CAA de MARSEILLE, 8ème chambre - formation à 3, 2 octobre 2018, 16MA01590, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 8e ch. - formation à 3, 2 oct. 2018, n° 16MA01590
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 16MA01590
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Marseille, 23 février 2016, N° 1306940
Identifiant Légifrance : CETATEXT000037502353

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée le 7 novembre 2013, M. A… D… a demandé au tribunal administratif de Marseille d’annuler la décision implicite par laquelle le maire de Marseille a rejeté sa demande du 9 juillet 2013, d’enjoindre au maire de Marseille de porter son indemnité spécifique de service de 44% à 70% du taux de base afférent au grade d’un ingénieur territorial ayant atteint le 8e échelon, sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de condamner la commune de Marseille à lui verser une somme de 26 782,86 euros correspondant aux primes dont il estime avoir été illégalement privé depuis le 3 août 2007.

Par un jugement n° 1306940 du 24 février 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire respectivement enregistrés le 25 avril 2016 et le 23 mai 2018, M. D…, représenté par Me C…, demande à la Cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d’annuler la décision implicite de rejet née le 11 septembre 2013, par laquelle le maire de Marseille a refusé de réévaluer son indemnité de service d’un montant annuel de 7 000 euros ;

3°) d’enjoindre au maire de Marseille de porter cette indemnité de service à 70 % du montant maximum du régime indemnitaire accordé au grade d’ingénieur, 8e échelon soit une somme de 11 120,87 euros par an, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l’arrêt à intervenir, cette somme ayant été portée à 844,43 euros par mois dans le dernier état des écritures ;

4°) de condamner la commune de Marseille à la somme de 49 194,92 euros correspondant à la perte de rémunération depuis le 3 août 2007 jusqu’au 31 mai 2018 ;

5°) de mettre à la charge de l’État le versement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

 – le jugement est entaché d’une erreur de droit ;

 – l’autorité communale a commis une erreur manifeste dans l’appréciation des mérites et des responsabilités sur le poste occupé ;

 – l’indemnité spécifique de service qui lui est versée est largement en deçà de celle qui devrait lui être attribuée en qualité d’ingénieur ;

 – la décision est entachée de détournement de pouvoir.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 janvier 2018, la commune de Marseille, représentée par Me B…, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. D… en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient d’une part que les moyens en excès de pouvoir ne sont pas fondés et d’autre part, que les conclusions indemnitaires sont soit irrecevables soit, pour celles relatives à la période courant du 3 août 2007 au 31 décembre 2008 prescrites en application de la loi du 31 décembre 1968.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

 – loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

 – le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 pris pour l’application du premier alinéa de l’article 88 de la loi du 26 janvier 1984 ;

 – le décret n° 2003-799 du 25 août 2003 relatif à l’indemnité spécifique de service ;

 – l’arrêté ministériel du 31 mars 2011 relatif à l’indemnité spécifique de service allouée aux ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts et aux fonctionnaires des corps techniques de l’équipement ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. Coutel,

 – les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

 – et les observations de Me C…, représentant M. D….

Une note en délibéré présentée pour M. D… a été enregistrée le 5 septembre 2018.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Marseille :

1. Considérant que les conclusions de M. D… présentées à fin d’annulation, qui sont dirigées contre la décision implicite de rejet née du silence gardé par l’administration sur sa demande en date du 9 juillet 2013, doivent être regardées comme dirigées contre la décision initiale lui attribuant un régime indemnitaire du grade d’ingénieur, révélée notamment par les bulletins de salaire émis à compter du mois de juin 2013 ; qu’ainsi, les conclusions présentées contre une décision qui fait grief, tant en première instance qu’en appel, sont recevables ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

2. Considérant que par arrêt n° 11MA00840 du 9 avril 2013, la cour administrative d’appel de Marseille a jugé que la commune de Marseille avait commis une erreur manifeste dans l’appréciation de l’adéquation entre le niveau de rémunération et les fonctions de M. D… en maintenant sa rémunération à un niveau correspondant à celui du grade de technicien supérieur territorial, alors que les missions qu’il exerçait équivalaient à celles d’un ingénieur territorial ; qu’en exécution de cet arrêt, la commune de Marseille a, par un nouveau contrat à durée indéterminée du 29 mai 2013, recruté M. D… en qualité d’ingénieur territorial à compter du 1er juin 2013 ; que M. D…, employé à la division administrative des environnements techniques, a bénéficié dès 2013 de conditions de rémunération fixées sur la base de l’indice brut 668, indice majoré 557, correspondant au 8e échelon du grade d’ingénieur, et perçoit un régime indemnitaire de 7 000 euros, constitué de la prime de service et de rendement et de l’indemnité spécifique de service ;

3. Considérant que si, en l’absence de dispositions législatives ou réglementaires relatives à la fixation de la rémunération des agents non titulaires, l’autorité compétente dispose d’une large marge d’appréciation pour déterminer, en tenant compte notamment des fonctions confiées à l’agent et de la qualification requise pour les exercer, le montant de la rémunération ainsi que son évolution, il appartient au juge, saisi d’une contestation en ce sens, de vérifier qu’en fixant ce montant l’administration n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation ; qu’aux termes de l’article 2 du décret du 6 septembre 1991 pris pour l’application du premier alinéa de l’article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : « L’assemblée délibérante de la collectivité (…) fixe, dans les limites prévues à l’article 1er, la nature, les conditions d’attribution et le taux moyen des indemnités applicables aux fonctionnaires de ces collectivités (…). L’autorité investie du pouvoir de nomination détermine, dans cette limite, le taux individuel applicable à chaque fonctionnaire. » ;

4. Considérant que M. D… estimant que son régime indiciaire ne correspond pas aux responsabilités et à la compétence technique dont il fait preuve au sein de son service, a demandé par courrier du 9 juillet 2013 que son régime indemnitaire soit augmenté et porté à 70% de la limite maximum du régime indemnitaire du grade d’ingénieur auquel ses fonctions correspondent ; qu’ainsi que l’ont dit les premiers juges, la circonstance que l’intéressé bénéficiait d’un régime indemnitaire égal à 70% de la limite maximum du régime indemnitaire du grade de technicien principal, avant l’arrêt de la Cour qui a notamment reçu exécution par le nouveau contrat du 29 mai 2013, n’impliquait pas que son nouveau régime indemnitaire dans l’emploi d’ingénieur, fût déterminé sur la base du même ratio de l’échelle de rémunération des ingénieurs territoriaux ; qu’en effet, alors même que l’intéressé exerce les mêmes fonctions que celles antérieures au contrat de 2013, les fonctions et missions d’un ingénieur, d’un niveau supérieur à celles d’un technicien territorial, impliquait également que l’administration communale déterminât le montant du régime indemnitaire de l’intéressé compte tenu de ses missions, en tenant compte notamment du niveau de difficulté et de responsabilité des fonctions confiées aux agents et fonctionnaires de la même catégorie ;

5. Considérant toutefois qu’aux termes de l’article 1er du décret du 25 août 2003 applicables à la date de la décision en litige : « Les ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts et les fonctionnaires des corps techniques de l’équipement, ingénieurs des travaux publics de l’État, techniciens supérieurs de l’équipement, contrôleurs des travaux publics de l’État, conducteurs des travaux publics de l’État, dessinateurs, experts techniques des services techniques bénéficient, dans la limite des crédits ouverts à cet effet, d’une indemnité spécifique de service. » ; qu’aux termes de l’article 2 de ce décret : « Sous réserve des dispositions de l’article 3, les taux moyens annuels de cette indemnité sont définis, pour les fonctionnaires des corps de l’équipement mentionnés à l’article 1er du présent décret, par un taux de base affecté d’un coefficient correspondant à leurs grades et emplois et d’un coefficient propre à chaque service. Le taux de base et le coefficient de modulation par service qui lui est affecté sont fixés par arrêté conjoint du ministre chargé de l’équipement, du ministre chargé du budget et du ministre chargé de la fonction publique. » ; qu’aux termes de l’article 4 de ce décret : « Les coefficients prévus aux articles 2 et 3 du présent décret, propres aux corps et grades de fonctionnaires des corps techniques de l’équipement précisés à l’article 1er du présent décret, sont les suivants : Ingénieur des travaux publics de l’État (à compter du 7e échelon) : 33. Ingénieur des travaux publics de l’État (du 1er au 6e échelon inclus) : 28. » ; qu’aux termes de l’article 1er de l’arrêté du 25 août 2003 fixant les modalités d’application du décret du 25 août 2003 : « Le taux de base prévu à l’article 2 du décret du 25 août 2003 susvisé est fixé à 361,90 euros » ; qu’aux termes de l’article 3 : Les coefficients de modulation individuelle prévus à l’article 7 du décret du 25 août 2003 susvisé sont fixés dans les conditions suivantes : Ingénieur des travaux publics de l’État 85% – 115% (…) Toutefois, à titre exceptionnel et par dérogation aux dispositions du présent article, pour tenir compte de la manière de servir, les coefficients de modulation individuelle peuvent être inférieurs aux minima prévus » ;

6. Considérant qu’en vertu des termes de la délibération de la commune de Marseille en date du 11 février 2013 et de son annexe, accordant une indemnité spécifique aux ingénieurs territoriaux applicable à la date de la décision attaquée, et des dispositions citées du décret du

25 août 2003 relatif à l’indemnité spécifique, auquel cette délibération doit être regardée comme renvoyant depuis le 15 décembre 2003 pour la détermination des modalités d’attribution individuelle de cette indemnité, les règles de calcul applicables à M. D… doivent respecter les prescriptions de l’arrêté ministériel du 31 mars 2011 pris pour l’application de ce décret ;

7. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. D… perçoit une indemnité spécifique de service, depuis sa nomination en qualité d’ingénieur territorial, d’un montant mensuel de 409,73 euros soit un montant annuel de 4 916,76 euros ; que toutefois, en vertu des dispositions citées applicables dès le 30 décembre 2012, le taux de base d’un ingénieur territorial est égal à 361,90 euros multiplié par le coefficient 33 à compter du

7e échelon et par le coefficient 28 en deçà de cet échelon ; qu’ainsi, le coefficient de modulation de service étant égal à 1, l’indemnité annuelle moyenne est égale à l’indemnité de base, soit 11 942,70 euros, pour un ingénieur au 7e échelon, contrairement d’ailleurs à ce que soutient la commune de Marseille ; mais qu’il résulte également des dispositions réglementaires citées que la modulation de l’indemnité spécifique ne peut être supérieure à un abattement de 15% ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier et n’est pas même allégué que M. D… ait pu, compte tenu de ses états de service, faire l’objet, à titre exceptionnel, d’une minoration individuelle supérieure à 15% ; qu’il s’ensuit que l’indemnité spécifique de service perçue par M. D… à la date de la décision en litige, qui est égale à 41% du taux moyen, a subi une minoration de 59% ; que, par suite, M. D… est fondé à soutenir que la commune de Marseille a entaché la décision lui accordant l’indemnité spécifique de service d’une erreur manifeste d’appréciation ;

Sur les conclusions à fin d’injonction :

8. Considérant qu’il ressort des termes de la demande de M. D… en date du 9 juillet 2013 que l’intéressé a demandé la revalorisation de son indemnité spécifique de service ; que le motif précédemment retenu implique que l’administration reprenne une décision à compter de l’année 2013, dans la limite des taux de minoration ou de majoration applicables, en tenant compte de la manière de servir de l’intéressé et de ses progressions d’échelon ; qu’en effet, à cette date M. D… était ingénieur non titulaire nommé par contrat à durée indéterminée en date du 29 mai 2013 ; que l’intéressé a changé de situation administrative dès lors que, par arrêté du 31 décembre 2013, il a été nommé ingénieur stagiaire au 4e échelon ; qu’il appartiendra ainsi à la commune d’apprécier le régime indemnitaire de l’intéressé en qualité de fonctionnaire ingénieur, lors du reclassement opéré en exécution de l’arrêt de la Cour rendu dans l’instance n° 16MA03589 ; qu’il est donc enjoint à la commune de Marseille de se prononcer sur ces points dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce d’assortir cette injonction d’une astreinte ;

Sur les conclusions indemnitaires :

9. Considérant qu’en tout état de cause, ces conclusions doivent être rejetées en tant qu’elles excèderont la somme qui devra être versée à M. D… en conséquence de la mesure d’injonction prononcée par le présent arrêt ;

10. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. D… est fondé à demander l’annulation du jugement du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à la revalorisation de son régime indemnitaire ; qu’il y a lieu de rejeter le surplus des conclusions de la requête ;

Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu’il soit mis à la charge de M. D…, qui n’est pas la partie perdante, le versement d’une quelconque somme à la commune de Marseille au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu’en revanche, il y a lieu dans les circonstances de l’espèce de mettre à la charge de la commune de Marseille le versement à M. D… de la somme de 2 000 euros ;

D É C I D E :


Article 1er : Le jugement n° 1306940 du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : La décision par laquelle le maire de Marseille a rejeté la revalorisation de l’indemnité spécifique de service de M. D… est annulée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Il est enjoint à la commune de Marseille de se prononcer sur le régime indemnitaire de M. D… dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, conformément aux motifs retenus aux points 7 et 8.

Article 5 : La commune de Marseille versera à M. D… la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Les conclusions de la commune de Marseille, présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. A… D… et à la commune de Marseille.

Délibéré après l’audience du 4 septembre 2018, où siégeaient :

— M. Gonzales, président,

 – M. d’Izarn de Villefort, président assesseur,

 – M. Coutel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 octobre 2018.

N° 16MA01590 2

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