Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 15 décembre 2020, n° 20/00353

  • Lotissement·
  • Cahier des charges·
  • Parcelle·
  • Commune·
  • Plan·
  • Espace vert·
  • Urbanisme·
  • Affectation·
  • Municipalité·
  • Destination

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 1re ch., 15 déc. 2020, n° 20/00353
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 20/00353
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

1re Chambre

ARRÊT N°470/2020

N° RG 20/00353 – N° Portalis DBVL-V-B7E-QM4T

SCI SCI ROZENN

C/

COMMUNE DE CARNAC

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 15 DÉCEMBRE 2020

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Fabrice ADAM, Premier Président de chambre,

Assesseur : Madame Brigitte ANDRÉ, Conseillère,

Assesseur : Madame Isabelle LE POTIER, Conseillère

GREFFIER :

Madame X-Y Z, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 27 Octobre 2020, tenue en double rapporteur avec l’accord des parties, par M. Fabrice ADAM, premier président de chambre et Mme Brigitte ANDRÉ, conseillère entendue en son rapport

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 15 Décembre 2020 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION :

La SCI ROZENN, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette

qualité au siège

[…]

[…]

Représentée par Me Gwendoline PAUL du Cabinet PAUL-AVOCATS, avocat au barreau de RENNES

DÉFENDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION :

La COMMUNE DE CARNAC représentée par son Maire en exercice

[…]

Hôtel de Ville

[…]

Représentée par Me Aurélie GRENARD de la SELARL ARES, avocat au barreau de RENNES

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 13 avril 1930, la commune de Carnac (Morbihan) a rédigé un cahier des charges portant sur la vente, en 192 lots, des terrains communaux de la Falaise de Saint Colomban. Le projet de lotissement a été approuvé par arrêté préfectoral du 6 février 1931 auquel était annexé un plan de lotissement daté du même jour. La commune de Carnac a ultérieurement procédé à une redistribution des lots du projet de lotissement selon un plan modificatif annexé à l’arrêté préfectoral du 20 novembre 1956 approuvant ce nouveau découpage. Sur ce second plan figuraient au coeur de l’îlot D, une parcelle et son chemin d’accès correspondant aux parcelles cadastrées section AW n° 264 et 306, d’une superficie totale de 1 901 m², présentées comme constituant un espace vert à créer. La commune de Carnac, restée propriétaire des dites parcelles, a, par délibération du 29 septembre 2011, décidé de les céder.

La SCI Rozenn, nue-propriétaire de la parcelle […], contiguë à la parcelle n° 264, a soutenu que selon le cahier des charges du lotissement, ces deux parcelles constituaient une partie commune du lotissement, de sorte que leur changement de destination requérait l’accord des colotis. Elle a en conséquence formé un recours en annulation de la délibération du 29 septembre 2011 devant le juge administratif. Ce recours a été rejeté par jugement du tribunal administratif de Rennes du 27 mars 2014, confirmé par arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes du 12 octobre 2015.

Soutenant toujours que les parcelles en cause constituaient une parcelle à destination d’espace vert commun du lotissement, la SCI Rozenn a, le 8 octobre 2015, assigné la commune de Carnac devant le tribunal de grande instance de Lorient aux fins de faire juger que le cahier des charges du lotissement imposait l’accord des colotis à la vente et d’obtenir la condamnation de la commune à la remise en conformité de ces parcelles. Par jugement du 7 septembre 2016, le tribunal de grande instance de Lorient a rejeté ses demandes. Cette décision a été confirmée par arrêt du 15 mai 2018.

Le 19 septembre 2019, la Cour de cassation a cassé l’arrêt du 15 mai 2018, sauf en ce qu’il confirmait le chef de dispositif du jugement ayant rejeté la demande de dommages-intérêts présentée par la commune, et a renvoyé les parties devant la cour d’appel de Rennes autrement composée. Il est reproché à l’arrêt cassé de n’avoir pas donné de base légale à sa décision en ne recherchant pas comme il le lui était demandé, si le plan du lotissement n’avait pas une valeur contractuelle et si la qualification de zone de verdure n’interdisait pas à la commune, en sa qualité de lotisseur et de coloti, de vendre la parcelle en vue d’y édifier des constructions.

Le 17 janvier 2020, la SCI Rozenn a saisi la cour de renvoi. Elle demande dans ses dernières conclusions l’infirmation du jugement en ce qu’il a rejeté ses prétentions et l’a condamnée à une

indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens et de :

— déclarer irrecevables, ou en tout cas non fondées, toutes prétentions contraires de la commune de Carnac ;

— dire que le cahier des charges du lotissement, reproduit dans les actes de vente des parcelles, a un caractère contractuel ;

— dire que les terrains situés […] et 306, d’une superficie de 1901 m², constituent une parcelle du lotissement à destination d’espace vert ;

— dire que le projet de cession de la commune de Carnac ne respecte pas les dispositions du cahier des charges du lotissement qui lui sont opposables ;

- en conséquence, condamner la ville de Carnac à conserver aux parcelles AW 264 et 306 un usage conforme au cahier des charges du lotissement, soit celui d’espace vert ;

— condamner la commune de Carnac à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

En réponse, la commune de Carnac demande à la cour de confirmer le jugement, de débouter la SCI Rozenn de toutes ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 8 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières écritures déposées par la SCI Rozenn le 11 juin 2020 et par la Commune de Carnac le 14 septembre 2020.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Il n’est plus discuté que les AW 264 et 306 dépendent du domaine privé de la commune de Carnac et ne sont dès lors pas, comme initialement soutenu, des parties communes du lotissement. Il n’est pas davantage discuté que le cahier des charges du lotissement daté du 13 avril 1930 engage les colotis entre eux pour toutes les stipulations qui y sont contenues.

Cependant le dit cahier des charges ne comporte aucune clause relative à l’affectation de certaines parcelles loties à un usage d’espace vert. Au contraire, il y est stipulé que tous les lots constituant le lotissement, alors au nombre de 192, dont la cession était prévue sans restriction, devaient porter une maison à édifier dans un délai déterminé qui courait, pour chaque lot, à compter de son adjudication.

La SCI Rozenn invoque, au soutien de sa position selon laquelle le plan de lotissement était intégré au cahier des charges et avait en conséquence valeur contractuelle, l’article 1er de ce cahier des charges ainsi rédigé :

'Le projet comprend la mise en vente d’une surface de terrain communal située au lieu dit 'Falaise de Saint Colomban’ et inscrite au plan cadastral de la commune de CARNAC sous le numéro 410 de la Section P.

Cette surface est divisée en 192 lots suivant un plan qui sera soumis aux différentes formalités nécessaires pour en obtenir l’approbation'.

Mais l’alinéa 2 de cet article – qui contient la seule référence du cahier des charges à un plan – n’avait pour but que de définir le périmètre du lotissement auquel il s’appliquait et non de contractualiser la division des lots contenue dans le dit plan, d’ailleurs non encore définitive puisque non approuvée. Ceci explique que le plan établi en 1931, soit postérieurement à l’élaboration du cahier des charges, a pu, 25 ans plus tard, être amplement remanié sans que l’avis des colotis ne soit sollicité. Au demeurant, le plan annexé à l’arrêté préfectoral du 6 février 1931, seul visé par l’article 1er du cahier des charges sus-reproduit, ne prévoit aucune affectation de parcelles à un usage spécifique et en particulier aucune affectation à un usage d’espace vert.

C’est seulement le nouveau plan établi unilatéralement en 1956 à l’initiative de la municipalité de Carnac au soutien de sa demande d’obtention de l’arrêté modificatif de lotissement du 20 novembre 1956 qui fait figurer, au sein de l’îlot D dont les lots ont été redistribués, une parcelle sur laquelle sont dessinés des arbres, ce plan portant la légende 'zone de verdure à créer'. A cet égard, l’extrait du registre des délibérations municipales du 16 septembre 1956 révèle que la municipalité avait décidé de conserver, au moins provisoirement, la propriété d’un certain nombre de lots à des fins diverses, à savoir l’affectation à un hôtel ou un gros établissement, d’une part, à un jardin public, d’autre part. Ces projets d’aménagement, qui n’étaient pas intégrés dans le cahier des charges du lotissement, ne constituaient pas un engagement de la municipalité envers ses colotis. Il s’agissait pour elle uniquement de décisions unilatérales de gestion du patrimoine communal dans l’intérêt de l’ensemble de ses administrés et non dans l’intérêt particulier des membres du lotissement.

Le plan annexé à l’arrêté préfectoral du 20 novembre 1956, en ce qu’il a été approuvé, ne peut donc avoir qu’une valeur réglementaire et l’affectation y prévue s’analyser tout au plus en une règle d’urbanisme. Or l’article L. 442-9 du code de l’urbanisme énonce que 'Les règles d’urbanisme contenues dans les documents du lotissement, notamment le règlement, le cahier des charges s’il a été approuvé ou les clauses de nature réglementaire du cahier des charges s’il n’a pas été approuvé, deviennent caduques au terme de dix années à compter de la délivrance de l’autorisation de lotir si, à cette date, le lotissement est couvert par un plan local d’urbanisme ou un document d’urbanisme en tenant lieu.'.

Tel étant le cas en l’espèce, la SCI Rozenn ne démontre pas l’existence d’un droit de nature conventionnelle conféré par le plan annexé à l’arrêté préfectoral du 20 novembre 1956, qui n’a pas modifié le cahier des charges de 1931 et qui ne constitue pas en tant que tel un engagement conventionnel inclus dans le dit cahier des charges. Le jugement critiqué sera en conséquence confirmé.

PAR CES MOTIFS, LA COUR :

Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 7 septembre 2016 par le tribunal de grande instance de Lorient ;

Y ajoutant,

Condamne la SCI Rozenn à payer à la commune de Carnac la somme de 8.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles d’appel ;

Condamne la SCI Rozenn aux dépens de la procédure d’appel y compris ceux afférents à l’arrêt du 15 mai 2018.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code de l'urbanisme
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 15 décembre 2020, n° 20/00353