d’une condition de légalité qui n’a pas été invoquée par la personne concernée et qu’au nom d’une protection juridictionnelle effective du droit à la sûreté, le juge compétent pour statuer sur le maintien en rétention, doit relever d’office toutes les irrégulatiés susceptibles d’emporter la mainlevée de la mesure, tant dans le cadre du contrôle de légalité de la mesure administrative de placement en rétention que dans le cadre du contrôle de la procédure aux fins de prolongation de la rétention.

En l’occurrence, la lecture de la décision du premier juge démontre que ce dernier, après avoir répondu au moyen tiré de la minorité de M. [K], a apprécié dans son ensemble la régularité de l’arrêté de placement en rétention en retenant qu’il avait été pris par une autorité compétente, qu’il était suffisamment motivé, que la mesure ne revêtait pas un caractère disproportionné eu égard à la situation personnelle de l’intéressé et compte tenu de l’insuffisance des garanties de représentation qu’il présentait. S’agissant de la procédure de rétention, le juge des libertés et de la détention de Nice a indiqué que la situation irrégulière de M. [K] était avérée, qu’il n’existait pas de moyen de transport disponible à destination de son pays d’origine avant l’expiration du délai de 48 heures de rétention administrative, qu’il n’avait pas remis préalablement aux services de police l’original de son passeport et qu’il ne justifiait d’aucune garantie de représentation effective, relevant notamment que sa volonté de se soumettre à la décision d’éloignement n’était pas démontrée, l’intéressé ayant été écroué postérieurement à la date de la mesure d’obligation de quitter le territoire français.

Il apparaît que, ce faisant, le premier juge a apprécié la régularité de l’arrêté de placement en rétention et de la procédure de rétention dans leur ensemble et au-delà des moyens soulevés par le retenu.

La décision rendue apparaît donc régulière.

II Sur le moyen tiré de la minorité de M. [K] :

L’article L. 741-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dispose que l’étranger mineur de 18 ans ne peut faire l’objet d’une décision de placement en rétention.

Le juge judiciaire dispose d’un pouvoir souverain d’appréciation relativement à l’état de minorité d’une personne étrangère placée en rétention et la charge de la preuve de la minorité pèse sur l’étranger.

L’article 388 du code civil prévoit que les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge en l’absence de documents d’identité valable et lorsque l’âge allégué n’est pas vraisemblable, ne peuvent être réalisés que sur décision de l’autorité judiciaire et après recueil de l’accord de l’intéressé. Les conclusions de cet examen, qui doivent préciser la marge d’erreur, ne peuvent, à elles seules, permettre de déterminer si l’intéressé est mineur. Le doute profite à l’intéressé. En cas de doute sur la minorité de l’intéressé, il ne peut être procédé à une évaluation de son âge à partir d’un examen du développement pubertaire des caractères primaires et secondaires.

Enfin, l’article L. 811-2 du même code dispose que la vérification de tout acte d’état civil étranger est effectué dans les conditions définies à l’article 47 du code civil. Aux termes de l’article 47 du code civil, tout acte de l’état civil des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes en usage dans ce pays, fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenues, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité.

Il est rappelé qu’il n’existe, en l’état de la législation applicable à la cause, aucune présomption de minorité. Si, dans un avis du 8 juillet 2014, la Commission nationale consultative des droits de l’homme a recommandé à l’égard de ceux qui se revendiquent mineurs, que le principe soit celui de la présomption de minorité, elle a précisé que la présomption de minorité est elle-même fondée sur deux autres présomptions : celle d’authenticité des documents produits et celle de légitimité de leur détenteur, ces présomptions étant simples.

En l’occurrence, le document présenté par M. [K] pour justifier de sa minorité à l’appui de sa contestation de l’arrêté de placement en rétention, n’est pas un document original mais seulement la photocopie d’une page prétendument extraite d’un livret de famille concernant [O] [K] né le 11 novembre 2005 à [Localité 1], ce qui est manifestement insuffisant pour démontrer que ce document concerne bien l’intéressé qui ne détient aucun autre document d’identité ou de voyage. L’intéressé qui ne justifie d’aucun document d’état civil ni pièce d’identité ne peut donc se prévaloir de la présomption d’authenticité de l’article 47 du code civil.

Il est établi qu’ a été réalisé dans le cadre de la procédure pénale un test osseux ayant conclu à la majorité de M. [K] et participé à sa condamnation par le tribunal correctionnel de Marseille en qualité de majeur. M. [K] ne critique nullement les conditions de réalisation de ce test ni la formulation de ses conclusions.

Par ailleurs, si l’arrêté préfectoral portant obligation de quitter le territoire national en date du 15 octobre 2022 mentionne comme date de naissance de l’intéressé le 11 novembre 2005, il ressort de la motivation de cette décision qu’il s’agit d’une erreur de plume, M. [K] étant considéré comme majeur dans le corps de l’arrêté. En tout état de cause, il n’appartient pas au juge judiciaire de se prononcer sur la légalité de la décision d’éloignement laquelle ne semble pas avoir été contestée devant le tribunal administratif.

Par ailleurs, l’arrêté de placement en rétention qui mentionne comme date de naissance le 1er janvier 2000 relève que M. [K], interpellé pour des faits de vol pour lesquels il a été écroué le 18 octobre 2022 à la maison d’arrêt de [Localité 2], qui s’était déclaré mineur lors de son interpellation en octobre 2022, alors qu’un examen osseux indiquait qu’il était majeur, a admis être né en 2000 lors de son écrou à la maison d’arrêt de [Localité 2].

Il apparaît en effet que la fiche pénale de l’intéressé comporte la mention d’une date de naissance au 1er janvier 2000 et que M. [K] a été condamné comme majeur et a purgé sa peine d’emprisonnement sous le régime de détention des majeurs.

Dès lors, il est incontestable que l’arrêté de placement en rétention se fonde sur plusieurs éléments autres que les tests osseux pratiqués sur la personne de M. [K] pour retenir que ce dernier est majeur, à savoir sa condamnation en tant que tel le 19 octobre 2022 par le tribunal judiciaire de Nice, et le fait qu’il ait accompli sa peine de prison comme majeur.

Dès lors, ce moyen doit être rejeté et la mesure déférée confirmée.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,

Confirmons l’ordonnance du Juge des libertés et de la détention de NICE en date du 25 Décembre 2022.

Les parties sont avisées qu’elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d’Etat ou de la Cour de cassation.

Le greffier, Le président,

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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Retention administrative, 27 décembre 2022, n° 22/01597