Cour d'appel de Paris, 27 octobre 1962, n° 9999

  • Sociétés·
  • Détaillant·
  • Marque de fabrique·
  • Faute·
  • Ès-qualités·
  • Magasin·
  • In solidum·
  • Condamnation·
  • Préjudice·
  • Propriété

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Paris, 27 oct. 1962, n° 9999
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 9999

Texte intégral

Marque de fabrique.

Atteinte à la propriété de la marque. Vente par un fabri cant à un soldeur d’objets destinés à un détaillant et portant la marque de celui-ci. Faute (oui). Responsabilité du fabricant et du soldeur. Garantie due par le fabricant au soldeur (oui).

Lorsqu’un fabricant, ayant fourni à un délaillant des produits revêtus d’une marque appartenant à ce dernier, reprend à la suile d’une transaction un lot de ces produits, el décide alors de les revendre à un soldeur, il lui appartient de supprimer les marques du détaillant auquel les produits avaient été primitivement destinés. En s’abstenant de le faire, le fabricant utilise sans droit une marque dont le détaillant avait la propriété exclusive, el commet ainsi une faute dans les termes de l’article 1382 du Code civil.

223

En négligeant de s’assurer que le fabricant étail proprié laire de la marque apposée sur les produits qui lui étaient livrés, le soldeur a également commis une faute. Mais, aucune collusion frauduleuse n’étant établie entre eux, le fabricant doit être tenu de garantir le soldeur: en

´ effet, ne pouvant ignorer qu’il était sans droit à laisser figurer la marque sur les produits vendus, il a manqué à ses obli gations contractuelles vis-à-vis du soldeur en lui livrant une marchandise dans des conditions qui l’exposaient à des

poursuites.

COUR DE PARIS (40 CH.), 27 OCTOBRE 1962.

Sté Diversold et Sté à r. 1. Garay c. Drouillot et Sté à r. 1. […].

La Cour, Statuant sur l’appel interjeté d’un jugement du Tribunal de grande instance de la Seine en date du 28 février 1961.

Considérant que la Société Garay fabriquait des chaussures pour la Société Nord Est qui les mettait en vente dans ses deux magasins situés l’un dans la gare du Nord et l’autre dans la gare de l’Est; que Drouillot, gérant de cette derrière Société, avait déposé comme marques de fabrique les 18 juillet 1955 et 19 octobre 1956 les dénominations « Cyril » et « Marino » ; que la Société Garay apposait les dites marques sur ses chaus sures avant de les livrer à la Société Nord Est; Considérant que fin 1958, Drouillot a demandé à la Société Garay de reprendre certaines des chaussures qui lui avaient été vendues fin 1957 parce qu’elles n’étaient pas conformes aux

.commandes passées; que la Société Garay a accédé à cette demande, a repris 138 paires, les a remboursées à la Société

Nord Est, et les a revendues à un prix très bas à Diversold, soldeur établi boulevard Sébastopol; Considérant que les marques « Cyril » et « Marino » n’ont pas été enlevées, et que Drouillot, ayant appris que des chaus sures ainsi marquées étaient vendues par Diversold, a fait pratiquer une saisie-contrefaçon et engagé l’instance actuelle; Considérant que X, en qualité de syndic de la Société

Garay, soutient que la Société […], en resti tuant à la Société Garay une partie des paires de chaussures qu’elle lui avait achetées antérieurement, savait qu’elles seraient nécessairement revendues à un soldeur; qu’il lui appartenait d’enlever toutes les marques pouvant se trouver sur celles-ci, si elle voulait éviter que ces marchandises ne soient remises


224 dans le commerce avec lesdites marques; que par suite aucune faute ne peut être retenue contre la Société Garay; Considérant que la Société […] fait toute fois observer qu’ayant demandé à la Société Garay de reprendre les chaussures, elle ne pouvait pas supposer que le fabricant les revendrait nécessairement à un soldeur; qu’elle pouvait

d’autre part, perser au contraire qu’il les détruirait; que la suppression des marques exige une opération matérielle qu’un négociant en chaussures peut difficilement effectuer dans son magasin; qu’elle avait au surplus intérêt à restituer lesdites chaussures telles qu’elles lui avaient été livrées de façon à ce que son fournisseur ne puisse contester leur identité ;

Considérant par contre que lorsque la Société Garay a pris la décision de revendre ces chaussures à un soldeur, il lui appar tenait de supprimer les marques du détaillant auquel ces chaus sures avaient été primitivement destinées; qu’en s’abstenant de la faire, la Société Garay a utilisé sans droit une marque dont les demandeurs avaient la propriété exclusive; qu’elle a ainsi commis une faute et doit, aux termes de l’article 1382 du Code civil, réparer le préjudice qui en est résulté; Considérant que la Société Diversold, également assignée par Drouillot et la Société des […], fait valoir, en ce qui la concerne, que sa bonne foi est certaine et qu’il ne peut lui être reproché aucun procédé frauduleux, alors surtout qu’elle exerce la profession de soldeur professionnel; mais considérant qu’en négligeant de s’assurer auprès de la Société

Garay que celle-ci était propiétaire de la marque apposée sur les chaussures que cette Société lui avait livrées, elle a commis une faute qui doit entraîner sa condamnation à réparer le préjudice souffert aux termes de l’article 1382 du Code civil; qu’en outre sa faute ayant contribué à la production du dom mage, ily aura lieu de prononcer à l’encontre des deux Sociétés

une condamnation in solidum ; Considérant toutefois qu’aucune collusion frauduleuse n’est établie entre les deux Sociétés; que la Société Garay, qui ne pouvait ignorer qu’elle était sans droit à laisser la marque « Cyril » figurer sur les chaussures vendues à la Société Diver sold, a manqué à ses obligations contractuelles vis-à-vis de cette dernière en livrant une marchandise dans des conditions telles que des poursuites pouvaient être engagées contre le détaillant ; qu’il y a lieu dès lors d’accueillir l’action en garantie formée contre la Société Garay par la Société Diversold;

Considérant, sur l’importance du préjudice, que les Sociétés Garay et Diversold font en vain valoir que le chiffre de 3 000 nou veaux francs retenu par les premiers juges serait trop élevé;

225 que si en effet le nombre des paires de chaussures livrées par la Société Garay avec la marque « Cyril » a été au maximum de 129, il convient de tenir compte de ce que la Société des

[…] a subi un préjudice relativement impor. tant du fait que des chaussures sur lesquelles figurait sa marque ont été revendues à vil prix, portant ainsi une atteinte incontes table à la notoriété de celle-ci, alors surtout que ces ventes en solde ont été pratiquées dans une boutique située dans le même quartier que les magasins de la Société des Chaussures

Nord Est; que dès lors la condamnation à 3 000 nouveaux francs à titre de dommages-intérêts, en réparation du préju

dice souffert, doit être maintenue;

Dit l’appel de X, ès-qualité de syndic de la faillite Par ces motifs, de la Société Garay, recevable mais mal fondé, l’en déboute; Dit la Société Diversold recevable et en partie bien fondée en son appel, y faisant droit dans cette mesure; Condamne la Société Diversold et la Société Garay in solidum

à payer à Drouillot, tant en son nom personnel qu’en qualité de gérant de la Société […], la somme de

3.000 nouveaux francs en réparation du préjudice causé;

Confirme au surplus le jugement déféré en ce qu’il a renvoyé les demandeurs et s’il y a lieu la Société Diversold à se faire admettre au passif de la Société Garay pour toutes créances pouvant résulter des condamnations prononcées, et en ce qu’il

a ordonné la confiscation des objets saisis, et a dit n’y avoir

Dit et juge que M. X ès-qualité, sera tenu de garantir lieu à publication; la Société Diversold de toutes les condamnations prononcées

contre elle en principal, intérêts et frais; Condamne in solidum, mais sous réserve de la garantie ainsi due, X ès-qualité et la Société Diversold aux entiers

dépens de première instance et d’appel.

MARIOTTE, conseiller-rapporteur ; MM. VOULET, président; Mes LAGARDE, COUÉTOUX DU TERTRE, avocat général.

-

GUÉLOT et LASSIER, avocats.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code civil
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, 27 octobre 1962, n° 9999