Cour d'appel de Paris, 16 décembre 1992, n° 92/11.091

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 16 déc. 1992, n° 92/11.091
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 92/11.091

Sur les parties

Texte intégral

16/12 92 15:15 12829835

N° Répertoire Général :

[…]

AIDE JUDICIAIRE

Admission du au profit de

Date de l’ordonnance de clôture :

S/ appel Just T.G.I.PARIS 1 Ch.1 Son

[…]

1ère page

SCP BERNABE

→→→ CABINET AVOCATS 001

COUR D’APPEL DE PARIS

chambre, section A I

ARRÊT DU 16 DECEMBYE 1992

!N° pages

PARTIES EN CAUSE
Monsieur A Z né le […]

Mars 1937 à Waterbury Connecticut, U.S.A. 9 nationalité américaine , directeur de recherch au National Cancer Institute demeurant 851:

Thorden Terrace. Bethesda, Maryland. […]

-appelant ayant pour avoué la S.C.P. BERNABE

RICARD et pour avocat Me PIWNICA

EF:

I) Monsieur B C demeurant […] , […],

2°) Monsieur D E demeurant […].

3°) La Société LE MONDE (S.A.R.L.) ayant son siège […]. 75015 prise en la personne de son gérant domicilié audit siège

-intimés ayant pour avoué Me BODIN CASALIS et pour avocat Me BAUDELOT

COMPOSITION DE LA COUR (lors des débats et du délibéré ):

Madame HANNOUN , Président,
Monsieur X,
Monsieur BOVAL, Conseillers

GREFFIER: MLe MONTMORY.

MINISTERE PUBLIC (auquel le dossier a été co: muniqué) -représenté par Madame BENAS, Avocat Général

DEBATS: A 1'audience publique du 3 Novembre 1992.

ARRET: -contradictoire


10/12 92 15:10 155554

A F est appelal d’un jugement du Tiibunal de Glade

Instance de PARIS en date du 20 mai 1992, qui l’a débouté de toutes ses demandes dans l’action qu’il avait introduite par actes du 21 octobre 1991 à l’encontre de G E et B C. respectivement journaliste au MONDE et directeur de publication de ce quotidien, ainsi que contre la société éditrice LE MONDE. Incriminant deux articles écrits par G E, publiés les 18 et 20 septembre

1991, et comportant selon lui des allégations diffamatoires ou subsidiairement injurieuses ou fautives à son égard, A Z avait, outre des mesures de publication, réclamé que ses adversaires soient condamnés solidairement à lui payer les sommes de 500.000 F à titre de dommages intérêts et de 30.000 F pour ses frais irrépétibles.

G I, B J et la société LE MUNDE avaient

conclu au débouté, en faisant valoir à titre principal que les faits exposés étaient exacts, et en sollicitant subsidiairement que leur

soit accordé le bénéfice de la bonne foi.

Le Tribunal a écarté I’exception de vérité, mais reconnu le bénéfice de la bonne foi aux défendeurs. Il a débouté A Z,

en le condamnant au paiement d’une indemnité de 10.000 F par application de l’article 700 dn nouveau Code de procedure civile.

Appelant suivant déclaration du 27 mai 1992, A Z sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a retenu que les propos incriminés étaient diffamatoires et que ses adversaires n’en démontraient pas la véracité. Concluant à la réformation pour le

Suplus, il plie la Cuul de dire que ces imputations diffamatoires ont

été faites de mauvaise foi, et il réclame les mesures de publication, les dommages intérets et l’indemnité pour frais irrépétibles qu’il

avait déjà sollicités en première instance.

G E, B C et la société LE MONDE concluent

à la confirmation du jugement, en réitérant leur argumentation sur la vérité des faits diffamatoires at enhsidiairement sur la bonne foi.

Ils réclament une indemnité oupplémentaire do 20.000 F pour lours

frais non taxables d’appel.

Référence étant faite au jugement entrepris et aux écritures des Ch parties pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, on se date 16:12. 92****

..pageH

…..

[…]


[…]

limitera ici à reproduire les principaux passages des articles

querellés.

L’article du 18 septembre 1991 est rédigé comme suit:

Dans un rapport préliminaire du National Institute of Health anéricain

LE PROFESSEUR Z EST ACCUSE D’AVOIR CENSURE

L’ARTICLE SUR LA DECOUVERTE DU VIRUS DU SIDA

Les pressions exercées sur lui pour qu’il ne parle pas auront été vaines: K Y, le virologiste en chef du laboratoire du Professeur A Z (National Cancer

Institute, Bethesda) au moment de la découverte du virus da SIDA a craqué. Il n’a pas voula porter seul le chapeau des irrégularités commises dans ce laboratoire à cette époque. Et, du même coup, la vérité commence enfin à apparaître dans ce qui constitue la plus incroyable polémique scientifique du siècle.

En effet, selon un rapport préliminaire de National Institute of Health, dont la teneur a été révélée par le N O dz 15 septembre, le Professseur Z a tout simplement censuré son principal collaborateur, l’empéchant d’écrire, dans l’article annonçant qu’il avait découvert le virus du SIDA, qu’il avait utilisé pour ce faire comme

'virus de référence’ celui que le professeur M (Institut Pasteur, Paris) lui avait adressé quelques mois plus tôt. Si le professeur Z avait publié dans SCIENCE

l’original de l’article qu’avait rédigé pour son compte K Y en mars 1984, il n’y aurait pas eu d’affaire". Tout aurait été clair, et personne n’aurait contesté la paternité des chercheurs français sur la découverte de virus de SIDA.

A en croire K Y (qui avait pris soin d’envoyer une copie du manuscrit original à sa soeur qui demeure en Ichécoslovaquie) des discussions pour le moins animées auraient en lieu à l’époque entre lui-même et A Z. « Je n’étais pas d’accord’ a déclaré aux enquêteurs du NIE le Dr Y, 'pour que nous omettions de citer les références de notre travail. Nous avons eu tort de ne pas indiquer plus clairement quelle a été la contribution du groupe de L M ». Pour les experts du NIE, il ne fait dès lors plus de doute que le professeur Z a exercé une 'censure’ caractérisée contrevenant ainsi aux règles les plus élémentaires de la communication scientifique.

Et par la suite, des années durant, il n’a cessé de mentir, affirmant qu’il

n’avait pas fait pousser le virus de PASTEUR en lignée continue. Au terme de ce rapport préliminaire de 200 pages, les experts du NIE s’en tiennent donc à l’accusation de censure, estimant que l’on ne peut encore parler formellement de « mauvaise conduite » – scientifique. Une accusation très grave qui contraindrait la direction du NIH à prendre. des sanctions à l’égard de son chercheur vedette.

On saura donc dans quelques semaines, à l’occasion de rapport définitif du NIE

-après que ce document aura êté une dernière fois revu par A Z, K Y, le Department of Health and Human Services et les deux groupes d’experts indépendants nommés par le NIH- si l’on peut ou non conclure que le Dr Z a délibérément « volé » Le

virus de l’Institut Pastear…..

Dans I’autre article incriminé, daté du 20 septembre 1991, et

intitulé:

L’épilogue de l’affaire Z LE GOUVERNEMENT N’EXCLUT PLUS UNE RENEGOCIATION

DE L’ACCORD REAGAN-CHIRAC DE 1987 SUR LE SIDA Ch.

date 16…2..92… il est notamment ecrit:

…..

3

-page

… A IE


16/12 ¹92 15:17 42829835 SCP BERNABE →→→ CABINET AVOCATS 4004

… L’article publié dimanche 15 septembre par le N O, révélant le contenu d’un rapport préliminaire du VIH accablant pour le professeur Z 'pose de graves questions’ quant aux conditions dans lesquelles la découverte du virus de SIDA a en lien. S’il

s’avérait, dit-on en substance au ministère de la recherche, que la recherche française

a bel et bien, à cette occasion. subi de graves préjudices. il faudrait alors s’interroger pour savoir dans quelle pesure l’accord de 1987 rend réellement compte des contributions respectives des uns et des autres dans cette découverte….

C’est la première fois que le Gouvernement français fait connaitre sa position dans cette affaire. Il le fait à un moment où il ne parait plus guère faire de doute que des irrégularités ont été commises par l’équipe da professeur Z. Selon nos informations, il ne resterait plus aux enquéteurs du XIE qu’à terminer l’analyse des souches virales que le professeur Z dit avoir utilisées poer isoler « son » virus avant de boucler définitivement leur rapport. On saura alors s’il s’est vraiment produit une contamination accidentelle ou si l’on peut parler de fraude…

SUR QUOI. LA COUR:

Considérant que les parties ne critiquent pas le jugement entrepris en ce qu’il a estimé que trois imputations diffamatoires

devaient être retenues:

l’accusation portée contre A Z d’avoir « censuré » son

principal collaborateur, Mikolas Y, en l’empêchant d’écrire, dans des articles annonçant la découverte du virus du SIDA (HTLV-III selon lui) publiés dans la revue américaine SCIENCE le 4 mai 1984, qu’il avait utilisé pour ce faire comme « virus de référence » celui que le professeur M de l’Institut Pasteur lui avait adressé

quelques mois auparavant et dénommé LAV,

l’allégation selon laquelle « des années durant » A Z "n’a cessé de mentir, affirmant qu’il n’avait pas fait pousser le virus de

Pasteur en lignée continue",

l’évocation de la possibilité d’un « vol » du virus de Pasteur par

-

A Z en vue de la mise au point d’un test sanguin de dépistage

de la maladie:

Considérant que les intimés font grief aux premiers juges de

n’avoir pas admis qu’ils rapportaient la preuve de la vérité de ces imputations; que cependant, l’argumentation développée par eux en cause d’appel n’apparait pas être de nature à justifier que soit remise en cause la motivation pertinente, que la Cour adopte, par laquelle le Tribunal a rejeté l’exception de vérité;

Considérant que le tribunal ayant reconnu aux défendeurs le

Ch…… bénéfice de la bonne foi, l’appelant ne conteste pas que la publica tion des articles incriminés ait pu correspondre à un but légitime a

16.12.92. dade H

h


[…]/12 92 15:18 42829835 SCP BERNABE →→→ CABINET AVOCATS

d’information des lecteurs, mais prétend en revanche que les premiers juges ont estimé à tort que l’absence d’animosité personnelle, le sérieux de l’enquête, la prudence dans la relation des faits, étaient

avérés en l’espèce:

Considérant que A Z soutient en premier lieu que G

E a dénaturé certains documents qui lui étaient soumis (en retenant la notion de « censure » alors que ce terme aurait été utilisé

dans les documents officiels en langue anglaise dans le sens de

« correction »), et a surtout délibérément omis de faire état des documents (en particulier, la mise au point publiée en septembre 1991 par la direction du NIH après la divulgation non autorisée du rapport préliminaire d’enquête) qui étaient de nature à l’exonérer des

accusations portées contre lui;

Qu’il fait valoir également que G E a fait preuve de partialité, d’outrance et de manque de prudence dans la rédaction en employant des "termes aussi infamants que ceux de censure, mensonge et vol à l’encontre d’un chercheur ayant consacré sa vie à la

recherche scientifique":

Qu’il expose enfin que l’animosité personnelle de G E

à son encontre, est établie par le fait que l’intéressé se serait fondé exclusivement sur les informations publiées par P Q

(alors que celui-ci aurait « déclaré que son but était de mettre fin aux activités du Professeur Z »), et n’a jamais tenté de se renseigner directement auprès de lui ou des autorités sanitaires

américaines;

Mais considérant que cette argumentation ne saurait être suivie; qu’il résulte des pièces versées aux débats que G E, qui a rendu compte au fil des années de la polémique relative aux circons effectué, pour les tances de la découverte du virus du SIDA, articles incriminés, une enquête sérieuse et approfondie, tirant certes parti des révélations de P Q, mais en les corroborant par les données provenant du projet de rapport d’enquête officiel, mentionnant en particulier les déclarations faites sous serment par que les termes employés doivent être personnes entendues; appréciés dans le contexte des articles (qui insistaient sur le les

caractère provisoire du rapport mentionné) en ayant égard notamment au fait que les mots « censure » et « vol » ont été mis entre guillemets, et n’apparaissent pas outranciers en l’état des enquêtes en cours à Ch… A.. ce sujet à la date des publications querellées, et dont les résultats 16.12.92….. date

5

..page


18/12 92 15:18 42829835 SCP BERNABE

→→→ CABINET AVOCATS 4006

définitifs n’étaient pas encore connus -si bien que l’appelant ne peut pas prétendre qu’il aurait été exonéré des accusations portées contre lui par la mise au point publiée en septembre 1991; que par ailleurs, la comparaison des articles incriminės et d’autres articles. versés aux débats, parus sur le même sujet en France et à l’étranger (non seulement les articles du N O, mais aussi ceux des revues spécialisées SCIENCE ou NATURE. ou de l’hebdomadaire britannique "THE

ECONOMIST", qui n’ont pas suscité de poursuites) ne confirme pas les allégations de A Z selon lesquelles G E aurait fait preuve à son égard d’une animosité particulière, étant d’ailleurs observé que l’argumentation de l’appelant de ce point de vue ne vise pas directement l’état d’esprit personnel de son adversaire, mais fait grief à celui-ci d’avoir repris des informations provenant de P

Q, lequel lui aurait ouvertement manifeste son nostilite;

Considérant qu’il s'ensnit que c’est à iuste titre que le

Tribunal, par des motifs pertinents que la Cour fait siens pour le surplus, a estimé que le bénéfice de la bonne foi devait être retenu; que le jugement entrеpiis melILE GA ULLIILmation tru’il P

débouté A Z de toutes ses demandes;

Considérant qu’il serait inéquitable de laisser à la charge des intimés certains irais irrepetibles qu’ils uut da exposer pour défendre leurs droits en appel; qu’il convient de leur allouer de ce chef une indemnité supplémentaire de 10.000 F;

PAR CES MOTIFS:

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris;

Y ajoutant:

Condamne A Z à payer à G E, B C et à la société LE MONDE une indemnité supplémentaire de 10.000 F pour

leurs fials ILLépélibles d’appel;

Rejette toute autre demande;

Ch A Condamne A Z aux dépens d’appel;

Jdate 16.12.92…


Admet Me BODIN CASALIS, avoué, au bénéfice des dispositions de

l’article 699 du nouveau Code de procédure civile.

PRONONCE EN AUDIENCE PUBLIQUE DE LA COUR D’APPEL DE PARIS, 1 CHAMBRE

A, le 16 Décembre 1992, par Madame HANNOUN, President, qui a signé la minute avec MIle MONTMORY, Greffier.

He

Ch…. A

date 12.92

-page et dernière SC 17 B Imp. Greffe CA PARIS

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