Cour d'appel de Paris, 4e chambre section b, 19 septembre 2003

  • Mot-clé permettant l'accès au site internet du défendeur·
  • Désignation générique du matériau·
  • Usage à titre de marque·
  • Marque devenue usuelle·
  • Mises en demeure·
  • Dégénérescence·
  • Marque 1700355·
  • Durée limitée·
  • Reproduction·
  • Contrefaçon

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 4e ch. sect. b, 19 sept. 2003
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Publication : PIBD 2004, 781, IIIM-137
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de grande instance de Paris, 16 février 2000
  • 1998/25145
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : KAYSERSBERG ; AKYPLEN ; AKYLUX
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 1415780 ; 1629196 ; 1700355
Classification internationale des marques : CL09; CL11; CL16; CL17; CL18; CL19; CL20; CL21; CL28
Référence INPI : M20030542
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Texte intégral

La cour est saisie d’un appel interjeté par la société KAYSERSBERG PACKAGING SA d’un jugement rendu le 16 février 2000 par le tribunal de grande instance de Paris dans un litige l’opposant à la société KARGIL SARL. Les circonstances de fait ont été exactement rappelées par les premiers juges. Il sera seulement indiqué que, se prévalant des marques KAYSERSBERG, AKYPLEN et AKYLUX, et constatant l’utilisation sur le réseau internet des mots clefs « KAYSERSEBERG », « AKYLUX » et « AJYPLEN » renvoyant au site d’une société concurrente KARGIL, KAYSERSBERG, estimant que cet usage était constitutif de contrefaçon et de concurrence déloyale, a fait citer devant le tribunal de grande instance de Paris, KARGIL, pour obtenir, outre des mesures d’interdiction sous astreinte et de publication, paiement de dommages et intérêts. KARGIL avait contesté les actes de contrefaçon et de concurrence déloyale et avait, en ce qui concerne la marque AKYLUX, conclu à la déchéance de KAYSERSBERG de ses droits sur cette marque pour dégénérescence en application de l’article L 714-6 du code de la propriété intellectuelle, réclamé paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive et d’une indemnité sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. Par le jugement déféré, le tribunal a :

- d’une part,
- prononcé la déchéance des droits de KAYSERSBERG sur la marque AKYLUX n° 1700355 en application de l’article L 714-6 du Code de la propriété intellectuelle,
- dit que cette décision devenue définitive sera transmise par les soins du secrétariat- greffe du tribunal à M. le directeur de l’INPI, aux fins d’inscription sur le Registre national des marques,
- débouté KAYSERSBERG de sa demande aux fins de contrefaçon de cette marque,
- d’autre part,
- dit que l’utilisation des dénominations « AJYPLEN », « KAYSERSEBERG » par KARGIL dans les pages source de son site internet constitue la contrefaçon des marques dénominatives françaises « KAYSERSBERG » enregistrée sous le n° 1415 780 pour désigner divers produits et services des classes 16 et 20 et « AKYPLEN » enregistrée sous le n° 1629196 pour désigner divers produits de la classe 17 et notamment « produits semi- finis en matières plastiques » appartenant à KAYSERSBERG,
- interdit en tant que de besoin à KARGIL, sous astreinte de 1000 francs par infraction constatée de poursuivre l’utilisation des dénominations « AJYPLEN » et « KAYSERSEBERG », notamment dans les pages source de son site internet, sans l’accord de KAYSERSBERG, à compter de la signification du présent jugement,
- condamné KARGIL à payer à KAYSERSBERG la somme de 100 000 francs à titre de dommages et intérêts pour l’atteinte portée à ses deux marques par la contrefaçon,
- débouté KAYSERSBERG de sa demande afférente aux actes de concurrence déloyale et parasitaire,
- autorisé KAYSERSBERG à faire publier- en entier ou par extraits- le dispositif du jugement dans deux revues ou journaux de son choix, aux frais de KARGIL, sans que ceux-ci puissent excéder -à sa charge- la somme globale de 30 000 francs hors taxes,
- dit que le tribunal se réserve expressément la liquidation des astreintes en vertu de l’article 35 de la loi du 9 juillet 1991 sur nouvelle saisine des parties,
- débouté les parties de toutes prétentions plus amples ou contraires,

— prononcé l’exécution provisoire de la seule mesure d’interdiction,
- condamné KARGIL à payer à KAYSERSBERG la somme de 20 000 francs sur le fondement de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile. Appelante de ce jugement, KAYSERSBERG, par ses écritures du 23 avril 2002, prie la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu’il a constaté que KARGIL s’est livrée à des faits de contrefaçon des marques nominatives KAYSERSBERG enregistrée sous le n° 1415 7780 et AKYPLEN enregistrée sous le n° 1 629 196,
- réformer partiellement le jugement entrepris,
- statuant à nouveau :

- dire que KARGIL s’est également rendue coupable de contrefaçon de la marque AKYLUX n° 1 700 355,
- dire que KARGIL s’est livrée à des actes de concurrence déloyale et parasitaire,
- débouter KARGIL de sa demande visant à obtenir la déchéance de ladite marque sur le fondement de l’article L 714-6 du CPI,
- de façon générale, débouter KARGIL de l’ensemble de ses demandes,
- faire défense à KARGIL d’utiliser les marques AKYLUX, AKYPLEN et KAYSERSBERG, à quelque titre que ce soit et pour quelque cause que ce soit, notamment dans le texte source d’un site internet, ainsi que dans tout autre fichier informatique, sous astreinte de 4000 euros par jour de retard, à compter de la signification de l’arrêt à intervenir,
- enjoindre à KARGIL de notifier aux sociétés responsables des moteurs de recherche des termes de ladite interdiction, ainsi que des instructions visant à supprimer tout lien existant dans leur base de données entre les mots-clés KAYSERSBERG, AKYLUX et AKYPLEN et ceux du/des sites web de KARGIL,
- condamner KARGIL, sous astreinte de 2000 euros par jour de retard à compter du huitième jour suivant la signification de l’arrêt à intervenir, à diffuser en tête de chacune de ses pages web, un extrait de l’arrêt à intervenir pendant un délai de six mois, dire et juger que le délai de huit jours étant écoulé, et à défaut pour KARGIL de s’être exécutée, dire que KAYSERSBERG sera en droit d’obtenir cette mesure de publication en intervenant directement auprès du fournisseur d’accès de KARGIL,
- condamner KARGIL à verser à KAYSERSBERG la somme de 54 000 euros à titre de dommages et intérêts, toutes causes confondues,
- ordonner la publication judiciaire de l’arrêt à intervenir dans quatre journaux ou périodiques au choix de KAYSERSBERG auprès (sic) de KARGIL, à concurrence de 4000 euros HT par insertion,
- dire et juger que la cour se réserve expressément la liquidation des astreintes en vertu de l’article 35 de la loi 91-650 du 9 juillet 1991,
- condamner KARGIL à verser à KAYSERSBERG la somme de 13 000 euros au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile. KARGIL a constitué avoué mais n’a pas conclu.

Considérant que dès lors qu’en appel, l’intimée n’a pas conclu, il convient de relever que la cour n’est saisie que des demandes formées en appel par KAYSERSBERG sur l’absence de dégénérescence de la marque AKYLUX, et en conséquence, sur le bien fondé de la demande en contrefaçon de cette marque, sur les mesures réparatrices et la demande en concurrence déloyale ; Considérant que le tribunal a fait droit à la demande en déchéance de la marque AKYLUX en raison de sa dégénérescence aux motifs que des nombreux documents mis aux débats (notamment des pages extraites de « la grande encyclopédie Alpha des Sciences et des techniques » de 1978, de pages extraites de sites internet « DUECI », « Horticole COM »), il résultait que le "terme Akylux, et non la marque elle-même, est utilisé très largement pour désigner de manière générique le matériau en polypropylène ; qu’un tel usage, connu de KAYSERSBERG, ne l’a cependant pas incitée à réagir pour lutter contre l’atteinte portée à sa marque par un phénomène de banalisation ; qu’elle ne prouve pas avoir manifesté sa volonté de conserver son droit privatif sur ce signe, notamment par des interpellations ou avertissements lancés à des éditeurs ou publicitaires qui présentent la dénomination protégée comme un terme générique, par l’introduction d’instances judiciaires en contrefaçon le cas échéant, au cours de ces vingt dernières années ; que ces faits dans leur ensemble caractérisent la dégénérescence de la marque en cause du fait de l’inaction de son propriétaire, face à l’utilisation abusive du public" ; Mais considérant que l’appelante souligne à juste titre que l’usage du terme « Akylux » qui, pour les premiers juges, servait à désigner, non pas un produit provenant d’une entreprise déterminée, mais une espèce particulière de matériau, n’est pas un usage généralisé ; qu’en effet, les documents mis aux débats en appel démontrent qu’en réalité dans les milieux professionnels la distinction est constamment faite entre le matériau, (le polypropylène), et la marque du produit semi-fini fabriqué par KAYSERSBERG ; qu’il en est ainsi des documents suivants :

- les dictionnaires et glossaires professionnels citent le terme polypropylène comme un matériau et le terme AKYLUX comme une marque ou un produit particulier,
- les annuaires professionnels (DESECHALIERS de 1986-87, COMPAS de 1989, FRANCE PLASTIQUES de 1995 et de 1998) citent également le nom AKYLUX comme une marque ou un produit et non pas comme le terme générique d’un matériau,
- dans la documentation diffusée par la Chambre Syndicale des Emballages en matière plastique qui fait une présentation des différents matériaux plastiques, il n’est nullement fait mention du nom AKYLUX, il en est de même du site internet « Emballages Magazine » qui dans la rubrique « produits » fait apparaître le polypropylène et dans la rubrique marques le nom AKYLUX
- une étude du Centre d’Etude et de Recherches Nucléaires (CERN) présente également de façon distincte le matériau polypropylène et la marque ; Qu’en outre, les extraits de presse mis aux débats mettent en évidence que la presse professionnelle précise de façon générale que le nom AKYLUX est une marque enregistrée et n’utilise pas le nom AKYLUX comme le terme générique du polypropylène ; que cet usage à titre de marque et non pas comme terme générique résulte également des documents (visés au bordereau de communication de pièces sous les n° 69 à 77) émanant de différents fabricants et de clients ; Considérant que, par ailleurs, contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, KAYSERSBERG n’a pas été inactive dans la protection de sa marque ; qu’elle justifie en

effet avoir, avant que lui soit opposée cette demande en déchéance, envoyé des lettres recommandées avec AR contenant mises en demeure de cesser une utilisation illicite du terme, notamment à la société SUN CLEAR DIFFUSION le 25 avril 1997, à la société LEC, le 8 avril 1999 ; que d’autres documents démontrent qu’elle désigne elle-même ses produits (plaques en polypropylène) sous le nom AKYLUX et qu’il n’est nullement établi que des plaques de cette matière non fabriquées par KAYSERSBERG auraient été diffusées également sous le terme AKYLUX ; qu’à cet égard les documents qui avaient été produits en première instance par KARGIL ne permettent pas de savoir si les produits désignés sous le terme en litige avaient une origine autre que celle de l’appelante ; Considérant qu’au vu de ces documents qui n’avaient pas été soumis à l’appréciation des premiers juges, il n’est nullement démontré que les conditions de déchéance de l’article L 714-6 du CPI par dégénérescence sont remplies ; que le jugement sera réformé de ce chef ; Considérant qu’il est constant, au regard du procès-verbal en date du 5 octobre 1998, que le terme déposé à titre de marque a été utilisé par KARGIL comme mot clef donnant accès à son site internet sans autorisation de KAYSERSBERG ; qu’un tel usage constitue une contrefaçon par reproduction à l’identique de la marque déposée pour désigner des produits identiques ; qu’il n’y a pas lieu de ce fait de rechercher l’existence d’un risque de confusion ; Considérant qu’au titre des mesures réparatrices, estimant que le montant retenu par les premiers juges est insuffisant, l’appelante demande une condamnation globale pour les atteintes portées aux trois marques à la somme de 53 000 euros ; Considérant, toutefois, que ce montant est excessif au regard du préjudice réellement subi, dans la mesure où, comme l’avaient déjà relevé les premiers juges, l’usage litigieux a cessé et n’a prospéré que durant une année ; que pour tenir compte de l’atteinte portée à la marque qui n’avait pas été retenue par les premiers juges, la cour estime que le préjudice global subi par KAYSERSBERG sera réparé par l’allocation de la somme de 23 000 euros ; que le jugement sera réformé de ce chef ; Considérant que les mesures de publication supplémentaires sollicitées par insertion sur les sites internet n’apparaissent pas appropriées, les publications ordonnées par les premiers juges étant suffisantes ; Considérant que les mesures d’interdiction seront confirmées ; qu’il sera précisé qu’elles porteront également sur la marque AKYLUX ; qu’il n’y a pas lieu pour la cour de se réserver la liquidation de l’astreinte ; que le jugement sera également confirmé sur ce point ; qu’il n’est pas nécessaire de faire droit à la demande d’injonction de notification aux sociétés responsables des moteurs de recherche des termes de l’interdiction, dès lors que KARGIL doit, en application de la mesure d’interdiction, tout mettre en oeuvre pour que les actes de contrefaçon ne se reproduisent pas ; Considérant que l’appelante réitère sa demande en concurrence déloyale mais ne développe aucun moyen à l’appui de cette demande ; qu’en outre les premiers juges ont exactement dit que les griefs de concurrence déloyale invoqués n’étaient pas distincts de ceux retenus au titre de la contrefaçon ; que le jugement sera, par des motifs que la cour adopte, confirmé de ce chef ; Considérant que l’équité commande d’allouer à KAYSERSBERG une indemnité supplémentaire de 3000 euros pour les frais d’appel non compris dans les dépens ; PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement sauf sur le rejet de la demande en contrefaçon de la marque AKYLUX, sur le montant des dommages et intérêts ; Réformant de ces chefs, statuant à nouveau et le précisant ; Rejette la demande en déchéance de la marque AKYLUX n° 1 700 355 ; Dit bien fondée la demande en contrefaçon de cette marque ; Condamne la société KARGIL SARL à payer à la société KAYSERSBERG PACKAGING SA pour l’entier préjudice subi du fait de la contrefaçon des trois marques la somme de 23 000 euros à titre de dommages et intérêts ; Dit que les mesures d’interdiction porteront également sur la marque AKYLUX ; Dit que les mesures de publication tiendront compte du présent arrêt ; Condamne KARGIL à payer à KAYSERSBERG la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile ; Rejette toutes autres demandes ; Condamne KARGIL aux entiers dépens ; Dit que les dépens d’appel seront recouvrés, le cas échéant, par la SCP FISSELIER- CHILOUX, avoué, conformément aux dispositions de l’article 699 du nouveau·Code de procédure civile.

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