Cour d'appel de Lyon, 23 juin 2003, n° 05/07532

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 23 juin 2003, n° 05/07532
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 05/07532
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lyon, 9 novembre 2005, N° F02/04919

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLEGIALE

R.G : 05/07532

Y

C/

Me X – Mandataire liquidateur de la SARL CLIMOVENT SYSTEM FRANCE

Me I X – Administrateur judiciaire de la SARL CLIMOVENT SYSTEM FRANCE

SARL CLIMOVENT SYSTEM FRANCE

CGEA DE CHALON SUR SAONE

APPEL D’UNE DECISION DU :

Conseil de Prud’hommes de LYON

du 10 Novembre 2005

RG : F 02/04919

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 23 JUIN 2003

APPELANT :

Monsieur J Y

XXX

« Villa Victoria »

XXX

Représenté par Maître MONOD, avocat au barreau deLyon

INTIMEES :

Me X – Mandataire liquidateur de la SARL CLIMOVENT SYSTEM FRANCE

XXX

XXX

représenté par Me Jean-Jacques BERTAGNA, avocat au barreau de PARIS substitué par Me GRANDPEY, avocat au même barreau

CGEA DE CHALON SUR SAONE

XXX

XXX

XXX

représenté par Me Cécile ZOTTA, avocat au barreau de LYON substitué par Me PALLANCA, avocat au barreau de LYON

PARTIES CONVOQUEES LE : 12 Décembre 2005

DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 26 Mai 2006

Madame Christine DEVALETTE, magistrat chargée d’instruire l’affaire assistée pendant les débats de madame Malika CHINOUNE, Greffier a entendu les plaidoiries en présence de Monsieur CATHELIN, Conseiller, les parties ou leur Conseil ne s’y étant pas opposés. Elle en a fait part à la Cour dans son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Elisabeth PANTHOU-H, Président

Madame Christine DEVALETTE, Conseiller

Monsieur Georges CATHELIN, Conseiller

ARRET : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le , par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Signé par Madame Elisabeth PANTHOU-H, Président, et par Madame Malika CHINOUNE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

LA COUR,

Monsieur Y a été engagé par la société FITTING VENTILATION FACTORY (FVF) par contrat à durée déterminée puis en contrat à durée indéterminée à compter du 1er Octobre 1996, comme responsable administratif et financier.

Dans le cadre d’un plan de reprise faisant suite à une procédure collective , la SARL CLIMOVENT, de droit italien , a racheté la société FVF , opération commerciale qui s’est traduite par la création de la société CLIMOVENT SYSTEM France SARL, dont Monsieur Z était nommé gérant .

Le contrat de Monsieur Y a été repris comme celui de plusieurs autres responsables de l’ancienne société .

Sur information concernant des malversations commises au sein de la société française , l’employeur a sollicité la réalisation d’un audit en Juillet 2002.

Au vu des résultats de cet audit , la SARL CLIMOVENT SYSTEM FRANCE a convoqué Monsieur Y à un entretien préalable le 7 Octobre 2002, avec mise à pied conservatoire , et , à l’issue de l’entretien qui s’est déroulé le 14 Octobre 2002, lui a notifié par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 Octobre 2002 son licenciement pour faute lourde dans les termes suivants :

'Nous vous avons fait part lors de notre entretien le 14 octobre 2002 des agissements que nous avons pu relever à votre encontre, d’une particulière gravité et constitutifs d’une faute lourde car ils témoignent d’une intention de nous nuire.

Vous êtes devenu, compte tenu de mon domicile italien et de mes

fonctions de gérant au sein de la société italienne CLIMOVENT

SYSTEM, dirigeant de fait de la société CLIMOVENT SYSTEM

FRANCE.

A ce titre il vous appartenait d’agir envers la société CLIMOVENT SYSTEM FRANCE avec intégrité et en « bon père de famille ».

Or, les faits que nous avons relevés à votre encontre, et malheureusement seulement à compter de la deuxième semaine du mois de septembre 2002, sont d’une extrême gravité et révèlent une intention-de nuire à notre société, sans conteste.

Ainsi, de part vos fonctions de « gérant de fait » de la société CLIMOVENT SYSTEM FRANCE, vous étiez en charge de l’achat des matières premières, de la vente de produits finis, de la gestion opérationnelle de la production, de l’embauche du personnel, des relations avec les banques et vous disposiez à ce titre de la signature bancaire. Ceci traduisait notre totale confiance en vous.

Cependant, nous avons récemment été informés d’un certain nombre de faits démontrant que vous avez délibérément défavorisé la société CLIMOVENT SYSTEM SERVICES au profit notamment d’une autre société dénommée « ALT SERVICES’ dans laquelle vous êtes indirectement intéressé.

Nous vous rappelons que la société CLIMOVENT SYSTEM FRANCE et la société italienne CLIMOVENT SYSTEM avait des relations de mère et fille puisque intervenant dans un même secteur d’activité. Elles étaient donc mutuellement et réciproquement cliente et fournisseur l’une de l’autre pour différentes sortes de produits. Vous en étiez parfaitement informé!

Malgré cela, à la fin de l’année 2001, nous avons appris que les commandes de certains produits de la société CLIMOVENT SYSTEM FRANCE avaient chuté de façon importante et ce depuis quelques mois. Votre inaction en la matière semblait inquiétante. Aussi, nous avons multiplié nos déplacements a VOURLES aux fins de vérifications.

Ce n’est qu’au cours de la deuxième semaine du mois de septembre 2002 que nous avons découvert l’ensemble des faits que nous vous reprochons.

1°) Il s’avère que notre société a vendu des matières premières à une société dénommée ALT SERVICES et ce en totale contradiction avec notre activité puisque, s’il est utile de vous le rappeler, notre société achète des matières premières qu’elle utilise aux fins de réalisation de produits finis, qu’elle vend ensuite à sa clientèle. Notre activité ne consiste en aucun cas à acheter des matières premières en vue de leur revente en l’état. Ainsi, la vente de matières premières à la société ALT SERVICES s’est éffectuée en contradiction totale avec notre activité.

Cet état de faits a fait bénéficier à la société ALT SERVICES des conditions avantageuses de paiements que nous avons auprès de sociétés d’affacturage. Ainsi, une activité de financement de la société ALT SERCICES s’est réalisée au détriment de la société CLIMOVENT SYSTEM FRANCE puisque la marge réalisée par notre société a été très faible.

De même, il est apparu que la société CLIMOVENT SYSTEM FRANCE a acheté différents produits à la Société ALT SERVICES. Les deux sociétés se sont donc retrouvées tour à tour être cliente et fournisseur l’une de l’autre.

Mais quelle n’a pas été notre surprise lorsque nous avons constaté que la société ALT SERVICES, Société à Responsabilité Limitée, au capital de 20.600 euros, était détenue à 33,33 % par la SCI du MONTCORIN, détenue elle-même à 50 % par vous-même et à 50 % par Monsieur A.

Et plus encore, au cours de l’année 2001, notre société a acheté auprès de la société ALT SERVICES du matériel pour une somme de 158.850,85 euros alors même qu’une partie de ce matériel aurait pu être achetée auprès de la société italienne CLIMOVENT SYSTEM ce qui aurait permis une économie de 3.277,92 euros !

Ces faits devaient se reproduire au cours des cinq premiers mois de l’année 2002, puisqu’à nouveau, la société CLIMOVENT SYSTEM FRANCE achetait auprès de la société ALT SERVICES pour 62.726,93 euros de marchandises. Sur ce montant de marchandises la société CLIMOVENT SYSTEM FRANCE aurait pu se fournir auprès de la société italienne CLIMOVENT SYSTEM et faire une économie de 313,82 euros ! Ceci ressort clairement d’un audit effectué à la demande de la société italienne CLIMOVENT SYSTEM les 23 et 24 juillet 2002 et dont nous avons eu connaissance qu’au cours du mois de septembre 2002 et duquel il ressort en page 12 que « les ventes par CLIMOVENT SYSTEM FRANCE de gaines alumines achetées à ALT SERVICES telles qu’elles ressortent de notre contrôle, font apparaître des marges faibles, voire négatives ».

Ces éléments ne font que démontrer votre intention de nuire à notre société au profit de la société ALT SERVICES dans laquelle vous avez une participation indirecte.

Il ressort également des comptes de la société CLIMOVENT SYSTEM FRANCE nous avons réalisé un chiffre d’affaires de 3.406.507 euros nous permettant de dégager une marge moyenne de 25 %. Or, la marge réalisée avec la société ALT SERVICES, cliente de notre société CLIMOVENT SYSTEM FRANCE, pour la même année de référence, n’était que de 8 %, telle qu’il ressort du document intitulé « Hit Parade Clients » que nous n’avons pas manqué de vous présenter lors de notre entretien.

Cette très faible marge réalisée avec la société ALT SERVICES

par rapport à la marge moyenne, confirme nos inquiétudes quant aux prix de vente que vous avez pratiqué au profit de la société ALT SERVICES au cours de l’année 2002 en comparaison des prix pratiqués normalement.

2°) Nous avons également pu relever à votre encontre des faits indigne d’un gérant de société et constitutifs de faits pénalement répréhensibles.

Ainsi, nous avons découvert que des chèques cadeaux avaient été achetés auprès de l’enseigne Décathlon Pro, au nom de notre société, la société CLIMOVENT SYSTEM FRANCE, laquelle avait réglé la facture correspondante mais dont les bénéficiaires exclusifs étaient Monsieur K A et pour la plus grande majorité vous-même.

En effet, 91 chèques d’un montant unitaire hors taxes de 22,87 euros et 130 chèques d’un montant unitaire hors taxes de 30 euros ont été payés par la société CLIMOVENT SYSTEM FRANCE en 2001 et 2002 et vous en avez été le destinataire.

Après vérifications, Monsieur B de l’enseigne « Décathlon Pro » nous a indiqué que ces chèques cadeaux avaient été envoyés à votre attention à l’adresse de notre société ! Notre présomption d’utilisation personnelle des chèques cadeaux payés par la société CLIMOVENT SYSTEM FRANCE est sans conteste étant donné la période d’achat de ces chèques cadeaux, savoir juillet 20Q1 et janvier 2002, soit des périodes ne correspondant pas à celles des cadeaux de C. Ces faits totalement répréhensibles, ne font que nuire au bon fonctionnement de la société.

3°) De plus, il apparaît que différentes personnes ont participé à une formation au sein de là société CETIAT, intitulée « perte de charge » le 16 janvier 2001 et pour un montant TTC de 856,95 euros. Un examen détaillé de la facture de cette société permet de constater qu’ont participé à cette formation Monsieur A, Monsieur D, Monsieur E et Monsieur F.

Or, si deux de ces personnes sont salariées de la société, Monsieur E et Monsieur F ne font pas partie du personnel de notre entreprise mais ce dernier se trouve être le gérant de la société ALT SERVICES ! Il apparaît donc clairement que vous avez délibérément fait usage des pouvoirs dont vous disposiez au sein de notre entreprise dans un sens contraire aux intérêts de notre société pour favoriser la société dans laquelle vous avez une participation indirecte via la Société Civile Immobilière du MONTCORIN, savoir la société ALT SERVICES.

4°) Votre mauvaise gestion de la société a entraîné un interdit bancaire que vous vous êtes bien gardé de nous révéler et pour cause ! Cela devait sans aucun doute, favoriser les intérêts de la société ALT SERVICES, ainsi que de la société « Ventilations du Ponant », dans laquelle il semble que vous ayez également une participation et que vous ayez avantagé au détriment des intérêts de notre société.

5°) Enfin, en votre qualité de gérant, vous étiez en charge notamment de la gestion du personnel et de la gestion financière de l’entreprise.

Or:

— Vous avez laissé Monsieur A modifier, de sa propre initiative, les composantes de sa rémunération. Or, il s’agit là d’une modification de son contrat de travail qui n’a pas été soumis à l’accord de la Direction de la société et qui se trouve donc en totale contradiction avec les dispositions légales en vigueur.

— Vous n’avez pas procédé aux vérifications préalables obligatoires et nécessaires des frais de déplacement et de restaurants présentés par Monsieur A (les frais de déplacement, notamment les frais d’essence sont abusivement élevés et les frais dé restaurant ne comportent ni la date ni la mention de la TVA, ce qui met la société en défaut face à l’administration fiscale).

L’ensemble des faits ci-dessus exposés témoignent de votre comportement antiprofessionnel.

Dans ces conditions, votre conduite mettant en cause la bonne marche du service et vos explications recueillies au cours de notre entretien du 14 octobre courant ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation des faits.

Aussi, nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier pour faute lourde.'

Le 5 Novembre 2002, Monsieur Y a saisi le Conseil des Prud’hommes de LYON en contestation de son licenciement .

Le 7 Novembre 2002, l’employeur s’est constitué partie civile devant le doyen des juges d’instruction de Lyon du chef d’abus de biens sociaux en mettant en cause Monsieur Y . Cette instruction s’est terminée par une ordonnance de non-lieu rendue le 2 Avril 2004.

D’autre part , par jugement du 21 Octobre 2003, le Tribunal de Commerce de LYON a prononcé le redressement judiciaire de la SARL CLIMOVENT SYSTEM France et a désigné L X et G respectivement comme administrateur judiciaire et représentant des créanciers .

Le 26 Février 2004, le redressement judiciaire a été converti en liquidation judiciaire et Maître G a été nommé en qualité de liquidateur judiciaire .

Par jugement du 10 Novembre 2005, le Conseil des Prud’hommes a dit que le licenciement reposait sur une faute lourde et a débouté en conséquence Monsieur Y de toutes ses demandes .

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 22 Novembre 2005, Monsieur Y a interjeté appel de ce jugement .

****

Monsieur Y demande l’infirmation du jugement , contestant en premier lieu sa qualification de gérant de fait , qualification expressément écartée par l’ordonnance de non lieu .

En sa qualité de salarié de la société , n’ayant aucun pouvoir décisionnaire ou de direction , Monsieur Y conteste le caractère réel et sérieux du licenciement :

— invoquant en 1er lieu, la prescription des griefs énoncés dans la lettre de licenciement du 17 Octobre 2002, l’employeur en ayant eu connaissance , concernant les achats de marchandises auprès de sociétés tierces ou sous – traitantes , au fur et à mesure de leur passation courant 2001 puis au cours des 5 premiers mois de l’année 2002, et en tout cas , pour les autres griefs , au moment de l’audit en Juillet 2002;

— rappelant que la décision pénale de non -lieu sur des faits strictement identiques à ceux visés dans la lettre de licenciement a autorité de chose jugée ;

— indiquant que les griefs sont infondés

* les achats effectués auprès de la société ALT SERVICES , dans lequel il n’a qu’une participation minoritaire , dans le cadre d’une SCI se sont effectués au prix du marché et ont généré une marge de 17 % pour la SARL CLIMOVENT SYSTEM FRANCE

*le salaire de Monsieur A n’ayant entraîné aucune observation de la part du gérant de la société employeur ;

* les chèques cadeaux ayant été simplement livrés au domicile de Monsieur A et non utilisés de manière abusive par ce dernier ou par lui-même ,

* la participation de deux clients à une formation commandée par la société CLIMIVENT n’ayant occasionné aucun préjudice à celle-ci puisque cette formation avait un coût forfaitaire ;

Monsieur demande la fixation de sa créance à la liquidation de la SARL CLIMOVENT SYSTEM France aux sommes suivantes:

—  14 025 € d’indemnité compensatrice de préavis ,

—  1402,50€ de congés payés afférents ,

—  4000€ de congés payés sur la période référence ,

—  56 100€ de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ,

—  5500€ d’indemnité conventionnelle de licenciement ,

—  15 000€ de dommages-intérêts pour circonstances vexatoires de la rupture ,

—  1500€ au titre de l’article 700 du NouveauCode de Procédure Civile ;

Monsieur Y demande que le jugement soit déclaré commun à l’AGS- CGEA de Chalon/Saône.

****

Maître G , es qualités , demande ,in limine litis , que l’action de Monsieur Y soit déclarée irrecevable , rappelant en 1er lieu que la décision de non lieu est dépourvue d’autorité de chose jugée, s’agissant de surcroît de faits de nature différente, et que la juridiction prud’homale conserve tout pouvoir d’appréciation sur la qualité de gérant de fait de Monsieur Y qui disposait d’une procuration bancaire , qui était chargé de toute la gestion , du contrôle et de la production de sorte qu’il n’établit pas de lien de subordination avec le gérant domicilié en Italie et que le contrat de travail est fictif .

Subsidiairement , Maître G, es qualités , demande la confirmation du jugement qui a retenu la faute lourde , les faits n’étant pas prescrits et constituant un comportement déloyal grave , sciemment commis pour nuire à l’entreprise française et à la société mère italienne au profit de sociétés concurrentes dans lesquelles Monsieur Y avait des participations .

Encore plus subsidiairement , si la faute grave devait être simplement retenue , Maître G, demande le rejet des prétentions de Monsieur Y relatives à l’indemnité de congés payés sur laquelle il ne fournit aucun justificatif , comme le rejet de la demande de dommages-intérêts ,qui n’est pas justifiée au delà du minimum légal de 6 mois , au cas où la Cour retiendrait que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse .

Maître G, es qualités , demande le rejet de toutes les autres demandes et la condamnation de Monsieur Y à verser à la liquidation la somme de 2000€ sur le fondement de l’article 700 du NouveauCode de Procédure Civile.

****

l’AGS- CGEA de Chalon/Saône s’associe aux demandes du mandataire liquidateur , tant sur l’irrecevabilité de l’action engagée par Monsieur Y que sur le mal fondé de cette action et rappelle le caractère subsidiaire et les conditions et limites de sa garantie .

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la qualité de salarié de Monsieur Y :

Maître G, es qualités , et l’AGS- CGEA de Chalon/Saône réitèrent en cause d’appel l’irrecevabilité des demandes de Monsieur Y devant le Conseil des Prud’hommes , faute de lien de subordination , exception d’incompétence sur laquelle le Conseil des Prud’hommes de LYON n’a pas répondu avant de statuer sur le fond .

Cette exception toutefois n’est pas fondée dans la mesure , ou en présence d’un contrat de travail repris et de bulletins de salaire , il incombe à la partie qui invoque la fictivité d’un tel contrat de travail apparent d’en apporter la preuve , ce qui ne saurait résulter uniquement de la large délégation de pouvoir accordée à Monsieur Y , d’autant qu’en l’espèce , l’employeur a précisément exercé son pouvoir disciplinaire en le licenciant pour faute lourde Les demandes formées par Monsieur Y , en tant que salarié de la SARL CLIMOVENT SYSTEM France en liquidation judiciaire , sont donc parfaitement recevables.

Sur le fond :

Il résulte de la combinaison des articles L122-6, L122-8 ,L122-14-2 (alinéa 1er ) et L223- 14 du Code du Travail qu’il appartient à l’employeur qui se prévaut d’une faute lourde du salarié de rapporter la preuve dans les limites tracées par la lettre de licenciement , d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables à, celui-ci qui constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis et qui traduit de surcroît une intention de nuire à son employeur, étant rappelé, sur la question de la preuve , qu’un non-lieu n’a pas autorité de chose jugée .

Selon l’article L122-44 du Code du Travail , dés lors qu’un fait fautif a été commis plus de deux mois avant l’engagement de poursuites disciplinaires , il appartient à l’employeur de rapporter la preuve de ce qu’il n’en a eu connaissance que dans les deux mois ayant précédé l’engagement de ces poursuites .

En l’espèce , concernant le grief de détournement de chèques cadeaux achetés en Juillet 2001 et Janvier 2002 ou de participation de personnes étrangères à la société à une formation qui s’est déroulée le 16 Janvier 2001 ou enfin d’acceptation d’une modification substantielle du contrat de travail de Monsieur A au début de l’année 2001, ces faits sont prescrits , dés lors que rien dans la lettre de licenciement ou dans les pièces produites aux débats ne permet de retenir que l’employeur ait eu connaissance de ces faits dans les deux mois précédant l’enclenchement de la procédure de licenciement.

En revanche , tout ce qui concerne les griefs liés aux relations avec la société ALT SERVICES n’est pas prescrit , dans la mesure où ,comme la SARL CLIMOVENT SYSTEM France l’indique dans la lettre de licenciement, l’intégralité de la situation n’ a été portée à sa connaissance qu’en Septembre 2002, à l’issue du rapport d’audit confié au cabinet CCI Conseils fin Juillet 2002.

Il ressort des éléments recueillis dans ce rapport et des statuts des sociétés ALT SERVICES et SCP du MONTCORIN que Monsieur Y a une participation dans la société ALT SERVICES par le biais de la société civile de portefeuilles du MONTCORIN, dans laquelle il possède 50 % des parts avec Monsieur K A et qui détient elle-même 33% de ALT SERVICES .

Il est également établi et non contesté que Monsieur Y , Directeur administratif et financier a vendu à la société ALT SERVICES des matières premières normalement destinées à être transformées pour être revendues en produits finis par la SARL CLIMOVENT SYSTEM , faisant bénéficier ainsi la société ALT SERVICES des conditions favorables de paiement accordées par les sociétés d’affacturage, avec une marge très faible pour son employeur et en contradiction avec l’activité de celui-ci .

Il est également établi que la SARL CLIMOVENT SYSTEM France , dirigée par Monsieur Y, a acheté , courant 2001,à la société ALT SERVICES du matériel pour une somme de 158 850,85 € , puis en 2002, à hauteur de 62 726,93 €, avec un surcoût certes très faible , mais au mépris du privilège devant être accordé à la société mère italienne qui aurait pu lui fournir ce matériel . Enfin , les ventes réalisées par la SARL CLIMOVENT SYSTEM FRANCE à la société ALT SERVICES font apparaître des marges de 8 % alors que la marge moyenne dégagée était , sur la période de référence, de 25 %.

Ces faits de favoritisme au profit d’une société dans laquelle le salarié détient une participation , au détriment de la société qui l’emploie et de la société mère située à l’étranger , caractérisent de la part d’un dirigeant comme Monsieur Y , un grave manquement aux règles de loyauté rendant impossible le maintien du contrat de travail pendant le préavis, et une volonté certaine de nuire à son employeur dans la mesure où la société favorisée a été créée en Décembre 2000, soit postérieurement au rachat de la société FVF et à la reprise des contrats de travail, et que la participation à cette société de Monsieur Y et de Monsieur A, autre salarié repris, était dissimulée derrière la SCP du MONTCORIN .

Le jugement qui a considéré que la faute lourde était établie à l’encontre de Monsieur Y et qui a débouté celui-ci de toutes ses demandes , doit être confirmé , y compris sur le rejet de la demande de dommages-intérêts pour circonstances vexatoires de la rupture que Monsieur Y ne caractérise pas autrement qu’en faisant référence à une plainte pénale postérieure au licenciement .

L’équité commande qu’il ne soit pas fait application de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile .

Le présent arrêt est nécessairement commun à l’AGS- CGEA de Chalon/Saône qui est partie à la présente instance .

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

— Confirme le jugement déféré ;

— Dit n’y avoir lieu de faire application de l’article 700 du NouveauCode de Procédure Civile ;

— Condamne Monsieur J Y aux dépens de la procédure d’appel .

LE GREFFIER LE PRESIDENT

M. CHINOUNE E.PANTHOU-H

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  1. Code de procédure civile
  2. Code du travail
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