CAA de BORDEAUX, 2ème chambre (formation à 3), 7 octobre 2014, 13BX00637, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 2e ch. (formation à 3), 7 oct. 2014, n° 13BX00637
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 13BX00637
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Poitiers, 9 janvier 2013, N° 1001950
Identifiant Légifrance : CETATEXT000029598829

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée le 27 février 2013, présentée pour M. B… A…, demeurant ……), par Me C…;

M. A… demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 1001950 du 10 janvier 2013 du tribunal administratif de Poitiers en tant qu’il a limité à 12 837 euros le montant en principal de l’indemnité que le centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers a été condamné à lui verser en réparation des préjudices subis du fait de l’intervention pratiquée le 6 janvier 1997 dans cet établissement ;

2°) de condamner le CHU de Poitiers à lui verser une indemnité de 48 613 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 avril 2010 ;

3°) de mettre à la charge du CHU de Poitiers la somme de 1 135 euros au titre des frais d’expertise ;

4°) de mettre à la charge du CHU de Poitiers la somme de 2 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;


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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 9 septembre 2014 :

— le rapport de M. Bernard Leplat ;

 – les conclusions de M. David Katz, rapporteur public ;

 – les observations de Me Darracq, avocat de M. A…;

1. Considérant que M. B… A… a subi, le 6 janvier 1997, au centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers, une intervention chirurgicale pour l’ablation d’une hernie discale ; qu’à la suite de l’aggravation des troubles dont il demeurait atteint, il a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Poitiers d’une demande d’expertise en vue de la détermination des causes du pseudo-méningocèle lombo-sacré à l’origine de ces troubles ; que la réclamation qu’il avait adressée, en se fondant sur le rapport de l’expertise effectuée en exécution de l’ordonnance du 24 février 2009 de ce juge des référés, au directeur du CHU ayant été rejetée, il a demandé au tribunal administratif la condamnation de cet établissement à lui verser une indemnité en réparation des préjudices subis à raison de la faute commise lors de l’intervention chirurgicale réalisée le 6 janvier 1997 ; que M. A… relève appel du jugement du 10 janvier 2013 du tribunal administratif de Poitiers, en tant qu’il a condamné le CHU de Poitiers à lui verser une indemnité dont il estime le montant insuffisant en réparation de ces préjudices ;

Sur la responsabilité :

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique : « I -Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d’un défaut d’un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute ( …) » ;

3. Considérant qu’il résulte de l’instruction et notamment du rapport de l’expertise effectuée en exécution de l’ordonnance du 24 février 2009 du juge des référés du tribunal administratif de Poitiers, que la fuite de liquide céphalo-rachidien, qui a provoqué le pseudo-méningocèle lombo-sacré, dont il n’est pas contesté qu’il est lui-même à l’origine des troubles, notamment urinaires, dont est atteint M. A…, résulte d’une brèche durale survenue à l’occasion de l’ablation d’une hernie discale au niveau des vertèbres L4-L5 pratiquée le 6 janvier 1997 ; que cette intervention a été réalisée conformément aux données acquises de la science médicale auxquelles l’apparition d’une brèche durale non suturable ne révèle aucun manquement ; que c’est également conformément aux données acquises de la science médicale, que la brèche a été colmatée par la mise en place d’un « patch » avec de la colle biologique ; qu’en revanche, la pose d’un drain de Redon aspiratif, à laquelle il a été procédé, est formellement contre indiquée et est contraire aux données acquises de la science médicale ;

4. Considérant qu’il incombe au juge retenant l’existence d’une faute du service public hospitalier lors de la prise en charge d’un patient de déterminer quelles en ont été les conséquences ; que s’il n’est pas certain qu’en l’absence de faute le dommage ne serait pas advenu, le préjudice qui résulte directement de la faute commise par l’établissement et doit être intégralement réparé n’est pas le dommage corporel constaté, mais la perte d’une chance de l’éviter ; que, c’est seulement dans un tel cas que la réparation qui incombe à l’hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l’ampleur de la chance perdue ;

5. Considérant que l’expert a relevé que « même si tout avait été fait de façon conforme aux règles de l’art, il persistait un risque de constitution d’un pseudo-méningocèle qui peut être chiffré à 50% » ; que les premiers juges en ont déduit que, bien que la pose d’un drain aspiratif ait constitué une faute médicale à l’origine de la formation du pseudo-méningocèle, M. A… n’avait perdu qu’une perte de chance d’échapper à l’aggravation des troubles dont il est atteint et que la fraction des différents chefs de préjudice résultant de cette perte de chance et devant être réparés devait être fixée à 50% ;

6. Considérant qu’ainsi qu’il vient d’être dit, il résulte du rapport de l’expertise qu’il n’existe, en l’état actuel de la science médicale, aucune technique entièrement fiable d’éviter des épanchements de liquide céphalo-rachidien susceptibles de donner naissance à un pseudo-méningocèle, à la suite d’une brèche durale qui ne peut pas être suturée en raison de sa taille ou de son siège ; que toutefois, cette circonstance n’est pas de nature à faire regarder le patient comme n’ayant perdu qu’une chance d’échapper aux séquelles du pseudo-méningocèle, lorsque l’apparition de celui-ci résulte de la pose d’un drain aspiratif qui n’a pu qu’entraîner les épanchements ; qu’ainsi il est certain qu’en l’absence de faute du CHU de Poitiers, le dommage ne serait pas advenu ; que, dans ces conditions, M. A… est fondé à soutenir que les troubles dont il demandait réparation présentent un lien direct et certain avec la faute médicale dont il a été victime et que le préjudice qui doit être réparé est l’entier dommage corporel constaté ;

Sur le préjudice :

7. Considérant qu’il résulte de l’instruction et notamment du rapport de l’expertise que M. A… a présenté un déficit fonctionnel temporaire dont le taux doit être fixé à 20% ; que contrairement à ce qu’il soutient le point de départ de la période à prendre en compte au titre de ce déficit temporaire n’est pas constitué par la date de l’intervention du 6 janvier 1997 mais par celle du 9 mai 2005, à laquelle l’intéressé a présenté les premiers troubles caractérisés ; que le terme de cette période doit être fixée au 26 avril 2006, date non contestée de la consolidation de son état de santé ; que les souffrances physiques endurées doivent être évaluées à 4 sur une échelle de 1 à 7 ; que le déficit fonctionnel permanent dont il reste atteint consiste en des troubles urinaires obligeant à des auto-sondages pouvant générer des infections urinaires répétées nécessitant des traitements antibiotiques ; qu’ainsi son taux doit être évalué à 15% ; que, dans ces conditions, M. A… n’est pas fondé à soutenir qu’en évaluant à la somme de 25 674 euros le montant de l’indemnité destinée à les réparer, les premiers juges n’ont pas fait une juste appréciation de l’ensemble de ces préjudices ainsi que des troubles de toute nature subis par lui dans ses conditions d’existence ;

8. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. A… est seulement fondé à demander la réformation du jugement attaqué qu’en tant qu’il ne lui a accordé qu’une indemnité d’un montant correspondant à la moitié de la somme de 25 674 euros ; qu’il a droit que cette somme, que le CHU de Poitiers doit être condamné à lui verser, porte intérêts au taux légal à compter du 16 avril 2010, ainsi qu’il est dit à l’article 1er du jugement attaqué ;

Sur les frais d’expertise :

9. Considérant que le jugement attaqué a mis les frais et honoraires de l’expertise à la charge du CHU de Poitiers ; qu’ainsi les conclusions de M. A… relatives à la charge de ces frais étaient sans objet et doivent être rejetées ;

Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de condamner le CHU de Poitiers à verser, en application de cet article, une somme de 1 500 euros à M. A… au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;


DECIDE

Article 1er : Le montant de l’indemnité que le CHU de Poitiers est condamné à verser à M. A… est porté de la somme de 12 837 euros à celle de 25 674 euros, qui portera intérêts au taux légal à compter du 16 avril 2010.

Article 2 : Le jugement du 10 janvier 2013 du tribunal administratif de Poitiers est réformé en ce qu’il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le CHU de Poitiers versera la somme de 1 500 euros à M. A… en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A… est rejeté.

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No 13BX00637

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