Cour d'appel de Montpellier, du 19 juin 2001, 99/04898

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Il résulte des dispositons de l’article 322, alinéa 2, du Code civil interprété a contrario que lorsqu’un enfant a un titre d’enfant légitime, le père n’est admis à contester sa paternité que s’il rapporte préalablement la preuve de l’absence de possession d’état conforme au titre de naissance. Cette possession d’état est établie dès lors que le père, en déclarant l’enfant à l’état civil comme son enfant légitime bien que se sachant dans l’incapacité de procréer, a affirmé pleinement et de manière non équivoque sa volonté de le considérer comme tel, et a par la suite normalement exercé les droits et rempli les devoirs d’un père à l’égard de son fils. La connaissance par le père légitime qu’il ne peut être le véritable géniteur ne suffit pas à démontrer que l’enfant n’est pas répu- té, même à l’égard des proches, être l’enfant légitime du couple

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 19 juin 2001, n° 99/04898
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 99/04898
Importance : Inédit
Textes appliqués :
Code civil, article 322, alinéa 2
Dispositif : other
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000006938199
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Texte intégral

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu le jugement rendu le 2 août 1999 par le Tribunal de Grande Instance de PERPIGNAN, qui a déclaré irrecevable l’action en paternité légitime introduite par X… Jean-Claude et débouté les défendeurs de leur demande fondée sur l’article 700 du N.C.P.C.;

Vu l’appel régulièrement interjeté par Mr X…;

Vu les conclusions notifiées le 25 avril 2001 par l’appelant, qui demande à la cour de déclarer son action recevable et fondée; de constater que la possession d’état d’enfant légitime de Julien X… n’est pas conforme à son titre de naissance et qu’elle est équivoque, discontinue et non paisible, et qu’il rapporte la preuve qu’il ne peut être son père biologique en raison de sa stérilité médicalement constatée; dire et juger en conséquence qu’il n’a aucun lien de filiation avec Julien X…, avec toutes les conséquences de droit qui en découlent; à titre subsidiaire, ordonner une

expertise biologique aux frais des défendeurs ayant pour objet de déterminer le taux de probabilité de sa non paternité; condamner les défendeurs in solidum au paiement de la somme de 10.000 francs sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

Vu les conclusions notifiées le 10 mai 2001 par Christiane FRELIER et Julien X…, qui sollicitent la confirmation de la décision entreprise et réclament le paiement de la somme de 10.000 francs TTC sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile;

Vu la communication de la cause au Ministère Public;

M O T I V A T I O Y…

L’action en contestation d’état d’enfant légitime exercée par Jean-Claude X… sur le fondement de l’article 322 alinéa 2nd du Code Civil interprété a contrario, ne se confond pas avec l’action en désaveu de paternité légitime régie par l’article 316 du Code Civil qui la soumet à une prescription de six mois; le non respect de ce délai ne prive donc pas le mari de la mère de la faculté d’introduire une action en contestation d’état d’enfant légitime dans le délai de droit commun de la prescription trentenaire. C’est à bon droit, en conséquence, qu’a été écarté le moyen fondé sur la prescription de cette action.

La recevabilité de l’action en contestation d’état d’enfant légitime doit donc être appréciée au regard des conditions définies par l’article 322 précité, dont il résulte que lorsqu’un enfant a un titre d’enfant légitime,-ce qui en l’espèce n’est pas discuté-, le père n’est admis à contester sa paternité que s’il rapporte préalablement la preuve de l’absence de possession d’état conforme au titre de naissance.

Selon les dispositions de articles 311-1 et 311-2 du Code Civil, la possession d’état doit être continue et non équivoque et se caractérise par une réunion suffisante de faits indiquant le rapport de filiation et de parenté entre un individu et la famille à laquelle il est dit appartenir; les principaux de ces faits sont le nom, le comportement et la notoriété, sans qu’il soit cependant nécessaire pour que la possession d’état soit établie que tous ces éléments soient réunis.

1) LE NOM

Jean-Claude X… n’a jamais prétendu que Julien X… ait porté depuis sa naissance un nom autre que le sien et se soit prévalu à un moment quelconque du nom de sa mère ou de celui d’un tiers.

2) LE COMPORTEMENT

Jean-Claude X…, qui selon les attestations produites savait depuis 1958 qu’il ne pouvait pas procréer, a déclaré Julien à l’état civil de la mairie de MONTREUIL le 9 mars 1979, jour de sa naissance, comme étant son enfant légitime issu de son mariage avec Christiane

FRELIER; ce faisant, il a affirmé pleinement et de manière non équivoque sa volonté de le considérer comme tel, et ce en pleine connaissance du fait qu’il ne pouvait être son géniteur.

Il n’a pas exercé dans le délai légal l’action en désaveu de l’article 316 du Code Civil.

Pendant toute la durée de vie commune des époux Z…, soit jusqu’au 17 décembre 1981, le jeune Julien, selon toutes apparences, a été entouré normalement de l’affection de ses parents.

Lors de la séparation du couple, le père a réclamé un droit de visite et d’hébergement sur l’enfant; le juge aux affaires matrimoniales a accédé à sa demande et mis à sa charge une contribution mensuelle à son éducation. Par jugement du 18 janvier 1983, le Tribunal de Grande Instance de PAU a maintenu ce droit de visite « en raison des liens affectifs unissant Monsieur X… à son fils »et en relevant l’attachement de Julien à son père, et a en outre confirmé la pension alimentaire allouée précédemment.

En obtenant un droit de visite et d’hébergement et en participant aux frais de son éducation, Monsieur X… a ainsi normalement exercé les droits et rempli les devoirs d’un père à l’égard de son fils.

Enfin, et alors que la possession d’état n’implique pas nécessairement une communauté de vie ou des relations constantes, Jean-Claude X… ne démontre pas ni même ne soutient avoir accompli un acte quelconque qui soit venu contester ou contredire cette possession durant les quinze années qui se sont écoulées entre le divorce prononcé le 18 janvier 1983 et le 28 septembre 1998, date

à laquelle, consécutivement à la demande de la Caisse d’Allocations Familiales en paiement d’un arriéré de pensions alimentaires réglées pour son compte, il a engagé son action en contestation d’état d’enfant légitime.

Il faut en déduire que Jean-Claude X…, bien qu’ayant toujours su dès avant sa naissance qu’il ne pouvait être son géniteur, a en pleine connaissance reconnu et déclaré Julien comme enfant légitime, n’a pas par la suite exercé d’action en désaveu et s’est comporté à son égard comme son père, et qu’il ne prouve pas avoir cessé à un moment quelconque de le considérer comme son fils avant la date de l’introduction de l’instance.

3) LA RÉPUTATION

Jean-Claude X… produit cinq attestations dont celles de son frère et d’une ancienne concubine déclarant savoir qu’il n’avait jamais pu avoir d’enfant et ne pouvait donc être le géniteur de Julien et que le couple ne s’en cachait pas .

Or ces seules pièces ne suffisent pas à établir que cette information ait été divulguée hors d’un cercle restreint pour se répandre dans le cadre général des relations scolaires, professionnelles et sociales de Julien X… et qu’il n’est pas publiquement tenu pour le fils légitime de celui dont il porte le nom.

Par ailleurs et surtout, la possession d’état d’enfant légitime, notion génératrice d’effets juridiques ayant pour but d’assurer la stabilité du nom patronymique dans l’intérêt de l’enfant et de ses descendants, ne saurait être assimilée à la seule filiation

biologique, sans incidence sur la possession d’état. En d’autres termes, la seule connaissance du fait que Jean-Claude X… n’est pas le véritable géniteur ne démontre pas pour autant que Julien n’est pas réputé, même à l’égard des proches, être l’enfant légitime du couple, et ce conformément à la volonté clairement exprimée par ses parents à sa naissance d’un commun accord et non démentie depuis lors.

Ces attestations sont donc inopérantes.

En définitive, force est de constater que Jean-Claude X… ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de l’absence d’une possession d’état continue et non équivoque conforme au titre de naissance.

Au contraire, tous les éléments objectifs du dossier convergent pour caractériser une telle possession dans les conditions définies aux articles 311-1 et 311-2 du Code Civil.

Tout porte à croire qu’en réalité, la demande de Jean-Claude X… ne procède que de sa volonté, motivée par de simples convenances personnelles récentes faisant peu de cas de l’intérêt de son fils légitime, de tenter de pallier l’absence d’exercice en temps utile de l’action en désaveu, ce qui est contraire tant à la lettre qu’à l’esprit de ces dispositions légales.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré irrecevable sa demande.

Succombant, Jean-Claude X… paiera en équité aux intimés la somme

de 10.000 francs sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et supportera tous les dépens.

P A R C E A… M O T I F A…

Confirme le jugement déféré.

Y ajoutant, condamne Jean-Claude X… à payer à Christiane FRELIER et à Julien X…, ensemble, la somme de 10.000 francs sur le fondement de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Le condamne aux dépens, avec droit de recouvrement direct au profit de Me GARRIGUE.

LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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