Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 16 septembre 2020, n° 17/00192

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Reims, ch. soc., 16 sept. 2020, n° 17/00192
Juridiction : Cour d'appel de Reims
Numéro(s) : 17/00192
Dispositif : Ordonnance d'incident

Sur les parties

Texte intégral

Ordonnance n°

du 16/09/2020

RG 17/00192

N° Portalis DBVQ-V-B7B-EFZ3

OB/FC

COUR D’APPEL DE REIMS

Chambre sociale

ORDONNANCE D’INCIDENT

Formule exécutoire le :

à :

— SELARL RAFFIN ASSOCIES

— SELARL BRUN

— SELAS BDB & ASSOCIÉS

— SCP DELVINCOURT CAULIER-RICHARD

Le seize septembre deux mille vingt,

Nous, Monsieur Olivier BECUWE, conseiller, magistrat en charge de la mise en état, assisté de Madame Françoise CAMUS, greffier,

Après les débats du 31 août 2020, avons rendu l’ordonnance suivante, dans la procédure inscrite sous le numéro RG 17/00192 du répertoire général, opposant :

Association CENTRE DE GESTION ET D’ETUDE AGS (CGEA) d’AMIENS

[…]

[…]

Représentée par la SELARL RAFFIN ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS

APPELANTE

à

Monsieur Z Y

[…]

[…]

Représenté par la SELARL BRUN, avocat au barreau de REIMS

SELARL AMANDINE X, prise en la personne de Mme X, ès qualités de mandataire liquidateur de la SASU ODCF

[…]

[…]

Représentée par la SELAS BDB & ASSOCIÉS, avocat au barreau de REIMS, et la SELARL GM ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

Société OVERHEAD DOOR CORPORATION

[…]

LEWISVILLE

[…]

[…]

Représentée par la SCP DELVINCOURT CAULIER-RICHARD, avocat au barreau de REIMS, et Me Laurent ASSAYA, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

* * * * *

EXPOSE DU LITIGE :

La société Overhead Door Corporation France (la société ODCF) a fait l’objet d’une procédure de liquidation judiciaire, ouverte par jugement rendu le 11 juillet 2013 par le tribunal de commerce de Reims.

Le liquidateur judiciaire a notifié leur licenciement à l’ensemble des salariés à partir du 17 octobre 2013, sous réserve de leur adhésion au contrat de sécurisation professionnelle.

Divers salariés licenciés ayant saisi le conseil de prud’hommes de Reims en contestation de leur licenciement, le liquidateur judiciaire de la société ODCF y a attrait en intervention forcée la société Overhead Door Corporation (la société ODC), société mère dont le siège est aux Etats-Unis.

Cette dernière ayant soulevé des exceptions d’incompétence, le conseil de prud’hommes, par jugements du 29 avril 2015, les a rejetées et a sursis à statuer dans l’attente de la décision de la juridiction administrative saisie d’une contestation de la décision d’homologation du document unilatéral fixant le plan de sauvegarde de l’emploi.

Selon ordonnance du président du tribunal de commerce du 29 février 2016, la société Amandine X, prise en la personne de Mme X, a été désignée mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société ODCF en remplacement du précédent mandataire.

A la suite de l’arrêt du Conseil d’Etat statuant, le 30 mai 2016, sur le recours administratif et validant la décision d’homologation, l’instance engagée devant la juridiction prud’homale s’est poursuivie.

Sur contredit, la cour d’appel de Reims a confirmé, le 15 juin 2016, la compétence matérielle du conseil de prud’hommes pour se prononcer sur l’appel en intervention forcée aux fins de déclaration de jugement commun de la société ODC.

Et par jugements du 14 décembre 2016, la juridiction prud’homale a notamment dit que les recours formés désormais par les salariés contre la société ODC relevaient des juridictions américaines et qu’elle demeurait compétente pour l’examen des litiges relatifs au motif économique contre le liquidateur.

Par déclarations du 19 janvier 2017, l’association centre de gestion et d’étude d’Amiens pour la garantie des salaires (l’AGS) a fait appel de ces jugements et, par des conclusions postérieures, le liquidateur judiciaire a formé appels incidents.

Les salariés n’ont pas conclu.

Par un arrêt du 18 octobre 2017, rendu sur contredit du liquidateur, la cour d’appel a jugé que M. Y et l’AGS ne pouvaient, à défaut d’avoir formé contredit, contester la compétence des juridictions américaines pour statuer sur leur action à l’égard de la société ODC.

Cet arrêt confirme, par ailleurs, l’incompétence de la juridiction prud’homale pour statuer sur l’action en garantie introduite par le mandataire liquidateur de la société ODCF à l’égard de la société ODC.

Il infirme également les jugements en ce qu’ils avaient dit les juridictions américaines compétentes pour statuer sur cette action et dit le tribunal de commerce de Reims compétent.

Le liquidateur ainsi que la société ODC ont chacun formé un pourvoi contre cet arrêt que la Cour de cassation a rejetés (Soc., 22 janvier 2020, n° 17-31.266).

La Cour de cassation a jugé que seul le tribunal de commerce de Reims était compétent pour connaître de l’action en garantie introduit par le liquidateur à l’égard de la société ODC.

Par des conclusions signifiées le 15 juin 2020, la société ODC, se prévalant tant de l’autorité de chose jugée attachée à l’arrêt de la Cour de cassation que de l’exclusivité du contredit ainsi que des dispositions de l’article 550 du code de procédure civile, demande au conseiller de la mise en état, à titre principal, de déclarer irrecevables les appels faits par l’AGS et le liquidateur et de la mettre hors de cause.

Elle sollicite, à titre subsidiaire, qu’il soit enjoint à l’AGS de communiquer diverses pièces permettant d’apprécier la demande indemnitaire que celle-ci a faite dans la cadre de son action indemnitaire au titre d’un licenciement frauduleux.

Les parties ont conclu et ont été convoquées à l’audience sur incident.

Le liquidateur comme l’AGS déclarent se désister finalement de leur instance à l’égard de la société ODC.

MOTIVATION :

Par sa phrase 'dit et juge que les exceptions d’incompétence soulevées par la société ODC sont recevables et justifiées', le dispositif du jugement du 14 décembre 2016 rendu à l’égard du salarié, dont l’étendue a été fixée par l’arrêt précité du 18 octobre 2017, tranche la question de la compétence de la juridiction appelée à connaître de l’action en responsabilité de l’AGS et en garantie du liquidateur contre la société ODC.

1°/ Sur l’irrecevabilité de l’appel principal de l’AGS :

C’est à juste titre que la société ODC excipe, d’une part, de l’exclusivité de la voie du contredit, en vigueur à l’époque s’agissant d’un jugement rendu le 14 décembre 2016, antérieurement à l’abrogation de ce recours par le décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, d’autre part, de l’autorité de chose jugée.

D’une part, sur l’exclusivité du contredit, il résulte, en effet, de l’application combinée de l’ancien article 80, alinéa 1er, et de l’article 323 du code de procédure civile qu’en présence d’une pluralité de parties, les voies de recours s’apprécient séparément à l’égard de chacune d’elles, hormis le cas

d’indivisibilité du litige, quand bien même le juge aurait statué sur le fond.

Or, si le jugement attaqué rendu le 14 décembre 2016 statue sur le licenciement en fixant la créance du salarié au passif de la société ODCF, il ne tranche, dans les rapports entre l’AGS et la société ODC, que la question de la compétence.

Il s’en déduit que seul un contredit, à l’exclusion de tout appel, devait être formé par l’AGS qui entendait contester l’incompétence de la juridiction prud’homale dans son appel en responsabilité dirigé contre la société ODC, ce que souligne d’ailleurs à juste titre l’arrêt précité rendu le 18 octobre 2017 par la cour d’appel de Reims.

D’autre part, sur l’autorité de chose jugée, cet arrêt dit, dans son dispositif, 'qu’à défaut de contredit formé par eux, ni les salariés ni l’AGS ne sont recevables à contester dans le cadre du présent contredit [formé par le liquidateur] les dispositions des jugements en ce qu’ils attribuent compétence[s] aux juridictions américaines pour statuer sur l’action des salariés et sur l’action de l’AGS à l’égard de la société ODC'.

Or, cette partie du dispositif n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.

Elle est donc revêtue d’une autorité irrévocable de chose jugée, fermant la voie à toute autre recours, tel un appel, pour contester l’incompétence.

En conséquence, et pour l’ensemble de ces raisons, son appel principal ne pouvait qu’être déclaré irrecevable, ce qu’admet implicitement l’AGS qui déclare s’en désister.

2°/ Sur l’irrecevabilité de l’appel incident du liquidateur :

C’est à bon droit que la société ODC invoque, d’une part, l’autorité de chose jugée, d’autre part, l’article 550 du code de procédure civile.

D’une part, sur l’autorité de chose jugée, la Cour de cassation a, par son arrêt précité du 22 janvier 2020, définitivement tranché la question de la compétence du tribunal de commerce de Reims pour connaître de l’action en garantie du liquidateur.

Et elle l’a fait en rejetant le pourvoi contre l’arrêt du 18 octobre 2017 frappé, comme l’exigeaient l’ancien article 80, alinéa 1er, et de l’article 323 du code de procédure civile, de contredit.

Le liquidateur ne peut donc contourner, par le biais d’un appel, qui n’était pas la bonne voie de recours, ce qui lui a été définitivement refusé sur contredit, seul recours ouvert.

D’autre part, il ressort des termes stricts de l’article 550 du code de procédure civile que l’irrecevabilité de l’appel principal, fait en l’espèce par l’AGS, entraîne celle de l’appel incident, étant souligné que les conclusions d’appel incident du liquidateur ont été prises à l’expiration du délai pour agir à titre principal.

En conséquence, son appel incident ne pouvait qu’être déclaré irrecevable, ce qu’admet implicitement le liquidateur qui déclare s’en désister.

3°/ Sur la mise hors de cause de la société ODC :

Il résulte de ce qui précède que ni l’AGS ni le liquidateur ne peuvent remettre en cause, par la voie de l’appel, le jugement d’incompétence du 14 décembre 2016.

En outre, les salariés n’ont pris aucune conclusion.

Il s’ensuit que la société ODC pourra être mise hors de cause.

S’il ne résulte d’aucun texte qu’une telle demande relève formellement du conseiller de la mise en état, la mise hors de cause est, en l’espèce, une conséquence inévitable de l’irrecevabilité des appels.

4°/ Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Il ne serait pas équitable, compte tenu de la nature de l’affaire telle qu’elle a été exposée, d’accorder une indemnité de frais irrépétibles.

Si l’incident déposé par la société ODC aurait certes pu, d’un point de vue purement juridique, être soulevé et réglé avant que la Cour de cassation ne statue par son arrêt précité du 22 janvier 2020, il était néanmoins opportun d’attendre le sens de cet arrêt pour vider, dans sa globalité, la question de l’irrecevabilité de l’appel principal et de l’appel incident qui n’apparaît pas simple.

Et tant le liquidateur que l’AGS n’ont alors opposé aucune défense inutile.

Les dépens afférents à l’instance sur incident suivront le sort de ceux sur le fond.

PAR CES MOTIFS :

Nous, conseiller de la mise en état, statuant publiquement, contradictoirement, et par ordonnance susceptible de déféré :

Constatons le désistement de l’appel principal de l’AGS et de l’appel incident de la société Amandine X, prise en la personne de Mme X, ès qualités de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société ODCF, en ce qu’ils font grief au jugement du conseil de prud’hommes du 14 décembre 2016 de faire droit à l’exception d’incompétence de la société ODC concernant l’action en responsabilité de la première et l’action en garantie du second dirigées contre elle ;

Disons y avoir lieu, au stade de la mise en état, à la mise hors de cause de la société ODC ;

Rejetons les demandes de frais irrépétibles ;

Renvoyons l’affaire à la mise en état ;

Disons que les dépens de la procédure d’incident sont joints avec ceux du fond.

Le greffier, Le magistrat,

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