Cour Administrative d'Appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 12 juillet 2016, 15MA00929, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 8e ch. - formation à 3, 12 juill. 2016, n° 15MA00929
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 15MA00929
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Montpellier, 18 décembre 2014, N° 1303994
Identifiant Légifrance : CETATEXT000032937058

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B… A… a demandé au tribunal administratif de Montpellier d’annuler la décision du 26 juin 2013 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande d’annulation de l’arrêté du ministre de l’intérieur du 3 décembre 2012 portant résiliation de son contrat d’engagement, ensemble l’arrêté du 3 décembre 2012 prononçant sa radiation définitive des contrôles, et d’enjoindre au ministre de la défense de la réintégrer dans ses fonctions de gendarme volontaire.

Par un jugement n° 1303994 du 19 décembre 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2 mars 2015, Mme A…, représentée par Me C…, demande à la Cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 19 décembre 2014 ;

2°) d’annuler l’arrêté du 3 décembre 2012 portant résiliation de son contrat d’engagement ainsi que la décision de rejet de la commission de recours des militaires du 1er juillet 2013 ;

3°) d’enjoindre au ministre de l’intérieur de la réintégrer dans ses fonctions de gendarme adjoint volontaire ;

4°) de mettre à la charge de l’État la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

 – son classement en catégorie P4 n’est pas justifié ;

 – l’avis de la commission de réforme du 28 novembre 2012 est en tous points contradictoire avec les certificats médicaux des 7 décembre 2012 et 18 juin 2013 ;

 – le code de la défense n’exige pas nécessairement un certificat médical émanant d’un médecin militaire pour une demande de réexamen de l’aptitude médicale ;

 – ces décisions s’inscrivent dans un contexte de harcèlement moral.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2015, le ministre de la défense conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu’aucun des moyens soulevés n’est fondé.

Vu :

-les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code de la défense ;

 – l’arrêté du 20 décembre 2012 du ministre de l’intérieur et du ministre de la défense relatif à la détermination et au contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire ;

 – l’instruction n° 2100/DEF/DCSSA/AST/AME du 1er octobre 2003 du ministre de la défense relative à la détermination de l’aptitude médicale à servir ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de Mme Pena,

- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

1. Considérant que Mme A… relève appel du jugement du 19 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant, d’une part, à l’annulation de la décision du 26 juin 2013 par laquelle le ministre de la défense a rejeté sa demande d’annulation de l’arrêté du ministre de l’intérieur du 3 décembre 2012 portant résiliation de son contrat d’engagement, ensemble l’arrêté du 3 décembre 2012, d’autre part, d’enjoindre au ministre de la défense de la réintégrer dans ses fonctions de gendarme adjoint volontaire ;

Sur les conclusions à fin d’annulation de l’arrêté du ministre de l’intérieur du 3 décembre 2012 :

2. Considérant qu’aux termes de l’article R. 4125-1 du code de la défense : « I. – Tout recours contentieux formé par un militaire à l’encontre d’actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d’un recours administratif préalable, à peine d’irrecevabilité du recours contentieux. / Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. (…) » ; que l’institution par ces dispositions d’un recours administratif préalable obligatoire à la saisine du juge a pour effet de laisser à l’autorité compétente pour en connaître le soin d’arrêter définitivement la position de l’administration ; qu’il s’ensuit que la décision prise à la suite du recours se substitue nécessairement à la décision initiale et qu’elle est seule susceptible d’être déférée au juge de la légalité ;

3. Considérant que la décision du ministre de la défense du 26 juin 2013 ayant été prise après avis de la commission de recours des militaires, elle s’est nécessairement substituée à l’arrêté du 3 décembre 2012 du ministre de l’intérieur par lequel Mme A… a été rayée des contrôles pour mise en réforme définitive à compter du 19 décembre 2012 ; que, par suite, les conclusions de Mme A… tendant à l’annulation de cet arrêté sont, ainsi que l’a à bon droit jugé le tribunal administratif, irrecevables ;

Sur les conclusions à fin d’annulation de la décision de rejet de la commission de recours des militaires du 1er juillet 2013 :

4. Considérant que les conclusions présentées par Mme A… comme tendant à l’annulation de « la décision de rejet de la commission de recours des militaires du 1er juillet 2013 » doivent être regardées, à l’instar de l’appréciation portée sur elles par les premiers juges, comme tendant à l’annulation de la décision du ministre de la défense du 26 juin 2013 rejetant sa demande d’annulation de l’arrêté du 3 décembre 2012 portant résiliation de son contrat d’engagement ;

5. Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article L. 4139-14 du code de la défense : « La cessation de l’état militaire intervient d’office dans les cas suivants : ( …) 4° Pour réforme définitive, après avis d’une commission de réforme (…) » ; qu’aux termes des articles R. 4139-55 à R. 4139-57 dudit code : « La commission de réforme des militaires est compétente pour émettre un avis médical portant : 1° Sur l’inaptitude définitive au service d’un militaire, quels que soient son statut et son lien au service (…) », « La commission de réforme des militaires est saisie : 1° Dans le cas prévu au 1° de l’article R. 4139-55, par l’autorité administrative dont dépend le militaire. Cette autorité agit soit sur demande du militaire, soit de son propre chef. (…) », " Une demande d’avis doit être accompagnée d’un certificat établi :

1° Par un médecin ou un chirurgien des hôpitaux des armées, s’il s’agit d’un militaire ; (…) La commission de réforme des militaires peut éventuellement prescrire de soumettre l’intéressé à une expertise complémentaire en milieu hospitalier militaire. » ; que selon l’article R. 4139-60 de ce même code : « Le ministre de la défense, ou le ministre de l’intérieur pour les militaires de la gendarmerie nationale, prend, par arrêté, une décision conforme à l’avis de la commission de réforme des militaires » ;

6. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 1er de l’arrêté du 20 décembre 2012 relatif à la détermination et au contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire : « L’article L.4132-1 du code de la défense dispose que nul ne peut être militaire s’il ne présente les aptitudes exigées pour l’exercice de la fonction. Cette exigence englobe non seulement les compétences techniques nécessaires pour tenir un emploi, mais aussi les aptitudes physique, mentale et médicale (cette dernière incluant l’aptitude psychique). (…) L’aptitude mentale traduit l’adhésion à un état d’esprit militaire dans toute l’acception de l’article L. 4111-1 du code de la défense selon lequel » l’état militaire exige en toute circonstance esprit de sacrifice, pouvant aller jusqu’au sacrifice suprême, discipline, disponibilité, loyalisme et neutralité. " Elle suppose des capacités d’anticipation, d’apprentissage, d’adaptation et de résistance aux agressions d’un environnement hostile. La détermination et l’optimisation des aptitudes physique et mentale à servir du personnel militaire relèvent de la compétence de l’encadrement militaire. L’aptitude médicale exprime la compatibilité de l’état de santé d’un individu avec les exigences du statut général des militaires et celles propres à chaque armée, direction et service ou à la gendarmerie nationale. L’aptitude psychique fait partie intégrante de l’aptitude médicale à servir. Objet du présent arrêté, la détermination et le contrôle de l’aptitude médicale à servir du personnel militaire sont fondés sur une expertise médicale qui relève de la compétence des médecins du service de santé des armées. (…) ; les médecins du service de santé des armées tiennent compte des décisions des instances civiles compétentes. Le médecin des armées (y compris le praticien réserviste) est responsable de la détermination de l’aptitude médicale. Sa décision peut s’appuyer sur l’avis d’un chirurgien dentiste des armées. Si la visite médicale a été effectuée par un interne de médecine générale, ses conclusions doivent être validées et signées par un médecin des armées. Le médecin des armées peut décider d’une inaptitude en fondant ses conclusions sur les éléments objectifs du bilan médical et sur l’estimation d’un risque pour l’individu ou la collectivité, basée sur sa connaissance des pathologies mais aussi sur celle du milieu militaire et des contraintes liées aux activités et situations d’exception imposées par ce statut. Il convient en effet de déterminer si un sujet est capable d’occuper un emploi, mais aussi s’il peut s’en acquitter au sein de la collectivité militaire (…) » ; qu’enfin, il ressort de l’Instruction n° 2100 du service de santé des armées du 1er octobre 2003 relative à la détermination de l’aptitude médicale à servir que le quatrième niveau de l’aptitude psychique, noté P4, est « attribué par le médecin spécialiste en psychiatrie » et révèle « une inaptitude définitive à servir en raison de troubles de la personnalité et de l’adaptation » ;

7. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier qu’alors qu’elle était affectée depuis le 24 mars 2011 en tant que gendarme adjoint volontaire à la brigade de gendarmerie des transports aériens de Montpellier, Mme A… a été placée en congé de maladie pour un syndrome anxio-dépressif et des troubles du sommeil du 15 au 28 mai 2012, puis du 18 juillet au 20 août 2012 et jusqu’au 30 septembre suivant ; qu’après avoir examiné l’intéressée le

1er octobre 2012, le médecin chef d’Arras a relevé qu’elle avait déjà fait l’objet d’une consultation en psychiatrie militaire en mars 2011 à la suite d’une altercation violente avec une camarade d’école de gendarmerie et qu’elle avait été orientée dès la fin de l’année 2011 par son médecin militaire vers une consultation de psychiatrie à laquelle elle n’avait pas donné suite, a également conclu à un syndrome anxio-dépressif réactionnel évoluant depuis lors ; que l’arrêt de maladie a ainsi été prolongé jusqu’au 28 octobre 2012, puis jusqu’au 20 décembre de la même année ; que, le 16 octobre 2012, le médecin militaire spécialiste du service de psychiatrie de l’hôpital d’instruction des armées Laveran de Marseille s’est prononcé pour le classement P4

de l’intéressée, après avoir constaté qu’elle présentait un " trouble de l’adaptation avec

humeur anxieuse chez une personnalité pathologique à tendance psychorigide " et

l’avoir déclarée « inapte à la poursuite de son engagement » ; qu’il a également sollicité la réunion de la commission de réforme militaire, laquelle a conclu, dans sa séance du

28 novembre 2012, à l’inaptitude au service de l’intéressée ; que, par l’arrêté du

3 décembre 2012 du ministre de l’intérieur, Mme A… a été rayée des contrôles pour mise en réforme définitive à compter du 19 décembre 2012 ; qu’à sa demande, la commission de réforme s’est de nouveau réunie le 19 juin 2013 et a confirmé l’avis précédemment rendu ; que, le

26 juin 2013, au vu de l’avis de ladite commission, le ministre de la défense a rejeté le recours de l’intéressée dirigé contre l’arrêté du 3 décembre 2012 ;

8. Considérant que, pour contester le classement P4 dont elle a fait l’objet, Mme A… verse au dossier trois certificats médicaux ; que, dans celui établi le 7 décembre 2012, le Dr D…, médecin traitant de l’intéressée, atteste avoir reçu la requérante pour un syndrome anxieux ; que dans ceux établis les 7 décembre 2012 et 18 juin 2013, le Dr E…, psychiatre, indique dans le premier, qu’il « apparaît techniquement et médicalement justifié d’accéder à une demande de nouvelle expertise accompagnée d’une évaluation de la réalité des faits qu’elle décrit », et, dans le second, que sa patiente « ne présente à ce jour aucun trouble psychopathologique » ; que, ce faisant, et alors qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que l’intéressée aurait sollicité une contre-expertise par la médecine militaire, Mme A… n’établit pas posséder les qualités « d’anticipation, d’apprentissage, d’adaptation et de résistance aux agressions d’un environnement hostile » requises par les dispositions mentionnées au point 6. et, plus généralement, ne rapporte pas la preuve de la compatibilité de son état de santé psychique « avec les exigences du statut général des militaires et celles propres à chaque armée, direction et service ou à la gendarmerie nationale » ; que c’est, par suite, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que le ministre de la défense, a confirmé l’inaptitude physique de l’intéressée à exercer ses fonctions de gendarme adjoint volontaire ;

9. Considérant que Mme A… soutient à tort que le ministre de la défense aurait fait une mauvaise interprétation du code de la défense en exigeant un certificat médical d’un médecin militaire pour une demande de réexamen de son aptitude médicale, dès lors que cette exigence résulte de l’article 1er de l’arrêté du 20 décembre 2012 précité ; qu’en tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que les certificats médicaux émanant des docteurs D… et E… n’auraient pas été pris en compte par les membres de la commission de réforme réunie le 19 juin 2013 ; qu’ainsi, le moyen tiré de l’erreur de droit ne saurait être retenu ;

10. Considérant enfin, que si Mme A… soutient être victime de harcèlement moral, lequel serait à l’origine de son état de santé et dont les décisions contestées seraient en quelque sorte le reflet, elle ne fournit au dossier aucun élément permettant de présumer que l’administration militaire aurait agi dans un tel contexte ;

11. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que Mme A… n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d’injonction :

12. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d’annulation de Mme A…, n’appelle aucune mesure d’exécution ; que, par suite, ses conclusions à fin de réintégration dans ses fonctions de gendarme volontaire doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions susmentionnées font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de l’État, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme A… demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :


Article 1er : La requête de Mme A… est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B… A…, au ministre de la défense et au ministre de l’intérieur.

Délibéré après l’audience du 21 juin 2016 où siégeaient :

 – M. Gonzales, président,

 – M. Renouf, président assesseur,

 – Mme Pena, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 12 juillet 2016.

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6N° 15MA00929

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