Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5 juin 2008, n° 08B00701

  • Centre hospitalier·
  • Justice administrative·
  • Assurance maladie·
  • Juge des référés·
  • Lot·
  • Tribunaux administratifs·
  • Provision·
  • Préjudice·
  • Hôpitaux·
  • Intervention

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 5 juin 2008, n° 08B00701
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 08B00701
Décision précédente : Tribunal administratif de Toulouse, 17 février 2008, N° 074711

Texte intégral

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL

DE Bordeaux

N°08BX00701


CENTRE HOSPITALIER DE FIGEAC


Ordonnance du 5 juin 2008


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La Cour administrative d’appel de Bordeaux

Le juge des référés

Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2008 au greffe de la Cour, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER DE FIGEAC , par Me Le Prado ;

Le CENTRE HOSPITALIER DE FIGEAC demande au juge des référés :

1) d’annuler l’ordonnance n° 074711 du 18 février 2008 par laquelle le juge de référés du Tribunal administratif de Toulouse l’a condamné à verser à Mme Y une provision de 15 000 euros à valoir sur la réparation du préjudice qu’elle a subi à la suite d’une intervention chirurgicale et une somme de 1 200 euros au titre de l’article L 761-1 du code de justice administrative;

2) de rejeter la demande présentée par Mme Y devant le juge des référés du Tribunal administratif de Toulouse;

.

Il soutient que le juge des référés a insuffisamment motivé sa décision au regard des conclusions dont il était saisi ; que toutes les informations nécessaires ont été données à Mme Y ; qu’aucune faute médicale ne peut être reprochée au centre hospitalier ;

Vu l’ordonnance attaquée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 avril 2008, présenté pour Mme Y par Me X tendant au rejet de la requête et par la voie de l’appel incident tendant à la condamnation du centre hospitalier à lui verser une provision de 641 008,09 euros avec les intérêts à compter du 26 mars 2007 et au versement des intérêts des intérêts ainsi qu’une somme de 2 500 euros au titre de l’article L 761-1 du code de justice administrative, par les moyens que l’ordonnance critiquée a clairement indiqué les motifs de droit et de fait justifiant le caractère non contestable de l’obligation du centre hospitalier ; que l’hôpital a commis une faute en n’informant pas Mme Y du risque de nécrose tissulaire post opératoire et en ne lui laissant pas un délai de réflexion suffisant pour l’opération à caractère esthétique ; qu’il en est de même de l’intervention à visée contraceptive ; qu’elle a été victime de retards dans la réalisation de soins et d’une infection nosocomiale ; qu’elle a droit à la réparation intégrale des préjudices subis puisque l’ensemble des préjudices est imputable au centre hospitalier et que les manquements de l’hôpital l’ont privée d’une chance très sérieuse de se soustraire aux risques ; que compte tenu de son âge la réparation des troubles dans les conditions d’existence, des préjudices d’agrément moral et physiologiques sera effectuée par une indemnisation d’un montant de 500 000 euros ; que les souffrances endurées évaluées par l’expert à 4 sur une échelle de 7 seront indemnisées par une somme de 60 000 euros et le préjudice esthétique par une somme de 80 000 euros ; que les périodes successives d’incapacité temporaire de travail justifient une indemnité de 1 008,09 euros ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 avril 2008, présenté pour la caisse primaire d’assurance maladie du Lot tendant à la réformation de l’ordonnance en tant qu’elle a rejeté ses conclusions et à la condamnation du CENTRE HOSPITALIER DE FIGEAC à lui rembourser les prestations servies d’un montant de 17 314,39 euros assorti des frais de gestion d’un montant de 926 euros et une somme de 800 euros au titre de l’article L 761-1 du code de justice administrative par les moyens que l’hôpital n’articule aucun moyen d’appel relatif au caractère contestable de la créance; que c’est à tort que le juge de première instance a rejeté ses conclusions alors qu’elle avait revendiqué une somme de 17 314,39 euros et que rien n’interdit de demander une provision représentant l’intégralité du remboursement de ses débours ;

Vu le mémoire enregistré le 21 avril 2008, présenté par la caisse primaire d’assurance maladie de l’Aveyron, informant la Cour qu’elle n’entendait pas intervenir dans l’instance ;

Vu le mémoire enregistré le 24 avril 2008, présenté pour le CENTRE HOSPITALIER DE FIGEAC tendant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens et en outre par les moyens que le délai de 10 jours retenu par le juge des référés ne correspond pas au temps réel de réflexion laissé à Mme Y pour prendre sa décision alors qu’elle était suivie par le docteur Z depuis de nombreuses années ; que le praticien a voulu éviter des anesthésies générales successives et que la patiente connaissait les risques encourus du fait d’une intervention de chirurgie plastique réalisée l’année précédente ; que l’article 6322-2 du code de la santé publique ne précise pas la durée du délai qui doit être seulement suffisant ; que l’expert exclut tout lien de causalité entre le manquement au devoir d’information et la perte de chance de se soustraire au risque ; que le seul préjudice réparable est le retard de cicatrisation de la plaie nécrotique ; que l’origine de la complication infectieuse n’est pas établie avec certitude ; que le non respect du délai de quatre mois pour l’intervention contraceptive est un manquement purement formel puisque la patiente connaissait l’enjeu de sa démarche ; que la réparation accordée par le juge des référés est excessive ; que les conclusions de la caisse primaire d’assurance maladie du Lot doivent être rejetées de même que les conclusions incidentes de Mme Y ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 avril 2008, présenté pour Mme Y, tendant au rejet de la requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du président de la Cour en date du 11 septembre 2007 désignant M. Dudezert, président de chambre, en qualité de juge des référés ;

Vu le code de justice administrative ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 541-1 du code de justice administrative : « Le juge des référés peut, même en l’absence d’une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l’a saisi lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. Il peut, même d’office, subordonner le versement de la provision à la constitution d’une garantie » ;

Considérant que, dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d’un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d’obtenir une amélioration de son état de santé ou d’échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l’établissement et qui doit être intégralement réparé n’est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d’éviter que ce dommage soit advenu ; que la réparation qui incombe à l’hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminé en fonction de l’ampleur de la chance perdue ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction et notamment du rapport de l’expert désigné par l’ordonnance du 23 mai 2003 du président du tribunal administratif de Toulouse que le 21 février 2002, Mme Y a subi une intervention chirurgicale multiple associant dermolipectomie antérieure, coelioscopie, ligature des trompes, traitement d’une grossesse extra-utérine, biopsies du col, curetage ; qu’outre un délai de réflexion anormalement bref pour la partie de l’intervention à fin de contraception, les soins post opératoires ont été à l’origine d’une surinfection de la plaie ; que ces fautes sont à l’origine d’un préjudice incontestable résultant de la perte de chance d’éviter que le dommage advienne dont le tribunal a fait une juste appréciation en les fixant à 55% pour les préjudices liés à la dermolipectomie et à 50% pour le préjudice lié à la stérilisation ;

Considérant que pour les mêmes motifs que ceux énoncés par le juge des référés du tribunal administratif, qui a suffisamment motivé sa décision, la provision à verser à Mme Y doit être fixée à 15 000 euros y compris les intérêts et les intérêts des intérêts ;

Considérant que les dispositions ci-dessus rappelées de l’article L 541-1 du code de justice administrative ne font pas obstacle à ce qu’une partie demande à l’occasion d’un référé provision la réparation de l’intégralité du préjudice qu’elle a subi ; que c’est à tort que le tribunal a écarté les conclusions de la caisse primaire d’assurance maladie du Lot et que l’article 3 de l’ordonnance du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Toulouse doit être annulé sur ce point ;

Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu d’accorder à la caisse primaire d’assurance maladie du Lot une provision de 15 000 euros et d’ajouter une somme de 926 euros en application de l’article L 376-1 du code de la sécurité sociale ;

Considérant qu’il y a lieu, en application des dispositions de l’article L 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge du CENTRE HOSPITALIER DE FIGEAC la somme de 1 300 euros au profit de Mme Y et la somme de 800 euros au profit de la caisse primaire d’assurance maladie du Lot au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

ORDONNE

Article 1er : L’article 3 de l’ordonnance du 18 février 2008 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Toulouse est annulé en tant qu’il concerne la caisse primaire d’assurance maladie du Lot.

Article 2 : Le CENTRE HOSPITALIER DE FIGEAC versera à la caisse primaire d’assurance maladie du Lot une provision de 15 000 euros et une somme de 926 euros au titre de l’article L 376-1 du code de la sécurité sociale.

Article 3 : Les conclusions du CENTRE HOSPITALIER DE FIGEAC sont rejetées.

Article 4 : Le surplus des conclusions de Mme Y est rejeté.

Article 5 : LE CENTRE HOSPITALIER DE FIGEAC versera une somme de 1 300 euros à Mme Y et une somme de 800 euros à la caisse primaire d’assurance maladie du Lot.

Article 6 : La présente ordonnance sera notifiée au CENTRE HOSPITALIER DE FIGEAC, à Mme Y et à la caisse primaire d’assurance maladie du Lot .

Fait à Bordeaux , le 5 juin 2008

J.M. DUDEZERT

La République mande et ordonne au ministre de la santé, de la jeunesse et de la vie associative en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente ordonnance.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5 juin 2008, n° 08B00701