Cour d'appel de Limoges, Chambre sociale, 8 avril 2019, n° 18/00615

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Limoges, ch. soc., 8 avr. 2019, n° 18/00615
Juridiction : Cour d'appel de Limoges
Numéro(s) : 18/00615
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Limoges, 27 mai 2018
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N° .

N° RG 18/00615 – N° Portalis DBV6-V-B7C-BH2GI

AFFAIRE :

SA G H I SERVICE Agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social.

C/

Y X

JPC/MLM

Rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur

G à Me Clerc, le 8/4/19

COUR D’APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE ECONOMIQUE ET SOCIALE

------------

ARRÊT DU 08 AVRIL 2019

-------------

A l’audience publique de la Chambre économique et sociale de la cour d’appel de LIMOGES, le huit Avril deux mille dix neuf a été rendu l’arrêt dont la teneur suit ;

ENTRE :

SA G H I SERVICE Agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social.

dont le […]

représentée par Me Philippe CLERC, avocat au barreau de LIMOGES

APPELANTE d’un jugement rendu le 28 Mai 2018 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LIMOGES

ET :

Monsieur Y X, demeurant […]

représenté par Me Olivier BROUSSE, avocat au barreau de LIMOGES substitué par Me Sandra BRICOUT, avocat au barreau de BRIVE

INTIME

---==oO§Oo==---

L’affaire a été fixée à l’audience du 04 Mars 2019, après ordonnance de clôture rendue le 23 janvier 2019.

Conformément aux dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile, Madame E F, Présidente de Chambre, et Monsieur Jean-Pierre COLOMER, Conseiller, magistrat rapporteur, assistés de Monsieur C D, Greffier, ont tenu seuls l’audience au cours de laquelle il a été entendu en son rapport oral, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients et ont donné leur accord à l’adoption de cette procédure.

Après quoi, Monsieur Jean-Pierre COLOMER, Conseiller, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 08 Avril 2019, par mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la Loi.

Au cours de ce délibéré Monsieur Jean-Pierre COLOMER, Conseiller, a rendu compte à la cour composée de Madame E F, Présidente de Chambre, de lui-même et de Madame A B, Conseillers.

A l’issue de leur délibéré commun a été rendu à la date fixée, l’arrêt dont la teneur suit par mise à disposition au greffe.

LA COUR

EXPOSE DU LITIGE :

La SA G H I Services (LFAS) est spécialisée dans le secteur d’activité des transports aériens de passagers.

A la suite de l’ouverture de nouvelles lignes au départ de l’aéroport de Limoges, elle a engagé M. X en qualité de personnel navigant commercial dans le cadre d’un contrat de travail à durée déterminée en date du 29 septembre 2015, conclu pour une durée de 6 mois prenant fin le 28 mars 2016.

Par contrat du 29 mars 2016, les parties ont poursuivi la relation contractuelle dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée à temps complet, M. X demeurant affecté à l’aéroport de Limoges.

Le 3 avril 2016, M. X a adressé un courrier électronique à son employeur afin de dénoncer un incident qui avait eu lieu le 31 mars précédent avec le capitaine Bianchi à l’occasion du vol Limoges/Lyon. Il expliquait que le pilote initialement prévu n’avait pu assurer le vol et que le capitaine Bianchi avait été chargé de le remplacer. Celui-ci s’était présenté avec retard après avoir effectué une simulation à Toulouse de 20h à 4h et s’être rendu directement à l’aéroport de Limoges pour assurer le vol de 8h30. Il indiquait qu’il avait trouvé le pilote stressé et fatigué et lui avait demandé s’il se sentait apte à voler. Il ajoutait qu’à leur arrivée à Lyon, le pilote lui avait fait savoir sur un ton d’une rare violence que c’était la première et la dernière fois qu’il lui demandait s’il se sentait apte à voler devant les passagers.

Aux termes de son rapport, M. X indiquait à son employeur qu’il considérait que le pilote avait manqué à plusieurs règles élémentaires de sécurité.

Le 6 avril, l’employeur lui a répondu que le capitaine Bianchi était un homme d’expérience et qu’il n’avait fait l’objet d’aucun reproche.

Par la suite, M. X a été à nouveau affecté sur les vols commandés par l’intéressé mais il a refusé de voler avec lui.

Le 7 avril, la société LFAS lui a demandé des explications quant à ses absences des 5, 6 et 7 avril 2016. M. X a justifié ses absences par son refus de voler avec le capitaine Bianchi.

Le 14 avril 2016, son employeur l’a convoqué en vue d’un entretien concernant son comportement. Cet entretien devait se tenir le 20 avril dans les locaux portugais de la compagnie d’I. M. X ne s’y est pas présenté en raison d’un arrêt de travail prenant effet le même jour. Cet arrêt a été prolongé jusqu’au 31 mai suivant.

M. X a fait l’objet d’un nouvel arrêt de travail du 19 juillet au 14 août 2016 et son employeur a considéré qu’il était en situation d’absence injustifiée pour la période intermédiaire du 1er juin au 18 juillet 2016. M. X a contesté cela en prétendant lui avoir adressé un arrêt de travail qui aurait ensuite été égaré.

Par courrier du 31 août 2016, la société LFAS lui a demandé de justifier de son absence du 1er juin au 18 juillet 2016 et de celle à compter du 15 août 2016.

Dans un courrier électronique du 9 septembre 2016, M. X a fait observer à son employeur que depuis plusieurs mois, il était systématiquement positionné dans les plannings en position 'stand-by’ ou 'off'.

==oOo==

Par requête en date du 24 avril 2017, M. X a saisi le conseil de prud’hommes de Limoges en vue d’obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail en faisant grief à son employeur de ne pas respecter son obligation de lui donner le travail convenu.

Par jugement en date du 28 mai 2018, le conseil de prud’hommes a :

— prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. X aux torts exclusifs de la société LFAS ;

— condamné la société LFAS à payer à M. X les sommes suivantes :

• 32 129,03 € bruts à titre de salaire, (21 mois et 13 jour) et 3 213 € bruts au titre des congés payés y afférents ;

• 3 000 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 300 € bruts au titre des congés payés y afférents ;

• 875 € au titre de l’indemnité de licenciement ;

• 4 500 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

• 1 300 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— ordonné la remise des documents sociaux correspondants sous astreinte ;

— condamné la société LFAS aux entiers dépens.

La société LFAS a régulièrement interjeté appel de cette décision le 25 juin 2018, son recours portant sur l’ensemble des chefs du jugement.

==oOo==

Aux termes de ses écritures déposées le 19 septembre 2018, la société LFAS demande à la cour d’infirmer la décision des premiers juges et, statuant à nouveau, de :

— débouter M. X de l’ensemble de ses demandes ;

— condamner M. X aux entiers dépens et à lui payer 4 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

A l’appui de son recours, la société LFAS soutient qu’en matière de résiliation judiciaire, il appartient au salarié de rapporter la preuve que son employeur a manqué à ses obligations contractuelles de façon suffisamment significative pour que la rupture du contrat de travail puisse être prononcée en sa faveur et qu’à défaut, il doit être considéré comme démissionnaire.

Elle conteste les allégations de M. X concernant l’absence de fourniture de travail et souligne que celui-ci a manqué à ses obligations en ne justifiant pas de ses absences et en refusant la planification des vols qui lui était adressée.

Aux termes de ses écritures déposées le 18 décembre 2018, M. X demande à la cour de confirmer la décision des premiers juges sauf en ses dispositions relatives au salaire et à l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et, statuant à nouveau :

— condamner la société LFAS à lui payer les sommes suivantes :

• les salaires du 15 août 2016 au jour de la décision dont appel augmentés des congés payés ;

• 9 000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

• 2 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner la société LFAS aux entiers dépens.

Il soutient principalement que son employeur ne lui a pas fourni de travail à compter du 15 août 2016 alors même qu’il est resté sa disposition de manière permanente.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 23 janvier 2019.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il convient de se référer à leurs écritures.

SUR CE,

Sur la démission :

Il est admis que la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail.

En l’espèce, le dernier arrêt de travail pour maladie de M. X a pris fin le 14 août 2016. Il se déduit de la mise en demeure que lui a adressée son employeur le 31 août 2016 que M. X n’a pas repris son service et ne s’est pas manifesté. Le salarié ne rapporte pas la preuve contraire.

Pour autant, cette absence injustifiée ne permet pas de caractériser une volonté claire et non équivoque de mettre fin au contrat de travail et ce, d’autant plus, M. X a déjà été en situation d’abandon de poste du 1er juin 2016 au 14 juillet 2016 puisqu’il n’a jamais fourni de justificatif à son employeur.

Il convient d’ailleurs de relever s’agissant de cette absence injustifiée qu’il a prétendu que son employeur avait égaré l’arrêt de travail qu’il lui avait envoyé par mail comme cela résulte des courriels des 21 juillet et 09 septembre 2016 mais que pour autant, dans le cadre de la présente instance, il s’est dispensé de produire tout justificatif d’absence pour cette période.

Il ne résulte pas donc pas de ces éléments que M. X a entendu démissionner de son poste. Le moyen sera rejeté.

Sur la demande de résiliation du contrat de travail :

La résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur suppose que le salarié rapporte la preuve que les manquements de l’employeur sont d’une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation contractuelle.

En l’espèce, M. X reproche à son employeur de ne plus lui avoir fourni de travail à compter du 15 août 2016, faute de l’avoir affecté sur des vols.

Le contrat de travail de M. X mentionne qu’il a été recruté en qualité de personnel navigant et qu’il « exercera ses fonctions à bord des avions exploités par G H I SERVICES ainsi qu’au sol, dans la mesure où le nécessiteront la préparation et l’accomplissement des vols ».

En vertu de cette clause, la société LFAS avait donc la possibilité de l’affecter au sol comme elle l’a exceptionnellement prévu dans les plannings pour la période du 19 au 28 août 2016 inclus, étant précisé que sur cette période de 10 jours, il a été affecté pendant 5 demi-journées au sol et a été placé pendant cinq jours en repos.

Le planning de la période du 29 août au 14 septembre 2016 n’est pas produit. Il n’est donc pas démontré que l’employeur avait prévu une affectation pour son salarié au cours de cette période. Cela étant, M. X est malvenu à en faire grief à son employeur qui l’a mis en demeure le 31 août 2016 de justifier de ses absences pour la période du 1er juin au 18 juillet 2016 ainsi que celle à compter du 15 août 2016, ce qu’il n’a pas fait.

La société LFAS produit le planning de M. X pour la période du 15 septembre au 8 octobre 2016, lequel fait clairement apparaître que celui-ci était à nouveau affecté sur des vols lorsqu’il n’était pas placé en situation de repos (cinq jours au cours de la période) mais M. X a informé son employeur dès le 13 septembre qu’il refusait de travailler au motif que l’employeur n’avait pas respecté le délai de prévenance et qu’il allait saisir le conseil de prud’homme.

Cet écrit est manifestement en contradiction avec l’allégation selon laquelle il s’était tenu à la disposition permanente de son employeur à compter du 15 août 2016.

En outre, en l’état des pièces et des allégations des parties, il n’apparaît pas que M. X avait eu à ce plaindre précédemment d’un manquement de son employeur à ce délai et, dans ces conditions, son refus de prendre son service apparaît disproportionné au manquement de l’employeur qu’il évoquait pour la première fois.

Enfin, il n’est pas justifié à partir du 8 octobre 2016 que l’employeur a continué à lui fournir du travail.

Au vu de ces éléments, il apparaît que l’employeur qui n’a pas tiré les conséquences de l’abandon de poste de M. X a cessé de lui fournir du travail à compter du 8 octobre 2016, ce qui constitue un manquement certain à ses obligations mais ce manquement ne présente pas une gravité justifiant la rupture du contrat aux torts de l’employeur au regard des manquements commis par le salarié.

En conséquence, il y a lieu de débouter M. X de sa demande de résiliation du contrat de travail. La décision des premiers juges sera donc infirmée.

Sur les autres demandes :

A la suite de la présente procédure, la société LFAS a exposé des frais non compris dans les dépens. L’équité commande de l’en indemniser. M. X sera condamné à lui payer la somme de 800 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire, en dernier ressort, par mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Infirme le jugement du conseil de prud’hommes de Limoges en date du 28 mai 2018 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Déboute M. X de l’ensemble de ses demandes,

Condamne M. X à payer à la société LFAS la somme de 800 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. X aux entiers dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

C D. E F

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
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