CAA de LYON, 4ème chambre - formation à 3, 31 janvier 2019, 16LY03829, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Lyon, 4e ch. - formation à 3, 31 janv. 2019, n° 16LY03829
Juridiction : Cour administrative d'appel de Lyon
Numéro : 16LY03829
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Lyon, 7 septembre 2016, N° 1202082 et 1504688
Identifiant Légifrance : CETATEXT000038087658

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :


Procédure contentieuse antérieure

— Sous le n° 1202082, la société Ribière Entreprise Générale a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la commune de Mions et les sociétés ACE BTP, Plan B Architectes Urbanistes, CetE Ingénierie, AEI, Bethac, Cathac et Atelier d’architecture Benoît Crépet à lui verser les sommes de 279 021,99 euros hors taxe (HT) en réparation du préjudice subi en raison du retard du chantier de construction du nouveau groupe scolaire Pasteur, 160 473,86 euros toutes taxes comprises (TTC) au titre des travaux supplémentaires correspondant à la mise en oeuvre de bandes noyées et à l’exécution de quantités supplémentaires de réseaux sous dallage, 23 920 euros TTC au titre des reprises d’études nécessaires à l’exécution des bandes noyées, augmentées des intérêts moratoires et de la capitalisation de ces intérêts.

— Sous le n° 1504688, la société Ribière Entreprise Générale a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la commune à lui verser la somme de 775 166,68 euros au titre du solde du marché portant sur la construction du nouveau groupe scolaire Pasteur, augmentée des intérêts moratoires et de la capitalisation de ces intérêts.

Par un jugement nos 1202082 et 1504688 du 8 septembre 2016, le tribunal administratif de Lyon, après avoir joint ces deux demandes, a condamné la commune de Mions à verser à la société Ribière Entreprise Générale la somme de 64 080,57 euros, assortie des intérêts moratoires à compter du 30 janvier 2015 et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 30 janvier 2016, et a rejeté le surplus des conclusions de la société.


Procédure devant la cour

I°) Par une requête, enregistrée le 18 novembre 2016 sous le n° 16LY03829, la commune de Mions, représentée par la SELARL cabinet d’avocats Philippe Petit et associés, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Lyon du 8 septembre 2016 ;

2°) à titre principal, de condamner la société Ribière Entreprise Générale à lui verser la somme de 382 592,37 euros au titre du décompte général rectifié, à titre subsidiaire, de condamner cette société à lui verser la somme de 282 297,14 euros, et à titre infiniment subsidiaire de la condamner au versement d’une somme de 173 672,22 euros ;

3°) dans tous les cas, d’assortir la condamnation prononcée des intérêts moratoires à compter du 30 janvier 2015 et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 30 janvier 2016 ;

4°) de mettre à la charge de la société Ribière Entreprise Générale le versement d’une somme de 3 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – c’est à tort que le tribunal administratif a considéré que les déductions opérées dans le décompte général, pour un montant de 99 180,89 euros HT, n’étaient pas toutes justifiées par des modifications du projet initial ;

 – contrairement à ce qu’ont estimé les premiers juges, elle n’a pas renoncé à appliquer des pénalités de retard du seul fait de repousser la date fixée de l’achèvement des ouvrages dans la mesure où le délai global d’achèvement des travaux n’a pas été respecté ;

 – le tribunal administratif a commis une erreur matérielle en considérant que les pénalités de retard appliquées s’élevaient à 185 640,30 euros alors qu’elles s’élèvent à la somme de 285 935,53 euros ;

 – en tout état de cause, la prorogation du délai d’exécution ne vaudrait renonciation que pour les pénalités dues au titre des retards antérieurs à la date d’achèvement des travaux contractuellement prévue ; le délai prorogé n’a pas été respecté et elle est bien fondée à appliquer des pénalités de retard a minima à hauteur de 77 015,38 euros ;

 – la société Ribière Entreprise Générale a été convoquée aux réunions nos 111, 114 et 117 mais ne s’y est pas présentée ; des pénalités pour absence aux réunions de chantier s’appliquent à hauteur de 250 euros ;

 – c’est à tort que le tribunal administratif a déchargé la société Ribière Entreprise Générale du paiement des pénalités pour retard dans la remise du dossier des ouvrages exécutés alors qu’elle a remis ce document avec 52 jours de retard ;

 – il est constant que les réserves à la réception n’ont pas été levées dans le délai imparti qui expirait le 4 septembre 2016 ; elle pouvait donc à bon droit appliquer des pénalités pour retard dans la levée des réserves à hauteur de 38 922,326 euros.

Par un mémoire, enregistré le 3 janvier 2019, la société Ribière Entreprise Générale, représentée par le cabinet B… Coiraton-Demercière, conclut au rejet de la requête et demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Lyon du 8 septembre 2016 ;

2°) de condamner la commune de Mions et les sociétés ACE BTP, Plan B Architectes Urbanistes, CetE Ingénierie, AEI, Bethac, Cathac, Atelier d’Architecture Benoît Crépet SARL à lui verser la somme de 5 849, 81 euros HT assorties des intérêts moratoires à compter d’octobre 2011 outre anatocisme ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Mions une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

 – c’est à bon droit que le tribunal administratif a jugé que la commune ne pouvait pas modifier le prix global et forfaitaire du marché et procéder à des déductions en tenant compte des quantités réellement utilisées ; en revanche c’est à tort que le tribunal a considéré que certains montants concernant les postes relatifs à la suppression d’un auvent, d’un édifice technique, d’une cunette et la simplification d’une échiffre, pouvaient être déduits du prix du marché ;

 – c’est à bon droit que le tribunal a jugé qu’il n’y avait pas lieu à application de pénalités de retard ; toutefois, il y a lieu pour la cour de rectifier le montant du cumul des acomptes retenu par le tribunal en y réintégrant le montant des pénalités de retard retenues à tort ;

 – elle avait terminé ses ouvrages le 30 juillet 2012, la réception tardive des travaux est la conséquence de fautes commises par la commune ; si la cour devait retenir le bien-fondé de l’application de pénalités de retard, il y a lieu d’en modifier le montant pour le fixer à 73 190, 30 euros ;

 – s’agissant des pénalités pour absence aux réunions de chantier, il ressort des comptes-rendus produits par la commune, qu’elle était présente à la réunion de chantier n° 113 et excusée aux réunions 110 et 116 ;

 – la commune n’apporte aucun élément de nature à justifier l’application de pénalités pour retard dans la remise du DOE ;

 – la commune n’établit pas que les réserves n’auraient pas été levées.

II°) Par une requête, enregistrée le 20 novembre 2016 sous le n° 16LY03848, la société Ribière Entreprise Générale, représentée par la SELARL YvanB…, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Lyon du 8 septembre 2016 ;

2°) de condamner la commune de Mions et les sociétés ACE BTP, Plan B Architectes Urbanistes, CetE Ingénierie, AEI, Bethac, Cathac, Atelier d’Architecture Benoît Crépet SARL à lui verser les sommes de 112 962,07 euros toutes taxes comprises (TTC) au titre des travaux supplémentaires concernant les bandes noyées, 48 048,49 euros TTC au titre des travaux supplémentaires concernant les réseaux sous dallage, 24 000 euros TTC au titre des travaux supplémentaires concernant les études structurelles complémentaires, 244 058,39 euros hors taxe au titre du préjudice pour allongement de délai entre le 8 août 2011 et le 21 novembre 2011, assorties des intérêts moratoires à compter d’octobre 2011 outre anatocisme ;

3°) de condamner la commune de Mions à lui verser la somme de 198 224,97 euros HT au titre du préjudice pour allongement de délai entre le 1er janvier 2013 et le 1er septembre 2014, assortie des intérêts moratoires à compter du 30 janvier 2015, outre anatocisme ;

4°) de mettre à la charge de chacun des défendeurs une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative au titre de la première instance, et une somme de 3 000 euros sur le même fondement au titre de l’appel.

Elle soutient que :

 – elle est bien fondée à demander l’indemnisation de l’ajournement d’un mois entre le 20 octobre et le 21 novembre 2011 en application de l’article 49 du CCAG Travaux 2009 ;

 – au surplus, sur cette même période, le maître d’ouvrage a commis une faute de nature contractuelle et la maîtrise d’oeuvre une faute de nature quasi-délictuelle du fait du retard dans la diffusion des plans d’exécution ;

 – cette situation l’a empêchée de démarrer les travaux ; or durant cette période, les moyens de l’entreprise étaient en place ; elle a ainsi subi un préjudice à hauteur de 244 058,39 euros HT ;

 – par des avenants successifs, le maître d’ouvrage a décalé la date de fin de travaux tous corps d’état du 27 juillet 2012 au 31 décembre 2013 soit un allongement du délai global de plus de 17 mois ; par ailleurs, les lots nos 8 et 10 ont été attribués tardivement, après la date contractuelle d’achèvement des travaux ; durant cette période, elle a dû laisser ses installations en place jusqu’au 1er septembre 2014 ; la commune est responsable des retards de chantier postérieurement au 21 novembre 2011 et doit être condamnée à lui verser la somme de 198 224,97 euros HT ;

 – la mise en place de bandes noyées, non prévue dans les plans d’exécution de la maîtrise d’oeuvre, était indispensable pour l’exécution, selon les règles de l’art, des ouvrages prévus par le marché ; la commune doit être condamnée à payer non seulement les travaux relatifs aux bandes noyées mais également le montant du surcoût de travail du bureau d’études Cetis, son sous-traitant ;

 – le dossier de consultation ne comprenait pas de métrage concernant les réseaux sous dallage ; il ne peut dès lors lui être reproché de ne pas avoir contrôlé le métrage annoncé avant la remise de son offre ; en outre, le maître d’oeuvre n’a pas organisé de réunion de synthèse ;

 – c’est à tort que le tribunal a écarté sa demande d’indemnisation des études structurelles complémentaires ;

 – c’est également à tort que le tribunal a rejeté les postes relatifs à la suppression d’un auvent, d’un édifice technique, d’une cunette et la simplification d’une échiffre ;

 – le tribunal administratif a commis une erreur matérielle dans le calcul du solde du marché ; il est demandé à la cour de rectifier cette erreur et de confirmer la décharge des pénalités de retard à l’exception de 2 000 euros pour absence à des réunions de chantier ;

 – le taux des intérêts moratoires est le taux BCE augmenté de 7 points ;

 – la commune étant la partie perdante en première instance, c’est à tort que le tribunal administratif n’a mis à sa charge aucune somme au titre des frais liés au litige.

Par un mémoire, enregistré le 15 février 2017, les sociétés Atelier d’architecture Benoît Crépet, Plan B Architectes et Urbanistes et CetE Ingénierie, représentées par Me Prudon, avocat, conclut au rejet de la requête, ainsi qu’aux conclusions d’appel en garantie de la commune de Mions et à ce qu’une somme de 4 000 euros soit mise à la charge solidaire de la commune de Mions et de la société Ribière Entreprise Générale sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles font valoir que :

 – l’ordre de service de démarrage des travaux a été signé le 4 août 2011 et pendant plus d’un mois la société Ribière Entreprise Générale n’a mobilisé aucun moyen matériel ; elle n’a mobilisé pour l’exécution du chantier que des moyens insuffisants, ce qui est à l’origine des retards dans l’exécution du chantier ; elle a d’ailleurs fait des économies sur ce chantier, en ne mobilisant pas les moyens annoncés ;

 – le retard de diffusion des plans est imputable à cette société qui a fait des demandes de variantes et n’a pas respecté les plans établis par le BET structures ;

 – c’est la société qui a pris l’initiative d’arrêter ses travaux le 24 octobre 2011 et l’OS n° 3 n’a été établi que pour la contraindre à reprendre l’exécution du chantier ;

 – les travaux ont été réceptionnés le 4 août 2014 malgré la proposition de refus du groupement de maîtrise d’oeuvre ;

 – les retards et surcoûts dont elle demande réparation sont liés à la proposition de la société de réaliser des solutions techniques en variante ; la société confond en outre entre les plans d’exécution et les plans d’atelier et de chantier qui sont contractuellement à la charge de l’entreprise ;

 – par ailleurs en tenant compte des intempéries, le retard de chantier n’est que de 6 semaines ;

 – s’agissant du réseau sous dallage, les travaux réalisés n’ont pas le caractère de travaux supplémentaires et ne résultent pas d’une erreur de conception de la maîtrise d’oeuvre ; il appartenait à la société Ribière d’estimer correctement les quantités lors de l’appel d’offres ;

 – la mission EXE a été retirée du marché de maîtrise d’oeuvre, elle ne peut dès lors être redevable d’une somme quelconque au titre des études structurelles complémentaires réalisées par la société Ribière ;

 – le quantum de la réclamation n’est pas justifié ;

 – les conclusions d’appel en garantie de la commune de Mions sont irrecevables et infondées.

Par un mémoire, enregistré le 10 avril 2017, la société AEI, représentée par Me Michel, conclut au rejet de la requête et de toute demande qui pourrait être dirigée contre elle, à la condamnation de la commune de Mions à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre et à ce qu’une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Ribière Entreprise Générale sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

 – le groupement de maîtrise d’oeuvre est un groupement conjoint et non solidaire ; elle ne pourrait répondre que de ses seules carences, qui ne sont ni démontrées ni même alléguées ;

 – si sa responsabilité devait être retenue, la commune de Mions devra être condamnée à la garantir entièrement.

Par un mémoire, enregistré le 25 septembre 2018, la commune de Mions, représentée par la SELARL cabinet d’avocats Philippe Petit et associés, conclut au rejet de la requête et demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Lyon du 8 septembre 2016 ;

2°) à titre principal, de condamner la société Ribière Entreprise Générale à lui verser la somme de 382 592,37 euros au titre du décompte général rectifié, à titre subsidiaire, de condamner cette société à lui verser la somme de 282 297,14 euros, et à titre infiniment subsidiaire de la condamner au versement d’une somme de 173 672,22 euros ;

3°) dans tous les cas, d’assortir la condamnation prononcée des intérêts moratoires à compter du 30 janvier 2015 et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 30 janvier 2016 ;

4°) de mettre à la charge de la société Ribière Entreprise Générale le versement d’une somme de 3 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

 – les requêtes nos 16LY03829 et 16LY03848 doivent être jointes ;

 – la demande de première instance de la société Ribière Entreprise Générale, enregistrée sous le n° 1202082, est irrecevable au regard des stipulations de l’article 50.1.1 du CCAG-Travaux ;

 – la société Ribière Entreprise Générale ne saurait se prévaloir des stipulations de l’article 49.1.1 du CCAG-Travaux ; elle n’a pas formulé de réserves conformément aux stipulations de l’article 3.8.2 de ce CCAG, n’a pas fait établir le constat contradictoire prévu par les stipulations de l’article 12 de ce même cahier et ne justifie pas des frais qu’elle aurait exposés spécifiquement pour la garde du chantier ;

 – elle ne saurait se prévaloir d’une faute contractuelle du maître d’ouvrage en l’absence de preuve d’une telle faute qui lui serait imputable et à l’origine du préjudice subi ; ainsi, s’agissant de la période du 7 juillet au 21 novembre 2011, le retard dans l’exécution du chantier est dû à une défaillance de la seule maîtrise d’oeuvre ; s’agissant de la période postérieure au 21 novembre 2011, elle ne saurait être tenue pour responsable de l’inexécution de leurs prestations par les titulaires des lots 8 et 10 ; elle avait confié son pouvoir de direction et de contrôle du marché au groupement de maîtrise d’oeuvre et il ne peut lui être imputée aucune négligence dans l’exercice de ce pouvoir ;

 – la société appelante est la seule responsable de l’allongement considérable de la durée des travaux ;

 – les bandes noyées que cette entreprise a réalisées ne constituent pas des travaux supplémentaires ; elles étaient prévues dans les pièces contractuelles et ne présentent pas un caractère indispensable ; en tout état de cause, la société Ribière aurait dû anticiper la nécessité de ces bandes noyées et en informer le maître d’ouvrage au moment de la remise de son offre ;

 – s’agissant des réseaux sous dalle, il appartenait à la société Ribière de mesurer elle-même l’étendue des obligations auxquelles elle s’engageait à prix forfaitaire ;

 – la société Ribière n’établit pas que son sous-traitant, la société Cetis, aurait réalisé des études structurelles présentant le caractère de travaux supplémentaires ;

 – les diminutions appliquées sur le décompte général sont toutes justifiées par des modifications du projet initial qui ont conduit à réduire les prix initialement prévus au marché ;

 – les pénalités appliquées sur le décompte général sont elles aussi toutes justifiées ; à titre subsidiaire, il y a lieu pour la cour, à tout le moins, de rectifier l’erreur matérielle commise par le tribunal administratif s’agissant du montant de la décharge des pénalités de retard ; à titre infiniment subsidiaire, des pénalités de retard restent dues au titre des travaux postérieurs à la date d’achèvement des travaux contractuellement prévue ;

 – si la société Ribière prétend ne pas être la partie perdante en première instance, le tribunal administratif n’a fait droit que partiellement à ses demandes ; elle n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions présentées au titre des frais d’instance non compris dans les dépens.

La procédure a été communiquée aux sociétés Bethac et Cathac et ACE BTP qui n’ont pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

 – le code des marchés publics alors en vigueur ;

 – le décret n° 2002-232 du 21 février 2002 ;

 – l’arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

 – le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Lesieux ;

 – les conclusions de Mme Gondouin, rapporteur public ;

 – les observations de Me A…, représentant la commune de Mions, de Me B…, représentant la société Ribière Entreprise Générale et de Me C…, représentant les sociétés Atelier d’architecture Benoit Crepet, Plan B Architecture Urbanistes et CetE Ingénierie.

Considérant ce qui suit :

1. Par acte d’engagement du 14 juin 2010, la commune de Mions a confié la maîtrise d’oeuvre de l’opération de construction du groupe scolaire Pasteur à un groupement conjoint composé des sociétés Atelier d’architecture Benoît Crépet, mandataire solidaire, Plan B architectes urbanistes, CetE Ingénierie, AEI, Bethac et Cathac et ACE BTP. Les travaux ont été divisés en 18 lots. Le lot n° 1 « gros oeuvre, charpente métallique, briques et terrassement » a été confié à la société Ribière Entreprise Générale, par acte d’engagement signé le 8 juillet 2011, pour un montant de 1 508 715 euros hors taxe (HT), hors option. L’ordre de démarrage des travaux a été donné par ordre de service du 1er août 2011, notifié le 4 août suivant à la société Ribière Entreprise Générale. Par des courriers adressés les 30 septembre 2011, 19 octobre 2011, 25 octobre 2011, 27 janvier et 8 février 2012, au maire de la commune de Mions, cette société a demandé à être indemnisée des retards subis dans l’avancée du chantier ainsi que des travaux supplémentaires exécutés par elle et le bureau d’études techniques (BET) Cetis, son sous-traitant. N’ayant pas obtenu le paiement des sommes qu’elle demandait, la société Ribière Entreprise Générale a saisi le tribunal administratif de Lyon d’une demande tendant à la condamnation in solidum de la commune de Mions et des sociétés membres du groupement de maîtrise d’oeuvre à lui verser ces sommes, augmentées des intérêts moratoires. Les travaux du lot n° 1 ont été réceptionnés avec réserves le 5 septembre 2014 avec effet au 4 août 2014. Le 23 octobre suivant, la société Ribière a notifié son projet de décompte final à la maîtrise d’oeuvre en y intégrant, outre les sommes déjà demandées, des sommes correspondant, d’une part, à l’immobilisation de ses moyens humains et matériels pendant la période du 1er janvier 2013 au 1er septembre 2014 en raison de l’allongement des délais d’exécution du marché, et d’autre part, à l’exécution de travaux supplémentaires. En réponse à la mise en demeure qui lui a été adressée le 10 décembre 2014, la commune de Mions a notifié le décompte général du marché le 5 février 2015 faisant apparaître un solde négatif de 384 209 euros toutes taxes comprises (TTC) à la charge de la société Ribière Entreprise Générale. Cette dernière a formé une réclamation le 5 mars 2015 puis saisi le tribunal administratif de Lyon d’une seconde demande en contestation de ce décompte. Par un jugement du 8 septembre 2016, le tribunal administratif, après avoir joint les deux demandes de la société Ribière Entreprise Générale, a condamné la commune de Mions à verser à cette société la somme de 64 080,57 euros TTC, au titre du solde du marché. Il a assorti cette somme des intérêts moratoires au taux égal au taux d’intérêt de la principale facilité de refinancement appliquée par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement principal la plus récente effectuée avant le 1er janvier 2015, majoré de sept points, à compter du 30 janvier 2015 et de la capitalisation de ces intérêts à compter du 30 janvier 2016. Il a rejeté le surplus des conclusions des parties. La commune de Mions et la société Ribière relèvent appel de ce jugement.

2. Ces deux requêtes étant dirigées contre le même jugement et ayant fait l’objet d’une instruction commune, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

Sur l’allongement du délai d’exécution du marché :

3. La société Ribière Entreprise Générale demande la condamnation de la commune de Mions, sur le fondement de la responsabilité contractuelle et des sociétés membres du groupement de maîtrise d’oeuvre sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle à l’indemniser, à hauteur de la somme de 244 058,89 euros HT, de son préjudice résultant de l’allongement des délais d’exécution du marché pour la période comprise entre le 8 août et le 21 novembre 2011. Elle demande la condamnation de la commune de Mions à lui verser une somme de 198 224,97 euros HT au titre du préjudice qu’elle estime avoir subi du fait de l’allongement de la durée du chantier entre le 1er janvier 2013 et le 1er septembre 2014.

En ce qui concerne la période du 8 août au 21 novembre 2011 :

Sans qu’il soit besoin d’examiner la recevabilité de la demande de première instance enregistrée sous le n° 1202082.

4 En premier lieu, aux termes de l’article 4.1 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) relatif au(x) délai(s) d’exécution des travaux : « Le délai global d’exécution de l’ensemble de l’opération est de 13 mois à compter de la date de début des travaux fixée par l’ordre de service ou à défaut la date de réception de l’ordre de service par l’entreprise. / Le délai maximum d’exécution des travaux se répartit comme défini dans le planning prévisionnel. Ce délai comprend le forfait pour intempéries prévu à l’article 5.3 du présent CCAP ainsi que la période de préparation. / La période de préparation comprend les délais d’études d’exécution et notes de calcul décrites au CCTC et aux CCTP de chaque lot. / Le délai contractuel d’exécution du marché est celui fixé à l’acte d’engagement, ce dernier comprend (…) la période de préparation défini au 28.1 du CCAG. / La durée de celle-ci est fixée à 7 semaines calendaires. ». Aux termes de l’article 4.2 de ce cahier : « A – Le calendrier détaillé d’exécution est élaboré par l’OPC après consultation des entrepreneurs titulaires des différents lots, dans le cadre du calendrier prévisionnel d’exécution prévu ci-dessus (…) ». En application de l’article 3 de l’acte d’engagement notifié à la société Ribière Entreprise Générale, « à compter de la date d’ouverture du chantier, l’ensemble des travaux Toux Corps d’État sera exécuté dans un délai de 13 mois y compris congés payés légaux et forfait intempéries. ».

5. Il résulte de l’instruction, et ainsi que l’a jugé le tribunal administratif de Lyon, que l’ordre de service de démarrer les travaux a été notifié à la société Ribière Entreprise Générale le 4 août 2011. Contrairement à ce qu’elle affirme, sa participation à des réunions OPC (Organisation, Pilotage et Coordination) avant cette date, en vue notamment d’élaborer le calendrier détaillé d’exécution des différents lots, ne permet pas de considérer que le point de départ du délai global d’exécution de l’ensemble de l’opération devait être fixé à une date antérieure et ce, même si, au cours de ces réunions, le 11 juillet 2011 a pu être envisagé comme date de démarrage des travaux .

6. Par ailleurs, il résulte des stipulations précitées, ainsi que du calendrier prévisionnel d’exécution inclus dans le dossier de consultation des entreprises que le délai contractuel d’exécution du marché comprenait une période de préparation de 7 semaines, suivie de plusieurs semaines de travaux préparatoires pour notamment l’installation du chantier, les démolitions, terrassements généraux, couche de forme et réseaux d’assainissement. La réalisation du gros oeuvre ne devait débuter que neuf semaines après l’ordre de service de démarrer les travaux, soit le 6 octobre 2011 et les plans d’exécution (EXE) dont la réalisation était confiée au BET CetE Ingénierie devaient être transmis à l’entrepreneur à la fin de la période de préparation.

7. Il résulte de l’instruction que le BET CetE Ingénierie a rencontré des difficultés dans la remise des plans EXE structure. Cette circonstance a d’ailleurs conduit la commune de Mions, maître d’ouvrage, à organiser une réunion de médiation, le 21 octobre 2011, entre le groupement de maîtrise d’oeuvre et la société Ribière Entreprise Générale et à proposer la signature d’un protocole transactionnel le mois suivant prévoyant notamment le transfert de la mission EXE « coffrage et ferraillage » du groupement de maîtrise d’oeuvre à la société Ribière Entreprise Générale. Le protocole transactionnel n’a pas été signé par les parties concernées mais la mission EXE « coffrage et ferraillage » ainsi d’ailleurs que les études d’exécution de la charpente métallique ont été, dès le mois d’octobre 2011, confiées au BET Cetis, sous-traitant de la société Ribière Entreprise Générale, même si ce transfert a fait l’objet d’un avenant qui n’a été notifié que le 27 avril 2012. Le chantier a été suspendu jusqu’au 21 novembre 2011, date à laquelle la société Ribière Entreprise Générale était invitée, par ordre de service n° 3 à reprendre le chantier.

8. Toutefois, en cours de période préparatoire, la société Ribière Entreprise Générale a modifié l’ordonnancement et le planning des travaux qu’elle avait proposé dans son offre et a sollicité, à plusieurs reprises, la mise en oeuvre de variantes et de modifications méthodologiques nécessitant la réalisation dans l’urgence de plans de synthèse par l’Atelier d’architecture Benoît Crépet et la reprise des plans EXE par le BET CetE Ingénierie. Les sociétés Atelier d’architecture Benoît Crépet, Plan B Architectes et Urbanistes et CetE Ingénierie font également valoir, sans être contestées, que la société Ribière Entreprise Générale n’avait pas désigné le BET en charge de lui dessiner les plans d’atelier et de chantier (PAC) et a sollicité la maîtrise d’oeuvre pour la réalisation de ces plans pourtant à la charge de l’entreprise titulaire du marché de travaux. Enfin, si les travaux ont été suspendus pendant un mois entre le 21 octobre et le 21 novembre 2011, cette suspension résulte du transfert de la mission EXE structure au BET Cetis accordé par la commune de Mions, à la demande de la société Ribière Entreprise Générale.

9. Dans ces conditions, la société Ribière Entreprise Générale n’établit pas que le préjudice dont elle se prévaut aurait été la conséquence d’une faute quasi-délictuelle du maître d’oeuvre dans l’exercice des missions que la commune de Mions lui avait confiées. En outre, il résulte de ce qui a été dit au point 7, qu’il ne peut être reproché à la commune de Mions, qui avait d’ailleurs confié une mission complète de maîtrise d’oeuvre au groupement conjoint représenté par l’Atelier d’architecture Benoît Crépet, d’avoir commis une faute dans l’exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché de maîtrise d’oeuvre.

10. En deuxième lieu, aux termes de l’article 49.1.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, dans sa version en vigueur à la date de la conclusion du marché : « L’ajournement des travaux peut être décidé par le représentant du pouvoir adjudicateur. Il est alors procédé, suivant les modalités indiquées à l’article 12, à la constatation des ouvrages et parties d’ouvrages exécutés et des matériaux approvisionnés. / Le titulaire, qui conserve la garde du chantier, a droit à être indemnisé des frais que lui impose cette garde et du préjudice qu’il aura éventuellement subi du fait de l’ajournement. / Une indemnité d’attente de reprise des travaux peut être fixée suivant les modalités prévues aux articles 14.3. et 14.4. ». Il y a ajournement des travaux au sens de ces stipulations, lorsque le maître d’ouvrage décide de différer leur début ou d’en suspendre l’exécution. Or, il résulte de l’instruction que la société Ribière Entreprise Générale a suspendu l’exécution des travaux, sans ordre de service, suite au transfert de la mission EXE structure à son sous-traitant, décidée, à sa demande, par le maître d’ouvrage. Par suite, la commune de Mions n’étant pas à l’origine de l’interruption des travaux, cette interruption n’est pas un « ajournement » au sens de l’article 49.1.1 précité. Il en résulte que la société Ribière Entreprise Générale ne peut prétendre au bénéfice du régime de responsabilité contractuelle de plein droit prévu par ces stipulations.

En ce qui concerne la période du 1er janvier 2013 au 1er septembre 2014 :

11. La société Ribière Entreprise Générale reproche à la commune de Mions d’avoir tardé à attribuer les lots nos 8 « Métallerie / Serrurerie » et 10 « Revêtements durs sols et murs ». Toutefois, elle n’établit pas que l’attribution de ces lots en juin et décembre 2013 aurait été à l’origine de l’allongement du délai global d’exécution et ce alors qu’il résulte de l’instruction que le lot dont elle était attributaire n’avait pu faire l’objet d’une réception avant le 5 septembre 2014 compte tenu des non-conformités et des réserves sur les travaux qu’elle avait exécutées. Par suite, elle ne peut prétendre à aucune indemnisation à raison de la mobilisation de ses moyens sur le chantier pour la période courant du 1er janvier 2013 au 1er septembre 2014.

Sur les travaux supplémentaires :

En ce qui concerne les bandes noyées :

12. Le titulaire d’un marché à prix forfaitaire a droit au paiement des travaux supplémentaires qui, bien que réalisés sans ordre de service du maître d’ouvrage, ont été indispensables à la réalisation de l’ouvrage selon les règles de l’art. La charge définitive de l’indemnisation incombe, en principe, au maître d’ouvrage qui peut appeler en garantie le maître d’oeuvre, en cas de faute de celui-ci.

13. La société Ribière Entreprise Générale soutient que lors du transfert de la mission EXE à son sous-traitant, le BET Cetis a mis en avant des problèmes de stabilité des structures des bâtiments A et B et que le maître d’oeuvre a demandé à ce qu’il soit prévu, dans les calculs de la structure du bâtiment C, la possibilité d’adjoindre, dans le futur, un étage supplémentaire. Elle soutient que des renforts structurels supplémentaires devaient être mis en oeuvre. Toutefois, il résulte de l’instruction que la société Ribière Entreprise Générale a fait le choix de modifier le concept structurel de l’ouvrage tel qu’il ressortait des documents de consultation des entreprises et des plans EXE établis par le BET CetE Ingénierie. Elle n’établit pas, par la seule production de plans d’exécution annotés, réalisés par ses soins, que cette modification de la conception structurelle des bâtiments aurait été indispensable à la réalisation de l’ouvrage selon les règles de l’art. Elle ne peut dès lors prétendre à aucune indemnisation à ce titre.

En ce qui concerne les réseaux sous dallage :

14. Aux termes de l’article 11.2.1 du CCAG-Travaux de 2009 : « Dans le cas d’application d’un prix forfaitaire, le prix est dû dès lors que l’ouvrage, la partie d’ouvrage ou l’ensemble de prestations auquel il se rapporte a été exécuté. Les différences éventuellement constatées, pour chaque nature d’ouvrage, ou chaque élément d’ouvrage entre les quantités réellement exécutées et les quantités indiquées dans la décomposition de ce prix, établie conformément à l’article 10.3.2, même si celle-ci a valeur contractuelle, ne peuvent conduire à une modification de ce prix. Il en est de même pour les erreurs que pourrait comporter cette décomposition. ». Dans le cas d’un marché public à prix forfaitaire, l’entreprise titulaire de ce marché peut néanmoins obtenir une indemnisation lorsque les documents techniques soumis à l’appel d’offres sont entachés d’erreurs suffisamment graves quant à la nature et aux quantités d’ouvrages à réaliser pour interdire aux candidats de présenter leurs propositions en connaissance de cause.

15. La société Ribière invoque une augmentation des quantités de réseaux sous dallage en faisant valoir que les entreprises chargées des réseaux intérieurs ont minimisé leurs propres linéaires au détriment de son lot « gros oeuvre », en charge des réseaux sous le dallage. Il résulte toutefois de l’instruction et, en particulier du cahier des clauses techniques particulières du lot n° 1, que les réseaux sous dallage devaient être évalués par l’entreprise et mis en oeuvre « selon les plans du BET Fluides » joints aux pièces du marché.

16. Par ailleurs, il appartenait, en application de l’article 1.4 du cahier des clauses techniques communes (CCTC), à chacune des entreprises de prendre connaissance du CCTP de l’ensemble des lots et de s’entendre avec les autres entrepreneurs sur ce qu’ils ont de commun. Ces stipulations précisent qu’ « aucun entrepreneur ne pourra prétendre ignorer les prestations et obligations des autres lots dont les travaux seront exécutés en liaison avec les siens. (…) Il s’engage à effectuer tous les calculs des quantités du bordereau de décomposition du prix global et forfaitaire étant seul responsable de la remise d’un ouvrage strictement conforme : / – aux plans remis (…) »

17. La société Ribière Entreprise Générale ne démontre pas, ni même d’ailleurs n’allègue, que les plans joints aux pièces du marché concernant les réseaux sous dallage et les réseaux intérieurs n’auraient pas été suffisamment détaillés ou auraient été incompatibles entre eux. Elle ne peut dès lors prétendre à aucune indemnisation au titre d’une augmentation de l’importance des réseaux sous dallage, dont il lui appartenait d’évaluer le métrage et le coût à l’occasion de la présentation de son offre.

En ce qui concerne les études structurelles complémentaires :

18. La société Ribière soutient, sans autre précision, que le BET Cetis, à qui elle a sous-traité la réalisation des études d’exécution des ouvrages en béton armé suite au transfert de la mission EXE structure du lot n° 1, aurait rencontré des difficultés dans la réalisation de cette mission compte tenu du « niveau insuffisant du projet et des modifications demandées par la maîtrise d’oeuvre ». Elle n’apporte toutefois pas la preuve de manquements du maître d’ouvrage ni même de la maîtrise d’oeuvre et n’établit pas que le prix prévu pour le transfert de cette mission, tel qu’il résulte de l’avenant n° 1 du 26 avril 2012, aurait été insuffisant pour permettre au BET Cetis de réaliser cette mission dans des conditions qu’elle connaissait depuis le mois d’octobre 2011.

Sur les déductions appliquées au prix du marché :

19. Il résulte des stipulations de l’article 11.2.1 du CCAG-Travaux précité, que dans le cas d’un marché public conclu à prix global et forfaitaire, le prix est dû dès lors que l’ouvrage a été exécuté. Les différences constatées entre les quantités réellement exécutées et celles indiquées dans la décomposition de ce prix ne peuvent donner lieu à une modification de ce prix. En revanche, la personne publique peut procéder à des déductions sur le prix dû lorsque des ouvrages ou des prestations prévues initialement au marché n’ont pas été exécutés ou ne l’ont été que partiellement.

20. En premier lieu, il résulte de l’instruction que le décompte général notifié à la société Ribière Entreprise Générale tient compte de déductions pour un montant de 95 121,96 euros HT soit 113 765,15 euros TTC correspondant à des différences constatées entre le prix provisoire des travaux sur les édicules et lanterneaux et le prix réel, entre les quantités d’acier annoncées et celles utilisées ainsi qu’en raison de l’amincissement des voiles extérieures R+1. Ainsi que l’a jugé le tribunal administratif de Lyon, la commune de Mions, qui ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l’article 16-1 du CCAG-Travaux dès lors que les sommes inscrites au décompte général ne correspondent pas à des « travaux en diminution » au sens de ces stipulations, n’établit pas que ces déductions résulteraient non d’un simple constat de ce que les quantités mises en oeuvre sont inférieures à celles portées à la décomposition du prix global et forfaitaire, mais d’une modification du projet ou de son exécution incomplète. Elle n’est dès lors pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rétabli la somme de 113 765,15 euros TTC dans le décompte général.

21. En second lieu, il résulte de l’instruction que ce décompte général procède également à des déductions pour un montant total de 4 058,93 euros HT correspondant à la suppression d’un auvent, d’un édifice technique, d’une cunette et à la simplification d’une échiffre. La commune de Mions soutient que la déduction ainsi opérée résulte d’une modification du projet initial. La société Ribière Entreprise Générale, qui se borne à soutenir que le tribunal administratif aurait inversé la charge de la preuve sans apporter à la cour le moindre élément de nature à établir que ces travaux auraient été exécutés, n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à la suppression de la déduction de ce montant du décompte général.

Sur les pénalités :

En ce qui concerne les pénalités pour retard dans l’exécution des travaux :

22. Aux termes de l’article 4.5.1 du CCAP : « (…) Par dérogation aux dispositions de l’article 20 du CCAG, il sera fait application de retenues provisoires en cas de retard constatés par référence aux délais intermédiaires portés sur le calendrier d’exécution des travaux. / Le montant des retenues provisoires s’appliquent à chaque délai intermédiaire et sont cumulables. (…) Le montant de ces retenues est égal à : (…) 1/4500° du montant du marché pour le lot 01 (…) Le montant des retenues provisoires pourra être appliqué sur simple constat du retard par rapport au calendrier d’exécution ou par rapport aux calendriers détaillés des tâches. / Ces retenues provisoires seront annulées ou remplacées par les pénalités définitives suivant la tenue des objectifs finaux. (…) ». Il résulte de ces stipulations, qui dérogent à celles de l’article 20 du CCAG Travaux et donc à celles de l’article 20.5.1 invoquées par la commune de Mions, qu’indépendamment de la possibilité d’infliger des pénalités, à titre provisionnel, en cas de dépassement des délais fixés par le calendrier détaillé d’exécution, le nombre de jours de retard devant être pris en compte pour déterminer les pénalités qui seront infligées à titre définitif, à l’occasion de l’édiction du décompte général, se calcule en comparant la date d’achèvement des travaux à la date d’expiration du délai contractuel global.

23. Il résulte de l’instruction que le décompte général notifié à la société Ribière Entreprise Générale fait mention de pénalités pour retard dans l’exécution des travaux pour un montant de 285 935,53 euros correspondant, selon la commune de Mions, à 206 jours de retard pour l’achèvement des ouvrages de charpente métallique du dernier bâtiment livré (bâtiment A) constatés au 31 mars 2013, 206 jours de retard pour l’achèvement des ouvrages de charpente métallique du « préau maternelle », constatés au 31 mars 2013, 181 jours de retard pour l’achèvement des ouvrages de charpente métallique du « préau élémentaire », constatés au 1er janvier 2013 et 220 jours correspondant au « retard finalement subi ».

24. Compte tenu de ce qui a été dit au point 22, les retenues provisoires constatant des retards en cours d’exécution des travaux, en janvier et mars 2013, ne devaient plus figurer dans le décompte général mais être remplacées par des retenues définitives correspondant au retard constaté à l’achèvement des travaux. Il résulte de l’instruction que par un avenant n° 7, la date d’achèvement des travaux a été repoussée au 31 décembre 2013. Le marché a été réceptionné le 5 septembre 2014, avec effet au 4 août 2014, soit avec un retard de 216 jours auquel s’applique un montant de pénalités journalières de 356,55 euros en tenant compte des modifications par avenants du montant initial HT du marché.

25. Il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 11 du présent arrêt que la société Ribière Entreprise Générale n’établit pas que l’allongement des délais d’exécution des travaux trouverait son origine dans une faute contractuelle de la commune de Mions ou dans une faute quasi-délictuelle du groupement de maîtrise d’oeuvre. Il s’ensuit que des pénalités pour retard dans l’exécution des travaux sont dues par la société Ribière Entreprise Générale pour un montant de 77 014,80 euros.

26. Par suite, la commune de Mions est seulement fondée à demander que la déduction effectuée par le tribunal administratif de Lyon pour un montant de 285 935,53 euros soit ramenée à la somme de 208 920,40 euros.

En ce qui concerne les pénalités pour absence aux réunions de chantier :

27. Aux termes de l’article 4.5.1 du CCAP : « (…) En cas d’absence sans justification aux réunions pour lesquelles sa présence aura été requise, l’entrepreneur se verra appliquer une pénalité de 250 euros HT par absence constatée. / NOTA : Par réunions de chantier s’entendent toutes les réunions organisées par la maîtrise d’oeuvre, la synthèse ou l’OPC. (…) ». Le décompte général met à la charge de la société Ribière Entreprise Générale une somme de 2 250 euros pour absence à 9 réunions de chantier.

28. Il résulte des comptes-rendus des réunions OPC produits par la commune de Mions, en première instance et en appel, que la société Ribière Entreprise Générale ne s’est pas présentée à au moins neuf réunions auxquelles elle avait été convoquée ainsi qu’il ressort des mentions de ces comptes-rendus.

29. Par suite, la commune de Mions est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a exclu du décompte la somme de 250 euros mise à la charge de la société Ribière Entreprise Générale.

En ce qui concerne les pénalités pour retard dans la remise des dossiers des ouvrages exécutés :

30. En application de l’article 9.4 du CCAP, les dossiers des ouvrages exécutés doivent être remis au plus tard 15 jours avant la date programmée pour les opérations préalables à la réception. Aux termes de l’article 4.5.1 du CCAP : « (…) En cas de retard, dans la remise des plans et autres documents à fournir après exécution par le ou les titulaires, une retenue égale à 150 euros par jour calendaire de retard sera opérée, dans les conditions stipulées à l’article 20.6 du CCAG sur les sommes dues au(x) titulaire(s). Par dérogation au 20.5 du CCAG, ces retenues ne sont pas payées après remise complète des documents. (…) »

31. Sur ce fondement, le décompte général met à la charge de la société Ribière Entreprise Générale la somme de 7 800 euros. Cependant, en application de ces stipulations qui dérogent à celles de l’article 20.5 du CCAG, les retenues ne sont pas dues après remise complète des documents. La commune de Mions se borne à soutenir qu’au 6 août 2014, date à laquelle la maîtrise d’oeuvre a dressé la liste des imperfections et malfaçons à corriger, les dossiers des ouvrages exécutés n’étaient pas complets. Ce faisant, elle n’apporte à la cour aucun élément de nature à établir que l’ensemble des dossiers des ouvrages exécutés n’auraient pas été remis avant la réception des travaux prononcée le 5 septembre 2014 avec effet le 4 août 2014 et par suite, à remettre en cause le jugement attaqué.

32. La commune de Mions n’est, dès lors, pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a exclu du décompte la somme de 7 800 euros mise à la charge de la société Ribière Entreprise Générale.

En ce qui concerne les pénalités pour retard dans la levée des réserves :

33. Aux termes de l’article 4.5.1 du CCAP : « (…) Lorsque la réception est prononcée sous les réserves prévues aux alinéas 5 et 6 de l’article 41 du CCAG, tout retard par rapport à la date fixée pour l’achèvement des travaux ou à la levée des réserves est sanctionné par une pénalité. / Cette pénalité est de : / 1/3000 (un pour trois mille) du montant HT de l’ensemble du marché par jour calendaire jusqu’au 30e jour exclusivement / 1/1000 (un pour mille) du montant HT de l’ensemble du marché par jour calendaire à partir du 31e jour. (…) ». Selon l’article 9.2 du même cahier : « Par dérogation aux dispositions de l’article 41-6 du CCAG, il est stipulé que le délai pendant lequel l’entrepreneur devra lever les réserves assorties à la réception partielle est fixé à 1 (un) mois décompté à partir de la date d’effet de la réception. »

34. Il résulte de l’instruction que le marché a été réceptionné le 5 septembre 2014 avec effet au 4 août 2014. Si la société Ribière Entreprise Générale fait valoir que les « réserves qui lui sont imputables » ont toutes été levées, il résulte de l’instruction qu’à l’expiration du délai d’un mois prévu par les stipulations de l’article 9.2 précité, les réserves figurant au procès-verbal de réception des travaux, lesquelles assortissaient déjà la décision de non-réception des ouvrages intervenue le 27 juin 2014, n’avaient pas toutes été levées.

35. Par suite, la commune de Mions est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a exclu du décompte la somme, non contestée de 38 922, 26 euros.

Sur le solde du marché :

36. En premier lieu, la société Ribière Entreprise Générale soutient, sans être contestée que le cumul des acomptes mensuels figurant dans le décompte général ne reflète pas la réalité des sommes effectivement versées, la commune de Mions ayant appliqué des pénalités provisoires pour retard dans l’exécution des travaux pour un montant de 89 494,05 euros suite à une réunion du 24 mai 2013. Or, et ainsi qu’il a été dit au point 22 du présent arrêt, les pénalités provisoires ont, en application de l’article 4.5.1 du CCAP, vocation à être supprimées et remplacées par des pénalités définitives se calculant en comparant la date d’achèvement des travaux à la date d’expiration du délai contractuel global. Par suite, il y a lieu de rectifier le montant retenu dans le décompte général au titre du cumul des acomptes en le fixant à 1 647 059 euros HT soit 1 754 602, 55 euros TTC.

37. En deuxième lieu, compte tenu du montant toutes taxes comprises du marché, des sommes inscrites au passif et non contestées, celles dont les montants ont été retenus à bon droit par les premiers juges, des acomptes versés et des pénalités tels qu’ils résultent du présent arrêt, le décompte général du marché s’établit comme suit :


Solde du décompte général notifié- 384 209,14 eurosRectification du cumul des acomptes+ 89 494,05 euros Travaux en déduction+ 113 765,15 eurosPénalités pour retard dans l’exécution des travaux + 208 920, 40 eurosPénalités pour retard dans la remise des DOE+ 7 800,00 euros Pénalités pour retard dans la production du projet de décompte final+ 1 616,77 euros Solde dû par la commune de Mions= 37 387,23 euros

38. Le solde du marché correspondant au lot n° 1 s’établit à la somme de 37 387,23 euros TTC en faveur de la société Ribière Entreprise Générale. Il y a lieu, en conséquence, de condamner la commune de Mions à lui verser cette somme.

Sur les intérêts moratoires et leur capitalisation :

39. La somme de 37 387, 23 euros que la commune de Mions est condamnée à verser à la société Ribière au titre du solde du marché est assortie des intérêts moratoires et de la capitalisation de ces intérêts dans les conditions, non contestées, définies par le tribunal administratif de Lyon aux points 25 et 26 de son jugement.

Sur les frais liés au litige de première instance :

40. Le tribunal a considéré qu’il n’y avait pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la société Ribière Entreprise Générale sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Cette société, qui n’établit pas que les premiers juges auraient porté une appréciation erronée sur ces circonstances, n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que le tribunal a rejeté ses conclusions tendant au remboursement des frais d’instance non compris dans les dépens.

Sur les frais liés au litige d’appel :

41. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions des parties présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


DÉCIDE :


Article 1er : La commune de Mions est condamnée à verser à la société Ribière Entreprise Générale la somme de 37 387, 23 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts moratoires et de la capitalisation de ces intérêts dans les conditions prévues à l’article 39 du présent arrêt.

Article 2 : Le jugement nos 1202082, 1504688 du 8 septembre 2016 du tribunal administratif de Lyon est réformé en ce qu’il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Mions, à la société Ribière Entreprise Générale et aux sociétés Atelier d’architecture Benoît Crépet, Plan B Architectes et Urbanistes, CetE Ingénierie, AEI, Bethac et Cathac et ACE BTP.

Délibéré après l’audience du 10 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
M. d’Hervé, président de chambre,
Mme Michel, président-assesseur,
Mme Lesieux, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 janvier 2019.

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Nos 16LY03829, 16LY03848

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CAA de LYON, 4ème chambre - formation à 3, 31 janvier 2019, 16LY03829, Inédit au recueil Lebon