Cour d'appel de Douai, 23 janvier 2014, n° 13/02260

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, 23 janv. 2014, n° 13/02260
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 13/02260
Décision précédente : Tribunal d'instance d'Arras, 14 mars 2013, N° 12-12-1022

Sur les parties

Texte intégral

XXX

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

TROISIEME CHAMBRE

ARRÊT DU 23/01/2014

***

N° MINUTE : 2014/47

N° RG : 13/02260

Ordonnance (N° 12-12-1022) rendue le 15 Mars 2013

par le Tribunal d’Instance d’ARRAS

REF : BR/CF

APPELANTE

XXX

agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

XXX

XXX

représentée et assistée par Me U-Guy VOISIN, avocat au barreau de DOUAI

INTIMÉS

Monsieur D, U-I X

né le XXX à XXX

demeurant

XXX

62680 B

représenté et assisté par Me Marjorie THUILLIEZ, avocat au barreau d’ARRAS

Madame G, R, I H épouse X

née le XXX à XXX

demeurant

XXX

62680 B

représentée et assistée par Me Marjorie THUILLIEZ, avocat au barreau d’ARRAS

Monsieur Z, D, E X

né le XXX à XXX

demeurant

XXX

62680 B

représenté et assisté par Me Marjorie THUILLIEZ, avocat au barreau d’ARRAS

DÉBATS à l’audience publique du 21 Novembre 2013

tenue par Bénédicte ROBIN magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Christine DUQUENNE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Françoise GIROT, Président de chambre

Bénédicte ROBIN, Conseiller

Cécile ANDRE, Conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 Janvier 2014 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Françoise GIROT, Président et Christine DUQUENNE, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 19 novembre 2013

*****

M. D X et Mme G H sont locataires d’un logement situé XXX à B, appartenant à la XXX.

Par acte d’huissier du 14 septembre 2011, les locataires et leur fils, ont fait assigner en référé la XXX pour obtenir l’autorisation de consigner les loyers et la condamnation du bailleur sous astreinte à mettre en oeuvre les moyens nécessaires pour faire cesser le trouble de jouissance qu’ils indiquent subir.

Par ordonnance du 5 décembre 2011, le juge des référés du tribunal de grande instance de Douai s’est déclaré incompétent au profit du juge des référés du tribunal d’instance d’Arras et le dossier a été transmis à ce tribunal.

Par ordonnance de référé du 15 mars 2013, le tribunal d’instance d’Arras a :

— au principal, renvoyé les parties à mieux se pourvoir,

— au provisoire, s’est déclaré compétent et a enjoint à la XXX de mettre en oeuvre tous les moyens de droit dont elle dispose, le cas échéant en introduisant une action en résiliation de bail, pour faire cesser les troubles de voisinage causés par les époux A, résidant XXX à B, dans les 6 mois suivant la signification du présent jugement, sous astreinte de 50€ par jour de retard pendant 2 mois,

— s’est réservé la liquidation de l’astreinte,

— rejeté les autres demandes,

— rappelé le caractère exécutoire par provision de l’ordonnance,

— condamné la XXX aux dépens.

Par déclaration au greffe du 17 avril 2013, la SA SIA Habitat a interjeté appel de cette décision.

Par dernières conclusions déposées au greffe le 4 novembre 2013, la SA SIA Habitat conclut à la réformation de la décision entreprise et au rejet des demandes formées par les consorts X. Elle sollicite l’allocation de la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et la condamnation des intimés aux dépens.

Elle invoque le fait qu’il n’existe pas d’urgence à ce qu’il soit statué sur la demande formée en référé et que le trouble manifestement illicite invoqué n’est pas actuel, les derniers agissements invoqués remontant à octobre 2010. Elle explique que les agissements dont se plaignent les consorts X ne se rattachent nullement à la jouissance de l’immeuble donné à bail, les faits gênants se déroulant à l’extérieur du logement loué et qu’il s’agit d’agissements délictueux. Elle indique qu’elle a adressé un courrier aux voisins des consorts X mais souligne qu’une procédure en résiliation de bail n’est pas certaine d’aboutir.

Elle précise que seuls les époux X sont signataires du bail et que leur fils n’étant nullement partie au contrat, il ne peut former de demande à l’encontre de la société SIA HABITAT.

Elle indique que compte tenu des dernières pièces versées aux débats par les intimés, elle va engager une procédure en vue de la résiliation du bail.

Par dernières conclusions déposées au greffe le 13 novembre 2013, les consorts X concluent à la confirmation de l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a fait droit à leur demande d’astreinte.

Se portant appelants à titre incident, ils concluent à l’infirmation partielle de la décision et demandent qu’il soit considéré que M. Z X a qualité pour agir, que la bailleresse a manqué à ses obligations et demandent que les loyers dus soient consignés jusqu’à ce que la bailleresse exécute ses obligations.

Ils demandent qu’il soit ordonné à la SA SIA Habitat de mettre en oeuvre tous les moyens dont elle dispose pour faire cesser les troubles de jouissance subis par les consorts X dont les époux A sont à l’origine, et ce en introduisant une action en résiliation de bail dans le délai d’un mois à compter de la décision à intervenir. A défaut, ils demandent qu’une astreinte de 150 € par jour de retard soit mise à la charge de l’appelante, sans limitation dans le temps, jusqu’à parfaite exécution par la bailleresse de ses obligations.

Ils sollicitent la condamnation de l’appelante à leur payer la somme de 10 000 € en réparation de leur préjudice et concluent au rejet des demandes formées par la SA SIA Habitat.

Ils concluent à la condamnation de l’appelante à leur payer la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens, avec distraction au profit de la SCP d’avocats MEILLIER THUILLIEZ.

Ils invoquent le fait que depuis 2008, ils subissent des troubles de voisinage causés par leurs voisins qui sont eux aussi locataires de la société SIA Habitat. Ils expliquent avoir subi les incivilités, nuisances et perturbations de leurs voisins ainsi que des vols et des dégradations de biens. Ils indiquent qu’ils ont saisi diverses instances de ces difficultés, sans succès.

Ils reprochent à la bailleresse de ne pas avoir donné suite à leurs réclamations et invoquent la violation des obligations contractuelles mises à la charge de celle-ci.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur l’urgence invoquée :

Les troubles invoqués par les consorts X se déroulent depuis de nombreuses années selon les pièces qu’ils produisent et cette circonstance justifie qu’il y ait lieu à référé.

Sur la violation des obligations contractuelles du bailleur :

L’article 6 b) de la loi du 6 juillet 1989 fait obligation au bailleur d’assurer la jouissance paisible du logement et le texte légal prévoit même expressément qu’après une mise en demeure dûment motivée, les propriétaires doivent, sauf motif légitime, utiliser les voies de droit dont ils disposent en propre afin de faire cesser les troubles de voisinage causés à des tiers par les personnes qui occupent les lieux.

Les époux X justifient avoir déposé plusieurs plaintes pour des vols, des insultes et les aboiements des chiens de leurs voisins. Certaines de ces plaintes sont déposées contre 'X’ mais d’autres visent expressément M. M A. Des membres de la famille C sont également visés par ces plaintes.

Des déclarations de mains courantes sont également produites, toutefois celles-ci ne visent nommément aucune personne et il n’est donc pas possible de rattacher les comportements dénoncés à un locataire de la société SIA Habitat.

Les pièces versées aux débats par les intimés établissent qu’ils ont saisi de nombreuses instances (mairie, conciliateur) dans le but qu’il soit mis fin aux faits subis.

Un mineur a été condamné pour des faits subis par les époux X, s’agissant de la dégradation d’un appui de fenêtre en PVC, par le biais d’un incendie.

Par ailleurs, les époux X se plaignent du comportement des chiens de M. A, qui les laisse divaguer et les incite à s’attaquer à eux ou aux personnes qui leur rendent visite.

Il est établi par un courrier émanant de la bailleresse que les deux familles (A et Y) dont les époux X dénoncent les agissements, sont locataires de la société SIA.

La situation est connue de la bailleresse puisque celle-ci a mis en demeure ces deux familles, par courrier recommandé du 25 novembre 2009, de respecter leurs obligations nées du bail et de cesser de troubler la tranquillité du voisinage.

Les époux X versent aux débats de nombreux courriers et des attestations émanant d’autres voisins qui corroborent leurs dires et se plaignent du bruit qui provient des appartements des fauteurs de troubles, de la divagation et des aboiements de leurs chiens et de jets d’oeufs sur eux-mêmes ou leurs voitures.

Il est également fait état de jets de mégots et de cailloux dans leur jardin.

Les époux X établissent par des documents médicaux que Mme X est très affectée par les agissements de son voisinage et que cela a des répercussions sur son état de santé, alors qu’elle est atteinte de problèmes cardiaques, est stressée et dort mal.

Les témoins qui avaient fourni des attestations ont encore attesté récemment, au cours de l’année 2013, pour indiquer que les troubles subis se poursuivaient. Ces témoins indiquent avoir à nouveau constaté le bruit excessif en provenance de l’appartement des voisins des époux X et l’agressivité du chien de ceux-ci.

L’ensemble de ces éléments démontre que les époux X subissent des troubles de voisinage qui sont commis par leurs voisins, lesquels sont également des locataires de la société SIA Habitat.

S’il est établi que la bailleresse a adressé une mise en demeure en 2009 et si elle indique avoir l’intention d’engager une procédure en résiliation de bail à l’encontre des fauteurs de troubles, pour autant il convient de relever qu’il n’est pas justifié de l’engagement d’une procédure à ce jour et que les difficultés sont connues depuis plusieurs années par la bailleresse, à tout le moins depuis 2009, ce qui lui a largement permis depuis de faire le nécessaire.

Elle ne justifie pas avoir adressé à ses locataires d’autres mises en demeure que celle du mois de novembre 2009, alors même qu’elle était informée des démarches entreprises par les époux X pour se plaindre de leurs voisins.

En effet, il est établi que tant la mairie que l’assureur des époux X ont informé la bailleresse des plaintes et que la société SIA Habitat, parfaitement alertée de la situation aurait pu faire le nécessaire pour respecter ses obligations de bailleresse en faisant constater les violations du contrat de bail commises par les voisins des époux X et en engageant les actions en justice nécessaires.

Dès lors, c’est à juste titre que le premier juge a enjoint à la bailleresse de prendre les mesures nécessaires pour remédier à la situation, au besoin en engageant une procédure en résiliation de bail et qu’il a assorti cette condamnation d’une astreinte. Malgré cette condamnation, assortie de l’exécution provisoire, la bailleresse ne justifie pas avoir entrepris de démarches, ainsi, conformément à la demande des époux X, une nouvelle astreinte sera mise à la charge de la SA SIA Habitat, à hauteur de 150 € par mois et pour une durée de 6 mois.

Comme le fait remarquer à juste titre la société SIA Habitat, le contrat de bail a été conclu entre les époux X et la bailleresse, mais M. Z X, qui est le fils des locataires, ne dispose pas de la qualité de partie au contrat, et ce nonobstant le fait qu’il vive chez ses parents.

Il reconnaît dans ses écritures qu’il ne peut se prévaloir de la violation du contrat de bail auquel il n’est pas partie et indique fonder sa demande sur l’article 1 382 du code civil.

L’engagement de la responsabilité de la société SIA Habitat sur ce fondement suppose que M. Z X démontre l’existence d’une faute commise par cette société, d’un dommage et d’un lien de causalité.

Compte tenu des éléments ci-dessus mentionnés, il est démontré que la famille A, a adopté un comportement qui créée des nuisances aux époux X ainsi qu’à leur fils.

La société SIA Habitat étant la bailleresse des familles A et X, elle est en capacité, en sa qualité de bailleresse de faire exécuter par ses locataires les clauses du contrat de bail et d’exiger le respect de la loi du 6 juillet 1989 par la famille A, ce qu’elle n’a nullement fait.

Cette abstention de la SA SIA Habitat constitue un faute qui a généré un préjudice subi par M. Z X puisque celui-ci, qui vit chez ses parents, est exposé aux mêmes troubles du voisinage que ceux-ci.

La responsabilité de la SA SIA Habitat est donc engagée à l’égard de celui-ci.

Sur la demande de dommages intérêts :

Les attestations versées aux débats par les époux X démontrent qu’ils vivent très difficilement cette situation.

En effet, ils habitent de très longue date dans la maison louée à la société SIA Habitat et les témoignages fournis établissent qu’ils n’avaient jamais connu de problèmes de voisinage avant l’arrivée de la famille A.

Il est également établi par les témoignages produits que les troubles subis ont un retentissement très important sur les époux X et notamment sur Mme X qui a un état de santé dégradé et dont il est établi qu’elle a besoin de calme et d’être préservée de toute anxiété.

L’inaction de la bailleresse a donc causé un préjudice important aux époux X, préjudice qui dure depuis de nombreuses années et la somme de 3 000 € doit donc leur être allouée à titre de provision sur ce fondement. La somme de 1 000 € sera allouée à titre de provision sur le même fondement à leur fils Z.

La décision entreprise sera infirmée sur ce point.

Sur les autres demandes :

C’est à juste titre que le premier juge a refusé de faire droit à la demande de consignation des loyers dans la mesure où s’il est établi que la bailleresse a manqué au respect de ses obligations, pour autant le logement reste habitable. La décision entreprise sera donc confirmée sur ce point.

Il est équitable d’allouer la somme de 2 000 € aux consorts X au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Les dépens d’appel seront supportés par la société SIA Habitat.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

— Confirme l’ordonnance rendue le 15 mars 2013 par le tribunal d’instance d’Arras en toutes ses dispositions, à l’exception de celles relatives à la demande de dommages intérêts ;

— L’infirme sur ce point et, statuant à nouveau :

— Condamne la société SIA Habitat à payer à M. D X et à Mme G H épouse X la somme de 3 000 € à titre de provision sur les dommages intérêts dûs pour trouble de jouissance ;

— Condamne la société SIA Habitat à payer à M. Z X la somme de 1 000 € à titre de provision sur les dommages intérêts dûs pour trouble de jouissance ;

— Y ajoutant :

— Assortit la condamnation de la société SIA Habitat à mettre en oeuvre les moyens de droit dont elle dispose, et au besoin en introduisant une action en résiliation de bail, pour remédier au trouble de jouissance subi par les époux X, d’une astreinte de 150 € par jour de retard pendant 6 mois, cette astreinte courant à l’expiration du délai d’un mois à compter de la signification du présent arrêt;

— Condamne la société SIA Habitat à payer à M. D X, à Mme G H épouse X et à M. Z X la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamne la société SIA Habitat aux dépens d’appel, avec distraction au profit de Maître THUILLIEZ, avocat.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

C.DUQUENNE F.GIROT

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Textes cités dans la décision

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