Cour d'appel de Papeete, Cabinet a, 28 octobre 2021, n° 20/00220

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Papeete, cab. a, 28 oct. 2021, n° 20/00220
Juridiction : Cour d'appel de Papeete
Numéro(s) : 20/00220
Décision précédente : Cour d'appel de Papeete, 22 août 2018, N° 282;17/00242
Dispositif : Ordonne la liquidation d'une astreinte

Sur les parties

Texte intégral

362

PG

--------------

Copie exécutoire

délivrée à :

— Me Maillard,

le 08.11.2021.

Copie authentique

délivrée à :

— Me Piriou,

le 08.11.2021.

REPUBLIQUE FRANCAISE

COUR D’APPEL DE PAPEETE

Chambre Civile

Audience du 28 octobre 2021

RG 20/00220 ;

Décision déférée à la Cour : arrêt n° 282, rg n° 17/00242 de la Cour d’Appel de Papeete du 23 août 2018 ;

Sur requête en liquidation d’astreinte déposée et enregistrée au greffe de la Cour d’appel le 11 août 2020 ;

Demanderesse :

L'Association Syndicale Libre Résidence Matahoi, dont le siège social est […], prise en la personne de son représentant légal, Mme C D, en sa qualité de syndic de ladite association syndicale, domiciliée en cette qualité audit siège ;

Représentée par Me Stéphane MAILLARD, avocat au barreau de Papeete ;

Défendeur :

Le Syndicat des Copropriétaires de la Résidence Vaite 3, dont le siège social est sis lot […], pris en la personne de son représentant légal, la Sogeco, en sa qualité de syndic domicilié en cette qualité centre Paofai, […], […] ;

Ayant pour avocat la Selarl Jurispol, représenté par Me Yves PIRIOU, avocat au barreau de Papeete ;

Ordonnance de clôture du 5 juillet 2021 ;

Composition de la Cour :

La cause a été débattue et plaidée en audience publique du 23 septembre 2021, devant M. GELPI, conseiller faisant fonction de président, Mme X et M. SEKKAKI, conseillers, qui ont délibéré conformément à la loi ;

Greffier lors des débats : Mme SUHAS-TEVERO ;

Arrêt contradictoire ;

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 264 du code de procédure civile de Polynésie française ;

Signé par M. GELPI, président et par Mme SUHAS-TEVERO, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A R R E T,

Rappel des faits et de la procédure :

[…]', sis à Pirae, constitué par cahier des charges dressé suivant acte notarié du 29 mars 1994, est divisé en 13 lots.

La résidence Vaite III a été construite sur le lot numéro 2 du lotissement en 1998 par la S.C.I. éponyme.

L’association syndicale du lotissement 'Résidence Matahoi’ déplore depuis 2013 l’écoulement dans ses parties communes des eaux usées non traitées de cette résidence Vaite III. Par conséquent, elle a mis en demeure, selon courrier du 10 mars 2014, le syndic de cette résidence de procéder à la remise en état du système d’évacuation de ses eaux usées dans les meilleurs délais. Ce courrier est resté sans effet.

Aux termes d’un procès-verbal de constat dressé le 29 janvier 2015 par Maître Y, huissier de justice, il a été constaté l’écoulement du trop plein des eaux usées de la résidence Vaite III directement dans le caniveau réservé aux eaux pluviales du lotissement 'Résidence Matahoi'.

Par suite, aux termes d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 18 mars 2015, l’association syndicale du lotissement a mis en demeure le syndic de la résidence Vaite III de procéder à la remise en état de son système d’évacuation et d’assainissement de ses eaux usées.

Par courrier du 16 avril 2015, ce syndic a reconnu la nécessité d’entreprendre des travaux de remise en état de sa filière d’assainissement, mais a fait part des nombreuses difficultés qu’il rencontrait pour y parvenir, difficultés techniques et financières.

La situation perdurant, l’association syndicale du lotissement 'Résidence Matahoi’ a sollicité en référé une expertise aux fins de constater les désordres invoqués, d’identifier leurs causes et leur origine, de décrire les risques encourus, de décrire les travaux nécessaires pour y remédier, de chiffrer les travaux de remise en état et enfin de donner les éléments techniques permettant de déterminer les

responsabilités encourues.

Il a été fait droit à sa demande par une ordonnance de référé du 21 septembre 2015, qui a confié une mission d’expertise à M. E F.

Après remise de ses conclusions en avril 2016, au vu de l’urgence caractérisée par le risque sanitaire, l’association syndicale du lotissement 'Résidence Matahoi’ a été autorisée à assigner à bref délai le syndicat des copropriétaires de la résidence Vaite III. Ce dernier a donc été attrait devant le tribunal de première instance de Papeete par requête et acte d’huissier du 27 juillet 2016, enregistrés au greffe le 1er août 2016.

Par jugement n°16/00436 du 26 avril 2017, ledit tribunal a :

— condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence Vaite III à réaliser les travaux énoncés par l’expert E F, dans son rapport du 26 avril 2016, conformément à sa préconisation n°1 pour assurer sur son lot un traitement performant de ses eaux usées dans le respect des règles de l’art, par la mise en place d’une station d’épuration avec rejet sur les parties communes de la Résidence Matahoi, aux frais de la résidence Vaite III, et ce, sous astreinte de 100.000 francs CFP par jour de retard passé un délai de six mois à compter de la signification de la décision à intervenir ;

— condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence Vaite III à verser à l’association syndicale du lotissement Résidence Matahoi la somme de 300.000 francs CFP à titre de dommages et intérêts, ainsi que 400.000 francs CFP au titre des frais irrépétibles ;

— débouté pour le surplus ;

— et condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence Vaite III aux dépens.

Ce dernier a interjeté appel contre ce jugement par une requête enregistrée au greffe le 18 août 2017.

Aux termes d’un arrêt prononcé le 23 août 2018, auquel il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits et de la procédure antérieure, la cour d’appel de Papeete a :

— déclaré l’appel recevable ;

— déclaré irrecevables les demandes formulées par le syndicat des copropriétaires de la résidence Vaite III à l’encontre de M. G H pour la première fois en cause d’appel ;

— mis hors de cause de l’instance M. G H ;

— infirmé le jugement du tribunal de première instance de Papeete n° 16/00436 du 26 avril 2017, en ce qu’il a condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence Vaite III à réaliser les travaux préconisés par l’expert E F, dans son rapport en date du 26 avril 2016, conformément à sa préconisation n°1 pour assurer sur son lot un traitement performant de ses eaux usées dans le respect des règles de l’art, par la mise en place d’une station d’épuration sur la résidence Vaite III avec rejet sur les parties communes de la résidence Matahoi, aux frais de la résidence Vaite III et ce, sous astreinte de 100.000 francs CFP par jour de retard passé un délai de six mois à compter de la signification de la décision à intervenir et en ce qu’il a condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence Vaite III à verser à l’association syndicale du lotissement Résidence Matahoi la somme de 300.000 francs CFP à titre de dommages et intérêts ;

— et statuant à nouveau, condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence Vaite III, pris en la personne de son représentant légal, à réaliser, à ses frais, les travaux nécessaires au traitement de ses eaux usées, dans le respect des règles d’urbanisme, par tout moyen agréé par le Service de l’Hygiène,

ainsi que dans le respect du cahier des charges du lotissement Matahoi et ce, sous astreinte ;

— fixé l’astreinte à la somme de 20.000 francs pacifiques par jour de retard passé un délai de six mois à compter de la signification du présent arrêt ;

— condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence Vaite III, pris en la personne de son représentant légal, à verser à l’association syndicale du lotissement Résidence Matahoi, prise en la personne de son représentant légal, la somme de 600 000 francs CFP à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du trouble anormal de voisinage ;

— confirmé pour le surplus le jugement déféré ;

— y ajoutant, rappelé aux copropriétaires de la résidence Vaite III qu’il leur appartient de se mobiliser pour mettre fin à ce trouble grave, la pollution engendrée par leur refus de se mobiliser pour se conformer à leur obligation de traiter leurs eaux usées pouvant à terme caractériser une infraction pénale ;

— rejeté tout autre chef de demande des parties, plus ample ou contraire au présent arrêt ;

— condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence Vaite III, pris en la personne de son représentant légal, à payer à l’association syndicale du lotissement Résidence Matahoi, prise en la personne de son représentant légal, la somme de 250 000 francs CFP en application de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

— et condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence Vaite III, pris en la personne de son représentant légal, aux dépens d’appel.

Par requête enregistrée au greffe le 11 août 2020, l’association syndicale du lotissement 'Résidence Matahoi’ a sollicité la liquidation de l’astreinte prononcée par la cour d’appel de Papeete dans son arrêt du 23 août 2018. Aux termes de ses conclusions récapitulatives reçues au greffe par voie électronique (RPVA) le 12 avril 2021, elle demande à la cour de :

— ordonner la liquidation de cette astreinte pour la période du 19 mars 2019 au 30 avril 2021 et en conséquence, condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ à lui payer la somme de 15 480 000 francs CFP, somme à parfaire à la date de la reddition de la décision à intervenir ;

— assortir l’exécution de l’arrêt de la cour d’appel de Papeete du 23 août 2018 d’une astreinte définitive de 500 000 francs CFP par jour de retard passé un délai d’un mois à compter de la signification de la décision à intervenir ;

— condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ à lui payer la somme de 1 000 000 francs CFP à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des troubles excédant les inconvénients normaux de voisinage depuis la reddition de l’arrêt de la cour d’appel du 23 août 2018 ;

— le condamner également au paiement d’une somme de 500 000 francs CFP au titre des frais irrépétibles avancés, outre les entiers dépens y compris les frais du procès verbal de constat de Maître Y du 8 août 2019 pour un montant de 60 305 francs CFP.

En réplique, suivant conclusions récapitulatives reçues par RPVA au greffe le 2 juillet 2021, le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III', pris en la personne de son représentant légal, le cabinet de syndic SOGECO, demande à la cour de :

— débouter l’association syndicale du lotissement 'Résidence Matahoi’ de l’intégralité de ses fins, moyens et conclusions ;

— et la condamner à lui payer la somme de 250 000 francs CFP au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction d’usage.

L’article 268 du code de procédure civile prescrivant d’exposer les moyens développés par les parties au soutien de leurs prétentions, il y sera procédé dans la motivation ci-après, à l’effet d’y répondre, en renvoyant pour un plus ample exposé à leurs écritures respectives.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 juillet 2021, fixant l’affaire à l’audience civile de la cour du 23 septembre 2021.

À l’issue de celle-ci, les parties ont été informées que la décision, mise en délibéré, serait prononcée le 28 octobre 2021, par mise à disposition au greffe.

Motifs de la décision :

Sur la liquidation de l’astreinte :

L’article 717 du code de procédure civile de la Polynésie française énonce, en son 2e alinéa : « L’astreinte est provisoire ou définitive. L’astreinte doit être considérée comme provisoire, à moins que le juge n’ait précisé son caractère définitif ».

L’article 718 du même code précise : « L’astreinte, même définitive, est liquidée par le juge qui l’a ordonnée ».

Enfin, l’article 719 stipule : « Le montant de l’astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter […]. L’astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s’il est établi que l’inexécution ou le retard dans l’exécution de l’injonction du juge provient, en tout ou partie, d’une cause étrangère ».

Les difficultés visées par ce dernier texte s’entendent, notamment, de tout obstacle personnel, matériel ou économique indépendant de la volonté du débiteur de l’astreinte, à charge pour ce dernier d’en justifier.

En l’espèce pour s’opposer à la liquidation de l’astreinte sollicitée par l’association syndicale du lotissement 'Résidence Matahoi', le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ :

— rappelle qu’il n’a pas contesté la réalité des difficultés rencontrées avec son système d’assainissement, ce qui l’a d’ailleurs conduit à mettre en place un système d’évacuation temporaire avec la pose d’un tuyau PVC pour limiter, autant que faire se peut, les nuisances ;

— soutient que cette situation lui est pas imputable mais résulte de l’impéritie du promoteur, M. G H ;

— indique que, suite à l’intervention précitée, les nuisances subies par l’appelante ne sont plus que résiduelles et limitées, puisque l’huissier mandaté par celle-ci a dû ouvrir un regard pour constater l’existence d’une odeur nauséabonde ;

— affirme qu’un temps précieux a été perdu dans la vaine recherche, du fait de l’opposition de l’appelante, d’une solution consistant à créer une station d’épuration commune ;

— souligne qu’en raison des contraintes topographiques du terrain, et afin de limiter le coût de travaux qui pourraient s’avérer difficilement supportables pour une petite copropriété (de 7 membres) comme elle, il a diligenté de nouvelles études auprès des cabinets 'Wild’ et 'Pae Tai Pae Uta’ aux fins d’installer une micro station d’épuration, les divers frais d’études et de maîtrise d''uvre engagés depuis 2017 représentant une somme supérieure à 3'000'000 francs CFP ;

— observe que les contraintes spécifiques des lieux, tenant à la nature du terrain ainsi qu’aux difficultés d’accès, aggravées par le contexte sanitaire peu favorable, ont fait que peu d’entreprises ont répondu à ses sollicitations ou ne l’ont fait qu’à des prix prohibitifs ;

— considère que ces éléments factuels démontrent l’absence de toute mauvaise volonté de sa part, mais au contraire l’existence de difficultés techniques et financières qui ne lui ont pas permis de mettre en 'uvre les travaux dans les délais prescrits ;

— précise que les démarches entreprises auprès des banques pour obtenir un financement de ces travaux se sont heurtées aux réticences de ces établissements à l’égard des copropriétés de moins de dix membres, comme en attestent les refus opposés par la Banque de Tahiti et par la Banque Socredo ;

— et enfin stigmatise l’attitude paradoxale de l’association syndicale du lotissement 'Résidence Matahoi’ consistant à réclamer l’exécution d’une condamnation pécuniaire, qui pourrait la priver des moyens financiers de procéder aux travaux exigés.

À titre liminaire, il importe de relever que l’arrêt de la présente cour, ayant confirmé l’obligation pour le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ d’effectuer les travaux de mise aux normes de son système de traitement des eaux usées, lui a été signifié le 18 septembre 2018. L’injonction d’effectuer ces travaux était assortie d’une astreinte, passé le délai de 6 mois à compter de la date de signification, de sorte que celle-ci a commencé à courir à compter du 19 mars 2019.

Au cours de ce délai de 6 mois et postérieurement, le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ prétend avoir effectué un certain nombre de démarches techniques [consultation sur la faisabilité technique de la société JL POLYNÉSIE avec visite de l’installation de I J, validation du principe micropieux en mars 2019, étude Géotechnique Z en juin 2019, missions complémentaires confiées à IPSI, K L, Z et PTPU face aux fortes contraintes techniques d’accès (inclinaison, sol, percolation, proximité des prospects, difficultés techniques), lancement de la consultation des entreprises (JL POLYNÉSIE, BOYER, FIUMARELLA, A, B, M N ETANCHEITE, TECHNI SERVICES) avec visites sur site, réception de l’offre de JL Polynésie en août 2019, puis de l’entreprise BOYER en décembre 2019, réception de l’offre de Techni services en mars 2020] ou financières [1re demande d’emprunt auprès de la Banque SOCREDO en décembre 2019, suivie d’une seconde en mars 2020 ; après avoir différé sa réponse du fait de la crise sanitaire, refus de la Banque SOCREDO par mail du 17 juillet 2020].

Cependant, aucun justificatif de ces démarches n’est versé aux débats puisque la quasi-totalité des pièces du dossier de l’intimée sont antérieures à la date de signification de l’arrêt du 23 août 2018.

Il résulte au contraire des éléments du dossier que la question technique d’une réfection totale du système d’évacuation des eaux usées du syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ est posée depuis la mise en demeure, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, que lui a adressée l’association syndicale du lotissement 'Résidence Matahoi’ par courrier du 10 mars 2014 et, a minima, depuis le rapport d’expertise de Monsieur E F déposé le 21 avril 2016.

S’il est concevable que le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ n’ait pas engagé de travaux définitifs dans l’attente de la décision de la cour, saisie de l’appel du premier jugement du 26

avril 2017 l’ayant condamné, déjà sous astreinte, à effectuer les travaux requis de mise aux normes sanitaires, il se devait en revanche de mettre à profit la durée de l’instance pour se donner les moyens techniques et financiers de remédier, en urgence, aux dysfonctionnements majeurs qu’il ne contestait d’ailleurs pas.

Son inertie perdurant encore à ce jour est d’autant moins explicable que, déjà au cours de son assemblée générale du 26 mai 2016, la résolution suivante avait été adoptée à l’unanimité : « S’est tenue une expertise le 15 décembre 2015 qui s’est avérée accablante pour le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ […] ; à la lecture de ce rapport vous conviendrez qu’il y a lieu de faire le nécessaire pour modifier votre système d’assainissement qui pollue au quotidien votre quiétude olfactive, celle de vos locataires et celle des propriétaires de l’association syndicale du lotissement 'Résidence Matahoi', étant précisé que des risques sanitaires sont patents […] ; une assemblée générale extraordinaire sera très certainement convoquée avant la fin d’année afin de statuer sur le choix d’une mission de maîtrise d''uvre. Cette dernière sera aussi l’occasion de faire le point sur la procédure et les diligences à entreprendre promptement ».

De plus fort, un permis de travaux immobiliers a été obtenu par ses soins dès le 9 août 2018 aux fins de réaliser : « des travaux de modification et de réalisation d’un nouvel assainissement collectif pour la résidence Vaite III».

Compte tenu de ces éléments factuels, le nouveau délai de 6 mois imparti par l’arrêt précité aurait dû s’avérer amplement suffisant.

Au lieu de cela, dans son procès-verbal dressé le 8 août 2019, M. O- P Y, huissier de justice à Faa’a, a constaté que : « […] La présence d’un tuyau en PVC parallèle à la canalisation indique que le trop-plein de cette fosse toutes eaux se déverse dans le caniveau du lotissement 'Matahoi'. En dehors des installations présentes à l’arrière de cette résidence et le long de la pente, je constate qu’aucune action ou travaux de traitement des eaux usées n’est visible sur les lieux. Les nuisances en rapport avec l’écoulement des eaux usées en provenance de la résidence Vaite III ne sont donc toujours pas traitées. Comme à l’occasion de mon transport sur les lieux le 29 janvier 2015, je constate que la résidence Vaite III procède toujours à l’évacuation du trop-plein du dispositif recevant les eaux vannes et usées directement dans le caniveau réservé aux eaux pluviales du lotissement 'Matahoi’ ».

Par conséquent, l’intimé est mal fondée à se prévaloir des difficultés techniques résultant de la topographie du terrain et de ses contraintes d’accès, puisque ces données sont constantes depuis le début du litige. De surcroît, dans son courrier du 28 juillet 2016, le cabinet de géomètre Wild proposait différentes solutions techniques et préconisait déjà, dans l’intervalle, de : « prendre des mesures conservatoires pour les fosses avec la mise en place d’une plaque en galva pour limiter les dégagements d’odeurs et la reprise des tuyaux d’assainissement cassés ». Quant au diagnostic réalisé en août 2017 par le bureau d’études environnement 'Pae Tai Pa Uta', il concluait, après la réalisation de tests de percolation : «Le système d’assainissement de la résidence ne répond pas à la réglementation et au permis autorisé en 1997. Les effluents ne sont pas traités, le système d’assainissement est inexistant. Une partie des eaux usées sont rejetés dans le caniveau d’eau pluvial». L’urgence sanitaire créée par cette situation avait même conduit la présente cour à rappeler dans son dispositif aux copropriétaires : «qu’il leur appartenait de se mobiliser pour mettre fin à ce trouble grave, la pollution engendrée par le refus de se mobiliser pour se conformer à leur obligation de traiter leurs eaux usées pouvant à terme caractériser une infraction pénale».

Le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ ne peut davantage se prévaloir de ses difficultés à obtenir le financement de ces travaux car, au regard de leur urgence consacrée par deux condamnations judiciaires sous astreinte, il relevait de la responsabilité impérieuse des copropriétaires de débloquer les fonds nécessaires, fût-ce par emprunts personnels, quitte à solliciter parallèlement des prêts bancaires pour reconstituer ensuite la trésorerie du syndicat. D’ailleurs la cour

observe que, bien que se prévalant d’un premier refus notifié par la Banque de Tahiti par courriel du 28 septembre 2018 (étant néanmoins observé que la pièce n° 28 versée au soutien de cette allégation semble concerner la résidence 'Vaimoanatea'), selon la pièce 23 de l’intimé, son assemblée générale n’aurait validé les travaux d’assainissement en fonds propres qu’en août 2020. De surcroît, outre que ce procès-verbal n’est pas produit aux débats, il n’est pas davantage justifié des appels de fonds réalisés depuis auprès des copropriétaires.

Pour ces motifs, il ne peut être jugé que le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ justifie que l’inexécution ou le retard dans l’exécution de l’injonction de faire qui lui a été notifiée, une première fois par jugement du 26 avril 2017, puis une seconde fois par arrêt du 23 août 2018, provient, en tout ou partie, d’une cause étrangère.

Par conséquent, il y a lieu de prononcer la liquidation de l’astreinte sur la base provisoire fixée par l’arrêt précité qui avait déjà divisé par cinq le montant de celle fixée par le premier juge. Compte tenu du délai écoulé depuis le 19 mars 2019 jusqu’au 5 juillet 2021, date de l’ordonnance de clôture de la présente instance, soit 840 jours, le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ doit donc être condamné au paiement de la somme de 16'800'000 francs CFP.

Sur les autres demandes de l’appelante :

L’association syndicale du lotissement 'Résidence Matahoi’ réclame également :

— d’une part, la fixation d’une nouvelle astreinte définitive à la somme de 500'000 francs CFP par jour de retard ;

— et d’autre part, la condamnation de l’intimé au paiement d’une somme supplémentaire de 1'000'000 francs CFP à titre de dommages- intérêts pour réparer le trouble anormal de voisinage qui persiste depuis l’arrêt du 23 août 2018.

Sur le premier chef de demande, contrairement à ce que soutient l’appelante, il n’est pas démontré que le montant de l’astreinte provisoire fixée par la cour n’est pas suffisant. En effet, si elle n’a pas immédiatement produit l’effet escompté, c’est sans aucun doute parce que le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ a mésestimé le risque de voir cette astreinte effectivement liquidée. Confronté aujourd’K à une condamnation pécuniaire substantielle de 16,8 millions de francs, sans compter l’astreinte pouvant encore être liquidée pour la période postérieure au 5 juillet 2021, il est peu probable que le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ persiste dans son inertie, sauf à encourir une déconfiture financière, potentiellement assortie d’une condamnation pénale.

Dans ces conditions, il n’est pas justifié de faire droit à la demande excessive de l’appelante.

S’agissant du second chef de demande, il convient de le déclarer irrecevable dès lors que la saisine de la présente cour est circonscrite à la liquidation de l’astreinte. En effet, si l’article 717 du code de procédure civile de la Polynésie française prévoit que : «L’astreinte est indépendante des dommages-intérêts […]», cela n’autorise pas pour autant le juge de l’astreinte à modifier la condamnation prononcée par le premier juge, puis doublée en cause d’appel, à peine de priver l’intimé d’un degré de juridiction. Par conséquent, si l’appelante souhaite voir indemniser supplétivement le préjudice subi suite au trouble anormal de voisinage ayant persisté après l’arrêt du 23 août 2018, il lui appartient de saisir à nouveau le premier juge.

Sur l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française :

Compte tenu de ce qui précède, il serait inéquitable de laisser à l’association syndicale du lotissement 'Résidence Matahoi’ la charge des frais irrépétibles du procès. En conséquence, le syndicat des

copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ sera condamné à lui payer la somme de 250 000 francs CFP au titre de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française.

Sur les dépens :

Aux termes de l’article 406 du code de procédure civile de la Polynésie française et en l’absence de circonstance particulière résultant de l’intérêt ou de la faute de l’autre partie, le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III', qui succombe, sera condamné aux entiers dépens de l’instance d’appel

Ces derniers ne sauraient toutefois inclure les frais du procès-verbal de constat de Maître Y du 8 août 2019, qui ne constituent pas juridiquement des dépens de la présente instance.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant par mise à disposition, publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort ;

Déclare l’association syndicale du lotissement 'Résidence Matahoi’ irrecevable en sa demande de condamnation à de nouveaux dommages- intérêts ;

Déboute le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ de ses entières demandes ;

Prononce la liquidation de l’astreinte provisoire prononcée par cette cour dans son arrêt n° 282 du 23 août 2018, pour la période du 19 mars 2019 au 5 juillet 2011, ces deux termes inclus ;

Condamne par conséquent le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ à payer à l’association syndicale du lotissement 'Résidence Matahoi’ la somme de 16'800'000 francs CFP ;

Déboute l’association syndicale du lotissement 'Résidence Matahoi’ du surplus de ses demandes ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ à payer à l’association syndicale du lotissement 'Résidence Matahoi’ la somme de 250 000 francs CFP au titre de l’article 407 du code de procédure civile de la Polynésie française ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence 'Vaite III’ aux entiers dépens de la présente instance.

Prononcé à Papeete, le 28 octobre 2021.

Le Greffier, Le Président,

signé : M. SUHAS-TEVERO signé : P. GELPI

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