Cour d'appel de Limoges, 9 janvier 2014, 12/01364

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Limoges, ch. civ., 9 janv. 2014, n° 12/01364
Juridiction : Cour d'appel de Limoges
Numéro(s) : 12/01364
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de commerce de Limoges, 28 octobre 2012
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000028464494
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Texte intégral

ARRET N.

RG N : 12/01364

AFFAIRE :

SAS CAPE SOCAP

C/

SAS CERITHERM prise en la personne de son Président

MJ-iB

paiement de sommes

Grosse délivrée à

maître DURAND-MARQUET, avocat

COUR D’APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE CIVILE

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ARRET DU 09 JANVIER 2014

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Le NEUF JANVIER DEUX MILLE QUATORZE la CHAMBRE CIVILE a rendu l’arrêt dont la teneur suit par mise à la disposition du public au greffe :

ENTRE :

SAS CAPE SOCAP

dont le siège social est 1 rampe Saint Prix – 02100 SAINT QUENTIN

représentée par Me Christophe DURAND-MARQUET, avocat au barreau de LIMOGES, Me Emmanuelle BORDENAVE-MARZOCCHI, avocat

APPELANTE d’un jugement rendu le 29 OCTOBRE 2012 par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE LIMOGES

ET :

SAS CERITHERM prise en la personne de son Président

Hôtel d’Entreprises Chemin des Garennes – 87150 ORADOUR SUR VAYRES

représentée par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC de la SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de LIMOGES, Me Anne TOURNUS, avocat au barreau de COMPIEGNE

INTIMEE

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L’affaire a été fixée à l’audience du 07 Novembre 2013 par application des dispositions de l’article 905 du code de procédure civile, la Cour étant composée de Madame Martine JEAN, Président de chambre, de Monsieur Didier BALUZE et de Monsieur Gérard SOURY, Conseillers, assistés de Madame Marie-Christine MANAUD, Greffier. A cette audience, Madame le Président a été entendue en son rapport, Maîtres BORDENAVE-MARZOCCHI et TOURNUS, avocats, sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.

Puis Madame Martine JEAN, Président de chambre, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 09 Janvier 2014 par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

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LA COUR

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La société CAPE SOCAP est intervenue en qualité de sous-traitant de la société CERITHERM en vue d’effectuer les opérations de désamiantage et la dépollution de plusieurs fours sur le site de la société Aubert et Duval aux Anzises ( 63 ). Un prix de 120.000 € avait été prévu.

Après exécution de ses prestations, la société CAPE SOCAP a réclamé paiement de deux factures correspondant à des travaux supplémentaires qui lui avaient été commandés le 30 juillet 2011, pour un montant de 20.973,65 € chacune.

La société CAPE SOCAP ayant obtenu une injonction de payer du président du tribunal de commerce de Limoges, la société CERITHERM a formé opposition.

Par jugement du 29 octobre 2012, le tribunal a débouté la société CAPE SOCAP de sa demande et, faisant partiellement droit à la demande reconventionnelle de la société CERITHERM, l’a condamnée à payer à cette société la somme de 24.965 € en réparation de son préjudice matériel ainsi que la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Le tribunal a considéré en substance que les sociétés étaient liées par un marché à forfait et que, si la société CERITHERM avait passé commande de travaux supplémentaires, son engagement avait été vicié par les manoeuvres dolosives de la société CAPE SOCAP qui lui avait fait croire à un achèvement lointain du chantier.

La société CAPE SOCAP a interjeté appel de cette décision selon déclaration du 12 novembre 2012.

Les dernières écritures des parties, auxquelles il est expressément renvoyé pour plus ample information sur leurs demandes et moyens, ont été transmises à la cour les 24 octobre 2013 par la société CAPE SOCAP et 9 octobre 2013 par la société CERITHERM.

La société CAPE SOCAP conclut à la réformation du jugement et demande à la cour de condamner la société CERITHERM à lui payer la somme de 41.947,30 € outre intérêts au taux visé par l’article L 441-6 du Code de Commerce à compter de la date d’exigibilité des factures ou, subsidiairement, au taux légal à compter de la mise en demeure, de débouter la société CERITHERM de ses demandes indemnitaires, de condamner enfin la société CERITHERM à lui payer la somme de 15.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Elle conteste l’existence d’un marché à forfait, considérant par ailleurs que, en tout état de cause, les travaux supplémentaires ont fait l’objet d’un accord entre les parties sur leur consistance et leur prix.

Elle dénie toutes manoeuvres de sa part susceptible de constituer un dol ayant vicié le consentement de la société CERITHERM.

La société CERITHERM conclut à la confirmation et forme appel incident pour obtenir, en sus des dommages et intérêts qui lui ont été alloués par la juridiction du premier degré l’indemnisation de son préjudice financier pour un montant de 125.000 €.

A titre subsidiaire, au cas où il serait fait droit à la demande de la société CAPE SOCAP, elle demande à la cour de juger que les intérêts ne seront dus qu’au taux légal à compter de la décision.

Elle réclame enfin paiement d’une somme de 6.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu qu’il est constant que la société CAPE SOCAP s’est engagée à effectuer pour le compte de la société CERITHERM des travaux de désamiantage de trois fours situés sur le site de la société Aubert et Duval sur la base d’un devis d’un montant de 120.000 €;

Attendu qu’il est tout aussi constant que la société CERITHERM a, le 29 juillet 2011, régularisé un bon de commande portant sur la somme de 41.947,30 € lequel porte mention de « suppléments réclamés par CAPE SOCAP pour la bonne fin des travaux de désamiantage du four RRI de AUBERT ET DUVAL Les Ancizes »;

Attendu que si les parties s’opposent en premier lieu sur la nature du marché conclu entre elles, la société CERITHERM prétendant qu’il s’agissait d’un marché à forfait ayant pour objet le désamiantage de trois fours tandis que la société CAPE SOCAP estime que les parties n’ont jamais envisagé de régulariser un marché à forfait, force est de constater que cette question ne présenterait d’intérêt pour la solution du présent litige que s’il était admis que le consentement de la société CERITHERM au titre de la commande de travaux supplémentaires s’est trouvé, comme le prétend cette dernière, vicié par des manoeuvres dolosives de son cocontractant ; que dans le cas contraire en effet, le coût des travaux supplémentaires serait bien dû par la société CERITHERM dès lors qu’elle en a commandé l’exécution, et ce que le marché liant les parties soit ou non à forfait ; que le marché à forfait n’exclut pas en effet la paiement de travaux supplémentaires mais suppose seulement que ceux-ci aient été autorisés par écrit et le prix convenu entre les parties ; qu’à cet égard une ratification est toujours possible en sorte que l’entrepreneur peut en obtenir le paiement quand bien même une commande, qui s’analyse en une acceptation des travaux réalisés, n’interviendrait qu’en cours de travaux, voire même après exécution ;

Attendu ainsi que la question, évoquée en second lieu par les parties, de l’existence ou non de manoeuvres dolosives de la société CAPE SOCAP ayant vicié le consentement de la société CERITHERM à l’occasion de la commande de travaux supplémentaires, sera examinée au préalable par la cour ;

Attendu que la société CERITHERM, qui soutient qu’elle n’était pas informée précisément du suivi du chantier de CAPE SOCAP et qu’elle était tenue par les délais qu’elle avait elle-même consentis dans le cadre du marché la liant à Aubert et Duval, fait valoir que, comme l’a jugé le tribunal, la société CAPE SOCAP a usé de manoeuvres dolosives pour obtenir son consentement à l’exécution de travaux supplémentaires, lesquelles ont consisté à lui faire croire à un achèvement lointain des travaux de désamiantage alors que les travaux étaient terminés ou en voie d’achèvement lorsqu’elle a régularisé le bon de commande du 29 juillet 2011 ;

Attendu certes qu’il est établi et résulte des mails échangés entre les parties que Monsieur X…, responsable de la société CAPE SOCAP a, le 28 juillet 2011à 12 heures 04, adressé un mail au responsable de la société CERITHERM qui à la fois chiffrait les travaux supplémentaires et faisait état d’une fin de chantier avant analyse en fin de semaine prochaine, ce qui portait au vendredi 5 août l’achèvement des travaux par CAPE SOCAP, les analyses restant néanmoins à exécuter, alors que cette société a été finalement en mesure de restituer le chantier, analyses effectuées, dès le 3 août 2011 ;

Attendu toutefois que cette seule constatation ne suffit pas à caractériser le dol de la société CAPE SOCAP qui ne peut résulter que de manoeuvres utilisées par la société CAPE SOCAP en vue de tromper la religion de la société CERITHERM ;

Or attendu que dès réception de ce mail, soit le 28 juillet à 17 heures 53, M. Y… de la société CERITHERM indiquait à la société CAPE SOCAP qu’elle allait lui adresser une commande complémentaire de 35k ¿ mais qu’elle avait besoin avant cela d’obtenir un engagement ferme de sa part sur la fin des 2 chantiers en cours ; qu’il précisait « merci de tout mettre en oeuvre pour que nous soyons en mesure de restituer l’installation RRI au plus tard la mardi 2 août ….. » ; que M. X… de la société CAPE SOCAP répondait ne pouvoir s’engager sur cette date du 2 août , précisant que « pour libérer cette zone à cette date, il faudrait mettre une mesure de restitution, dès demain ou samedi, ce qui au vu des informations du terrain et des photos reçues ne nous semble pas envisageable » ; qu’il précisait encore « la date serait plutôt fin de semaine prochaine comme indiqué dans notre mail du même jour » ; que M. Y… adressait alors à M. X… un nouveau mail ainsi rédigé : « je reformule. En juste contrepartie de cette commande, Merci de vous engager à réaliser la mesure de restitution le mardi 2 août »; que c’est dans ces conditions qu’était régularisé par la société CERITHERM le bon de commande litigieux dont cette société estime désormais qu’il est nul en raison du vice de son consentement consécutif aux manoeuvres dolosives de la société CAPE SOCAP.

Attendu toutefois que la cour ne trouve pas dans les échanges intervenus entre les parties la preuve de manoeuvres dolosives de la société CAPE SOCAP en vue d’obtenir la régularisation d’un bon de commande ; qu’il apparaît au contraire que la société CERITHERM – dont il convient d’observer qu’elle ne justifie pas d’une contestation explicite en cours de travaux sur le principe de la réalisation et du paiement de travaux supplémentaires puisqu’elle a non seulement mis à la disposition de la société CAPE SOCAP, sans formuler de quelconques reproches à cette société sur une mauvaise préparation de son intervention, des marteaux piqueurs mais encore lui écrivait le 28 juillet par courriel de M. Z… adressé à 8 h 41 " enfin pour les prestations supplémentaires sur le four RRI, comme je vous l’ai déjà dit et comme M. Y… vous l’a confirmé, nous comprenons votre position. Pourriez vous s’il vous plaît nous faire parvenir un détail des coûts ? – est elle-même à l’origine des tractations intervenues ayant conduit en définitive à la signature du bon de commande du 29 juillet 2011, celle-ci s’engageant à régulariser par écrit un bon de commande pour les travaux supplémentaires, dont la question avait été évoquée parla société CAPE SOCAP à tout le moins depuis le 21 juillet 2011, sous réserve toutefois que la société CAPE SOCAP fasse le nécessaire, comme il l’a été prévu au bon de commande, pour une restitution du chantier le 2 août 2010 pour libération de la zone et restitution impérative le 5 août ; que la cour ne voit en effet dans cet avenant au contrat initial qu’un échange de consentement librement consenti par deux chefs d’entreprises responsables, que l’un d’eux ne saurait après coup chercher à remettre en cause en invoquant des manoeuvres dolosives de son cocontractant que les éléments du dossier ne permettent nullement de caractériser ; que notamment la société CERITHERM ne peut utilement soutenir que la circonstance que la restitution ait en définitive eu lieu le 3 août 2010 prouve que les travaux étaient en voie d’achèvement à la date où elle a consenti à régulariser un bon de commande pour les travaux supplémentaires alors qu’elle a elle-même imposé le 5 août comme dernier délai de restitution et qu’il est établi que, pour parvenir à respecter son engagement, la société CAPE SOCAP a accepté de faire travailler son équipe le samedi 30 juillet 2011, l’intervention de la société ITGA, chargée des analyses de concentration en fibres d’amiante ayant pu se dérouler sans délai ; que rien ne permet en tout cas de démontrer que la société CAPE SOCAP a fait croire à une fin des travaux lointaine alors que dès son premier mail du 28 juillet, avant régularisation du bon de commande, elle faisait état d’une fin de chantier, certes avant analyse, le 5 août 2011, date très proche de celle de la restitution du chantier après analyse ( 3 août), étant observé que les éléments du dossier permettent d’affirmer, puisque tel a bien été le cas, que la société chargée des analyses pouvait intervenir à très bref délai ; que s’il peut certes être admis que la crainte de voir la société CAPE SOCAP cesser le chantier a pu favoriser la régularisation par la société CERITHERM du bon de commande qui lui était réclamé par la société CAPE SOCAP, la pression exercée par cette dernière société ne caractérise ni une contrainte ni un dol ;

Attendu ainsi que le jugement sera réformé et la société CERITHERM condamnée à payer à la société CAPE SOCAP la somme de 41.947,30 € avec intérêts calculés conformément aux dispositions de l’article L 441-6 alinéa 8 du Code de commerce à compter de la date d’exigibilité des factures ; que rien ne permet en effet d’écarter en l’espèce l’application de ces dispositions qui s’appliquent de manière obligatoire même si les parties n’ont rien prévu, leur objet même étant de suppléer l’absence de conditions générales convenues entre les parties ;

Et attendu qu’en passant commande le 29 juillet de travaux supplémentaires et en prévoyant expressément, à cette occasion, la restitution de la zone pour le 5 août 2010 au plus tard, la société CERITHERM a nécessairement admis tant la nécessité de travaux supplémentaires que la prorogation du chantier ; qu’elle ne saurait par ailleurs réclamer désormais à la société CAPE SOCAP, sans aucun accord préalable, paiement de prestation ou de mise à disposition de matériels alors même qu’elle lui écrivait par courriel du 21 juillet 2011 ; « je sais que la situation est un peu tendue du fait des contraintes de délai très fortes : coupure électrique de 3 jours où il est impératif d’intervenir sur les cables électriques , et le confinement gêne pour cela . Soyez sûr de notre entier support pour l’avancée du projet : mise à disposition de 2 marteaux piqueurs, d’un chariot élévateur 3 jours, du déplacement des échafaudages par mon personnel ---- nous devons travailler ensemble pour aller au bout » étant observé d’ailleurs qu’à cette date le délai de restitution était d’ores et déjà dépassé sans que la société CERITHERM, qui s’étonne certes d’un arrêt du chantier « entre le mercredi après-midi 13 juillet et le mercredi 20 juillet matin, venue de M. X… », en fasse alors reproche à la société CAPE SOCAP ; que la société CERITHERM sera en conséquence déboutée de sa demande en dommages et intérêts ;

Attendu enfin que la société CERITHERM sera condamnée à payer à la société CAPE SOCAP la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

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PAR CES MOTIFS

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LA COUR

Statuant par décision contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

REFORME le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la société CERITHERM à payer à la société CAPE SOCAP la somme de 41.947,30 € avec intérêts calculés conformément aux dispositions de l’article L 441-6 alinéa 8 du Code de commerce à compter de la date d’exigibilité des factures,

DEBOUTE la société CERITHERM de sa demande reconventionnelle,

CONDAMNE la société CERITHERM à payer à la société CAP SOCAP la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

CONDAMNE la société CERITHERM aux dépens d’instance et d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Marie-Christine MANAUD. Martine JEAN.

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Textes cités dans la décision

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