Cour d'appel de Pau, 1re chambre, 18 décembre 2020, n° 18/02540

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Pau, 1re ch., 18 déc. 2020, n° 18/02540
Juridiction : Cour d'appel de Pau
Numéro(s) : 18/02540
Importance : Inédit
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
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Texte intégral

PS/JD

Numéro 20/03787

COUR D’APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 18/12/2020

Dossier : N° RG 18/02540 – N° Portalis DBVV-V-B7C-G7RB

Nature affaire :

Demande en nullité de la vente ou d’une clause de la vente

Affaire :

[Y] [C], [V] [Z] épouse [C]

C/

[U] [G],

[B] [N],

SCP DUCOURAU-DURON-

[K]-[X]-

MOREAU LESPINARD,

SA CREDIT FONCIER DE FRANCE,

SA AXA FRANCE,

SCI MESTADE,

SAS PROMOTION PICHET, SARL IG2P

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 18 Décembre 2020, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 15 Septembre 2020, devant :

Madame DUCHAC, Président

Monsieur SERNY, Conseiller, magistrat chargé du rapport conformément à l’article 785 du code de procédure civile

Madame ASSELAIN, Conseiller

assistés de Madame HAUGUEL, Greffier, présente à l’appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTS :

Monsieur [Y] [O] [J] [C]

[Adresse 6]

[Localité 9]

Représenté par Maître MARIOL de la SCP LONGIN/MARIOL, avocat au barreau de PAU

Assisté de Maître PLOUTON, avocat au barreau de LYON

Madame [V] [W] [I] [Z] épouse [C]

[Adresse 6]

[Localité 9]

Représentée par Maître MARIOL de la SCP LONGIN/MARIOL, avocat au barreau de PAU

Assistée de Maître PLOUTON, avocat au barreau de LYON

INTIMES :

Maître [U] [G]

[Adresse 5]

[Localité 16]

Représenté par Maître LOUBERE, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN

Assisté de la SCP COLLET- de ROCQUIGNY-CHANTELOT-ROMENVILLE-BRODIEZ & ASSOCIES, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND

Maître Frédéric DUCOURAU

[Adresse 2]

[Localité 13]

Représenté par Maître PARGALA de la SELARL PARGALA – DABAN, avocat au barreau de TARBES

Assisté de la SCP LAYDEKER SAMMARCELLI MOUSSEAU, avocats au barreau de BORDEAUX

SCP [N]-[T]-[K]-[X]-[S] [A], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 13]

Représentée par Maître PARGALA de la SELARL PARGALA – DABAN, avocat au barreau de TARBES

Assistée de la SCP LAYDEKER SAMMARCELLI MOUSSEAU, avocats au barreau de BORDEAUX

SA CREDIT FONCIER DE FRANCE pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 10]

Représentée par Maître LIGNEY de la SCP DUALE-LIGNEY-MADAR-DANGUY, avocat au barreau de PAU

Assistée de Maître JOURDE, avocat au barreau de PARIS

SA AXA FRANCE VIE

[Adresse 7]

[Localité 11]

Représentée par Maître PENEAU de la SCP PENEAU-DESCOUBES PENEAU, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN

Assistée de la SELARL ABEILLE & ASSOCIES, avocats au barreau de MARSEILLE

SCI MESTADE

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentée par Maître PARGALA de la SELARL PARGALA – DABAN, avocat au barreau de TARBES

Assistée de la SCP LAYDEKER SAMMARCELLI MOUSSEAU, avocat au barreau de BORDEAUX

SAS PROMOTION PICHET, venant aux droits et obligations de la SARL IG2P dont le siège social était [Adresse 4], dissoute suite à la réunion de toutes ses parts sociales entre les mains de la SAS PROMOTION PICHET

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentée par Maître PIAULT de la SELARL LEXAVOUE, avocat au barreau de PAU

Assistée de Maître LIEF, de la SCP GRAVELLIER – LIEF – DE LAGAUSIE – RODRIGUES, avocat au barreau de BORDEAUX

SCP PERRAUD – DAUDE

[Adresse 5]

[Localité 16]

Représentée par Maître LOUBERE, avocat au barreau de MONT-DE-MARSAN

Assistée de la SCP COLLET de ROCQUIGNY- CHANTELOT – ROMENVILLE- BRODIEZ & ASSOCIES, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND

sur appel de la décision

en date du 27 JUIN 2018

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONT DE MARSAN

RG numéro : 14/00164

Vu l’acte d’appel initial du 30 juillet 2018 ayant donné lieu à l’attribution du présent numéro de rôle ;

Vu le jugement dont appel rendu le 27 juin 2018 par le tribunal de grande instance de MONT DE MARSAN qui a :

— déclaré les époux [C] dans leurs actions,

— débouté les époux [C] de leur action en annulation des contrats de réservation puis de l’acte notarié reçu par Me [N], notaire à [Localité 13] (33) portant d’acquisition en VEFA auprès de la S.C.C.V. MESTADE et au prix de 112.640 euros d’un appartement situé dans la copropriété [Adresse 17] situé [Localité 12] cadastrée section CB n°[Cadastre 1],

— débouté les époux [C] de leur action corrélative en annulation du prêt contracté pour financer cette acquisition faite sous le régime de la défiscalisation,

— débouté les époux [C] de leurs actions en responsabilités visant la SCCV MESTADE, la SAS DE PROMOTION PICHET dont elle est la filiale et L’EURL IG2P, anciennement CAPITALYS CONSEIL qui l’avait démarché et conduit à acquérir sous le régime de défiscalisation De Robien 'recentrée',

— débouté les époux [C] de leurs actions en responsabilité visant Maître [G] notaire et la SCP [G] ET ASSOCIES NOTAIRES, notaires ayant reçu procuration pour acquérir et visant [B] [N] et la SCP [N], [T] [K], notaires instrumenteur,

— débouté les époux [C] de leurs actions en responsabilité civile visant le CREDIT FONCIER DE FRANCE et la compagnie AXA, assureur groupe garantissant le remboursement du prêt souscrit,

— condamné les époux [C] à payer diverses sommes à ses adversaires en compensation de frais irrépétibles,

— condamné les époux [C] aux dépens ;

Vu les dernières conclusions (conclusions n°3) transmises par voie électronique le 22 juin 2020 par les époux [C] ;

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 05 juin 2020 par la S.C.I. MESTADE ;

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 23 juin 2020 par la SAS PROMOTION PICHET venant aux droits de la société IG2P anciennement CAPITALYS CONSEIL (conclusions n°2) ;

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 05 juin 2020 (conclusions n°3) par Maître [N] et de la SCP de notaires [B] [N], [L] [T], [R] [K], [D] [X] et [F] [S] [A], implantée à [Localité 14] ;

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 25 février 2020 par [U] [G] et la SCP PERRAUD [G] PERRAUD NOTAIRES, implantée à [Localité 16] ;

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 22 juillet 2020 par le CREDIT FONCIER DE FRANCE ;

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 25 janvier 2019 par la compagnie AXA ASSURANCE VIE ;

Vu la transmission au ministère public et la mention écrite portée sur la chemise du dossier par laquelle il déclare s’en rapporter à la justice

Vu l’ordonnance de clôture délivrée le 09 septembre 2020

Le rapport ayant été fait oralement à l’audience.

MOTIFS

SUR L’IDENTITE DES PARTIES A L’INSTANCE

La société IG2P, anciennement dénommée CAPITALYS CONSEIL et immatriculé au RCS de [Localité 15] sous le numéro 442 611 604, qui avait la SAS PROMOTION PICHET comme associé unique a été dissoute le 31 mai 2019 et son patrimoine a été transmis activement et passivement à la SAS PROMOTION PICHET immatriculée au même RCS sous le numéro 415 535 514.

Les actions visant la société IG2P visent donc aujourd’hui la SAS PROMOTION CONSEIL.

L’action visant la SAS PROMOTION CONSEIL en qualité de tiers responsable en sa qualité de dirigeant de la société IG2P a perdu son objet en raison de la confusion intervenue entre la société gérée et la société gérante.

L’OPERATION IMMOBILIERE LITIGIEUSE

a) les contrats passés

Domiciliés à [Localité 20] (63), les époux [C], exerçant respectivement la professions de responsable en environnement et la profession d’infirmière, percevant, selon la déclaration faite au commercialisateur, un revenu annuel imposable de 51.274 euros soit 4.272 euros par mois, sont entrés en relation avec la société CAPITALYS CONSEIL devenue ensuite IG2P aux droits de qui vient aujourd’hui la SAS PICHET PROMOTION.

Selon contrat de réservation daté du 06 mai 2008 portant les trois signatures engageant les parties portant les signatures du réservant et du réservataire et mention qu’il est signé à VEYRE MONTON (63), commune où ils sont domiciliés, les époux [C] se sont portés acquéreurs au prix de 112.460 euros T.T.C. soit 94.180,60 euros H.T., à financer intégralement par l’emprunt, d’un logement d’une superficie habitable de 36,20 m² portant la référence commerciale 209 dans le bâtiment A d’une résidence à construire à [Localité 12] (40).

L’objet de l’opération était la défiscalisation expressément entrée dans le champ contractuel ; ils ont pris connaissance de l’obligation de louer dans la limite d’un plafond et pris connaissance du mandat de gestion donné par la S.C.C.V. MESTADE à la S.A.R.L. GESTIA.

Le 04 juin 2008, la S.C.C.V. MESTADE a procédé à une notification de ce contrat de réservation par LRAR dont les époux [C] ont accusé réception le 06 juin 2008 comme indiqué en page 22 de l’acte notarié (avec une erreur matérielle sur la date de l’envoi qui aussi celle de la réception).

Le 24 juin 2008, le CFF les a rendus destinataires d’une offre de prêt

qu’ils ont acceptée sans faire usage du droit de rétractation de 10 jours propre au

prêt lui-même.

Le 26 août 2008, procuration notariée a été donnée par les époux [C] à un clerc de l’étude [N], notaire à [Localité 13] pour les représenter lors de la signature de l’acte authentique ; cette procuration notariée a été reçue par Me [U] [G], notaire à [Localité 16]. Elle vise un contrat de réservation en date du 06 mai 2008, rappelle que les acquéreurs avaient un droit de rétractation à compter de la notification de cet acte dont il est constaté qu’elle a eu lieu le 04 juin 2008 et qu’elle a été présentée aux époux [C] le 06 mai suivant ; la procuration signée par les époux [C] mentionne qu’ils n’ont pas exercé leur droit de rétractation dans les 7 jours de cette présentation.

Pour financer cette acquisition, le CREDIT FONCIER DE FRANCE a ensuite formulé une offre de prêt en date du 24 juin 2008 d’un montant correspondant à la totalité du prix d’acquisition à rembourser au taux financier révisable de 5,20% avec un différé d’amortissement de 12 mois donnant lieu à la perception d’intérêts intercalaires de 488,11 euros hors assurance, suivie de 288 échéances (24 ans) d’amortissement d’un montant constant de 685,40 euros hors assurance et hors révision éventuelle, les échéances d’assurance groupe étant fixées à 26,76 euros.

L’offre de prêt a été acceptée par les emprunteurs le 10 juillet 2008 ; les conditions de ce prêt sont évoquées dans l’acte notarié postérieur qui prévoit la prise de sûreté réelle mais pas la prise d’inscription de l’action résolutoire.

Une assurance groupe garantissant les risques décès a été souscrite en adhérent à une notice proposée par la compagnie AXA (notice PERIODIMO 10).

L’acte authentique de vente a été reçu le 05 septembre 2008 par Me [N] notaire à [Localité 13] pour être ensuite publié le 06 octobre 2008 volume 2008 P nE7539 au fichier immobilier de [Localité 18].

Cet acte notarié de vente :

— porte cession en VEFA des lots portant les numéros 67, à usage d’appartement, et 98 à usage de parking extérieur, selon l’état descriptif de division et le règlement de copropriété reçus le 18 juin 2007 en l’étude de Me [N] et publié le 02 juillet 2007 volume 2007 P nE5282,

— moyennant paiement d’un prix de 94.180,60 euros H.T. soit 112.640 euros T.T.C. dont 18.459,40 euros de TVA au taux de 19,6%,

— sur lequel a été immédiatement libérée une somme de 101.376 euros (90%) en considération de l’état d’avancement des travaux,

— indique que l’achèvement des travaux de bâtiment est prévu pour intervenir au quatrième trimestre 2008.

S’agissant du délai de rétractation, l’acte notarié n’évoque pas le contrat de réservation et ne fait aucune référence à la législation sur le démarchage à domicile et à son éventuelle combinaison avec le droit des ventes immobilières aux particuliers ; visant la loi 89-010 du 31 décembre 1989 qui avait été codifiée à droit constant aux articles L 271-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation, il mentionne que la notification du contrat de réservation par la LRAR du 04 juin 2008 reçue le 06 juin 2008 a fait courir un délai de rétractation de 7 jours dont les acquéreurs n’ont pas usé. Par erreur, il date le contrat de réservation du 06 juin 2008 alors qu’il est en date du 06 mai 2008 ; il y a eu confusion de la date de l’acte et de la date à laquelle il a été notifié aux acquéreurs dans les formes légales prévues par le du Code de la Construction et de l’Habitation.

Le 05 septembre 2008 a été également reçu un prêt hypothécaire toujours par Maître [N], ainsi que cela est mentionné dans l’acte de vente.

Le bien a été livré le 25 septembre 2008 dans le délai que prévoyait l’acte notarié. La totalité du prix a été payée.

Il a été loué à compter du début du mois de mars 2009 au prix de 352 euros ; l’historique de location n’est pas retracé mais rien n’indique qu’elle ait été interrompue ; le niveau actuel du loyer n’est pas précisé.

La totalité du programme construit par le groupe PICHET sous le régime de la garantie intrinsèque, n’a cependant pas été réalisé dans sa totalité puisqu’en 2014, un huissier constatait l’absence d’édification d’une partie des tranches à construire.

B) Les difficultés rencontrées par les acquéreurs

Le premier contrat de bail a été souscrit par [E] [M] à effet du 01 mars 2009 moyennant un loyer de 352 euros (appartement 312 euros, parking 40 euros).

Le retournement de la conjoncture économique à la fin de l’année 2008 ont déjoué les prévisions qui étaient celles des parties au contrat quelques mois plus tôt lorsqu’elles se sont engagées ; le bien acquis a aujourd’hui perdu de la valeur au lieu d’en avoir pris et les époux [C] démontrent par des éléments concordants que sur le marché local D'[Localité 12], commune située à 20 kms de [Localité 18] et à 100 kms de la côte, il se négocierait actuellement pour une valeur que la cour estime être de 60% du montant H.T. de l’acquisition soit la somme 94.181/*60% = 56.508 euros arrondie à 57.000 euros à prendre pour base comme calcul du préjudice à réparer après recherche de responsabilités.

SUR LES MOYENS D’IRRECEVABILITE

A) la publicité foncière

L’action en nullité de la vente délivrée le 13 mai 2013 par les époux [C] à la S.C.C.V. MESTADE venderesse a été publiée le 20 décembre 2013 volume 2013 P n°8344. Le moyen d’irrecevabilité tiré du défaut de publication n’est donc pas fondé.

B) Sur la prescription de l’action en nullité du contrat de réservation

La loi du 17 juin 2008, immédiatement entrée en vigueur,

— a réduit les délais de prescription des actions en responsabilité contractuelle et quasi délictuelle qui était de 30 ans et de 10 ans à un délai unique de 5 ans de sorte l’application immédiate de ce texte a eu pour effet de rendre applicable ce délai de 5 ans aux délais qui couraient déjà et qui devaient expirer après le 18 juin 2013

— mais les actions en nullité des contrats ont continué d’être soumises à un délai de prescription de 5 ans sauf dispositions contraires de sorte qu’en l’espèce, les délais antérieurement en cours n’ont pas été affectés par la nouvelle loi.

Le contrat de réservation a été conclu le 06 mai 2008 au domicile des époux [C] ; l’action en nullité de ce contrat de réservation est donc prescrite puisque le contrat a été signé plus de 5 ans (à quelques jours près) avant l’assignation.

Cependant cette irrecevabilité n’étant pas de nature à restituer à l’acte nul sa capacité à faire courir le délai de réflexion de 7 jours indispensable à la validité formelle du consentement qui s’apprécie à la date de la vente, la question de l’application de la législation propre au démarchage à domicile reste posée sur le fond.

C) sur la prescription de l’action en nullité de la vente

L’action en nullité d’un acte juridique pour dol se prescrit soit à compter de l’acte soit à compter de la découverte des manoeuvres qui ont présidé à sa conclusion.

Quel que soit le fondement juridique, l’action en nullité de la vente, passée le 05 septembre 2008, n’est pas prescrite puisque l’assignation en annulation a été délivrée le 13 juin 2013, moins de 5 ans après la conclusion de l’acte, la question du report du point de départ de l’action en annulation pour dol à la date de découverte du dol ne se pose pas.

Cette action en annulation de la vente pour dol n’est pas affectée par la prescription de l’action en annulation du contrat de réservation.

D) sur la recevabilité concernant le prêt

Le contrat de prêt a été conclu le 10 juillet 2008 selon l’acte d’acceptation écrite signé des acquéreurs ; l’acceptation n’a pas été prématurée. Le contrat s’est donc formé à cette date sous la condition suspensive de la signature ultérieure de l’acte authentique de vente qui a en outre rendu la vente et les prêts interdépendants.

L’acte de vente mentionne que les époux [C] ont conclu un prêt notarié selon acte authentique reçu le même jour en la même étude aux fins de prise de sûreté réelle ; le point de départ de l’action en annulation du prêt ou de sa stipulation d’intérêts s’est donc trouvé reporté à la date de l’acte authentique de prêt.

Or, l’assignation visant le CFF n’a été délivrée que le 12 décembre 2013, soit plus de 5 ans après l’expiration du délai imparti pour agir en nullité de la stipulation d’intérêts du prêt au regard de l’article 1907, la prescription puisque la prescription a couru à compter de signature du prêt avec affectation hypothécaire signé le 05 septembre 2008 (et non de l’acte sous-seing privé de prêt).

SUR L’ACTION EN ANNULATION POUR VIOLATION DU DROIT DE LA CONSOMMATION

L’action en nullité du contrat de réservation est prescrite.

En ce qui concerne la vente, le contrat de réservation qui visait les règles du code de la consommation et celles du code de la construction et de l’habitation a été notifié, postérieurement à sa signature, dans les formes de l’article L 271-1 du code de la construction et de l’habitation, faisant ainsi courir un délai valable, ce que les acquéreurs ont confirmé au notaire ayant reçu la procuration authentique.

Ils ont donc bénéficié d’un délai valable lorsqu’ils ont signé la procuration authentique pour acquérir.

Ils seront déboutés de ce chef d’annulation.

ACTION EN ANNULATION POUR DOL – MOYENS NON FONDES

Les époux [C] reprochent à la S.C.I. MESTADE et à la société IG2P qu’elle avait mandatée, d’avoir commis des fraudes qui affectent la validité du consentement donné lors de l’achat.

L’introduction de l’instance tient aux difficultés financières auxquelles les époux [C] ont été confrontés immédiatement après cet achat. Le brutal renversement de conjoncture économique intervenu à l’automne 2008 a mis fin à une longue période de conjoncture haussière ; les prix de l’immobilier, et, corrélativement ceux des loyers, ont cessé de grimpé et ont baissé, surtout en dehors des grands centres urbains, réalisant ainsi des risques de pertes économiques auxquels personnes croyait auparavant. C’est à juste titre que la S.C.I. MESTADE et la SAS PROMOTION PICHET soutiennent que ce brutal retournement des marchés immobiliers et locatifs doit être pris en compte dans l’appréciation à porter ; ce renversement de conjoncture est de nature à justifier l’abandon du projet immobilier envisagé en le limitant à ce qui avait déjà été construit ; les contrats l’y autorisent et la finalité des contrats de réservation est de permettre un tel abandon.

Les moyens de fait développés au soutien du dol se ramènent à cinq dont quatre ne sont pas fondés.

1- Moyen invoquant la connaissance certaine que le programme ne se réaliserait pas et qu’aucune activité locative rentable ne pourrait s’y implanter

Le moyen de fraude ainsi invoqué consiste à soutenir que la SAS PROMOTION PICHET savait que l’offre locative ne serait pas trouvée pour le programme construite par sa filiale d'[Localité 12] et que la construction a été entreprise sans réel besoin dans le seul but de vendre ; elle s’appuie sur une étude analysant la situation du LOT et GARONNE . Elle produit la jurisprudence de la cour de [Localité 19] qui statuait sur la situation carcassonnaise ; elle s’appuie aussi sur les valeurs du marché locatif local en 2006.

Le mécanisme de défiscalisation lors de l’achat d’immeubles locatifs a été imaginé pour développer l’offre locative commerciale ou d’habitation dans des zones où cette offre est jugée insuffisante ; ces zones sont définies, non par les promoteurs constructeurs, mais par le collectivités locales sous le contrôle des services étatiques ; le but est d’attirer des capitaux de personnes privées pour construire et pour les inciter acheter en VEFA ; en contrepartie, la loi leur permet ensuite de réduire leurs impôts en justifiant de l’effectivité d’une location. Le succès d’un programme reste soumis aux aléas conjoncturels entre la date de l’engagement et celui de la livraison ; il n’y a pas de garantie que l’offre crée rencontre une demande moyennant un niveau de loyers suffisants.

L’argumentation développée revient à soutenir que non seulement la SAS PROMOTION PICHET mais aussi tous les acteurs qui ont défini le périmètre éligible à la défiscalisation n’auraient pris en compte que leurs intérêts immédiats tout en reportant la certitude d’un échec économique sur les acquéreurs emprunteurs.

Cette argumentation n’est pas fondée ; toute acquisition d’immeuble de rapport comporte un tel aléa, surtout quand il y a achat en VEFA ; la baisse des prix ne signifie pas qu’il y ait eu fraude ; cette perspective paraissait peu envisageable lorsque le programme a été décidé et l’était encore lors de la signature du contrat de réservation ; aucune donnée ne vient démontrer que l’offre locative locale d'[Localité 12] était déjà saturée durant les années 2006 et 2007, qui sont les années d’ élaboration du projet.

Le niveau des prix des immeubles et le montant moyen des loyers locaux étaient certes plus bas que ceux envisagés pour la location des biens vendus mais ce n’est pas significatif d’un dol ; cependant la différence est justifiée économiquement par le fait que l’on vend un immeuble neuf ; ensuite, le recours au démarchage justifie certains surcoûts . Cela ne suffit pas caractériser un dol par dissimulation car s’il y a erreur, elle ne porte que sur la valeur du bien et n’est pas juridiquement sanctionnable.

Ce moyen de fraude n’est pas justifié.

2- Moyen tiré de la surévaluation du bien financière et qualitative

La présentation publicitaire flatteuse ne peut pas être critiquée ; elle n’est pas erronée dans les faits décrits par la plaquette publicitaire même s’ils peuvent avoir été enjolivés ; elle n’excède pas les limites à ne pas dépasser dans les arguments de vente ; cette plaquette publicitaire est destinée à des acquéreurs voulant vivre [Localité 12] plutôt qu’à des propriétaires cherchant, comme en l’espèce, un rapport ou une défiscalisation sans intention d’y résider.

L’acquéreur invoque la surévaluation délibérée du bien. Ce grief n’est pas fondé ; pris dans un sens étroit, il se ramène à soutenir une simple erreur sur la valeur, non sanctionnable en droit ; l’argumentation ne serait fondée que si un élément supplémentaire de fraude venait s’y ajouter, ce qui n’est pas le cas.

Les loyers des immeubles neufs sont plus élevés que les loyers d’immeubles anciens car ils sont plus attirants et mieux adaptés à l’usage de l’ automobile, en particulier dans une petite ville ignorant les gros embouteillages.

Le montant de la commission encaissés par la société IG2P pour commercialiser les biens proposés à la vente en VEFA est critiquée. Selon les documents produits sous la contrainte, le taux de la commission payé par la S.C.C.V. MESTADE à la filiale du groupe chargée de la commercialisation était de 13% du montant T.T.C. de la vente. Ce taux doit être considéré comme applicable à toutes les ventes mais, si ce taux contribue à renchérir le prix de vente, il n’est pas démontré en quoi un tel taux de commission serait aberrant ou abusif alors qu’il reste compatible avec l’ampleur des coûts induits par un système de vente délibérément orienté vers la recherche d’acquéreurs dont les domiciles sont très éloignés du lieu de construction. Ces choix économiques relèvent de la liberté d’entreprendre et ne peuvent être assimilés à des choix dolosifs sans qu’il soit prouvé qu’au sein du groupe, ce taux de commission soit sans lien avec les prestations fournies.

3- Moyen tiré de l’absence de liberté du choix du notaire

La nature même des ventes en VEFA de droits immobiliers appelés à faire partie d’un ensemble vaste à soumettre au droit de la copropriété exige en pratique une centralisation de l’établissement des actes ; les promoteurs proposent un notaire, mais rien n’interdit à l’autre cocontractant de demander à bénéficier des services de leur propre notaire.

Le recours à la procuration est lié au fait que les acquéreurs en défiscalisation n’ont pas acquis pour habiter mais pour louer en vue d’une revente à l’issue de la période d’octroi des avantages fiscaux ; le système de défiscalisation est éprouvé même s’il ne peut pas se révéler avantageux en tous lieux et en toutes circonstances

En l’espèce, rien d’anormal ne peut se déduire d’une centralisation des actes en l’étude de Maître [N] ; il s’agit d’un choix rationnel ; cela ne prouve ni la fraude, ni même une violation du devoir d’impartialité auquel tout officier ministériel est tenu.

4- Moyen tiré de l’existence d’un démarchage financier illégal

Ce moyen de nullité n’est pas fondé car le contrat litigieux reste un contrat de vente avec offre de crédit bancaire affecté pour l’acquisition d’un bien destiné à une utilisation ouvrant droit à des avantages fiscaux ; il ne s’agit pas d’un contrat de placement d’un produit financier au sens du code monétaire et financier. non le placement d’un produit financier au sens du code monétaire et financier.

LA DEMONSTRATION DU DOL

Est en cause la méthode de commercialisation par établissement d’une simulation dont la sincérité et la justesse dont contestées.

Les conclusions des parties constituent une double invitation concordante à procéder vérification de la cohérence du document, et ce, même si les parties n’ont pas explicitement fait les calculs ; les articles 26 et 27 du code de procédure civile s’appliquent et aucune expertise n’est nécessaire.

Le dispositif de défiscalisation 'De Robien Recentré’ consiste à considérer le prix d’achat comme une charge déductible du revenu imposable à concurrence de 6% du prix pendant les 7 premières années et de 4% du prix pendant les deux années suivantes ce qui permet à l’acquéreur de récupérer la moitié de ce prix si tout se passe bien.

Les textes sont les suivants :

Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent:

a) Les dépenses de réparation et d’entretien effectivement supportées par le propriétaire comme les primes d’assurance, le montant des dépenses supportées pour le compte du locataire par le propriétaire dont celui-ci n’a pu obtenir le remboursement, au 31 décembre de l’année du départ du locataire, les provisions pour dépenses, comprises ou non dans le budget prévisionnel de la copropriété,

b) Les dépenses d’amélioration afférentes aux locaux d’habitation, à l’exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d’agrandissement ; (…)

c) Les impositions, autres que celles incombant normalement à l’occupant,(…)

d) Les intérêts de dettes contractées pour la conservation, l’acquisition, la construction, la réparation ou l’amélioration des propriétés ;

e) Les frais de gestion, fixés à 20 euros par local, majorés, lorsque ces dépenses sont effectivement supportées par le propriétaire, des frais de rémunération des gardes et concierges, des frais de procédure et des frais de rémunérations, honoraires et commissions versées à un tiers pour la gestion des immeubles (…) ;

h) Pour les logements situés en France, acquis neufs ou en l’état futur d’achèvement à compter du 3 avril 2003, et à la demande du contribuable, une déduction au titre de l’amortissement égale à 6 % du prix d’acquisition du logement pour les sept premières années et à 4 % de ce prix pour les deux années suivantes. La période d’amortissement a pour point de départ le premier jour du mois de l’achèvement de l’immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure.

(..)

Le bénéfice de la déduction est subordonné à une option qui doit être exercée lors du dépôt de la déclaration des revenus de l’année d’achèvement de l’immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. Cette option est irrévocable pour le logement considéré et comporte l’engagement du propriétaire de louer le logement nu pendant au moins neuf ans à usage d’habitation

principale à une personne autre qu’un membre de son foyer fiscal. Cette location doit prendre effet dans les douze mois qui suivent la date d’achèvement de l’immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure. Cet engagement prévoit, en outre, que le loyer ne doit pas excéder un plafond fixé par décret. (…)

A l’issue de la période couverte par l’engagement de location, et sous réserve que les conditions de loyer et de ressources soient remplies, le propriétaire peut bénéficier de la déduction prévue au j, qu’il y ait ou non changement de titulaire du bail.

La période d’amortissement a pour point de départ le premier jour du mois d’achèvement des travaux.

Le barème de l’impôt

Pour le calcul de l’impôt sur les revenus 2006 2007 et 2008, les tranches d’impositions sont au nombre de 4 rappelées ci-dessous avec la formule légale de calcul de l’impôt, portée à la connaissance de tous les foyers soumis à déclaration annuelle :

— la tranche d’imposition (taux marginal d’imposition dit Taux Marginal d’Imposition qui apparaît dans certaines simulations) est déterminée en fonction du quotient familial,

— l’impôt est calculé sur le revenu imposable de départ non affecté du quotient familial (on additionne pour les salaires après abattements forfaitaires pour frais et revenus locatifs sur les loyers nets de charge) selon l’une des formules suivantes ci-dessous, les constantes chiffrées étant nécessaires à la progressivité arithmétique de l’impôt.

Pour 2006, les revalorisations 2007 et 2008 ne modifient pas les ordres de grandeur

Revenu imposable

Taux Marginal

Montant de l’impôt Brut

Inférieur à 5 614

0%

0

De 5 614 à 11 198

5,50%

[R x 0,055] ' [308,77 x N]

De 11 198 à 24 872

14%

[R x 0,14] ' [1 260,60 x N]

De 24 872 à 66 679

30%

[R x 0,30] ' [5 240,12 x N]

Supérieure à 66 679

40%

[R x 0,40] ' [11 908,02 x N]

Les déductions de 6% pendant 7 ans puis de 4% pendant 2 ans :

— viennent réduire le revenu imposable et non les impôts,

— et la déduction d’impôt est d’autant plus importante que la tranche d’imposition est élevée puisque la diminution d’impôt est calculée avec le pourcentage de la tranche d’imposition,

— pour un loyer donné augmentant le revenu du ménage et pour un prix d’achat du bien donné, le calcul de la baisse d’impôt est arithmétiquement indépendant aussi bien du quotient familial (N) que du revenu pris pour base (R) et que des constantes de tranche variant annuellement.

Les intérêts de l’emprunt sont en outre déduits du revenu imposable ; plus l’emprunt est prévu pour durer, plus lent est l’amortissement et plus lourds sont les intérêts ; un emprunt long accroît les réductions d’impôts à défaut de beaucoup diminuer annuellement a valeur nette du bien.

La technique générale de la simulation – Le modèle de simulation de référence objet du débat ; le sens des expressions utilisées.

Dans une argumentation générale, les acquéreurs mettent en cause la méthode de présentation utilisée dans la simulation précontractuelle, invoquant le flou et l’absence de vraisemblance des résultats.

Dans une argumentation tout aussi générale et expressément mentionnée comme étant valable dans tous les dossiers, les sociétés MESTADE et PROMOTION PICHET réfutent ces arguments en se prévalant de l’exactitude arithmétique de la simulation,

— de la pertinence de ses calculs qui ont procédé à une revalorisation non critiquable de 2% par an dans une des colonnes de la simulation remise,

— de ce que la notion de gain à neuf ans est pertinente pour représenter la différence entre le prix d’acquisition revalorisé et le capital restant dû sur l’emprunt, deux colonnes faisant ressortir les évolutions parallèles,

— de ce qu’il suffisait aux acquéreurs de vérifier eux-mêmes puisqu’ils avaient largement le temps,

— en se référant à un modèle à 11 colonnes

C’est ce modèle qui a été utilisé pour établir la simulation précontractuelle.

Il importe cependant de préciser.

— > La simulation proposée à l’acquéreur n’est pas contractuelle ; en ce sens qu’elle ne lie pas les parties ni sur les conditions économiques à venir, ni sur sa teneur chiffrée ; les informations patrimoniales personnelles demandées aux acquéreurs emprunteurs ne servent qu’à dégager l’ordre de grandeurs des coûts, des dépenses et des avantages fiscaux dans le but de les convaincre de la pertinence à s’engager dans l’opération ; par conséquent, quoique proches, les données contractuelles seront différents si l’opération se réalise ; la simulation procède à une extrapolation à droit constant et à conjoncture constante ; elle n’encourt aucun grief de ce chef ; elle doit être étudiée à taux d’intérêt présumé constant (alors qu’il baissera dans le temps) et admettant compte tenu de la date du démarchage, un taux de revalorisation annuelle du bien ;

— > Mais les ordres de grandeurs qu’elle dégage à partir d’éléments financiers personnels aux candidats à l’acquisition constituent l’élément essentiel pour emporter leur consentement ; sa cohérence interne et sa sincérité doivent donc être contrôlées a posteriori pour trancher le présent litige même si les contrats de prêt diffèrent dans le taux et la durée (les différences ne révèlent aucun bouleversement de l’opération) ;

— > Les contrats réellement conclus ne sont donc pas pris en considération à ce stade ; ils ne peuvent servir de base qu’à l’appréciation du préjudice mais non à l’appréciation préalable de la responsabilité encourue. Pour ce qui est du prêt, c’est le taux constant de la simulation qui est pris pour base car c’est le seul qui puisse servir à une prévision.

— > enfin, selon que l’on prend pour base le prix H.T. ou le prix T.T.C du bien acquis, le 'gain à 9 ans’ varie du simple au double ; il s’agit d’un élément essentiel pour apporter la réponse positive ou négative à la question posée de l’existence d’un dol ; cela se vérifie avec la simulation remise aux époux [C].

Ce modèle de simulation appelle les observations suivantes :

— la notion de 'gain à 9 ans’ (ou encore 'capital à terme’ selon le modèle remis aux époux [C]) correspond à la valeur du bien T.T.C. réactualisée diminuée du capital restant dû sur l’emprunt reconstituable à partir du cumul annuel des remboursements de capital emprunté tel qu’il est mentionné dans la simulation ; elle se veut donc être une valeur nette du bien acquis ; il sera démontré que cette appréciation T.T.C. n’est pas la bonne base de calcul ;

— la revalorisation de 2% par an est appliquée au prix du bien mais aussi aux charges et des loyers ; cette hypothèse peut être considérée comme valable

pour les démarchages antérieurs à la crise financière d’octobre 2008 ; en revanche pour un contrat passé après la fin du mois de novembre 2008, cette revalorisation constitue un argument de vente frauduleux de la part d’un professionnel de l’immobilier ;

— la colonne dénommée 'EPARGNE’ n’est pas une épargne mais un déficit à combler ; la somme ainsi portée dans cette colonne ne correspond pas à une valeur liquide qui entre dans le patrimoine ou qui y reste : elle correspond au montant à payer pour combler le déficit entre le montant des échéances à payer et les loyers nets augmentés des économies fiscales ; ce qui entre dans le patrimoine n’est que la valeur nette du bien qui augmente au fur et à mesure que le passif qui le grève baisse ; mais la somme qualifiée d’épargne n’est pas une disponibilité financière (ce qui est le sens du mot épargne qui ne fait pas référence à utilisation qu’on peut en faire) ; il s’agit d’une dépense effectivement payée à la banque prêteuse et qu’il faut assumer sauf à risquer d’être saisi ; présenter cette dépense comme une épargne consiste à induire en erreur ;

— le 'gain fiscal’ n’est pas davantage une entrée effectives de deniers, les économies d’impôts appelées aussi 'gain fiscal’ sont présentées comme participant au comblement du déficit entre le coût du prêt et les loyers nets mais constitue une dépense évitée et elle est comptée comme une entrée ; s’ajoutant à 'l’épargne', elle équilibre les sorties ; ce 'gain fiscal’ n’est pas un gain, c’est la prise en charge indirecte par l’Etat d’une dépense et cette prise en charge indirecte n’est en rien garantie car elle suppose la perception effective de loyers ; en outre ce gain ne vient alléger la dépense de remboursement que pendant 9 ans alors que le prêt envisagé est prévu pour être conclu pour une durée très supérieure ;

— la simulation contient donc en 'entrées’ les loyers nets de charge, les économies d’impôts qui n’en sont pas et une 'épargne’ qui n’en est pas une ; la somme de ces entrées et de ces sorties doit être nulle, mais ce n’est pas un autofinancement, ce n’est qu’un équilibre de donnes comptables.

— la simulation contient en 'sorties’ : le montant des échéances du prêt et le coût de l’assurance groupe ADI, qui, quant à elles sont bien des sorties d’argent.

La simulation remise aux époux [C]

En l’espèce, la simulation remise est conforme au modèle auquel renvoient les conclusions des S.C.I. MESTADE et de la SAS PROMOTION PICHET.

La copie servile est la suivante ; le gain fiscal est évalué à 10% de la valeur d’achat soit 11.264 euros.

Caractéristiques

Gest ion loc

Montant

112.640

Frais gestion

9,01%

Apport

0

Taxe Foncière

8,33%

Rev fonciers

0

Ass loyers

4,10%

Loyer

352

Charges copro

3,00%

GAIN FISCAL

11264

Prêt

112.640

adi

0,30

GAIN 9 ANS

44 251

Durée prêt (ans)

24

Total

24,44%

Duré sim (ans)

9

Taux

4,6%

Déduc 6% An

6 758

Revalorisation

2%

Déduc 4% An

4 506

Tranche impôt

14%

Entrée

Entrée

Déficit réel

Sortie

Sortie

Sortie

Par an

Cumul

Année

Loyer an brut

Economie impôts

'Epargne'

Frais gestion

Adi

Banque

Trésorerie an

Trésorie cum

Loyer net an

Intérêts

Capital

Valeur bien T.T.C.

Sim

0

0

An 1

4 224

0

3 348

680

338

5 181

1372

1372

3 544

5 181

0

112 640

An 2

4 308

1 041

3 348

694

338

7 759

-94

7279

3 614

5 125

2 633

114 893

An 3

4 395

1 043

3 348

1 074

338

7 559

-385

893

3 321

5 003

5 390

117 191

An 4

4 483

1 097

3 348

1 096

338

7 759

-266

627

3 387

4 873

8 276

119 534

An 5

4 572

1 100

3 348

1 117

338

7 759

-195

432

3 455

4 738

11 298

121 925

An 6

4 664

1 103

3 348

1 140

338

7 759

-123

309

3 524

4 596

14 462

124 364

An 7

4 757

1 106

3 348

1 163

338

7 759

-49

260

3 594

4 476

17 775

126 851

An 8

4 852

1 109

3 348

1 186

338

7 759

6

286

3 666

4 291

21 243

129 388

An 9

4 949

766

3 348

1 210

338

7 759

-244

42

3 740

4 128

24 874

131 976

— > La colonne Epargne ne tient pas compte du différé d’amortissement durant la première année ;

— > un prêt de 112.640 euros au taux financier de 4,6% l’an sur 24 ans d’amortissement et 1 an de différé d’amortissement se rembourse par 12 échéances de 458,47 euros soit 5.501 euros sur un an, et ensuite des mensualités de 686,58 euros soit 8.239 euros par an ; le capital restant dû au bout de neuf ans est de 92.927 euros ;

— > dans les documents manuscrits, on retrouve comme donnée identifiable que 'l’épargne mensuelle’ de 300 euros qui est la différence entre le 'delta’ mensuel de 378 euros entre loyers et échéances d’emprunt, diminué de 78 euros d’économies d’impôts mensuelles.

— > la simulation est faite sur 8 ans et non pas 9 ; 9 années sont indiquées mais cela ne fait jamais que 8 intervalles de temps. Il s’agit d’une erreur de présentation du démarcheur ;

Compte tenu du prix du bien acquis, il peut être déduit des revenus :

— la somme de 6.758 euros pendant 7 ans

— la somme de 4.506 euros pendant 2 ans

Les données sont connues par la fiche de situation patrimoniale.

Le quotient familial est de 3 dans les calculs.

Le revenu imposable après abattement est indiqué comme s’élevant à 51.274 euros après abattement ; l’avis d’imposition sur le revenu de 2006 n’est pas produit mais le couple a déclaré au commercialisateur payer la somme de 4.027 euros d’impôts. L’application du quotient familial détermine bien la tranche d’imposition de 14%. Il n’y a pas de revenu foncier antérieur. Selon la formule habituelle de la tranche à 14% en 2006 qui est (Revenu imposable * 0,14) – Nbre parts * 1 260,60 ), l’impôt s’élève à 51.274 * 0,14 – 3 * 1.260,60 = 3.397 Euros (barème de tranche pour 2007 sur revenus 2006 mais pour 2008 la différence est négligeable).

Le loyer prévu est de 352 euros soit 4.224 euros la première année, soit 3.544 euros nets, ce qui, pour le calcul de l’impôt aboutit aux baisses de revenus imposables suivantes pour chacune des trois tranches considérées. Le montant des intérêts des emprunts vient aussi en déduction du revenu imposable ; on s’aperçoit que les calculs de la société PICHET sont globalement justes mais omettent une année et que les montants augmentent alors qu’ils devraient diminuer puisque, à échéance constante, la part d’intérêts remboursés dans chaque échéance baisse au fur puisque la part de capital amorti augmente. On peut considérer que la simulation est correcte s’agissant des économies d’impôts.

— > La simulation mentionne 'Gain si vente à 9 ans ': 44.251 euros. Cette affirmation est fausse.

Cette somme correspond à la différence entre la valeur du bien actualisée réactualisée à 131.976 euros diminuée du capital restant à rembourser selon la simulation qui est de 112.640 – 24.874 euros = 88.066 euros ; sur 9 ans, un tableau d’amortissement indique 87 766 euros en prenant la 109ème échéance ; à la suite d’une erreur d’intervalle, la valeur du bien a été calculée sur 8 ans et non sur 9 ans ; l’année de différé d’amortissement a été omise ; sa valeur serait de 131.976 * 1,02 = 134.616 euros d’où selon cette méthode, un gain à 9 ans de 134.616 – 87.766 = 46.850 euros. Les documents manuscrits indiquent bien un capital de 45.000 euros nets d’impôts. Cette expression 'net d’impôts’ de signifie rien car le capital en question est le bien lui-même pris dans sa valeur nette qui augmente au fur et à mesure que diminue le capital restant dû qui le grève ; c’est une valeur qui n’est pas nette d’impôts puisque les impôts ont été payés pour l’acquérir.

Ce gain à neuf ans procède d’une présentation fallacieuse pour prendre pour base d’évaluation le prix T.T.C. payé à l’achat.

En droit, en effet, pour calculer le prix de vente net vendeur d’un immeuble, qu’il soit ou non revalorisé, le prix incluant la fiscalité d’achat ne peut être prise pour base puisque lors de la revente, un prix net vendeur s’entend d’un prix reçu après report de la fiscalité et des frais sur l’acquéreur ; or, sur ce point, la SAS PROMOTION PICHET et la S.C.I. MESTADE en sont parfaitement conscientes comme le révèle la teneur contradictoire de leurs conclusions

— pour réfuter l’accusation de dol par augmentation de valeur du bien, elle soutient qu’il faut prendre sa valeur H.T. ; il s’agit d’une argumentation soutenue par une juste en droit et en fait ;

— dans la simulation destinées à emporter le consentement de l’acquéreur, elles soutiennent le contraire et la pertinence d’une revalorisation du prix T.T.C. ; il s’agit d’une argumentation fausse en droit et en fait ; elle est uniquement destinée à en endormir la vigilance du cocontractant en lui faisant croire à un accroissement de son patrimoine de l’ordre du double de ce qu’il sera dans l’hypothèse admise (augmentation du prix de 2% an et absence de tout incident d’une location au prix envisagé au départ).

Si l’on prend la valeur hors taxe de l’immeuble qui est de 112.640/1,196 = 94.180 euros et si on la réévalue à raison de 2% par an, on obtient le tableau comparatif suivant ; on en déduit que :

— selon la méthode fallacieuse des sociétés venderesses, le gain à 9 ans a été recalculé sur 9 ans (et non sur 8) à 46.540 euros

— selon la valeur rectifiée H.T., le gain fiscal à 9 ans devient de (131.976/1,196 * 1,02) – 87.766 = 24.789 euros.

Année

Valeur T.T.C.

KRD

Gain An 'n'

Valeur H.T.

KRD

Gain An '9 ans

Sim

112 640

0

94 181

0

0

An 1

114 893

112 640

2 253

96 064

112 640

-16 576

An 2

117 191

110 007

7 184

97 985

110 007

-12 022

An 3

119 534

107 250

12 284

99 945

107 250

-7 305

An 4

121 925

104 364

17 561

101 944

104 364

-2 420

An 5

124 364

101 342

23 022

103 983

101 342

2 641

An 6

126 851

98 178

28 673

106 063

98 178

7 885

An 7

129 388

94 865

34 523

108 184

94 865

13 319

An 8

131 976

91 397

40 579

110 348

91 397

18 951

An 9

134 615

87 766

46 849

112 555

87 766

24789

Compte tenu de la durée de l’emprunt envisagé (et non de l’emprunt réel), la différence est donc de l’ordre du simple au double ; il y a bien tromperie.

En résumé, le dol est démontré en l’espèce par les éléments concordants suivants pris dans la simulation et non dans l’opération réelle.

— le gain à 9 ans artificiellement augmenté du simple au double en utilisant fallacieusement la valeur d’achat T.T.C. et non la valeur H.T. comme assiette de sa prise de valeur nette (revalorisée ou non) rapportée à la diminution du capital restant dû sur l’emprunt en basant fallacieusement la prise de valeur nette du valeur du bien ; compte tenu de la durée de l’emprunt envisagé (et non de l’emprunt réel), se trouve affichée une valeur du double environ ; le gain de valeur nette du bien n’est pas de 44.251 euros comme indiqué mais de l’ordre de 24.789 euros (avec une revalorisation du bien acceptée comme hypothèse valable) ; avec un coefficient de revalorisation moindre, le gain à 9 ans est moindre encore ;

— cette présentation n’a été possible que parce qu’au départ du raisonnement, le calcul d’impôt n’a été posé dans aucune des deux hypothèses à comparer que sont d’abord la situation actuelle de la personne démarchée ensuite l’hypothèse d’un achat aux prix et conditions envisagés ; le recours à l’écrit pour convaincre supposait qu’à tout le moins fût établi un document exhaustif posant correctement les hypothèses ; au lieu de cela, il est aisé de constater que l’acquéreur s’est trouvé submergé par un flot d’affirmations arithmétiquement incontrôlables ; si les calculs demeurent simple sans exiger d’expertise, ils n’ont été reconstitués par aucune des parties au procès, qui se sont bornées à inviter la juridiction à le faire au travers des critiques formulées ou des affirmations soutenues en défense ;

— les calculs d’impôts ne sont pas refaits crayon en main avec application des formules d’imposition et référence à toutes les déductibilités prévues par le CGI.

Il résulte ensuite de la propre argumentation de la SAS PROMOTION PICHET et de la S.C.I. MESTADE, que cette méthode de commercialisation est généralisée et applicable à tous les dossiers plaidés.

LA SANCTION DU DOL

Le dol ainsi caractérisé n’est cependant pas suffisamment grave pour justifier l’annulation de la vente ; la mise en location du bien a pu se faire sans carence locative insupportable dans sa durée et sans baisse excessive des loyers. Aucun document fiscal n’est fourni qui fasse état de rappels de droits par l’administration.

L’action en nullité sera rejetée et la réparation interviendra par équivalent.

LES AUTEURS DU DOL ENGAGEANT LEUR RESPONSABILITE

La S.C.I. MESTADE est l’auteur du dol pour être cocontractant de l’acquéreur.

La SAS PROMOTION PICHET est coauteur du dol au profit de la S.C.I. MESTADE ; ce sont ses agissements commerciaux qui ont permis la commission du dol. Elle est coresponsable du préjudice ; les deux sociétés doivent le réparer in solidum.

Les conclusions demandant une indemnisation spécifique de la SAS PROMOTION PICHET en raison de son rôle dirigeant ne peuvent être accueillies ; elles méconnaissent le principe de la responsabilité civile en ce que la SAS PROMOTION PICHET et la S.C.I. MESTADE sont coresponsables de préjudices générées par les fautes dolosives commises en communs l’une en qualité de venderesse engagée en connaissance de cause par sa mandataire et l’autre en qualité de mandataire trompant directement le cocontractant qui se lie à son mandant.

L’ACTION EN RESPONSABILITE VISANT LES NOTAIRES

En droit, le notaire est tenu d’informer et d’éclairer les parties sur la portée et les effets de l’acte par lequel elles s’engagent, notamment sur à ses incidences fiscales, ainsi que sur les risques, de l’acte auquel il prête son concours, et, le cas échéant, de le leur déconseiller ; cette obligation doit prendre en considération des mobiles des parties, extérieurs à l’acte, lorsque le notaire en a eu connaissance, notamment prendre en considération les risques de la défiscalisation.

Quand un acte authentique est reçu en vertu d’une procuration authentique donnée par l’une des parties, le notaire instrumenteur et le notaire chargé de recevoir la procuration doivent échanger toutes informations et pièces pour exercer leur devoir de conseil en prenant en considération la situation concrète des parties ; le notaire instrumenteur doit transmettre toutes les informations nécessaires, lister les vérifications à faire et la teneur des questions à poser pour s’assurer de la bonne compréhension de la situation juridique par les parties ; le notaire chargé de recevoir procuration doit quant à lui apprécier si ces éléments lui paraissent suffisants pour informer la partie qui va donner son consentement en son étude ; il doit refuser de recevoir procuration si les éléments d’information reçus de son confère lui paraissent insuffisant.

Attirer l’attention sur les risques juridiques et fiscaux d’une opération ne revient pas à porter une appréciation sur son opportunité économique.

Maître [N] connaît les risques et sait qu’il y a défiscalisation au cas d’espèce ; il est le notaire qui centralise la commercialisation sinon de tout le programme d’un moins d’une partie ; il connaît les prix pratiqués, les caractéristiques des biens vendus ; il sait aussi qu’une partie du programme est vendue en vue d’opérations de défiscalisation et la localisation du domicile de l’acquéreur ainsi que l’établissement d’une procuration notariée lèvent tous doutes à ce sujet ; il avait donc à coordonner son action avec son confère chargé de recevoir procuration (qui devait pour sa part suspecter la défiscalisation par le seul fait de l’éloignement géographique) pour faire en sorte que les acquéreurs soient informés des risques de l’opération qui résident essentiellement d’une part dans la perte des avantages recherchés en cas de solution de continuité dans la location, et d’autre part dans le risque de ne pas pouvoir assurer dans la durée de l’emprunt (25 ans) l’effort financier suffisant pour combler le déficit mensuel entre le crédit à payer et le loyer à percevoir.

Si les acquéreurs ne le leur demandent pas de contrôler la teneur de la simulation précontractuelle qui est à la base du consentement donné, les notaires n’ont pas à en demander la communication car ce n’est pas un document contractuel nécessaire à l’efficacité de l’acte ; si les acquéreurs justifient l’avoir demandé, le notaire doit positivement prouver qu’il a examiné ce document car il a l’obligation de le faire et cet examen n’est pas contraire à l’obligation d’impartialité qui s’impose à lui, même si en pratique, il est le notaire chargé de recevoir une partie sinon la totalité des actes de vente du programme immobilier.

Le dol n’a été possible en l’espèce que par la technique utilisée lors de l’établissement de la simulation qui reste le seul outil de tromperie utilisé ; les acquéreurs n’allèguent pas avoir demandé d’examiner ce document au notaire qu’ils ont physiquement rencontré pour donner procuration. Ils ne peuvent donc pas lui reprocher de ne pas avoir procédé aux vérifications que vient d’effectuer la cour. Ils savaient par ailleurs, qu’en raison de la longueur de l’emprunt, le déficit mensuel perdurerait au-delà de la fin des avantages fiscaux, et savaient également que pour ne pas perdre l’avantage fiscal acquis, il leur faudrait revendre immédiatement à l’issue de cette période de 9 Ans puisque cela ressortait clairement de la simulation, indépendamment de son exactitude.

Dans ces conditions, le dol sanctionné qui engageant la responsabilité de la S.C.I. MESTADE et de la SAS PROMOTION PICHET n’aurait pas pu être évité, même si les notaires avaient attiré expressément l’attention de l’acquéreur emprunteur sur le risque encouru.

Les deux notaires seront mis hors de cause.

LES ACTIONS VISANT LA BANQUE

La banque n’a pas participé au dol commis par les sociétés venderesses, ce qui fait obstacle au report du point de départ de la prescription la concernant.

L’action en responsabilité est prescrite.

LE CALCUL DU PREJUDICE

A) Les postes de demandes formulés dans l’hypothèse du maintien des contrats

1- Les époux [C] invoquent une perte de chance de ne pas contracter et estiment que 'leur perte de chance peut être raisonnablement évaluée à 40% de la valeur de leur bien qui sera estimé(e') À 112.640* 50% = 56.320 euros,

2- Ils demandent ensuite la compensation de la perte locative de 1.710 euros,

3- ils demandent enfin une somme de 48.023,95 euros, en renvoyant à un tableau établi par leurs soins, correspondant à ce qu’ils qualifient de préjudice financier complémentaire subi résultant de la formule : loyers nets – dépenses de crédit – taxes foncières,

4- ils demandent enfin 'dans le cadre du pouvoir d’évocation de la cour d’appel', l’indemnisation 'd’une seconde composante du préjudice de perte de chance de ne pas avoir contracté à de meilleurs conditions’ une indemnité qu’ils évaluent à 48.023,95 euros 'calculée sur la base du coût total du crédit multiplié par le pourcentage correspondant au différentiel entre le prix d’acquisition et la valeur de revente',

B) sur l’indemnisation au titre de la carence locative

La demande n’est pas fondée parce que cette carence locative provient des aléas économiques ; les S.C.I. MESTADE et PROMOTION PICHET n’ont pas garanti une pérennité locative et ont même fait souscrite à l’acquéreur, pour le protéger, une assurance couvrant les périodes de carences locatives ; le risque réalisé n’a pas été caché ; la perte locative subie constitue donc la réalisation d’un risque auquel l’acquéreur s’est trouvé exposé ; il n’est pas indemnisable dans l’hypothèse d’un préjudice analysé en perte de chance d’être demeuré dans une situation plus favorable.

C) les surcoûts quotidiens

La somme est obtenue en faisant la différence entre les dépenses d’emprunt – capital inclus -, augmentées de la taxe foncière en déduisant le montant des loyers nets. Or le remboursement du capital n’est pas un coût pour trouver sa contrepartie dans la propriété ; le coût est limité aux intérêts.

La somme de 27.758 euros présentée sous forme de tableau est arrêtée en 2013 ; il n’y a aucune de l’arrêter à cette date ; pour la période ainsi délimitée, cette demande tend en réalité à récupérer indirectement le prix payé aux sociétés venderesses sans qu’elles récupèrent la propriété, sauf à déduire le montant des loyers nets réellement perçus. Elle a été volontairement limitée pour masquer la fausseté du raisonnement derrière une demande ne présentant pas un caractère excessif dans son montant.

Cette demande ne peut qu’être rejetée.

D) la demande complémentaire résultant des dernières écritures

— le pouvoir d’évocation de la cour : l’exercice de cette faculté suppose que le premier juge n’ait pas tranché tout le litige dont il était saisi parce qu’il ne pouvait pas le faire (exemple type : jugement tranchant la responsabilité – institution d’une expertise évaluant le préjudice – appel – dépôt du rapport -arrêt statue sur la responsabilité et le préjudice sans renvoyer devant le premier juge) ; la cour ne se trouve pas dans une telle hypothèse d’évocation puisque le premier juge a tranché la totalité du litige ; il lui est demandé de statuer sur un complément de demande indemnitaire.

— jurisprudence faussement citée : la cour note qu’en se référant à un arrêt du 26 septembre 2018, les demandeurs prêtent à la cour de cassation une motivation qu’elle n’a pas tenue ; les phrases sont extraites de la motivation du second moyen de l’arrêt qui a été rejeté comme n’étant manifestement pas susceptible d’entrainer la cassation.

Il est regrettable que, sous couvert de technicité juridique, les conclusions d’appel prêtent une motivation imaginaire à la cour de cassation.

— Inclusion de la TVA dans l’assiette de la demande : pour être cette fois en position de créancier, les conclusions commettent la même erreur dolosive que la partie adverse en incluant la TVA dans l’assiette des calculs à faire ;

— Un préjudice de perte de chance n’a pas deux 'volets’ ;

— Contradiction interne et fausseté du raisonnement :le préjudice est qualifié de perte de chance de ne pas contracter ; il est lié au financement inutile d’une partie du prix du bien parce que ce dernier a perdu de sa valeur ; par conséquent, le coefficient de perte de chance s’applique à la perte évaluée en pourcentage de la valeur du bien ; or la somme demandée est le produit du bien affecté du pourcentage de perte ; c’est donc la perte elle-même et le coefficient de perte de chance a volontairement été omis qui ne peut pas être égal à 1 (même chose dans les autres dossiers, ce qui exclut l’erreur ponctuelle).

— Le sens de la question posée : ainsi rétablie dans le seul sens qu’elle peut avoir, l’indemnisation demandée en lien avec la valeur du bien se limite à réclamer l’évaluation du montant du capital inutilement acquis et financé et à réclamer aux responsables, le remboursement du coût de la rémunération contractuelle versée à la banque et à l’assureur groupe pour financer et garantir ce capital inutilement emprunté, ces sommes étant calculées aux conditions du contrat conclu.

— Calcul : les époux [C] indiquent que le bien ne vaut plus 50% de sa valeur d’achat soit 112.640 * 50/100 = 56.320 euros et ils estiment que leur perte de chance peut être aussi évaluée à 50% de la valeur du bien ; cette expression n’est pas logique. Il faut calculer le coefficient de perte de valeur sur le prix H.T. payé à l’achat soit 112.640 / 1,196 = 94.181 euros.

Le bien ne vaut effectivement plus que 57.000 euros net vendeur comme le prouvent les ventes constatées. La perte de valeur est de 94.181 – 57.000 = 37.191 euros.Le bien a donc perdu environ 40 % de sa valeur.

Une perte de chance de 50% (proportion demandée) appliquée à une perte de valeur commandait de poser l’opération arithmétique suivante : 94.181 * 40% * 50% et aboutirait à ne demander que 18.836 euros. Ce qui est demandé n’est autre que le remboursement de la totalité de la perte du bien.

Compte tenu de cette formulation contradictoire, il faut qualifier le préjudice à réparer :

— soit le préjudice ainsi quantifié est analysé en un préjudice de pure perte s’il est estimé que le contrat n’aurait pas été passé si le dol n’avait pas été commis.

— soit le préjudice ainsi quantifié est analysé en un préjudice de perte de chance s’il est estimé que les acquéreurs auraient néanmoins contracté malgré le caractère dolosif de la promesse contractée.

La cour retiendra la perte de chance de ne pas contracter car il n’est pas sûr que sans la fraude, le contrat n’aurait pas été signé.

La cour retiendra qu’il y a eu perte de chance de ne pas contracter car il n’est pas sûr que sans la fraude, le contrat n’aurait pas été signé. Compte tenu de l’illogisme de la formulation de la demande, elle n’est pas liée par le taux de perte de chance apparemment demandé puisqu’il a été démontré que ce taux n’est que le proportion atteint par la perte invoquée (sur une base fausse au demeurant puisqu’augmentée de la TVA).

Les éléments de fraude accumulés sont suffisamment concordants et élaborés pour affirmer que les époux [C] avaient deux chances sur trois soit 66,67% de chance d’éviter cette perte si :

— le mécanisme fiscal De Robien recentré tel qu’institué à l’article 31 CGI leur avait été expliqué étape par étape et crayon en main lors de la simulation, en faisant tout le moins ressortir sur quelques années, à revenu constant, le montant de la baisse d’impôt ;

— si la base de calcul du gain fiscal avait été la bonne au lieu d’aboutir à une majoration artificielle de 19,6% de la valeur de départ (le prix payé T.T.C. dont on déduit le capital restant dû à 9 ans).En matière de dol, la négligence de la personne lésée n’est pas de nature à constituer la justification d’un partage de responsabilité.

Les époux [C] ont donc droit à une indemnité qui s’élève à une indemnité égale au prix payé T.T.C. 112.640 * 40% (montant de la perte calculée sur prix H.T.) * 66,67 % (coefficient de perte de chance) = 30.037 euros,

En revanche, les acquéreurs ont pu mettre le bien en location et percevoir les avantages fiscaux ; ils n’ont pas subi de carences locatives insupportables ; ils ont donc atteint le but recherché ; dans ces conditions, même en admettant que sans le dol, ils auraient eu une chance sérieuse de ne pas contracter, les contreparties obtenues dans la réalisation de cette opération maintenue, qui a rapporté, n’autorisent pas à inclure dans l’assiette du préjudice, le coût financier du prêt contracté pour financer la valeur perdue.

Pour les mêmes raisons, le coût de l’assurance groupe ne constitue pas un préjudice en lien avec le fait dommageable.

E) le préjudice moral et psychologique

Le préjudice moral subi s’apprécie en fonction de la durée des soucis accumulés depuis l’année 2009 ; le préjudice est d’autant plus important qu’il s’agit d’une faute dolosive et non pas d’une erreur commise par le responsable ; ce dol qui a failli irrémédiablement compromettre la situation des époux [C] ; il sera évalué à 15.000 euros (7.500 euros pour chacun des époux).

Sur les demandes annexes

Le coût du constat d’huissier de 2014 sera mis à la charge de la S.C.I. MESTADE

En compensation de frais irrépétibles, les époux [C] obtiendront une somme de 5.000 euros.

Il ne sera pas fait application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de l’une quelconque des autres parties du chef des procédures de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

* en raison de la confusion des qualités résultant d’une cession de patrimoine à titre universel, déclare sans objet toute action en responsabilité visant la SAS PROMOTION PICHET prise en qualité de dirigeant de la S.A.R.L. IG2P ;

* déclare la décision commune à la compagnie AXA FRANCE VIE assureur groupe ;

* infirme le jugement et statue à nouveau,

* déclare les époux [C] irrecevables

— dans leurs actions visant le CREDIT FONCIER DE FRANCE

— dans leur action en annulation du contrat de réservation

* les déclare recevable dans le surplus de leurs demandes ;

* dit qu’ils ont été victimes d’un dol commis par la SAS PROMOTION PICHET et la S.C.I. MESTADE ;

* les déboute de leur action en annulation du contrat de vente et en annulation/caducité du prêt ;

* et décide d’une réparation indemnitaire ;

* condamne la S.C.I. MESTADE et la SAS PROMOTION PICHET à payer in solidum aux époux [C] une indemnité de 30.037 Euros ;

* les condamne à payer in solidum aux époux [C] une indemnité de 15.000 euros en réparation du préjudice moral ;

Dit que les intérêts au taux légal courront sur ces sommes à compter du présent arrêt.

* déboute les époux [C] de leurs actions en responsabilité visant les autres parties et met par conséquent hors de cause :

— la banque prêteuse,

— Maître [B] [N] et la SCP [N], [T] [K], [X] notaires instrumenteurs,

— Maître [G] notaire et la SCP [G] ET ASSOCIES NOTAIRES, notaires, ayant reçu procuration

* déboute les époux [C] de leur action en annulation de la stipulation de prêt bancaire ;

* les déboute du surplus de leurs demandes indemnitaires ;

* condamne la S.C.I. MESTADE et la SAS PROMOTION PICHET in solidum aux dépens de première instance et d’appel incluant les frais de publicité foncière, les frais fiscaux et le coût du constat d’huissier, dont distraction au bénéfice des avocats adverses qui en font la demande,

* les condamne à payer in solidum aux époux [C] une somme de 5.000 euros en compensation de frais irrépétibles.

* dit n’y avoir lieu à l’autre application de l’article 700 du code de procédure civile tant du chef de la procédure de première instance que du chef de la procédure d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Mme DUCHAC, Président, et par Mme HAUGUEL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Sylvie HAUGUEL Caroline DUCHAC

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Cour d'appel de Pau, 1re chambre, 18 décembre 2020, n° 18/02540