Cour Administrative d'Appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 7 février 2013, 12NC00307, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nancy, 1re ch. - formation à 3, 7 févr. 2013, n° 12NC00307
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro : 12NC00307
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Nancy, 19 décembre 2011, N° 1002264
Identifiant Légifrance : CETATEXT000027195443

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée le 21 février 2012, présentée pour M. B… A…, demeurant…, par le cabinet filor – juri-fiscal ;

M. A… demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1002264 du 20 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du préfet des Vosges n° 1719/2010 du 27 juillet 2010 portant déclaration d’utilité publique des travaux de prélèvement et de dérivation des eaux des sources de la Dière et de Bugney et des périmètres de protection autour des points de captage de ces sources, autorisation d’utiliser l’eau de ces sources pour la consommation humaine, et valant déclaration de prélèvement des eaux souterraines ;

2°) d’annuler l’arrêté du préfet des Vosges n° 1719/2010 du 27 juillet 2010 ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

— le prélèvement d’eau effectué étant supérieur au seuil de 10 000 m3/an prévu à la rubrique n° 1.1.2.0. de la nomenclature annexée à l’article R. 214-1 du code de l’environnement, le projet était soumis à un régime d’autorisation et non de simple déclaration comme l’a estimé à tort le préfet ;

— le dossier de déclaration de prélèvement d’eau déposé est incomplet, faute de comporter une évaluation réelle des impacts du prélèvement sur les milieux naturels ; il existe en effet un très grand décalage entre l’étude de terrain réalisée en 2002 et l’autorisation litigieuse délivrée 8 ans après ; compte tenu de ce long délai, rendant impossible que les conditions existant à la date de la décision contestée soient les mêmes que celles prises en compte initialement par le préfet, le dossier aurait dû faire l’objet d’une révision et mise à jour complète ; certaines des données exigées par l’article R. 214-32 du code de l’environnement sont manquantes : il en va ainsi des indications d’incidence sur le milieu aquatique ;

— le périmètre de protection rapprochée mis en place par l’arrêté n’est ni étroitement nécessaire aux travaux autorisés ni à la protection effective des captages, ni même proportionné à l’objectif recherché ; les sources de la Dière et de Bugney sont situées à flanc de coteau, en position dominante par rapport à la ville, alors que son habitation et ses terrains sont situés à environ 10 à 15 mètres plus en aval du captage situé le plus en pied de coteau, c’est-à-dire celui de Bugney ; eu égard à cette configuration, il est inconcevable que des eaux qui s’infiltreraient sur sa propriété puissent souiller les captages situés nettement plus en amont ; la source de la Dière est beaucoup trop éloignée de son habitation pour justifier l’extension du périmètre de protection jusqu’à cet endroit ; au moins la parcelle n° 1006 n’aurait pas dû être incluse dans le périmètre de protection rapproché des sources de la Dière et de Bugney ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu la mise en demeure adressée le 13 septembre 2012 au ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, en application de l’article R. 612-3 du code de justice administrative, et l’avis de réception de cette mise en demeure ;


Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2012, complété par un mémoire de production enregistré le 19 décembre 2012, présenté par le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir qu’il souscrit aux observations produites par le préfet des Vosges devant le Tribunal administratif ; que le volume maximal autorisé du prélèvement d’eau étant en l’espèce de 22 865 m3 par an, il n’est soumis qu’à un régime de déclaration et non d’autorisation ; que le contenu du document d’incidences qui a été actualisé le 22 juin 2009 comporte une étude des divers points envisagés à l’article R. 214-32 du code de l’environnement ; que l’inclusion des terrains du requérant dans les périmètres de protection rapprochée est justifiée tant par leur grande proximité avec le périmètre de protection immédiate des captages que par la nature karstique du terrain ; qu’en effet, les eaux souterraines en système karstique circulent très rapidement et sans filtration naturelle et sont donc vulnérables ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 11 janvier 2013, présenté pour M. A…, qui conclut aux mêmes fins que la requête ;

Il soutient que l’hydrogéologue qui a établi le rapport du 2 août 2002 fait partie du conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques ; qu’ainsi et alors même que cette personne s’est fait excuser, cet organe consultatif ne peut être regardé comme neutre et indépendant ; que sa maison d’habitation est implantée 10 à 15 m plus bas que le captage le plus bas, celui des sources de Bugney ; que les drains captant l’eau des sources de Bugney à 5,30 m au maximum sous la surface du terrain, la différence d’altitude entre le niveau du captage et le sol au niveau de son habitation reste de l’ordre de 5 à 10 m ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l’environnement ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 17 janvier 2013 :

— le rapport de M. Pommier, président,

— les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public,

— et les observations de Me Rémy, avocat de M. A… ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 25 janvier 2013, présentée pour M. A… ;

1. Considérant que l’alimentation en eau potable des habitants de la commune de Mont-les-Neufchâteau est assurée depuis les années 1930 par le captage des sources de la Dière et de Bugney ; que, par un arrêté de régularisation du 27 juillet 2010, le préfet des Vosges a déclaré d’utilité publique au profit de la commune de Mont-les-Neufchâteau les travaux de prélèvement et de dérivation des eaux souterraines des sources de la Dière et de Bugney ainsi que la délimitation des périmètres de protection, a autorisé la commune de Mont-les-Neufchâteau à traiter et distribuer au public l’eau provenant de ces sources et a délivré récépissé de la déclaration de prélèvement ; que M. A…, propriétaire des parcelles cadastrées n° C 351, 352, 359, 1006, 1029, 1030 et 1061, classées dans le périmètre de protection rapprochée autour des points de prélèvement de ces sources, relève appel du jugement du 20 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de l’arrêté attaqué en tant qu’il donne récépissé de déclaration de prélèvement d’eau souterraine des sources de la Dière et de Bugney :

2. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article L. 214-1 du code de l’environnement : «  Sont soumis aux dispositions des articles L. 214-2 à L. 214-6 les installations ne figurant pas à la nomenclature des installations classées, les ouvrages, travaux et activités réalisés à des fins non domestiques par toute personne physique ou morale, publique ou privée, et entraînant des prélèvements sur les eaux superficielles ou souterraines, restitués ou non, une modification du niveau ou du mode d’écoulement des eaux, la destruction de frayères, de zones de croissance ou d’alimentation de la faune piscicole ou des déversements, écoulements, rejets ou dépôts directs ou indirects, chroniques ou épisodiques, même non polluants. (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 214-2 de ce code : «  Les installations, ouvrages, travaux et activités visés à l’article L. 214-1 sont définis dans une nomenclature, établie par décret en Conseil d’Etat après avis du Comité national de l’eau, et soumis à autorisation ou à déclaration suivant les dangers qu’ils présentent et la gravité de leurs effets sur la ressource en eau et les écosystèmes aquatiques compte tenu notamment de l’existence des zones et périmètres institués pour la protection de l’eau et des milieux aquatiques.(…) » ; que l’article R. 214-1 dudit code dispose que : " La nomenclature des installations, ouvrages, travaux et activités soumis à autorisation ou à déclaration en application des articles L. 214-1 à L. 214-6 figure au tableau annexé au présent article. Tableau de l’article R. 214-1 : Nomenclature des opérations soumises à autorisation ou à déclaration en application des articles L. 214-1 à L. 214-3 du code de l’environnement (…) TITRE Ier PRÉLÈVEMENTS (…)1. 1. 2. 0. Prélèvements permanents ou temporaires issus d’un forage, puits ou ouvrage souterrain dans un système aquifère, à l’exclusion de nappes d’accompagnement de cours d’eau, par pompage, drainage, dérivation ou tout autre procédé, le volume total prélevé étant : 1° Supérieur ou égal à 200 000 m3 / an (A) ; 2° Supérieur à 10 000 m3 / an mais inférieur à 200 000 m3 / an (D). (…) » ;

3. Considérant que, contrairement à ce que soutient le requérant, le volume total prélevé dans le système aquifère étant de 22 865 m3 par an, il ressort clairement de la rubrique 1.1.2.0 précitée que ce prélèvement n’est soumis qu’à un régime de déclaration et non d’autorisation ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article R. 214-1 du code de l’environnement doit être écarté ;

4. Considérant, en second lieu, qu’aux termes de l’article R. 214-32 du code de l’environnement : " I.-Toute personne souhaitant réaliser une installation, un ouvrage, des travaux ou une activité soumise à déclaration adresse une déclaration au préfet du département ou des départements où ils doivent être réalisés. II.-Cette déclaration, remise en trois exemplaires, comprend : 1° Le nom et l’adresse du demandeur ; 2° L’emplacement sur lequel l’installation, l’ouvrage, les travaux ou l’activité doivent être réalisés ; 3° La nature, la consistance, le volume et l’objet de l’ouvrage, de l’installation, des travaux ou de l’activité envisagés, ainsi que la ou les rubriques de la nomenclature dans lesquelles ils doivent être rangés ; 4° Un document : a) Indiquant les incidences du projet sur la ressource en eau, le milieu aquatique, l’écoulement, le niveau et la qualité des eaux, y compris de ruissellement, en fonction des procédés mis en oeuvre, des modalités d’exécution des travaux ou de l’activité, du fonctionnement des ouvrages ou installations, de la nature, de l’origine et du volume des eaux utilisées ou affectées et compte tenu des variations saisonnières et climatiques ; (…) d) Précisant s’il y a lieu les mesures correctives ou compensatoires envisagées. Ce document est adapté à l’importance du projet et de ses incidences. Les informations qu’il doit contenir peuvent être précisées par un arrêté du ministre chargé de l’environnement. (…) » ;

5. Considérant que le premier rapport hydrogéologique établi le 2 août 2002 a fait l’objet d’une actualisation en juin 2009 ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que la mise à jour à laquelle il a été procédé dans le nouveau rapport et qui intègre notamment les consommations annuelles jusqu’à l’année 2008 serait insuffisante ou trop sommaire ; que si les valeurs des débits qu’il prend en compte pour le calcul de la production des sources sont celles mesurées en 1995 et 2002, il n’apparaît pas que ces données seraient trop anciennes et ne correspondraient plus à la situation existant en 2009 ; que ce document comporte bien une partie consacrée à l’analyse des incidences du projet ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, cette analyse qui porte sur les différents points énumérés au a) du 4°de l’article R. 214-32 du code de l’environnement ne présente pas un caractère lacunaire ; que, par suite, M. A… n’est pas fondé à soutenir que l’arrêté attaqué en tant qu’il donne récépissé de la déclaration de prélèvement d’eau serait entaché d’un vice de procédure ;

6. Considérant que la circonstance que le conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques, appelé à donner un avis sur la délimitation des périmètres de protection autour des points de captage des sources de Bugney et de la Dière, ait compté parmi ses membres, au titre des personnalités qualifiées, l’hydrogéologue qui a rédigé le rapport du 2 août 2002 n’est pas, en l’espèce, de nature à faire regarder l’avis émis par cet organisme consultatif comme irrégulier, dès lors qu’il est constant que cette personne n’a pas siégé lors de la séance du 27 juillet 2010 au cours de laquelle a été examiné ce dossier ;

Sur la légalité de l’arrêté attaqué en tant qu’il déclare d’utilité publique le périmètre de protection rapprochée autour des captages des sources de la Dière et de Bugney :

7. Considérant qu’aux termes de l’article L. 215-13 du code de l’ environnement : « La dérivation des eaux d’un cours d’eau non domanial, d’une source ou d’eaux souterraines, entreprise dans un but d’intérêt général par une collectivité publique ou son concessionnaire, par une association syndicale ou par tout autre établissement public, est autorisée par un acte déclarant d’utilité publique les travaux. » ; qu’aux termes de l’ article L. 1321-2 du code de la santé publique : «  En vue d’assurer la protection de la qualité des eaux, l’acte portant déclaration d’utilité publique des travaux de prélèvement d’eau destinée à l’alimentation des collectivités humaines mentionné à l’article L. 215-13 du code de l’environnement détermine autour du point de prélèvement un périmètre de protection immédiate dont les terrains sont à acquérir en pleine propriété, un périmètre de protection rapprochée à l’intérieur duquel peuvent être interdits ou réglementés toutes sortes d’installations, travaux, activités, dépôts, ouvrages, aménagement ou occupation des sols de nature à nuire directement ou indirectement à la qualité des eaux et, le cas échéant, un périmètre de protection éloignée à l’intérieur duquel peuvent être réglementés les installations, travaux, activités, dépôts, ouvrages, aménagement ou occupation des sols et dépôts ci-dessus mentionnés. (…) » ;

8. Considérant qu’une opération ne peut être légalement déclarée d’utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d’ordre social ou l’atteinte à d’autres intérêts publics qu’elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l’utilité qu’elle présente ;

9. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que les sources de la Dière et de Bugney, qui émergent au contact entre des formations calcaires et un soubassement argileux, sont alimentées par les précipitations tombant sur des affleurements calcaires et qu’eu égard à la circulation rapide et sans aucune filtration des eaux souterraines dans cette formation géologique ainsi qu’à la vulnérabilité des eaux captées, en raison notamment de la proximité de la route départementale D. 71, un périmètre de protection plus large que le seul bassin d’alimentation théorique calculé à partir du débit des sources est nécessaire ;

10. Considérant que les parcelles 1030 et 1029 sont situées à proximité des deux ouvrages de captage de la source de Bugney ; qu’une partie de la parcelle 1006 est très proche du périmètre de protection immédiate ; que la seule circonstance qu’elles soient en contrebas, d’environ 10 à 15 m, des points de prélèvement ne peut suffire à démontrer, eu égard à la nature argileuse des terres en cet endroit, que les eaux pluviales s’infiltrant dans ces terrains ne pourraient en aucune façon rejoindre la nappe souterraine alimentant la source ;

11. Considérant que la parcelle 1061, laquelle au demeurant n’est pas en contrebas de cette source, n’est pas à une distance de la source telle que son inclusion dans le périmètre de protection rapprochée puisse être regardée comme excessive, eu égard à la nécessité de garantir la qualité des eaux destinées à la consommation humaine ; qu’il en va de même des parcelles 351, 352 et 359, situées en amont de la chambre de captage de la source de la Dière, et incluses dans le périmètre de protection rapprochée défini autour de cet ouvrage ;

12. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. A… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ; qu’il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A… est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B… A… et au ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

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N° 12NC00307

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