Cour d'appel de Paris, 15 décembre 1970, n° J.4376

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 15 déc. 1970, n° J.4376
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : J.4376

Sur les parties

Texte intégral

[…]

☆ PARIS

E U FRANCAISE IQ 011231 L B GROSSE DELIVRÉE SOUS U P E LE NO 38 A LA Bureau du 5ème chambre A R

ARTET NO! 3 AS IER DU 15 DECEMBRE 1970 DATE DU 19.1.

-

Frais de Justice CONTRADICTOIRE A LA REQUÊTE DE

B H I 3 Avocats

[…]

[…]

COUR D ' APPEL DE PARI S Cie laFONCIERE

et autres

-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:

C/ CINQUIEME CHAMBRE – Section A

AUDIENCE PUBLIQUE DU MARDI QUINZE DECEMBRE MIL X

NEUF CENT SOIXANTE DIX.

[…]

LA COUR, saisie de l’appel N° J. 4376 Ch.Vac.

ENTRE/

1°/ La Compagnie LA FONCIERE, dont le siège est à

Paris, […]

2°/ La Compagnie THESEA, dont le siège est à Paris,

[…]

3/ La Compagnie FONCIERE CAMER, dont le siège est f

e

à Paris, […] a

4/ La Compagnie LA MINERVE, dont le siège est à r

Paris, […]

5/ La Compagnie d’Assurances D.V.G., dont le siège est à Paris, […]

6°/ La Compagnie LA PATERNELLE, dont le siège est

à Paris, […]

7°/ La Compagnie L’UNITE, dont le siège est à Paris

[…]

8°/ La Compagnie LA PREVOYANCE, dont le siège est

à Paris, […]

9°/ La Compagnie LA CONCORDE, dont le siège est à

Paris, […]

10°/ La Compagnie LA ZURICH, dont le siège est à

Paris, […]

1ère Page./. 11 / La Compagnie d’assurances U.M. A.T., dont le

Ich siège est à Paris, […]


5ème chambre A 15 décembre 1970

12/ La Compagnie des ASSURANCES GENERALES, […]

lieu à Paris siiph daer. 14 asute d es

130/La Compagnie LA FORTUNE, […]

140/ La Compagnie LE NORD, […]

150/ La Compagnie L’UNION INDUSTRIELLE ET COMMERCIALE, $[…]

16°/ La Compagnie LA ROTERDAM KOEPEL, […]

à Parise halen Sonte d en en rapporte le

17/ La Compagnie LA BLACK SEA, […] d’art

180/ La Compagnie LA CORDIALITE, […]

196/ La Compagnie L’ECONOMIC, […]

à Paris des ALFA 3

20%/ La Compagnie GROUPEMENT FRANCAIS D’ASSURANCES, […]

Coysevox à Paris expertiselon lequel la gres interna

21°/ La Compagnie LONDON AND HALL MARITIME, […]té

à Paris qui o’wat pas été soumis réguli

22/ La Compagnie LA DONDON OVERSEAS, […]

230/ La Compagnie LA MARITIME INSURANCE, […]

24/La Compagnie LANE DAS MIJ, […]tant

25 La Compagnie PARISIENNE DE GARANTIE, […]

à Parisatiné, antiquaire à la situation finsheibre très axXİNŞ

26°/ La Compagnie LA NORWICH UNION, […]

à Parisk, s’exposerait délibérément süx risques de toutes

27°/ La Compagnie LA PROVINCIAL, […]ité

28°/ La Compagnie LA RELIANCE MARITIME, […]-Paris

29/ La Compagnie LA HANSA MALAREN, 3 rue Saint Georges-Paris

[…], […]

31/ La Compagnie L’AGGRIPPINA, […],

32°/ La Compagnie L’ALPINA, […] à Paris par

33°/ La Compagnie LA BRITISCH FOREIGN,7 rue de Louvois-Paris

34 La Compagnie LE CONTINENT, […]

2ème Page./.. 350 La Compagnie L’EUROPE, […]


5ème chambre A 15 décembre 1970 www N°3

36°/ La Compagnie LA FLANDRE, […]

37°/ La Compagnie LA FRANCE AFRICAINE, […]

38°/ La Compagnie LLOYD CONTINENTAL FRANCAISE, […]

[…]

39°/ La Compagnie NATIONALE SUISSE, […]

40°/ La Compagnie LA NEW HAMPSHIRE, […]

[…], […]

à Paris

42°/ La Compagnie C.A.L.A.T.,9 rue des Filles Saint Thomas-Paris

43° La Compagnie L’EQUITE, […]

44°/ La Compagnie LE RHONE MEDITERRANEE, […]

seille (13)

45°/ La Compagnie LA FRANCE, […]

46°/ La Compagnie LA PATRIE, […]

47°/ La Compagnie LA WESTMINSTER, […]

48°/ La Aompagnie A.T.I.C.A.M., […]

49°/ La Compagnie M. G.F.A., […]

50 / La Compagnie LA POOL REMBAUVILLE, 3 rue de la Bourse-Paris

Appelantes, ayant pour avoué la S.C.P. J. et D. B traghdadlian, ET/
Monsieur X, demeurant à […]

Intimé, ayant pour avoué Maitre PAMART di APRES AVOIR ENTENDU à l’audience publique du 17 novembre 1970, en son rapport, Monsieur le Président Rouquet, chargé de suivre la procédure, et en leurs conclusions et plai doiries respectives, Maitre Y, abocat des Compagnies

d’Assurances la Foncière, The Sea, la Foncière Camer, la Minerve,

la D.V.G., la Paternelle, l’Unité, la Prévoyance, la Concorde, la Zurich, 1'U.M. A.T., les Assurances Générales, la Fortune, le

3ème Page./. Nord, l’Union Industrielle et Commerciale, la Roterdam Koepel,

la Black Sea, la Cordialité, l'Economic, le Groupement Françaisdh


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d’assurances, la London and Hall Maritime, la London Overseas, la Maritime Insurance, la Lane Das Mij, la Parisienne de Ga rantie, la Norwich Union, la Provincial, la Reliance Maritime, la

Hansa Malaren, la Roterdam, l’Aggrippina, l’Alpina, la Britisch Fe

Foreign, le Continent, l’Europe, la Flandre, la France Africaine, la Lloyd Continental Française, la Nationale Suisse, la New

Hampshire, la Providence Incendie, la C.A.L.A.T., 1'Equité, le

Rhône Méditerranée, la France, la Patrie, la Westminster, 1¹

A.T.I.C.A.M., la M. G.F.A. et la Pool Rembauville, assisté de la société civile professionnelle Z et A

B, leur avoué; Maitres Bernard Gorny et Simonard, avocats de X, assisté de Pamart, son avoué; ensemble en ses con clusions, le Ministère Public; la cause, mise en délibéré, a été renvoyée à l’audience publique de ce jour pour le prononcé de l’arrêt, et ce jourd’hui, après en avoir délibéré conformé ment à la loi;

STATUANT sur les appels régulièrement formés par quarante deux compagnies d’assurances, d’une part, et par douze Compagnies d’assurances, d’autre part, à l’encontre d’un jugement en date du 8 juillet 1969 par lequel le Tribunal de Commerce de Paris a condamné certaines d’entre elles, à la suite du naufrage d’un yacht appartenant à C, dit

X, à payer à celui-ci, en vertu d’une police « corps » les sommes de un million cinq cents mille francs avec intérêts de droit pour la perte du bateau lui-même, et de cent cinquan te six mille francs avec intérêts de droit pour les effets personnels, mais a débouté C, dit X, de sa demande qui tendait au paiement, en application d’une police d’assurant million ces Maritimes sur facultés, de quatre sept cent quarante trois mille cinq cent vingt francs avec intérêts de droit, pour la perte de la marchandise transportée, l’intéressé étant

4ème Page./. déclaré mal fondé « quant à présent » en sa demande, du fait th is


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qu’il ne justifiait pas, en l’état, de la valeur de la marchan dise à bord au moment du naufrage;

-

Considérant que les douze Compagnies qui assuraient le bateau lui-même (police « corps ») et les effets personnels des passagers, concluent à l’infirmation de ce jugement, deman dant à être déchargées des condamnations prononcées contre elles; qu’elles soutiennent d’abord que x ***** xxx x xx x x le contrat d’assurances souscrit par

C serait nul en application de l’article 348 du

# code de commerce, et subsidiairement, de l’article 357 du même code

Considérant que les quarante deux compagnies qui avaient consenti à assurer la marchandise transportée (police

« facultés ») concluent également à l’infirmation du jugement en trepris en ce qu’il a admis la demande en son principe, celle ci étant seulement déclarée mal fondée en l’état; qu’elles. soutiennent en effet, comme pour la police « corps », que le contrat

d’assurances est nul en application de l’article 348 du code de commerce, C, dit X, leur ayant caché les buts et les conditions véritables de la croisière, ce qui avait eu pour effet de diminuer leur opinion du risque;

Considérant que C, dit X, affirme au contraire que les articles 348 et 357 du code de commerce ne sauraient recevoir application en l’espèce, et qu’il n’y a pas lieu de prononcer la nullité des polices; qu’il conclut à la confirmation du jugement entrepris;

-

Considérant que l’intimé fait observer que la Police

« corps » a été signée le 18 aout 1967, postérieurement à la pro mulgation de la loi du 3 juillet 1967 sur les Assurances mari times, que l’article 62 de cette loi a abrogé notamment 1¹ar ticle 348 du code de commerce, et qu’il est dit en l’article 63

5ème Page./. que les contrats d’assurance ayant pour objet de garantir les risques relatifs à la navigation de plaisance, contrats qui ne sont pas régis par la loi nouvelle, seront « à titre provisoire » do



XANK 5ème chambre A 15 décembre 1970

soumis aux dispositions de la loi du 13 juillet 1930 relative

aux contrats d’assurance;

Mais considérant qu’en vertu de son article 64, la loi du 3 juillet 1967 n’a pris effet que le 25 avril 1968, soit postérieurement à la conclusion de la police« corps » et même longtemps après le naufrage, survenu le 14 octobre 1967; qu’en exprimant qu’à « titre provisoire » les contrats relatifs

à la navigation de plaisance seraient soumis à la loi du

13 juillet 1930, le législateur n’a pas voulu dire que cette disposition s’appliquerait immédiatement et sans attendre

l’entrée en vigueur de l’ensemble du texte, mais que, posté rieurement à cette entrée en vigueur et à « titre provisoire »,(

c’est à dire jusqu’à l’intervention d’une réglementation spéciale, les assurances en matière de navigation de plai sance seraient soumises à la loi du 13 juillet 1930; qu’il est dit en l’article 1er de cette loi qu’elle ne concerne que les assurances terrestres et n’est pas applicable aux assu rances maritimes; que l’intimé fait état du Chapitre IV des conditions générales de la police « corps », dans lequel il est spécifié que "les garanties prévues aux paragraphes

B,C,D,E du Chapitre « Objet de l’assurance » sont régies par la loi du 13 juillet 1930 et les décrets des 14 juin et 30 décembre 1938"; que cette référence à la loi du 13 juillet

1930 est la seule qui figure dans la Police; que les paragra phes B, C, D, E, concernent respectivement, le § B les « accidents causés aux tiers », le § C, « défense et recours », le § D les

« indemnités forfaitaires » et le § E le « vol »; que les « ac cidents causés au navire assuré » figurent dans un § A qui, seul, intéresse le présent litige; qu’il n’y a, dans les clauses des Conditions générales intéressant les risques en l’espèce garantis et dans les conditions particulières, aucune référence à la loi de 1930; qu’en résumé, ni en raison 6ème Page./. des termes du contrat, ni en vertu de la loi du 3 juillet by q


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1967, celle-ci n’étant pas encore entrée en vigueur lors de la conclusion du contrat, la loi du 13 juillet 1930 n’est appli cable à ce litige; qu’au contraire, l’article 348 du code de W

commerce n’était pas encore abrégé aux dates de signature des

Polices; qu’il est dit en cet article que « toute réticence, toute fausse déclaration de la part de l’assuré… qui dimi nueraient ep l’opinion du riqque ou en changeraient le sujet, annulent l’assurance », et que « l’assurance est nulle, même dans le cas où la réticence, la fausse déclaration… n’auraient pas influé sur le dommage ou la perte de l’objet assuré »;

Considérant que, propriétaire du yacht « Toguna III »,

C, dit X, antiquaire de renommée mondiale, a chargé le Cabinet de Courtage Tétard de négocier pour son compte une double assurance, pour le bateau et les choses transportées, à

l’occasion d’une croisière qui, de Cannes, devait le conduire sur les côtes d’Italie, de Grèce et de la Méditerranée orientale; que les deux Polices ont été conclues par le Cabinet Tétard avec la Compagnie la Foncière , apéritrice ; que le Toguna III

a appareillé de Cannes le 29 juillet 1967; qu’il à voulé le

14 octobre 1967 au large des côtes égyptiennes dans des cir constances demeurées mystérieuses; que lors de ce naufrage,

C n’était pas à bord, ayant quitté à une précédente escale son yacht, qui était occupé par six personnes: le fapi taine, un s t E, deux matelots, les sieurs Bertini et Fran çois, ainsi que deux femmes et l’enfant du sieur E; que ce dernier a déclaré: "M. X m’avait conseillé, si nous étions suivis par une edette de la douane, de jeter la cargaison par dessus bord, mais seulement de façon à pouvoir la récupérer dans un fond accessible avec nos appareils de plongée… J’ai toujours su que notre activité était localement répréhensible. .

7ème Page./. L’équipage a été tenu au courant de nos activités au Pirée et

a accepté le risque"; que Bertini a reconnu qu'il était "depuisb q


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longtemps" au courant des activités clandestines et de contrebande de l’expédition; que D a déclaré notamment:

"J’étais dans la cuisine et j’ai entendu le Capitaine qui parlait avec M. X de nous débarquer.J’ai demandé des expli cations à M. E et c’est à ce moment là qu’il m’a ap pris qu’il faisait de la contrebande et que ce serait trop dangereux pour hous de rester à bord.Finalement, ayant tous donné notre accord sur les risques encourus, il fut décidé de continuer le voyage.Une nuit, nous avons été chercher des statuettes sur les côtes de Turquie, sous le Cap Sighagik,à 4 h heures du matin.Le bateau est venu tout près des côtes.M. Here mann a pris le Zodiac, et le va et vient a commencé; il a ramené les colis et nous l’avons aidé à les mettre à bord.

Le bateau était tous feux éteints.Il ny a pas eu d’alerte";

Considérant que le Cabinet Tétard ayant demandé, au nom de son client, que les indemnités dues en vertu des deux Polices soient versées à ce dernier, la Compagnie la

Foncière, apéritrice, a répondu le 12 décembre 1967: « Nous con sidérons que les assureurs ne peuvent en aucun cas être recherchés…, en vertu notamment des dispositions de l’ar ticle 348 du code de commerce, les opérations auxquelles s’est livré l’assuré impliquant réticence de sa part, laquelle en traine de plein droit la nullité des contrats d’assurances »; que dans ces circonstances, C a saisi le Tribunal de Commerce de Paris d’une demande qui tendait à obtenir paiement des indemnités auxquelles il prétendait avoir droit en vertu des deux Polices;

Considérant que, dans son jugement, le Tribunal expose qu’il a fait comparaitre devant lui en qualité de sachant le Cabinet Tétard, et que celui-ci a déclaré avoir tenu la compagnie apéritrice au courant « de la nature de la croisière entreprise » et avoir répercuté les déclarations

Sème Page /. d’aliments relatives à la police « facultés »; qu’il a déduit

M


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des dires du Cabinet Tétard que celui-ci a "toujours reçu de X les éléments complets, détaillés et nécessaires en s

vue de l’appréciation du risque" et que Kamar n’a commis aucut ne réticence à son égard; qu’il a ajouté qu’il convenait « de laisser au Cabinet Tétard l’entière responsabilité de ses dires »

Considérant qu’il est écrit dans ce jugement que les assureurs ont soutenu que X, qui avait conclu une assu rance pour une navigation de plaisance, leur avait laissé ignorer qu’en réalité cette croisière avait pour but la recherche et le commerce d’oeuvres d’art, et que ce genre de commerce ne saurait être qu’illicite ou clandestin; qu’il n’ apparait pas que, ce faisant, les premiers juges aient exacte ment analysé les conclusions qui leur ont été présentées par les défendeurs; que le moyen tiré des dispositions de l’article

348 du code de commerce était ainsi formulé: "Attendu que les facultés assurées ont été présentées aux assureurs comme des marchandises normales destinées à être transportées par le

Yacht Toguna III alors qu’il s’agissait de marchandises de contrebande, consistant en objets d’art antique exportés et chargés clandestinement, en infraction à la réglementation de tous les pays d’origine; Attendu que la navigation de contre bande présente pour le navire et la cargaison des risques particuliers de nature et d’importance différentes d’autant que le Capitaine du navire avait ordre de jeter par dessus bord, par petit fond si possible, les marchandises clandesti nes en cas de poursuites par la Douane ou par la police;

Attendu que le fait de ne pas avoir révélé la nature exacte de l’expédition entreprise, pas plus que le caractère fraudu leux des marchandises assurées, contrairement à l’obligation contractuelle faite à l’assuré par l’article 15 de la Police,

9 ème Page./. constitue une réticence de l’assuré qui a diminué pour l’as sureur l’opinion qu’il pouvait se faire du risque assuré, ce qui entraine la nullité de l’assurance en application de l’ar


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ticle 248 du code de commerce…."; qu’il en résulte que devant le Tribunal, comme devant la Cour, les appelantes n’ont pas prétendu qu’elles ignoraient que l’intimé, antiquaire, devait à l’occasion de cette croisière en Méditerranée, transporter des objets d’arts; qu’elles n’auraient d’ail leurs xxxx pu décemment le soutenir étant donné l’allusion très nette faite à cette intention de X dans la Police

« corps » et surtout la conclusion d’un contrat d’assurance

« facultés », destiné précisément à couvrir le risque relatif aux marchandises transportées; que loin de prétendre que le transport des objets d’art annoncé par Hamer était nécessai rement clandestin et frauduleux, les assureurs, au moins devant la Cour, soutiennent que l’intimé qui leur a indiqué qu’il voulait profiter de ce voyage pour se procurer des oeuvres

d’art, ne leur avait pas dit ni laissé entendre qu’il pensait les obtenir d’une manière illicite; qu’en définitive, le

Tribunal a répondu au moyen tiré par les assureurs des dis positions de l’article 348 par le seul motif que cette "ar gumentation (stait) d’un intérêt relativement minime en la présente espèce, à moins qu’il ne soit prouvé que le sinistre ait eu un lien direct et étroit avec le caractère illicite

et clandestin de la navigation…", et que ce lien n’était pas prouvé; 1

Considérant qu’à la demande des assureurs tendant

à voir prononcer la nullité des contrats pour « réticence », et en conséquence le débouté de X, ce dernier oppose trois

moyens;

Considérant que l’intimé déclare que les Compagnies ont parfaitement connu la « nature » de la croisière par les

10ème Page./. informations du Cabinet Tétard, alors qu’au surplus cette nature ressortait à l’évidence des Polices elles-mêmes; th I qu’après avoir aisément fait la démonstration que les Com pagnies d’assurances ont su qu’il devait transporter des


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objets d’art, il affirme "qu’il est de notoriété commune, même pour les non-professionnels du transport, que, dans tous les pays, des restrictions s’opposent à l’exportation des oeuvres

d’art« et que les assureurs »n’ont donc pu, à aucun moment, se méprendre sur le caractère du chargement et du transport fon sécutif";

Considérant que cette dernière affirmation est précisément contestée par les appelants; que de nombreux pays, notamment certains Etats du Bassin Méditerranéen, ont pris des mesures destinées à protéger leur patrimoine artistique; qu’il en est ainsi, en France, avec la loi du 23 juin 1941; qu’aux termes de l’article 1er de cette loi, "les objets présentant un intérêt national d’histoire ou d’art ne pourront être exportés sans une autorisation du Secrétaire d’Etat à l’Education

Nationale et à la Jeunesse…."; que, sous menace de sanctions pénales, il est interdit d’exporter de France des oeuvres d’art sans la permission de l’autorité compétente; que l’exportation 4 est donc licite à la condition d’avoir obtenu une telle auto risation; qu’une réglementation semblable à celle en vigueur en France existe en Italie, des dérogations à l’interdiction

d’exporter pouvant être accordées par le Ministère de l’Ins truction Publique, l’exportateur étant alors soumis au paiement de droits d’autant plus élevés que la valeur du ou des objets est plus grande; que des dispositions analogues ont été pri ses dans de nombreux pays, notamment en Grèce et en Turquie; 11 qu’ainsi, au Liban l’exportation des antiquités, en principe interdite, peut être autorisée, et cette autorisation est « ac cordée de droit » dans certains cas et en particulier quand les objets d’art ont été « importés de l’étranger »; qu’en définitive, si la plupart des Etats dont les territoires bordent la Médi

11ème Page./. terranée, ont réglementé l’exportation des oeuvres d’art, cette

réglementation n'a pas pour but ni pour tinitatis xxx effetah m


5ème chambre A 15 décembre 1970

d’interdire cette exportation, mais seulement de la contrôler

en vue de sa limitation dans la mesure nécessaire à la pro tection des patrimoines nationaux; qu’il n’a pas été caché aux assureurs, avant qu’ils contractent, qu’au cours de sa croisière en Méditerranée, l’intimé transportait des objets

d’art; qu’ils n’avaient cependant aucune raison de soup çonner que cet antiquaire de bonne renommée et de réputation mondiale, ainsi que lui-même en rapporte la preuve, serait capable, alors qu’il est possible d’exporter des objets d’art avec des autorisations régulières, de se procurer ces objets par des voies illicites; que cette opinion, qui résulte de

l’examen des différentes législations, n’est pas infirmée par

l’attestation délivrée à l’intimé par un sieur Ratton, qui serait antiquaire et expert, selon lequel le marché interna tional des antiquités serait « pour une grande part » alimenté

d’objets qui n’ont pas été soumis régulièrement, lors de leur exportation du payt dont ils sont originaires, aux autorisa tions prescrites par la législation de ce papays; qu’il est possible en effet qu’existe un trafic clandestin important sur les objets d’art anciens, sans que l’on doivent penser que l’intimé, antiquaire à la situation financière très xixix assise, possédant plusieurs Galeries d’Art à Haris et à

New-York, s’exposerait délibérément aux risques de toutes sortes qui mena cent ceux qui se livrent à cette activité

illicite; qu’on ne saurait attribuer plus de portée à l’at testation délivrée le 11 février 1969 par le Cabinet Tétard

à X; que ce Cabinet prétend qu’il aurait "présenté aux

Compagnies apéritrices des deux polices corps et facultés,

d’une façon exacte et complète, le but et le caractère par ticulier du voyage entrepris par le Toguna…"; que de tels termes sont équivoques,"le but et le caractère particulier

12ème Page./ du voyage" pouvant être une allusion aussi bien à des achats se d


5ème chambre A 15 décembre 1970 v°3

honnêtes qu’à un commerce illicite; que cette attestation mon tre seulement l’embarras du Cabinet Tétard, soucieux de ne pas se voir reprocher par X d’avoir été un mandataire inti dèle; que l’intimé verse également aux débats une lettre adtessée le 21 mars 1968 à un sieur Camus, du Cabinet Tétard, par le sous-directeur de La Union et ie henix Espagnol; que ce dernier confirme à son correspondant qu’il lui a refusé de participer à l’assurance de l’expédition du Toguna pour deux raisons: "10/ Ce genre de navire de plaisance d’après toutes les statistiques est en général déficitaire, car il est bien rare que chaque sortie n’entraine des réparations qui dépassent largement les primes reçues 2°/ La nature même de la croisière, prévue autour de la Méditerranée, et l’achat

d’oeuvre d’art ne pouvaient qu’aggraver la situation prévisi ble de ce risque en raison du caractère aléatoire du commerce du proposant"; qu’il faut ob server que cette attestation a été délivrée après le naufrage par un assureur a posteriori renseigné sur les buts réels de la « croisiere » et les condi

tions dans lesquelles alle a eu lieu; que les termes employé s

n’expriment pas nécessairement que lors des pourparlers avec le Cabinet Tétard, celui-ci lui avait révélé que X avait

l’intention de procéder à des exportations illicites; qu’en admettant même que le sieur Camus ait, dans sa conversation avec ce responsable du Phenix Espagnol, laissé entrevoir les intentions réelles de X, rien ne prouve u’il ait usé de

la même franchise avec les autres Compagnies d’assurances, au risque de se voir opposer le même refus, étant impensable que ces derniers aient accepté de propos délibéré de garantir les aléas d’une aventure aussi périlleuse;

Considérant que l’intimé ajoute, dans ses conclusions

13ème Page./. signifiées le 10 novembre 1970, que le Cabinet Tétard n’aurait thy Jo eu aucune raison de cacher aux assureurs les intentions véri


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tables de X, puisque les exportation envisagées "contre venant des réglementations internes étrangères, ne sont en rien contraire à l’ordre public français, et ne constituent pas une cause immorale ou illicite susceptible d’affecter la

validité d’un contrat soumis à notre droit";

-

Mais considérant que le Cabinet Tétard avait au

contraire le plus grand intérêt à ne rien dire des intentions véritables de X, car s’il avait exactement renseigné les assureurs, il est certain que ceux-ci n’auraient pas contracté;

Considérant que l’intimé soutient encore que l’ar ticle 348 est d’interprétation stricte, et que, pour

apprécier si la réticence a pu diminuer l’opinion du risque, il

y a lieu « seulement de déterminer si la connaissance du ou des éléments ignorés des assureurs les aurait amenés à per cevoir une prime plus élevée » que celle convenue, le risque pour eux se ramenant à une« expression chiffrée »; qu’ils pré tendent, à ce propos, que les primes perçues en matière de navigation de plaisance sont généralement plus élevées que celles appliquées à la navigation commerciale; que cet argu ment ne mérite pas davantage d’être retenu; qu’en effet, il ne s’agit pas, dans le cadre d’application de l’article 348,

d’apprécier si les primes sont plus élevées pour les yachts de plaisance que pour les cargos, mais seulement de vérifier sifses réticences ou celles de son mandataire, ayant consisté

+ par./.

à ne pas dévoiler ses intentions de fraude, X n’a pas kdy diminué l’opinion du risque" dans l’esprit des assureurs avec lesquels il contractait;

Considérant qu’en outre l’intimé fait état de ce que les deux Polices comportent une même clause d’exclusion

de garantie aux cas de contrebande et de "commerce prohibé ou

clandestin", et veut en déduire qu’aucune aggravation consé

14ème Page./. cutive du risque couvert par les assureurs ne pouvait se

h s produire "puisque l’on entrait immédiatement dans le domaine


5ème chambre A 15 décembre 1970 N°3

de l’exclusion de garantie";

Considérant qu’aux termes de la Police « corps » sont exclus de la garantie….4°) les conséquences de viola tion de blocus, contrebaude, commerce prohibé ou clandestin, les frais de quarantaine, d’hivernage ou de jours de planche« , tandis que selon l’article 7 de la rolice »facultés" dont

« Risques exclus a) amendes, confiscation, mises sous séquestre, réquisition, violation de blocus, contrebande, commerce prohibé ou clandestin, dommages-intérêts, saisies conservatoires, saisie exécution ou autres saisies…. »; que l’argument que l’intimé entend tirer de ces dispositions est spécieux; qu’en effet, si les deux contrats ont exclu de la garantie les dommages causés aux choses assurées par la contrebande ou le commerce

prohibé ou clandestin, cette exclusion de la garantie n’em pêche pas la nullité de ces contrats si, comme en l’espèce, il est prouvé que, par sa réticence, ayant consisté à dissimu ler son intention de pratiquer un commerce illicite, l’intimé

a diminué aux yeux des assureurs l’opinion que ceux-ci pou vaient se faire du risque ;

Considérant enfin que X fait valoir que le sinistre s’est produit en haute mer, c’est à dire dans une zone échappant radicalement à la compétence des Etats d’où provenaient les marchandises se trouvant à bord, et n’a donc, comme l’ont relevé les premiers Ju es, "aucune corrélation avec l’illicéité du trafic" au regard de leurs réglementations nationales; qu’il suffit pour rejeter cet argument de rappe ler qu’aux termes de l’alinéa 2 de l’article 348 « 1'assurance est nulle, même dans le cas où la réticence… n’aurait pas influé sur le dommage ou la perte de l’objet assuré »; H

Considérant qu’il est reconnu par l’intimé qu’à

l’occasion de cette « croisière », il s’est livré à l’exporta

15ème Page./. tion illicite d’oeuvres d’art; qu’il est établi, notamment par of th les déclarations du Capitaine du yacht et de ses marins, que


5ème chambre A 15 décembre 1970

cette activité clandestine a entrainé des risques particu liers, infiniment plus grands que ceux qui auraient été en courus si le bateau avait été seulement employé pour la pro menade ou pour un commerce honnête; que pour montrer le

caractère avantureux de l’entreprise, il convient d’indiquer que lors du naufrage les trois hommes disposaient d’au moins deux fusils et de revolvers et qu’en quittant le bord ils

n’ont emporté aucune autre chose précieuse que ces armes; qu’ il est certain qu’avant la signature des contrats, X et son mandataire ont laissé ignorer aux assureurs à quel trafic le bateau allait être employé; que l’opinion du risque qu'

ont pu se faire les assureurs s’en est trouvé diminué; qu’en conséquence, les deux contrats d’assurances doivent être annulés en application de l’article 348 du code de commerce et C,dit X, doit être débouté de sa demande;

PAR CES MOTIFS:

Donne acte à la société civile professionnelle

Z et A B, société titulaire d’un office

d’avoué près cette Cour, de ce qu’elle se constitue pour les cinquante compagnies d’assurances sus-nommées, aux lieu et place de Maitre Z B, démissionnaire en sa faveur, précédemment constitué;

Déclare recevable l’appel des assureurs; le dit

bien fondé; W

Infirme le jugement entrepris, et statuant à nouveau

Déclare les deux contrats d’assurance (police

« Corps » et police « Facultés ») annulés en vertu de l’article

348 du code de commerce;

Déboute C, dit X, de ses demandes;

Le condamne aux dépens de première instance et

d’appel; en ordonne la distraction au profit de la société

16ème Page./. civile professionnelle Z et A B, société

J


5ème chambre A 15 décembre 1970 N°3

titulaire d’un office d’avoué, aux offres de droit;

Rejette comme inopérantes ou mal fondées toutes conclusions plus amples ou contraires des parties; -

FAIT ET PROLONCE à l’audience publique de la cinquième chambre de la Cour d’Appel de Paris, tenue au Palais de Justice à Paris, le mardi quinze décembre mil neuf cent soixante dix, où étaient présents et siégeaient:

En présence de Mousieur BAILLIF, Avocat Général;

Monsieur LOUQUET, Président; Messieurs F et G DE

CRISEN Y, Conseillers; assistés de Maitre Jeannine LEQUEN,

Approuvé uze бериец "Rouqur Greffier.

mots rayés nuls et deusc. renvois./.

no

1

17ème et dernière Page./.

Jy ch

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Cour d'appel de Paris, 15 décembre 1970, n° J.4376