Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, du 30 décembre 1993, 93PA00407 93PA00232, publié au recueil Lebon

  • Acte anormal de gestion -avantages consentis à des filiales·
  • Absence d'effet sur la règle de territorialité de l'impôt·
  • Application limitée de la législation fiscale française·
  • Territorialite de l'impôt plateau continental·
  • Règles générales propres aux divers impôts·
  • Bénéfices industriels et commerciaux·
  • Impôts sur les revenus et bénéfices·
  • Conventions bilaterales -cameroun·
  • Revenus et bénéfices imposables·
  • Détermination du bénéfice net

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

La convention franco-camerounaise du 21 octobre 1976 ne fait pas obstacle à la règle de territorialité de l’impôt, énoncée à l’article 209-I du code général des impôts, selon laquelle ne peuvent être prises en compte, pour la détermination du bénéfice imposable en France à l’impôt sur les sociétés, des charges qui se rapportent à une activité exercée dans un établissement situé hors de France. (1) L’article 2 de la convention de Genève du 29 avril 1958 sur le plateau continental stipule que l’Etat riverain exerce des droits souverains sur le plateau continental aux fins de l’exploration de celui-ci et de l’exploitation de ses ressources naturelles. L’article 15 de la loi n° 68-1181 du 30 décembre 1968, qui a tiré les conséquences de cette souveraineté en matière douanière et fiscale, a limité le champ d’application de la législation fiscale française aux seuls produits extraits du plateau continental. Des prestations de services d’études, sondages et expertises géophysiques dispensées sur le plateau continental ne peuvent être regardées comme des produits extraits du plateau continental. Il ne peut dès lors en être tenu compte pour déterminer les bases de l’impôt dû par la société qui les effectue. (2) Il résulte des dispositions de l’article 209-I du code général des impôts, auxquelles ne font pas obstacle les stipulations de l’article 10 de la convention franco-camerounaise du 21 octobre 1976, que des charges se rapportant à une activité exercée hors de France dans un établissement stable ne peuvent être prises en compte pour la détermination du bénéfice imposable en France. Ce principe s’applique tant aux frais de siège d’un établissement stable situé au Cameroun qu’aux frais financiers afférents à des établissements situés hors de France, qui exercent des activités distinctes de celles que la société exerce en France.

Le prêt sans intérêt consenti par une société à sa filiale constitue un acte anormal de gestion, en l’absence de toute difficulté financière de la société bénéficiaire du prêt et de toute contrepartie commerciale retirée par la société de sa renonciation à percevoir des intérêts.

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Conclusions du rapporteur public

93PA00232 93PA00407 Sté SCHLUMBERGER […] Audience du 21 décembre 1993 Lecture du 30 décembre 1993 CONCLUSIONS de Mme X, Commissaire du Gouvernement Par deux requêtes distinctes, le […] et la société SCHLUMBERGER font régulièrement appel du même jugement en date du 12 mai 1992 par lequel le tribunal administratif de Paris a, d'une part, accordé la décharge du complément d'impôt sur les sociétés mis à la charge de la société au titre de 1976, à raison des prestations de services rendues sur le plateau continental, d'autre part, rejeté sa demande en réduction de complément d'impôt sur les …

 
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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 2e ch., 30 déc. 1993, n° 93PA00407 93PA00232, Lebon
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 93PA00407 93PA00232
Importance : Publié au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux fiscal
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 11 mai 1992
Textes appliqués :
CGI 209 par. 1, 39

Code des douanes 1

Convention 1958-04-29 Genève plateau continental art. 2

Convention fiscale 1976-10-21 France Cameroun art. 10

Loi 68-1181 1968-12-30 art. 1, art. 15, art. 5, art. 19

Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000007428885

Sur les parties

Texte intégral


Vu I) enregistrée le 4 mai 1993 sous le n° 93PA00407, la requête du ministre du budget, porte-parole du gouvernement tendant à ce que la cour :
1°) rétablisse la société de prospection électrique Schlumberger au rôle supplémentaire de l’impôt sur les sociétés émis au titre de 1976, à concurrence de 683.984 F en droits et 185.506 F en pénalités ;
2°) réforme en ce sens le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 12 mai 1992 ;
Vu II) enregistrée le 5 mars 1993 sous le n° 93PA00232, la requête de la société de prospection électrique Schlumberger, dont le siège est … (7e) ;
La société demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 12 mai 1992 en ce qu’il n’a pas fait droit à ses demandes concernant la prise en compte des frais de siège imputables à l’établissement camerounais et l’exclusion des frais financiers réintégrés à la base imposable de l’exercice 1979 ;
2°) de lui accorder la décharge sollicitée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la Convention sur le plateau continental du 29 avril 1958, publiée par le décret n° 65-1049 du 29 novembre 1965 ;
Vu la loi n° 68-1181 du 30 décembre 1968 relative à l’exploration du plateau continental et à l’exploitation de ses ressources naturelles ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 21 décembre 1993 :
 – le rapport de M. Brotons, conseiller ;
 – et les conclusions de Mme Albanel, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que le recours du ministre du budget, porte-parole du gouvernement et la requête de la société de prospection électrique Schlumberger sont dirigés contre un même jugement par lequel il a été statué sur la demande de ladite société ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur l’appel du ministre :
Considérant qu’aux termes de l’article 209-1 du code général des impôts « les bénéfices passibles de l’impôt sur les sociétés sont déterminés … en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France » ; que le plateau continental ne fait pas partie du territoire soumis à la souveraineté de l’Etat français ; que l’article 2 de la Convention de Genève du 29 avril 1958 applicable en l’espèce stipule toutefois que l’Etat riverain exerce des droits souverains sur le plateau continental aux fins de l’exploration de celui-ci et de l’exploitation de ses ressources naturelles ; que la France a tiré pleinement et exclusivement les conséquences de ce principe en matière douanière et fiscale par le titre III « dispositions financières et fiscales » de la loi du 30 décembre 1968 dont l’article 1er dispose que « le plateau continental … est soumis à un régime juridique unique fixé par la présente loi » ; que l’article 15 de cette loi dispose qu'"en matière douanière les produits extraits du plateau continental sont considérés comme extraits du territoire douanier prévu par l’article 1er du code des Douanes ; les mêmes produits doivent pour l’application de la législation fiscale être considérés comme extraits du territoire fiscal métropolitain" ; que ces dispositions limitent clairement le champ d’application de la législation fiscale française, telle qu’elle résulte notamment de l’article 209-1 précité du code général des impôts, aux produits extraits du plateau continental et que, contrairement à ce que soutient le ministre, les dispositions combinées des articles 5 et 19 de la loi ne sont pas de nature à conférer à celles de l’article 15 une portée autre que celle qui ressort clairement de son texte même et qui d’ailleurs n’est en rien infirmée par les travaux préparatoires de la loi ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction que la SA de prospection électrique Schlumberger, société française dont le siège est à Paris, dispense en mer d’Iroise sur le plateau continental, sur lequel l’Etat français exerce les droits définis par l’article 2 de la convention de Genève, des prestations de services d’études, sondages et expertises géophysiques ; que si ces prestations contribuent, comme le souligne le ministre, à l’exploration du plateau continental, elles ne peuvent être pour autant regardées comme des « produits extraits du plateau continental » que l’article 15 de la loi du 30 décembre 1986 a soumis seulement au champ d’application territorial de la loi fiscale française, dès lors, en toute hypothèse, qu’il n’est allégué par aucune des parties et ne ressort d’aucune pièce du dossier que les prestations litigieuses n’aient pas été dispensées dans le cadre d’un établissement stable ou d’un cycle complet d’opérations sur le plateau continental ; qu’il suit de là que le ministre n’est pas fondé à demander la réformation du jugement entrepris en ce qu’il a réduit les cotisations supplémentaires assignées à la société requérante à proportion des bases afférentes aux prestations de service qu’elle a dispensées en mer d’Iroise sur le plateau continental ;
Sur l’appel de la société :
En ce qui concerne les frais de siège imputables à l’établissement camerounais :
Considérant que la société requérante, qui possède un établissement stable au Cameroun a retranché de son résultat imposable en France de l’exercice 1979, la partie des frais de siège afférents à son établissement stable qui n’avait pas été admise en déduction des résultats dudit établissement par les autorités camerounaises ;
Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article 10 de la Convention franco-camerounaise du 21 octobre 1976, entrée en vigueur le 19 juillet 1978 : « 1. Les revenus des entreprises industrielles, minières, commerciales ou financières ne sont imposables que dans l’Etat sur le territoire duquel se trouve un établissement stable … 2 »lorsqu’une entreprise possède des établissements stables dans les deux Etats contractant chacun d’eux ne peut imposer que le revenu provenant de l’activité des établissements stables situés sur son territoire« 3 … une quote-part des frais généraux du siège de l’entreprise est imputable aux résultats des différents établissements stables dans les conditions déterminées par la législation de chaque Etat » ;

Considérant d’autre part, qu’aux termes de l’article 209 du code général des impôts dans sa rédaction applicable : « I. Sous réserve des dispositions de la présente section, les bénéfices passibles de l’impôt sur les sociétés sont déterminés d’après les règles fixées par les articles 34 à 45, 53 à 57 et 302 septies A bis et en tenant compte uniquement des bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en France ainsi que de ceux dont l’imposition est attribuée à la France par une convention internationale relative aux doubles impositions » et que l’article 39 du même code dispose : « Le bénéfice est établi sous déduction de toutes charges, celle-ci comprenant … notamment : 1° Les frais généraux de toute nature » ; qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsqu’une société dont le siège est en France exerce dans un établissement situé hors de France une activité industrielle ou commerciale distincte, elle ne peut pas tenir compte, pour la détermination du bénéfice imposable en France à l’impôt sur les sociétés, des charges qui se rapportent à son activité exercée dans l’établissement situé hors de France ; que, pour ventiler la fraction des frais généraux du siège de la société qui se rapporte à cette dernière activité, la société peut, à défaut de circonstances particulière propres à justifier un autre mode de calcul se référer au rapport existant entre le chiffre d’affaires de cet établissement et le chiffre d’affaires total de la société ;
Considérant que la circonstance que l’administration fiscale du Cameroun ait en vertu de la législation de cet Etat limité l’imputabilité des frais de siège sur les résultats de l’établissement à 10 % seulement du bénéfice imposable de la société avant déduction desdits frais, si elle peut être le cas échéant de nature à donner lieu à l’application de l’article 41 de la convention précitée, n’autorisait pas la société requérante à déduire le montant des frais dont l’imputation lui a été par suite refusée sur les résultats de l’établissement, du résultat légalement imposable en France ; que, dès lors, c’est en conformité tant avec les stipulations de ladite convention que de la législation interne et donc à bon droit que l’administration a procédé à la réintégration de la somme de 1.284.720 F dans les bases de la société imposable à l’impôt sur les sociétés au titre de l’exercice 1979 ;
En ce qui concerne les frais financiers :
Considérant que l’administration a réintégré dans les bases imposables de la société au titre de l’exercice 1979 une quote-part représentant 91,7 % des frais financiers supportés par la requérante, en conséquence d’un emprunt qu’elle avait contracté en 1979 auprès de la société Forex Neptune, pour un montant de 145.078.255 F ; que la société persiste à contester cette réintégration ;
Considérant que l’emprunt en cause a été utilisé pour l’exploitation des établissements étrangers de ladite société, et pour accorder un prêt sans intérêts à la société Etudes et productions Schlumberger, filiale de la requérante ;

Considérant, en premier lieu, qu’il n’est pas contesté que les établissements situés à l’étranger de la société de prospection électrique Schlumberger se livrent à des activités distinctes de celles de cette dernière, imposables hors de France ; que, dès lors, en application du principe de territorialité de l’impôt énoncé par l’article 209-1 précité du code général des impôts, il ne peut être tenu compte, dans les charges ayant grevé le résultat de l’exercice 1979 de la société requérante, de l’intégralité des charges de l’emprunt ainsi contracté ; que le service était donc fondé à exclure desdites charges la quote-part afférente à l’activité des établissements étrangers ; qu’en outre la circonstance que les frais litigieux aient notamment eu pour objet de réaliser des investissements qui n’étaient pas propres à l’activité de telle ou telle des succursales étrangères mais ont été utilisés tout à tour par elles ne suffit pas à elle seule et faute pour la requérante d’établir qu’ils ont servi à la réalisation de bénéfices imposables en France, à permettre leur imputation sur le résultat de la société imposable en France ; qu’enfin la requérante ne saurait utilement s’opposer à la réintégration litigieuse en faisant état de ce qu’elle déclarait à l’imposition en France des produits financiers correspondant à des placements de trésorerie alimentés par les bénéfices réalisés par ses succursales étrangères ;
Considérant, en second lieu, que la société de prospection électrique Schlumberger a consenti en 1979 un prêt sans intérêt d’un montant de 96.000.000 de francs à sa filiale la société Etudes et productions Schlumberger ; que le vérificateur regardant cette opération comme constitutive d’un acte anormal de gestion a réintégré au résultat imposable de la société pour ladite année une somme correspondant à la renonciation de recettes ainsi constatée ;
Considérant, d’une part, que si la société requérante invoque l’intérêt qu’elle avait à dispenser sa filiale du paiement de toute rémunération sur les fonds prêtés afin d’améliorer la trésorerie de celle-ci cette circonstance n’est, en l’absence non contestée de toute difficulté financière de la société bénéficiaire de l’avance, pas de nature à justifier l’avantage ainsi consenti ;
Considérant, d’autre part, que si la société invoque un intérêt en tant que cliente de sa filiale pour justifier l’opération litigieuse, et fait état à cet égard d’une instruction administrative qui n’exigerait pas, en cas de contrepartie de nature commerciale, que la filiale fût en difficulté, son allégation n’est en tout état de cause pas assortie de précisions suffisantes, permettant d’apprécier la réalité de la contrepartie invoquée ;
Considérant que, dès lors, le ministre, en se prévalant de l’absence de contrepartie retirée par la société requérante de sa renonciation à percevoir des intérêts, apporte la preuve du bien-fondé des redressements litigieux ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté le surplus de sa demande ;
Article 1er : La requête du ministre du budget, porte-parole du Gouvernement et la requête de la société de prospection électrique Schlumberger sont rejetées.

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