Cour d'appel de Caen, 2 juin 2015, n° 15/00878

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Caen, 2 juin 2015, n° 15/00878
Juridiction : Cour d'appel de Caen
Numéro(s) : 15/00878
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Argentan, JEX, 22 février 2015, N° 14/00005

Texte intégral

AFFAIRE : N° RG 15/00878

Code Aff. :

ARRET N°

XXX

ORIGINE : DECISION du Juge de l’exécution d’ARGENTAN en date du 23 Février 2015 -

RG n° 14/00005

COUR D’APPEL DE CAEN

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 02 JUIN 2015

APPELANTE :

La Société coopérative Banque Populaire BRED

N° SIRET : 552 .091 795

XXX

XXX

prise en la personne de son représentant légal

représentée et assistée de Me José COHEN, avocat au barreau D’ARGENTAN

INTIME :

Monsieur Z Y

né le XXX à XXX

XXX

XXX

représenté et assisté de Me Bruno HUAUME, avocat au barreau D’ARGENTAN

A.J. Totale numéro 141180022015002770 du 23/04/2015

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame PIGEAU, Président de chambre,

Monsieur JAILLET, Conseiller, rédacteur,

Madame SERRIN, Conseiller,

DEBATS : A l’audience publique du 05 mai 2015

GREFFIER : Madame X

ARRET : mis à disposition au greffe le 02 Juin 2015 et signé par Madame PIGEAU, président, et Madame X, greffier

Faits, procédure et prétentions :

La BRED Banque Populaire a engagé une procédure de saisie immobilière d’un bien appartenant à M. Y afin d’obtenir le paiement de la somme de 145 112,74 € (au titre d’un contrat de prêt des 24 et 25 juillet 2009) et de celle de 8 367,74 € (en vertu d’un jugement du tribunal d’instance de Lisieux du 18 juillet 2011).

Le commandement aux fins de saisie immobilière a été délivré le 26 novembre 2013.

Par assignation du 13 février 2014 la BRED Banque Populaire a fait assigner M. Y devant le juge de l’exécution du tribunal de grande instance d’Argentan afin de voir, en substance valider la saisie, fixer la créance et déterminer les modalités de la vente à venir.

Par jugement du 23 février 2015 (dont appel) le tribunal de grande instance d’Argentan a, en substance :

' constaté la prescription de l’action de la BRED au titre de l’emprunt immobilier,

' renvoyé la procédure à une nouvelle audience d’orientation pour apprécier la réalité d’une éventuelle inscription hypothécaire au titre du jugement du 18 juillet 2011.

Par acte d’huissier du 30 mars 2015 la BRED a fait assigner à jour fixe M. Y devant la cour d’appel de Caen.

Elle considère que le courrier de M. Y par lequel l’intéressé envisageait de s’acquitter de sa dette par la vente de l’immeuble emportait 'renonciation tacite’ de l’intéressé à se prévaloir de la prescription biennale acquise antérieurement et qu’il a fait naître un nouveau délai de 2 ans résultant de la loi du 17 juin 2008.

Elle souligne qu’elle dispose en toute hypothèse d’un autre titre – le jugement du 18 juillet 2011 pour suivre sur sa procédure.

M. Y qui a conclu le 8 avril 2015 sollicite la confirmation du jugement en ses dispositions relatives au prêt immobilier : prescription de l’action et défaut de renonciation expresse et en toute connaissance de cause à cette prescription (la jurisprudence de la cour de cassation s’étant fixée en novembre 2012 et juin 2014) au surplus acquise.

A titre subsidiaire et en tant que de besoin, il sollicite d’être autorisé à vendre son immeuble à l’amiable, ayant signé deux mandats de vente au prix de 90 000 €.

S’agissant du jugement du 18 juillet 2011 il sollicite les plus larges délais de paiement et le bénéfice des dispositions de l’article 1244-1 du code civil.

Il demande, en toute hypothèse, paiement d’une indemnité de 3 000 € TTC au titre de l’article 37 de la loi sur l’aide juridictionnelle et la condamnation de la BRED aux entiers dépens de la procédure.

MOTIFS de la Cour

'Sur la créance de la BRED au titre du crédit immobilier

L’action des professionnels, pour les biens et services qu’ils fournissent aux consommateurs, (tels les crédits immobiliers qu’ils leur consentent) se prescrit par 2 ans.

Le point de départ du délai de prescription se situe, en cas d’action en paiement au titre d’un prêt immobilier consenti par un professionnel à un consommateur, à la date du premier incident de paiement non régularisé.

Par ailleurs la renonciation à la prescription est expresse ou tacite.

La renonciation tacite résulte de circonstances établissant sans équivoque la volonté de ne pas se prévaloir de la prescription.

En l’espèce il convient de considérer que :

' le premier incident de paiement non régularisé date du 23 mars 2010 si bien que la prescription était acquise le 23 mars 2012.

' Le courrier adressé en mai 2012 au prêteur par M. Y ne caractérise pas la volonté non équivoque de l’intéressé de renoncer à la prescription acquise.

En effet dans cette lettre M. Y se borne à indiquer qu’il désire 'régler le problème de (sa) dette’ et qu’il propose de mettre en vente son bien immobilier hypothéqué pour lui permettre de rembourser celle-ci.

Il s’agit donc d’une simple proposition ne faisant absolument aucune référence à la prescription acquise antérieurement.

Et pour cause M. Y ne pouvait évidemment savoir en mai 2012 que la cour de cassation allait juger en novembre 2012 que les crédits immobiliers consentis par des professionnels à des consommateurs étaient soumis à la prescription biennale de l’article L 137-2 du code de la consommation.

Dès lors, il n’a pu en pleine connaissance de ses droits à faire valoir l’existence d’une prescription applicable et acquise, tacitement y renoncer en proposant des modalités de remboursement de sa dette.

Le jugement qui a, dans ces conditions, déclaré éteinte la créance de la BRED au titre du contrat de prêt des 24 et 25 juillet 2009, mérite donc confirmation.

' Sur la créance de la BRED au titre du jugement du tribunal d’instance de Lisieux du 18 juillet 2011

L’effet dévolutif de l’appel permet à la cour de statuer sur ce point.

La BRED dispose d’un titre de créance constitué par une décision de justice, à savoir un jugement du tribunal d’instance de Lisieux du 18 juillet 2011 signifié le 11 août 2011.

Le montant de cette créance, qui n’est pas atteinte par la prescription, s’élève à la date de délivrance du commandement à 8 367,74 €.

Alors que la banque ne justifie pas avoir tenté en vain d’obtenir l’exécution du jugement par d’autres moyens moins préjudiciables au débiteur, la poursuite sans désemparer d’une procédure de saisie immobilière excéderait ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement d’une créance d’un montant de l’ordre de 8 400 €.

M. Y qui a retrouvé un emploi en février 2014 moyennant un salaire de l’ordre de 1 480 € brut par mois et ce, après une longue période de chômage, doit être considéré comme un débiteur malheureux et de bonne foi.

Les besoins du créancier doivent être appréciés en tenant compte de sa qualité de professionnel.

Il convient ainsi d’accorder à M. Y un délai de grâce sur le fondement des articles 1244 et suivants du code civil en précisant que les paiements s’imputeront en priorité sur le capital afin de permettre l’apurement effectif de la dette et le respect du délai au regard des facultés contributives du débiteur.

' Sur l’indemnité prévue par l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991

M. Y est bénéficiaire de l’aide juridictionnelle totale.

Eu égard à la situation économique de la BRED, partie perdante et condamnée aux dépens, et par application de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 2 000 € TTC sera allouée à l’avocat de intimé.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a déclaré éteinte la créance de la BRED au titre du prêt immobilier des 24 et 25 juillet 2009.

S’agissant de la créance de la BRED fondée sur le jugement du tribunal d’instance de Lisieux du 18 juillet 2011.

Dit que M. Y pourra s’acquitter du paiement de sa dette selon les modalités suivantes :

' en 23 versements mensuels et successifs de 200 €.

' un 24e et dernier versement égal au solde de la dette en principal et intérêts.

Dit que les paiements s’imputeront en priorité sur le capital.

Dit qu’à défaut du respect d’une seule échéance M. Y perdra le bénéfice de ce délai et que l’intégralité de la dette deviendra exigible.

Rappelle que la décision du juge prise en application de l’article 1244-1 du code civil suspend les procédures d’exécution engagées par le créancier, les majorations d’intérêts ou les pénalités cessant d’être dues pendant le délai fixé.

Condamne la BRED aux entiers dépens avec application de l’article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP HUAUME-LEPELLETIER-ARIN-PELLETIER.

Condamne la BRED à payer à Me HUAUME, avocat (associé de la SCP HUAUME-LEPELLETIER-ARIN-PELLETIER du bénéficiaire de l’aide juridictionnelle la somme de 2 000 € TTC par application de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

E. X D. PIGEAU

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