Cour d'appel de Toulouse, 30 mars 2015, n° 14/00376

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Toulouse, 30 mars 2015, n° 14/00376
Juridiction : Cour d'appel de Toulouse
Numéro(s) : 14/00376
Décision précédente : Tribunal de commerce de Toulouse, 8 décembre 2013, N° 2012J01277

Sur les parties

Texte intégral

.

30/03/2015

ARRÊT N°183

N°RG: 14/00376

MM/CD

Décision déférée du 09 Décembre 2013 – Tribunal de Commerce de TOULOUSE – 2012J01277

XXX

SARL ENTREPRISE X

C/

XXX

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

1re Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TRENTE MARS DEUX MILLE QUINZE

***

APPELANTE

SARL ENTREPRISE X

XXX

XXX

Représentée par Me Franck MALET de la SCP MALET FRANCK ET ELISABETH, avocat au barreau de TOULOUSE

Assistée de Me Eric ARNAUD-OONINCX de la SCP ROUZAUD ET ARNAUD-OONINCX, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

XXX Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social

XXX

XXX

Représentée par Me Francis NIDECKER, avocat au barreau de TOULOUSE

Assistée de Me Guy AZAM de la SELARL COTEG et AZAM ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l’affaire a été débattue le 15 Décembre 2014 en audience publique, devant la Cour composée de :

B. BRUNET, président

M. MOULIS, conseiller

P. CRABOL, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : J. BARBANCE-DURAND

ARRET :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

— signé par M. MOULIS, conseiller ayant participé au délibéré, en remplacement du président, empêché, et par J. BARBANCE-DURAND, greffier de chambre.

FAITS ET PROCÉDURE

L’EURL X a une activité principale de plâtrerie.

Dans le cadre de son activité professionnelle elle a confié à la SARL Absis Expertises la tenue de sa comptabilité par lettre de mission du 2/07/2001.

L’EURL X a fait l’objet d’un contrôle fiscal pour la période du 1/10/2004 au 30/09/2007 et jusqu’au 31/06/2008 en matière de TVA.

Elle a reçu une première proposition de rectification en date du 22/12/2008 et une deuxième en date du 18/12/2009.

Suivant acte d’huissier du 31/03/2011 l’EURL X a fait citer la SARL Absis Expertises devant le tribunal de commerce de Toulouse pour la voir condamner à lui payer la somme de 308.310,83 € en réparation du préjudice subi suite aux manquements commis par l’expert comptable outre les intérêts et pénalités de retard, les honoraires exposés pour l’assistance au contrôle fiscal et les heures consacrées par M. X et sa secrétaire pour répondre à l’administration fiscale.

Suivant jugement en date du 9/12/2013 le tribunal de commerce a :

— débouté l’EURL X de l’ensemble de ses demandes

— débouté la SARL Absis Expertises de sa demande en dommages et intérêts

— condamné l’EURL X à payer à la SARL Absis Expertises la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

— condamné l’EURL X aux dépens.

L’EURL X a relevé appel de la décision le 20/01/2014.

L’ordonnance de clôture est en date du 18/11/2014.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses conclusions en date du 17/07/2014 l’EURL X demande à la cour d’infirmer la décision et de :

— condamner la SARL Absis Expertises à payer la somme de 105.261 € représentant son préjudice matériel subi du fait des fautes commises par elle et ayant conduit aux redressements fiscaux mis en recouvrement

— condamner la SARL Absis Expertises à payer la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et immatériel réellement souffert

— condamner la SARL Absis Expertises à payer la somme de 20.000 € au titre des frais irrépétibles.

Elle soutient que l’expert-comptable est tenu à une obligation de moyens, de prudence et de diligence mais qu’il a commis des fautes qui constituent des carences et des méconnaissances professionnelles.

Elle indique que, devant la cour, elle limite la réparation de son préjudice aux pénalités et majorations encourues en sus des droits acquittés.

Dans ses écritures en réponse du 5/06/2014 la SARL Absis Expertises, exposant qu’elle n’a commis aucun manquement dans l’accomplissement de sa mission conclut à la confirmation du jugement et, formant appel incident, sollicite l’allocation d’une somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte portée à son image.

Elle sollicite également 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle indique que l’ EURL X ne rapporte pas la preuve des fautes qu’elle lui reproche.

Elle fait valoir qu’au contraire le redressement qui a été effectué résulte du comportement fautif de l’EURL X. Elle ajoute que cette dernière n’a pas apporté de réponse à l’administration fiscale et surtout n’a pas fourni les justificatifs réclamés.

Sur le préjudice elle indique que les pénalités de retard ont été réduites après transaction à la somme de 82.993 € et que l’EURL X est mal fondée à solliciter une somme supérieure. Elle ajoute que l’EURL X ne justifie pas avoir payé cette somme.

MOTIFS DE LA DECISION

sur la responsabilité de la SARL Absis Expertises

Il appartient à l’expert-comptable d’exécuter la mission qui lui est confiée avec toute la compétence et le soin que le client est en droit d’attendre d’un professionnel normalement diligent.

Sa responsabilité ne peut être engagée que s’il est prouvé qu’il a commis une faute dans l’exercice de sa mission et que cette faute est en relation directe avec le dommage, en l’espèce le redressement.

La charge de la preuve incombe au client qui s’en prévaut.

Suivant lettre de mission en date du 2/07/2001 Z A, expert-comptable, a accepté de tenir la comptabilité de la société. Il a ensuite exercé sous la dénomination de Absis Expertises, société dont il était le gérant. Sa mission concernait la tenue de la comptabilité, l’élaboration des bulletins de salaire, les déclarations sociales et fiscales et l’élaboration des comptes annuels.

Suivant courrier en date du 22/12/2008 la direction générale des finances publiques a informé le représentant légal de l’EURL X que cette dernière faisait l’objet d’une vérification de la comptabilité et que, concernant les opérations de l’exercice clos le 30/09/2005, elle envisageait de modifier la base de calcul et/ou le montant de certaines impositions.

L’administration indiquait que la comptabilité présentée était irrégulière, non sincère et qu’elle ne pouvait avoir de caractère probant. Elle concluait qu’elle rejetait cette comptabilité.

Dans un autre courrier du 18/12/2009 la direction générale des finances publiques indiquait qu’elle envisageait de modifier la base de calcul et/ou le montant de certaines impositions pour les périodes concernant les exercices clos les 30/09/2006 et 30/09/2007, et pour la période du 1/10/2005 au 30/06/2008 en ce qui concerne la TVA. L’administration indiquait que pour les exercices clos en 2006 et 2007 l’ensemble des faits constatés conduit à conclure que la comptabilité est irrégulière, non sincère, qu’elle ne peut avoir un caractère probant et qu’elle ne s’appuie pas systématiquement sur des justificatifs nécessités par les réglementations comptables et fiscales. Elle exposait que dès lors cette comptabilité était rejetée.

Suite à une transaction intervenue entre les parties le 26/09/2012 la somme totale due par l’EURL X a été fixée à 460.647 €, les intérêts de retard et les pénalités d’assiette encourus représentant la somme de 82.993 €.

Il appartient à l’EURL X de démontrer que ce redressement est dû à des fautes commises par l’expert comptable, Z A, qui a ensuite exercé sous la dénomination SARL Absis Expertises.

Il ressort tout d’abord des pièces produites que les relations contractuelles entre l’EURL X et la SARL Absis Expertises ont pris fin le 27/07/2007.

Dès lors, au moment où les contrôles ont été effectués, à compter du 6/10/2008, la SARL Absis Expertises n’était plus l’expert comptable de l’EURL X.

Cependant le redressement visant en grande partie une période qui concernait des opérations de comptabilité réalisées par la SARL Absis Expertises, il aurait convenu que l’EURL X lui demande d’assister aux opérations de vérification, ce qu’elle ne démontre pas avoir fait. Elle prétend toutefois que c’est la SARL Absis Expertises qui a refusé son assistance tout en exposant que sa présence aurait été inopportune. Les explications qu’elle fournit à ce sujet sont donc confuses.

Néanmoins il est établi que les documents administratifs relatifs au courrier du 22/12/2008 ont été soumis à l’examen de la SARL Absis Expertises qui indique dans un courrier du 14/01/2009 puis dans un autre courrier du 17/02/2009 auquel sont annexés des commentaires, observations, remarques, explications et justifications réalisés par elle que la mise en cause de la valeur probante et de la sincérité de la comptabilité ne porte en réalité que sur l’absence, la non-production, la non-présentation ou le défaut de pièces justificatives et que les manquements constatés ne sont pas de son fait mais de celui de la société.

Elle précise qu’en effet il appartient à l’entreprise d’établir les stocks, de présenter les justificatifs des comptes, de fournir le détail des opérations de vente et elle ajoute que l’EURL X a procédé manuellement à des modifications des mentions figurant sur les factures de vente et d’achat.

La SARL Absis Expertises rapporte en outre la preuve par la production de nombreux courriers datant de 2006 et de 2007 qu’elle avait beaucoup de difficultés à se faire remettre par sa cliente les pièces nécessaires pour établir la comptabilité.

Or l’EURL X ne répond pas aux explications pourtant précises fournies par la SARL Absis Expertises, invoquant de son côté de façon générale et sans entrer dans le détail certaines fautes qui consisteraient à ne pas avoir refusé de passer des écritures contraires à la loi et/ou qui ne refléteraient pas la réalité et la sincérité de l’activité sociale.

Elle fait également état de comptabilisation de factures incorrectement établies et libellées, de déduction de charges non déductibles, de crédit de TVA imputé à tort deux fois, de TVA déduite à tort.

L’EURL X ne fait pas la démonstration de l’existence de ces fautes qui ne sauraient non plus être établies que du seul fait de l’existence du redressement fiscal.

Il convient d’ajouter que si les premières propositions de rectification émises le 22/12/2008 ont été soumises à l’examen de la SARL Absis Expertises et ont donc recueilli des commentaires de sa part, il n’est pas établi que les secondes propositions de rectification en date du 18/12/2009 l’ont été. Le cabinet comptable n’a donc pas été mis en mesure de fournir ses explications sur ces anomalies.

Par ailleurs l’EURL X n’indique pas quelle réponse elle a fourni à l’administration et quelles sont les démarches qu’elle a accomplies pour tenter de régulariser sa situation. Elle ne démontre pas non plus s’être défendue ni avoir exercé un recours devant le tribunal administratif.

De plus il ressort de plusieurs mentions faites par l’administration fiscale que les anomalies relevées ne peuvent, compte tenu de la date à laquelle les écritures ont été passées, être imputables à la SARL Absis Expertises mais au cabinet d’expertise qui lui a succédé.

Il ressort de l’ensemble de ces éléments que les fautes invoquées par l’EURL X restent vagues et imprécises, qu’il aurait convenu qu’elles soient clairement déterminées et datées ce qui aurait permis d’établir le lien de causalité entre celles ci et les droits non acquittés et dont il lui est demandé paiement et qui sont à l’origine des pénalités et majorations réclamées.

A défaut il y a lieu de considérer que la preuve de fautes commises par la SARL Absis Expertises n’est pas rapportée.

En l’absence d’éléments suffisants l’EURL X ne peut engager la responsabilité du cabinet comptable et la décision de 1re instance sera dans ces conditions confirmée.

Sur la demande reconventionnelle

Invoquant une atteinte à son image la SARL Absis Expertises sollicite l’allocation de la somme de 50.000 €.

Elle explique qu’en effet le conseil de l’EURL X a adressé à l’administration fiscale un courrier qui est un véritable réquisitoire à son encontre, ce qui lui est préjudiciable puisqu’elle est en contact permanent avec cette administration.

Cependant l’administration fiscale qui est confrontée régulièrement à ce type de litige est en mesure de faire la part des choses et la SARL Absis Expertises est mal fondée en sa demande dont elle sera déboutée.

L’ EURL X qui succombe supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme en son entier la décision entreprise,

Y ajoutant

Condamne l’EURL X à payer à la SARL Absis Expertises la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés devant la cour,

Condamne l’EURL X aux dépens d’appel.

LE GREFFIER P/LE PRESIDENT

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Textes cités dans la décision

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Cour d'appel de Toulouse, 30 mars 2015, n° 14/00376