Cour administrative d'appel de Nancy, 3e chambre, 18 mars 2021, n° 20NC02080

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nancy, 3e ch., 18 mars 2021, n° 20NC02080
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro : 20NC02080
Décision précédente : Tribunal administratif de Nancy, 31 mars 2020, N° 2000065
Dispositif : Satisfaction partielle

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B D a demandé au tribunal administratif de Nancy d’annuler l’arrêté du 29 novembre 2019 par lequel le préfet des Vosges a refusé de lui renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d’office à la frontière.

Par un jugement n° 2000065 du 1er avril 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande de M. D.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2020, M. B D, représenté par Me E, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement n° 2000065 du tribunal administratif de Nancy du 1er avril 2020 ;

2°) d’annuler l’arrêté du préfet des Vosges du 29 novembre 2019 ;

3°) d’enjoindre au préfet des Vosges, dans un délai de quinze jours à compter de l’arrêt à intervenir et sous astreinte de cent euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « étudiant » ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— la décision portant refus de renouvellement d’un titre de séjour est entachée d’une erreur de droit dès lors qu’il aurait dû bénéficier d’un renouvellement de plein droit de son titre de séjour en application des dispositions du 4° du II de l’article L. 313-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— en retenant l’absence de caractère sérieux des études poursuivies, la décision en litige est entachée d’une erreur de droit et d’une erreur d’appréciation au regard des articles L. 313-7 et R. 313-26 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— le préfet s’est livré à une appréciation erronée des critères énoncés dans la circulaire du ministère de l’intérieur du 7 octobre 2008, relative à l’appréciation du caractère réel et sérieux des études des étudiants étrangers.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 février 2021, le préfet des Vosges conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par M. D ne sont pas fondés.

M. D a été admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par une décision du 18 août 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

— le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

— le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. C,

— et les observations de Me E pour M. D.

Considérant ce qui suit :

1. M. B D est un ressortissant tunisien né le 10 mai 1994. Il est entré régulièrement en France, le 27 août 2012, sous couvert de son passeport revêtu d’un visa de long séjour. Il a été mis en possession d’un titre de séjour portant la mention « étudiant » sur le fondement des dispositions du I de l’article L. 313-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, qui a été régulièrement renouvelé jusqu’au 30 novembre 2018 afin de lui permettre de poursuivre ses études universitaires en droit. Le requérant a sollicité une nouvelle fois le renouvellement de ce titre. Toutefois, par un arrêté du 29 novembre 2019, le préfet des Vosges a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de son éventuelle reconduite d’office à la frontière. M. D a saisi le tribunal administratif de Nancy d’une demande tendant à l’annulation de l’arrêté préfectoral du 29 novembre 2019. Il relève appel du jugement n° 2000065 du 1er avril 2020 qui rejette sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision portant refus de renouvellement d’un titre de séjour :

2. Aux termes du premier alinéa du premier paragraphe de l’article L. 313-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa rédaction alors applicable : « I. – La carte de séjour temporaire accordée à l’étranger qui établit qu’il suit en France un enseignement ou qu’il y fait des études et qui justifie qu’il dispose de moyens d’existence suffisants porte la mention » étudiant « . En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l’étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l’âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l’autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l’article L. 313-2 soit exigée et sous réserve d’une entrée régulière en France. () ». Pour l’application de ces dispositions, il appartient à l’administration, saisie d’une demande de renouvellement d’une carte de séjour temporaire portant la mention « étudiant », d’apprécier, sous le contrôle du juge administratif de l’excès de pouvoir, la réalité et le sérieux des études poursuivies. A cet égard, le caractère réel et sérieux de ces études est subordonné à une progression régulière de l’étudiant et à la cohérence de son parcours.

3. Il ressort des pièces du dossier que M. D est entré en France le 27 août 2012 pour y suivre des études de droit. Il s’est inscrit successivement à la faculté de droit René Descartes de Paris pour les années universitaires 2012-2013 à 2017-2018, à la faculté libre de droit, d’économie et de gestion de Paris pour l’année universitaire 2018-2019 et à la faculté de droit, des sciences économiques et de gestion de Nancy pour les années 2019-2020 et 2020-2021. Il est constant que le requérant a validé ses deux premières années de licence au terme de ses quatre premières années d’études. S’il est vrai qu’il a échoué, à trois reprises, à obtenir sa licence, l’intéressé fait valoir, sans être sérieusement contredit, que la progression de ses études a été perturbée par la maladie grave contractée par son frère à partir de 2017 et qu’il s’est trouvé dans l’impossibilité de se présenter aux examens à l’issue de son année universitaire 2018-2019 à la faculté libre de droit, d’économie et de gestion de Paris, faute d’avoir pu acquitter la totalité des frais d’inscription demandés par cet établissement. Il ressort, en outre, des pièces du dossier que, postérieurement à la décision en litige, M. D a validé sa troisième année de licence à l’issue de son année universitaire 2019-2020 au sein de la Faculté de droit, des sciences économiques et de gestion de Nancy et qu’il est désormais inscrit, pour l’année universitaire en cours, en master I « Droit public ». Dans ces conditions, eu égard à la cohérence du parcours de M. D et nonobstant la lenteur de sa progression, le préfet des Vosges a commis une erreur dans son appréciation de la réalité et du sérieux des études poursuivies par l’intéressé.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. D est fondé à demander l’annulation de l’arrêté du préfet des Vosges du 29 novembre 2019. Par suite, il est également fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d’injonction :

5. Eu égard au motif d’annulation retenu, l’exécution du présent arrêt implique nécessairement qu’il soit enjoint au préfet des Vosges, dans les deux mois suivant sa notification, de délivrer à M. D un titre de séjour « étudiant ». Il n’y a pas lieu, en revanche, d’assortir cette injonction d’une astreinte.

Sur les frais de justice :

6. M. D ayant obtenu le bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par une décision du 18 août 2020, les conclusions de l’intéressé, présentées sur le seul fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu’être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2000065 du tribunal administratif de Nancy du 1er avril 2020 est annulé.

Article 2 : L’arrêté du préfet des Vosges du 29 novembre 2019 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet des Vosges de délivrer à M. D un titre de séjour « étudiant » dans les deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Me E pour M. B D en application des dispositions de l’article 6 du décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et au ministre de l’intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Vosges.4

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