Cour d'appel de Reims, 1ere chambre sect.civile, 23 avril 2019, n° 18/01655

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Chronologie de l’affaire

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Rivière Avocats · 31 mai 2019

Par Marie-Bénédicte Pain, Magali Dupuy …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Reims, 1re ch. sect.civ., 23 avr. 2019, n° 18/01655
Juridiction : Cour d'appel de Reims
Numéro(s) : 18/01655
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Troyes, 17 mai 2018
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

ARRET N°

du 23 avril 2019

R.G : N° RG 18/01655 – N° Portalis DBVQ-V-B7C-EQOU

SARL LE CLOS DE RIZAUCOURT

c/

DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES D’ILE DE FRANCE

FM

Formule exécutoire le :

à

 :

—  SCP DELVINCOURT-CAULIER RICHARD

— Maître Philippe PONCET

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE-1° SECTION

ARRÊT DU 23 AVRIL 2019

APPELANTE :

d’un jugement rendu le 18 mai 2018 par le tribunal de grande instance de TROYES,

SARL LE CLOS DE RIZAUCOURT

[…]

[…]

COMPARANT, concluant par la SCP DELVINCOURT-CAULIER RICHARD, avocats au barreau de REIMS et ayant pour conseil la SCP DELPEYROUX et Associés, avocats au barreau de PARIS

INTIME :

DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES D’ILE DE FRANCE Monsieur le Directeur Régional des Finances Publiques d’Ile de France et de PARIS, Pôle Fiscal Parisien 1 – Pôle Juridictionnel Judiciaire.

[…]

[…]

[…]

COMPARANT, concluant par Maître Philippe PONCET, avocat au barreau de REIMS.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Francis MARTIN, président de chambre

Madame Florence MATHIEU, conseiller

Monsieur Cédric LECLER, conseiller

GREFFIER :

Monsieur MUFFAT-GENDET, greffier, lors des débats et Madame NICLOT, greffier, lors du prononcé,

DEBATS :

A l’audience publique du 25 février 2019, où l’affaire a été mise en délibéré au 23 avril 2019,

ARRET :

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 23 avril 2019 et signé par Monsieur MARTIN, président de chambre, et Madame NICLOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Exposé du litige :

Par acte en date du 26 janvier 2011, la SARL Le Clos de Rizaucourt a fait l’acquisition à Dienville d’un terrain à bâtir sur lequel deux pavillons étaient en cours d’édification.

Le 31 mai 2016, la société Le Clos de Rizaucourt a reçu de l’administration fiscale un avis de mise en recouvrement d’un montant de 47 132 euros, dont 8 840 euros d’intérêts de retard, correspondant aux droits de mutation liés à l’acte d’acquisition immobilière précité.

Par exploit d’huissier en date du 1er mars 2017, la SARL Le Clos de Rizaucourt a assigné le directeur régional des finances publiques devant le tribunal de grande instance de Troyes, aux fins de voir prononcer la décharge de l’imposition mise à sa charge à hauteur de 47 132 euros.

Le directeur régional des finances publiques a demandé au tribunal de rejeter toutes les demandes de la SARL Le Clos de Rizaucourt.

Par jugement en date du 18 mai 2018, le tribunal de grande instance de Troyes a :

— déclaré recevable l’assignation délivrée au directeur régional des finances publiques par la SARL Le Clos de Rizaucourt,

— débouté la SARL Le Clos de Rizaucourt de sa demande de décharge de l’imposition mise à sa charge pour un montant de 47 132 euros dont 8 843 euros de pénalités,

— confirmé, en conséquence, la décision de l’administration fiscale en date du 26 janvier 2017 rejetant la réclamation contentieuse s’agissant de droits d’enregistrement pour un montant de 47 132 euros dont 8 843 euros de pénalités mis à la charge de la SARL Le Clos de Rizaucourt,

— rejeté la demande de condamnation du directeur régional des finances publiques au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la SARL Le Clos de Rizaucourt aux entiers dépens.

Pour statuer ainsi, le tribunal a relevé :

— qu’en application de l’article 1594-0 G du code général des impôts, pour bénéficier de l’exonération la SARL Le Clos de Rizaucourt devait s’engager, dans l’acte d’acquisition, à produire un immeuble neuf dans le délai de quatre ans et à justifier dans ce délai de l’exécution des travaux de construction, alors que la SARL Le Clos de Rizaucourt n’avait pas effectué cette déclaration dans les quatre ans impartis et que les vérifications opérées par l’administration fiscale n’ont pas permis de s’assurer que les travaux d’édification des pavillons avaient bien été achevés dans ce délai de quatre ans,

— qu’en application de l’article 1840 G ter du code général des impôts, le non-respect de l’engagement ou le défaut de production de la justification entraîne l’obligation de payer les droits dont la mutation a été exonérée, ainsi que les pénalités y afférentes, obligation dont la SARL Le Clos de Rizaucourt ne peut s’exonérer en prétextant les modifications réglementaires intervenues dans la définition du document justificatif à produire, alors qu’il n’est pas établi qu’elle ait jamais cherché à satisfaire cette obligation de justification.

Par déclaration enregistrée le 25 juillet 2018, la SARL Le Clos de Rizaucourt a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions déposées le 31 janvier 2019, la SARL Le Clos de Rizaucourt demande à la cour d’infirmer en tous ses points le jugement déféré, de prononcer la décharge de l’imposition mise à sa charge au titre des droits d’enregistrement pour un montant de 47 132 euros dont 8 840 euros de pénalités et de condamner le directeur régional des finances publiques à lui verser la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

A l’appui de son appel, la SARL Le Clos de Rizaucourt expose :

— que contrairement à ce qu’écrit le tribunal dans son jugement, le fait que la construction des pavillons ait été achevée dans le délai de quatre ans imparti n’est pas contestable, puisque dans sa décision de rejet du 26 janvier 2017, le directeur régional des finances publiques a lui-même reconnu que les pavillons concernés avaient été achevés début 2012, soit bien avant l’expiration du délai de 4 ans,

— que le directeur régional des finances publiques reconnaît également que pour satisfaire à son obligation de justification de l’exécution des travaux, elle ne devait produire aucun document émanant de la Mairie puisque cette exigence avait disparu depuis que le texte de l’article 266 bis I de l’annexe III au CGI avait été modifié en 2012,

— qu’il ne saurait pas davantage lui être reproché de ne pas avoir transmis une déclaration relative à une régularisation de TVA, sans aucun rapport avec les droits de mutation concernant le présent litige,

— que le document justificatif qui aurait dû être produit n’est donc pas défini,

— que seule peut être sanctionnée l’absence d’achèvement des constructions dans le délai de quatre ans, mais non l’omission d’une simple obligation déclarative dont il n’est au surplus pas établi la nature,

— que si elle avait su que l’absence d’envoi d’un imprimé relatif à la TVA pouvait avoir une telle conséquence financière pour elle, elle aurait adressé cet imprimé que l’administration ne lui a d’ailleurs jamais réclamé.

Par conclusions déposées le 7 février 2019, le directeur régional des finances publiques d’Ile de France et du département de Paris demande à la cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et de condamner la SARL Le Clos de Rizaucourt à lui payer la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Le directeur régional des finances publiques d’Ile de France et du département de Paris fait valoir que la motivation du jugement doit être entièrement réitérée.

MOTIFS DE LA DECISION

Vu les dernières écritures déposées par la SARL Le Clos de Rizaucourt et par le directeur régional des finances publiques d’Ile de France et de Paris,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 12 février 2019.

Sur les droits de mutation dus par la SARL Le Clos de Rizaucourt

L’article 1594-0 G du code général des impôts dispose que sont exonérés de taxe de publicité foncière ou de droits d’enregistrement les acquisitions d’immeubles réalisées par une personne assujettie au sens de l’article 256A, lorsque l’acte d’acquisition contient l’engagement, pris par l’acquéreur, d’effectuer dans un délai de quatre ans, les travaux conduisant à la production d’un immeuble neuf ou nécessaires pour terminer un immeuble inachevé ; cette exonération est subordonnée à la condition que l’acquéreur justifie de l’exécution des travaux à l’expiration du délai de quatre ans.

Dans son acte d’acquisition du 26 janvier 2011, la SARL Le Clos de Rizaucourt s’est expressément engagée, pour bénéficier du droit fixe d’enregistrement et de l’exonération du droit proportionnel d’enregistrement, à cette double obligation:

— effectuer dans un délai de quatre ans les travaux conduisant à la production d’immeubles neufs,

— justifier, à l’expiration du délai de quatre ans, de l’exécution desdits travaux.

Il est constant qu’à l’expiration du délai de quatre ans, soit au 26 janvier 2015, la SARL Le Clos de Rizaucourt n’a pas justifié de l’exécution des travaux d’achèvement des pavillons.

L’administration fiscale a donc procédé au rappel des droits de mutation éludés, soit 38 133 euros, augmentés des intérêts de retard arrêtés à 8 999 euros.

La SARL Le Clos de Rizaucourt estime que les travaux ont été achevés dans le délai de quatre ans et se prévaut d’une date d’achèvement au 15 janvier 2012.

En revanche, la SARL Le Clos de Rizaucourt ne conteste pas n’avoir pas justifié auprès de l’administration fiscale, à l’expiration du délai de quatre ans, de l’achèvement des travaux de construction des pavillons.

La SARL Le Clos de Rizaucourt soutient que l’article 1594-0 G du CGI ne précisait pas sous quelle forme devait s’effectuer la justification de la bonne exécution desdits travaux et elle reproche même au tribunal de l’avoir condamnée sans avoir 'défini quel document elle aurait dû produire'.

Il convient, en premier lieu, de relever qu’il n’appartient pas à la juridiction judiciaire d’indiquer quel document la SARL Le Clos de Rizaucourt devait utiliser pour remplir l’obligation déclarative claire et précise qu’elle avait contractée expressément en contrepartie de l’avantage fiscal obtenu. Si, bien qu’étant une professionnelle des opérations immobilières, la SARL Le Clos de Rizaucourt a eu une hésitation sur la nature du document à utiliser pour justifier de l’achèvement des travaux, il lui était loisible de se renseigner sur ce point auprès de l’administration fiscale. Elle ne justifie, ni même ne soutient, avoir effectué cette démarche de bon sens.

Il convient, en second lieu, de relever que la nature du document à produire résultait des dispositions du CGI applicables au terme du délai de quatre ans, soit au 26 janvier 2015. En effet, l’article 266 bis.I de l’annexe III du CGI précisait que la justification de l’exécution des travaux 'résulte du dépôt de la déclaration spéciale mentionnée au I de l’article 244 de l’annexe II du même code'. Ce dernier article renvoyait lui-même à l’article 269.1.b du CGI qui définissait le document à produire lors de l’achèvement des travaux, à savoir 'la déclaration prévue par la réglementation relative au permis au construire', autrement dit la déclaration prévue par l’article L.462-1 du code de l’urbanisme.

Peu importe que l’article 269.1.b du CGI soit un texte propre à la TVA, dès lors que les textes sur les droits d’enregistrement y renvoient pour la définition de la déclaration d’achèvement des travaux à produire dans ce cadre.

En s’abstenant de produire la déclaration de l’article L462-1 du code de l’urbanisme, attestant de l’achèvement et de la conformité des travaux au permis délivré ou à la déclaration préalable, voire même toute autre déclaration d’achèvement de travaux de nature à prouver sa bonne foi dans l’exécution de son obligation, la SARL Le Clos de Rizaucourt a manqué à son obligation déclarative qui conditionnait le bénéfice de l’avantage fiscal octroyé.

L’article 1840 G ter.I du CGI dispose que lorsqu’une exonération ou une réduction de droits d’enregistrement ou de taxe additionnelle aux droits d’enregistrement a été obtenue en contrepartie du respect d’un engagement ou de la production d’une justification, le non-respect de l’engagement ou le défaut de production de la justification entraîne l’obligation de payer les droits dont la mutation a été exonérée.

La SARL Le Clos de Rizaucourt est précisément dans la situation prévue à cet article : elle s’était engagée, en contrepartie de l’avantage fiscal obtenu, à justifier, au terme d’un délai de quatre ans, de l’achèvement de la construction de ses pavillons, mais elle n’a pas satisfait à cette obligation déclarative. Elle doit donc rembourser l’avantage obtenu, outre les intérêts de retard. Pour s’opposer à cette sanction, la SARL Le Clos de Rizaucourt invoque une décision du Conseil constitutionnel, mais cette décision est relative aux amendes proportionnelles, alors que nulle amende n’est infligée en l’espèce, de sorte que l’invocation de cette jurisprudence constitutionnelle est inopérante.

Enfin, la SARL Le Clos de Rizaucourt ne peut alléguer aucune 'doctrine administrative’ pour éluder l’application de la loi lorsqu’elle est parfaitement claire comme l’est l’article 1840 G ter.I précité.

Par conséquent, c’est à juste titre que le tribunal a confirmé la décision de l’administration fiscale de réclamer à la SARL Le Clos de Rizaucourt le paiement de la somme de 47 1332 euros au titre du remboursement des droits d’enregistrement éludés et des intérêts de retard.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

La SARL Le Clos de Rizaucourt, qui est la partie perdante, supportera les dépens et sera déboutée de sa demande de remboursement de ses frais de justice irrépétibles. En outre, il est équitable qu’elle soit condamnée à payer au directeur régional des finances publiques d’Ile de France et de Paris la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant en audience publique et par arrêt contradictoire,

DECLARE l’appel recevable,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DEBOUTE la SARL Le Clos de Rizaucourt de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SARL Le Clos de Rizaucourt à payer au directeur régional des finances publiques d’Ile de France et de Paris la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SARL Le Clos de Rizaucourt aux dépens.

Le greffier Le président

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Cour d'appel de Reims, 1ere chambre sect.civile, 23 avril 2019, n° 18/01655