CAA de BORDEAUX, 3ème chambre - formation à 3, 3 janvier 2017, 16BX00955, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Bordeaux, 3e ch. - formation à 3, 3 janv. 2017, n° 16BX00955
Juridiction : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Numéro : 16BX00955
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Sur renvoi de : Conseil d'État, 16 février 2016
Identifiant Légifrance : CETATEXT000033828227

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Smurfit Kappa Papier recyclé France a demandé au tribunal administratif de Limoges :

 – par une requête enregistrée sous le n° 0901687, d’annuler la décision du 6 juillet 2009 par laquelle le ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer a rejeté le recours administratif qu’elle avait présenté contre son arrêté du 31 octobre 2008, en tant qu’il a ramené le quota d’émission de gaz à effet de serre qui lui avait été alloué pour son installation de production de papier située à Saillat-sur-Vienne à 35 837 tonnes de CO2 par an, avec effet au 1er janvier 2010 ;

 – par une requête enregistrée sous le n° 1000550, d’annuler la décision de ce même ministre du 1er février 2010 rejetant le recours administratif qu’elle a formé à l’encontre de son arrêté du 13 juillet 2009, en tant qu’il a ramené le quota d’émission de gaz à effet de serre qui lui est alloué pour son installation de production de papier située à Saillat-sur-Vienne à 35 837 tonnes de CO2 par an à compter du 1er janvier 2010.

Par deux jugements distincts n° 1000550 et n° 0901687 du 9 février 2012, le tribunal administratif de Limoges a annulé ces deux décisions du ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer des 6 juillet 2009 et 1er février 2010.

Par un arrêt n° 12BX00915-12BX00916 du 17 juin 2014, la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté les recours du ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement tendant à l’annulation de ces jugements et au rejet des demandes présentées par la société Smurfit Kappa Papier recyclé France devant le tribunal administratif de Limoges.

Par une décision du 17 février 2016, rendue sous le n° 383771, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, a annulé l’arrêt de la cour et lui a renvoyé ces deux affaires.

Procédure devant la cour :

I) Par un recours enregistré le 10 avril 2012, le ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1000550 du 9 février 2012 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé sa décision du 1er février 2010 rejetant le recours administratif formé par la société Smurfit Kappa papier recyclé France à l’encontre de son arrêté du 13 juillet 2009, en tant qu’il a ramené le quota d’émission de gaz à effet de serre qui lui avait été alloué pour son installation de production de papier située à Saillat-sur-Vienne à 35 837 tonnes de CO2 par an à compter du 1er janvier 2010 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Smurfit Kappa devant le tribunal administratif de Limoges.

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II) Par un second recours enregistré le 10 avril 2012, le ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0901687 du 9 février 2012 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé sa décision du 6 juillet 2009 rejetant le recours administratif formé par la société Smurfit Kappa papier recyclé France à l’encontre de son arrêté du 31 octobre 2008, en tant qu’il a ramené le quota d’émission de gaz à effet de serre qui lui avait été alloué pour son installation de production de papier située à Saillat-sur-Vienne à 35 837 tonnes de CO2 par an, avec effet au 1er janvier 2010 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Smurfit Kappa devant le tribunal administratif de Limoges.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 ;

 – le code de l’environnement ;

 – la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979

 – la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Sabrina Ladoire,

 – et les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 31 mai 2007, pris sur le fondement des articles L. 229-5 à L. 229-19 et R. 229-5 à R. 229-33 du code de l’environnement, le ministre de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables a fixé la liste des exploitants auxquels ont été affectés des quotas d’émission de gaz à effet de serre pour la période 2008/2012, les installations au titre desquelles ces quotas ont été affectés et les montants desdits quotas. A ce titre, la société Smurfit Kappa papier recyclé France s’est vu attribuer, pour l’installation de production de papier qu’elle exploite à Saillat-sur-Vienne (Haute-Vienne), un quota de 367 210 tonnes de CO2 pour l’ensemble de la période, soit 73 442 tonnes par an. Par un arrêté du 31 octobre 2008, le ministre chargé de l’écologie a toutefois réduit les quotas alloués à la société Smurfit Kappa à 179 185 tonnes de CO2 au titre de la période 2008-2012, soit 35 837 tonnes annuelles. Le 18 mars 2009, la société a présenté, conformément à l’article R. 229-27 du code de l’environnement, un recours administratif préalable contre cet arrêté du 31 octobre 2008 qui lui avait été notifié le 22 janvier 2009. Après avis, le 5 juin 2009, de la commission de recours sur les décisions relatives aux quotas d’émission de gaz à effet de serre, le ministre a, le 6 juillet 2009, rejeté le recours de la société et maintenu la réduction du nombre de quotas alloués à la société par l’arrêté du 31 octobre 2008, avec effet à compter du 1er janvier 2010. Le ministre a ensuite, par un arrêté du 13 juillet 2009, modifié l’arrêté du 31 mai 2007 susmentionné en fixant à 35 837 tonnes de CO2, le quota affecté à la société Smurfit Kappa pour chacune des années 2010 à 2012. Cet arrêté a été confirmé, sur le recours administratif de la société et après l’avis de la commission de recours du 8 janvier 2010, par décision ministérielle du 1er février 2010. Par deux jugements du 9 février 2012, le tribunal administratif de Limoges a annulé les décisions des 6 juillet 2009 et 1er février 2010 prises sur recours administratif préalable de la société Smurfit Kappa, lesquelles s’étaient respectivement substituées aux arrêtés des 31 octobre 2008 et 13 juillet 2009, en se fondant sur le motif tiré de ce que l’Etat ne pouvait légalement, plus de quatre mois après son édiction, partiellement abroger la décision, créatrice de droits, du 31 mai 2007 fixant les montants des quotas d’émission de gaz à effet de serre alloués à la société Smurfit Kappa. Le ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement a interjeté appel de ces jugements, lesquels ont été confirmés par un arrêt de la cour n° 12BX00915-12BX00916 du 17 juin 2014. Par une décision du 17 février 2016, rendue sous le n° 383771, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, a annulé l’arrêt de la cour et lui a renvoyé ces deux affaires.

Sur la légalité des décisions :

2. Le tribunal administratif de Limoges a annulé les décisions en litige au motif qu’elles avaient eu pour effet d’abroger, plus de quatre mois après son édiction, l’arrêté du 31 mai 2007 qui constituait selon lui une décision créatrice de droits.

3. Sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l’administration ne peut retirer ou abroger une décision expresse individuelle créatrice de droits que dans le délai de quatre mois suivant l’intervention de cette décision et si elle est illégale.

4. D’une part, aux termes de l’article L. 229-5 du code de l’environnement, dans sa rédaction applicable à la date des décisions contestées : « Les dispositions de la présente section s’appliquent aux installations classées rejetant un gaz à effet de serre dans l’atmosphère lorsqu’elles exercent une des activités dont la liste est fixée par décret en Conseil d’Etat (…) ». Aux termes de l’article L. 229-7 du même code : « Un quota d’émission de gaz à effet de serre au sens de la présente section est une unité de compte représentative de l’émission de l’équivalent d’une tonne de dioxyde de carbone. / Pour chaque installation bénéficiant de l’autorisation d’émettre des gaz à effet de serre, l’Etat affecte à l’exploitant, pour une période déterminée, des quotas d’émission et lui délivre chaque année, au cours de cette période, une part des quotas qui lui ont été ainsi affectés. / La quantité de gaz à effet de serre émise par cette installation au cours d’une année civile est calculée ou mesurée et exprimée en tonnes de dioxyde de carbone. / A l’issue de chacune des années civiles de la période d’affectation, l’exploitant restitue à l’Etat sous peine des sanctions prévues à l’article L. 229-18 un nombre de quotas égal au total des émissions de gaz à effet de serre de ses installations ». En vertu de l’article L. 229-8 de ce code : « I. – Les quotas d’émission de gaz à effet de serre sont affectés par l’Etat (…) par périodes de cinq ans, dans le cadre d’un plan national établi pour chaque période. (…) / IV. – Le plan répartit les quotas d’émission entre les différentes installations mentionnées à l’article L. 229-5. Cette répartition tient compte des possibilités techniques et économiques de réduction des émissions des activités bénéficiaires, des prévisions d’évolution de la production de ces activités, des mesures prises en vue de réduire les émissions de gaz à effet de serre avant l’établissement du système d’échange de quotas ainsi, le cas échéant, que de la concurrence d’activités situées dans des pays extérieurs à la Communauté européenne (…) ». L’article L. 229-11 du même code prévoit que : « L’autorité administrative notifie aux exploitants des installations autorisées à émettre des gaz à effet de serre le montant total des quotas d’émission affectés au titre de chaque période couverte par un plan et la quantité délivrée chaque année. / Un décret en Conseil d’Etat fixe (…) les règles de délivrance annuelle des quotas, les règles applicables en cas de changement d’exploitant ou de cessation ou de transfert d’activité ainsi que les conditions dans lesquelles les décisions d’affectation ou de délivrance et le plan national d’affectation des quotas prévu à l’article L. 229-8 peuvent être contestés ». Aux termes de l’article L. 229-13 de ce code : « Les quotas sont valables pendant la durée du plan au titre duquel ils sont affectés tant qu’ils ne sont pas utilisés (…) ». Enfin, selon l’article R. 229-9 du code de l’environnement, dans sa version applicable au litige : « Dès la publication du décret approuvant le plan national d’affectation des quotas, le ministre chargé de l’environnement fixe par arrêté la liste des exploitants auxquels sont affectés des quotas d’émission pour la période couverte par le plan. / L’arrêté précise, pour chaque installation, le montant total des quotas affectés ainsi que les quantités de quotas qui seront délivrées chaque année ».

5. D’autre part, les articles R. 229-11 à R. 229-19 du code de l’environnement, dans leur rédaction en vigueur à la date des décisions litigieuses, fixent les conditions dans lesquelles les décisions d’affectation pluriannuelles de quotas peuvent être modifiées ou abrogées pour la durée de la période de référence restant à courir, notamment dans les cas de création d’une nouvelle installation classée entrant dans le champ du dispositif, de changement d’exploitant, de modification entraînant un changement notable de l’installation, de mise à l’arrêt et de variation d’activité exceptionnelle et imprévisible d’une installation. L’article R. 229-15 prévoit notamment qu’en cas d’arrêt de l’installation, il n’est plus délivré de quotas à l’exploitant au titre de cette installation, le solde des quotas affectés non encore délivrés venant abonder la réserve constituée en application de l’article L. 229-18.

6. Il résulte des dispositions citées ci-dessus que la décision par laquelle le ministre chargé de l’écologie retient un exploitant sur la liste des exploitants auxquels sont affectés des quotas d’émission de gaz à effet de serre et précise, pour chacune de ses installations, d’une part, le montant des quotas qui lui sont affectés pour l’ensemble de la période couverte par le plan national d’affectation des quotas, et d’autre part, les quantités de quotas qui lui seront délivrées chaque année, se borne à fixer un cadre prévisionnel qui a vocation à déterminer le montant annuel des quotas dont disposera l’exploitant et n’a pas le caractère d’une décision créatrice de droits au profit de ce dernier, au sens des principes rappelés au point 2, qui ne pourrait être abrogée au-delà du délai de quatre mois suivant son intervention. En revanche, les arrêtés annuels délivrant les quotas à l’exploitant constituent des décisions créatrices de droits. Les principes rappelés au point 3, non plus que les dispositions rappelées ci-dessus ne s’opposent à ce que le ministre tienne compte, pour modifier la décision affectant les quotas pour l’ensemble de la période du plan, et à l’occasion des arrêtés annuels de délivrance des quotas, d’une erreur commise par l’exploitant dans les éléments factuels de la déclaration préalable ayant servi de base au calcul des quotas alloués pour la durée du plan et portant sur ses émissions lors de l’année de référence.

7. Il ressort des pièces du dossier que par arrêté du 31 mai 2007, le ministre chargé de l’écologie a fixé la liste des exploitants auxquels étaient affectés des quotas d’émission de gaz à effet de serre pour la période 2008-2012, les installations au titre desquelles ces quotas sont affectés et les montants desdits quotas. A ce titre, l’arrêté affectait à la société Smurfit Kappa Papier recyclé France, pour l’installation de production de papier exploitée à Saillat-sur-Vienne, un quota de 367 210 tonnes de CO2 pour l’ensemble de la période 2008-2012, soit 73 442 tonnes par an, sur le fondement des déclarations par l’exploitant des émissions de gaz à effet de serre de ses installations pour l’année 2002. Cette déclaration s’est néanmoins révélée erronée, l’exploitant ayant pris en compte, dans le montant des émissions déclarées, les émissions résultant d’une unité de cogénération dont l’exploitation avait été confiée à une autre société déjà bénéficiaire de quotas à ce titre. Par arrêté du 31 octobre 2008, le ministre chargé de l’écologie a ainsi, pour tenir compte de cette erreur, réduit les quotas affectés à la société Smurfit Kappa papier pour les porter à 35 837 tonnes annuelles, puis il a, par un arrêté du 13 juillet 2009 abrogeant les deux arrêtés précédents, révisé l’affectation des quotas en allouant ce nouveau montant annuel pour les années 2010 à 2012. Il résulte de ce qui a été dit au point 6 que le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie est fondé à soutenir que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en estimant que l’arrêté du 31 mai 2007 avait le caractère d’une décision individuelle créatrice de droits et en en déduisant qu’il ne pouvait légalement, par les décisions litigieuses, modifier cet arrêté pour tirer les conséquences de l’erreur commise par l’exploitant dans sa déclaration d’émission initiale.

8. Il appartient à la cour, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens invoqués par la société Smurfit Kappa papier recyclé France tant en première instance qu’en appel, à l’appui de ses conclusions tendant à l’annulation des décisions des 6 juillet 2009 et 1er février 2010.

9. En premier lieu, la société soutient que le chef du service « climat et efficacité énergétique » ne disposait pas d’une délégation de signature régulièrement publiée lui permettant de signer les décisions attaquées.

10. M. B… A…, chef du service « climat et efficacité énergétique » a reçu, par un arrêté du 17 juillet 2008 régulièrement publié au Journal officiel du 19 juillet 2008, délégation à l’effet de « signer, au nom du ministre d’Etat, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, tous actes, arrêtés et décisions, l’exclusion des décrets, dans la limite des attributions du service climat et efficacité énergétique ». Par suite, le moyen tiré de l’incompétence du signataire de ces décisions manque en fait.

11. En deuxième lieu, la société Smurfit Kappa papier recyclé France fait valoir que les décisions attaquées ont modifié l’arrêté du 31 mai 2007 qui lui avait attribué des quotas d’émission de gaz à effet de serre, en diminuant les quotas qui lui avaient été alloués à compter du 1er janvier 2010, et qu’elles auraient donc dû être motivées en application des dispositions de la loi du 11 juillet 1979.

12. Contrairement à ce que soutient la requérante, aucune disposition ni aucun principe n’exigeait la motivation d’une décision rejetant un recours administratif dont la présentation était obligatoire préalablement à tout recours contentieux, avant l’entrée en vigueur de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011, laquelle a modifié l’article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs. Par suite, les décisions en litige ayant été édictées les 6 juillet 2009 et 1er février 2010 et n’entrant pas dans le champ d’application des articles 1er et 2 de la loi du 11 juillet 1979 alors applicables, le moyen tiré de leur insuffisance de motivation est inopérant.

13. En troisième lieu, la société excipe, à l’appui de ses conclusions tendant à l’annulation de la décision du 6 juillet 2009, de l’illégalité de l’arrêté du 31 octobre 2008 en soutenant qu’il a été édicté sans qu’elle ait été mise à même de présenter ses observations écrites ou orales.

14. Cependant, les dispositions de l’article R. 229-27 du code de l’environnement ayant institué un recours administratif préalable obligatoire à la saisine du juge, la décision prise à la suite de ce recours se substitue nécessairement à la décision initiale, et elle est dès lors seule susceptible d’être déférée au juge de la légalité. Dès lors, la décision du 6 juillet 2009 prise à la suite du recours administratif préalable obligatoire présenté par la société Smurfit Kappa le 18 mars 2009 à l’encontre de l’arrêté du 31 octobre 2008 s’est nécessairement substituée à cet arrêté. La société Smurfit Kappa ne saurait, par suite, invoquer utilement le moyen tiré de ce que cet arrêté du 31 octobre 2008 serait entaché d’un vice de procédure, dans la mesure où ce vice est en tout état de cause propre à la décision initiale et a nécessairement disparu avec elle.

15. En quatrième lieu, la société Smurfit Kappa soutient que le plan national d’affectation de quotas (PNAQ) approuvé par le décret du 15 mai 2007 n’était pas entaché d’une erreur de fait qui aurait pu justifier que soit modifié le nombre de quotas qui lui avait été octroyé par l’arrêté du 31 mai 2007 et qu’en tout état de cause, une telle erreur ne permettait pas de fonder légalement la modification du nombre de quotas alloués.

16. D’une part, si cette société se prévaut du fait que les déclarations qu’elle a adressées à la DRIRE du Limousin le 20 janvier 2004 indiquaient qu’elle avait effectivement émis en 2002 environ 70 706 tonnes de CO2 au titre de ses installations de chaufferie, il résulte de l’instruction que les émissions déclarées par cette société comprenaient les émissions produites par une installation de cogénération exploitée par la société Sethelec et qu’ainsi, la vapeur produite par cette société pour la société requérante faisait à tort l’objet d’une double allocation de quotas. Par suite, les décisions en litige ne sont pas entachées d’une erreur de fait. D’autre part, et en vertu du principe énoncé au point 6 du présent arrêt, le ministre peut tenir compte, pour modifier la décision affectant les quotas pour l’ensemble de la période du plan, et à l’occasion des arrêtés annuels de délivrance des quotas, d’une erreur commise par l’exploitant lors de la rédaction de sa déclaration préalable ayant servi de base au calcul des quotas. En l’espèce, et ainsi qu’il vient d’être dit, il résulte de l’instruction que la déclaration effectuée par la société Smurfit Kappa mentionnait à tort les émissions engendrées par l’installation de cogénération exploitée par la société Sethelec, ce qui aboutissait à accorder une double allocation de quotas pour une même installation. Par suite, en réduisant, par les décisions en litige, le quota d’émissions de gaz à effet de serre octroyé à cette société pour les années 2010 à 2012, le ministre n’a pas fait une inexacte application des dispositions précitées aux points 4 et 5 du présent arrêt.

17. En cinquième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 6 que le délai de quatre mois n’était pas opposable à l’administration pour abroger l’arrêté du 31 mai 2007. Par suite, la société ne saurait utilement se prévaloir du fait que ce délai ayant expiré, l’Etat ne pouvait réduire les quotas qui lui avaient été alloués dès lors que cette restriction du nombre de quotas n’était justifiée ni par un motif d’ordre public, ni par une fraude commise par la société dans sa déclaration.

18. En dernier lieu, la société Smurfit Kappa ne saurait se prévaloir utilement du fait qu’elle aurait besoin des quotas alloués initialement pour garantir sa compétitivité sur le marché, cette circonstance étant sans incidence sur la légalité des décisions en litige.

19. Il résulte de ce qui précède que la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie est fondée à soutenir que c’est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Limoges a annulé ses décisions du 6 juillet 2009 et du 1er février 2010.

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. Ces dispositions font obstacle à ce qu’il soit fait droit aux conclusions présentées par la société Smurfit Kappa papier recyclé France sur leur fondement.

DECIDE :

Article 1er : Les jugements n° 1000550 et n° 0901687 du 9 février 2012 du tribunal administratif de Limoges sont annulés.

Article 2 : Les demandes présentées par la société Smurfit Kappa papier recyclé France devant le tribunal administratif de Limoges sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par la société Smurfit Kappa papier recyclé France au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 16BX00955

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