Cour administrative d'appel de Paris, 18 mars 2014, n° 12PA03703

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 18 mars 2014, n° 12PA03703
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 12PA03703
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 28 juin 2012, N° 1111976/3-3

Sur les parties

Texte intégral

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL

DE PARIS

N° 12PA03703

__________

Mme X et autres

__________

Mme Coënt-Bochard

Président

__________

Mme Vrignon

Rapporteur

__________

M. Rousset

Rapporteur public

__________

Audience du 11 février 2014

Lecture du 18 mars 2014

__________

49-03-04

49-05-04

C

A.L.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La Cour administrative d’appel de Paris

(4e Chambre)

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 28 août et 17 octobre 2012, présentés pour Mme B X, demeurant XXX à XXX, Mme H I, demeurant XXX à XXX, M. L M, demeurant XXX à XXX, Mme J K, demeurant XXX à XXX, M. Z A , demeurant XXX à XXX, M. Q-R S, demeurant XXX à XXX, Mme F G, demeurant XXX à XXX, M. Q-U V, demeurant XXX à XXX, Mme N O P, demeurant XXX à XXX et M. D E, demeurant XXX à XXX, par Me Crusoé ;

Mme X et autres demandent à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 1111976/3-3 du 29 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l’annulation de l’arrêté en date du 31 mai 2011 par lequel le préfet de police a interdit la consommation de boissons alcooliques sur le domaine public de 16h à 7h, ainsi que la vente à emporter de boissons alcooliques du 2° au 5° groupe, de 22h30 à 7h, sur certaines voies du 13e arrondissement de Paris ;

2°) d’annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et la somme de 35 euros correspondant à la contribution pour l’aide juridique prévue par l’article R. 761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu l’arrêté des consuls du 12 messidor an VIII qui détermine les fonctions du préfet de police de Paris ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 11 février 2014 :

— le rapport de Mme Vrignon, premier conseiller,

— les conclusions de M. Rousset, rapporteur public,

— et les observations de Me Torregroza, substituant Me Crusoé, avocat de Mme X et autres ;

1. Considérant que Mme X et autres relèvent régulièrement appel du jugement du 29 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l’annulation de l’arrêté en date du 31 mai 2011 par lequel le préfet de police a interdit la consommation de boissons alcooliques sur le domaine public de 16h à 7h, ainsi que la vente à emporter de boissons alcoolisées du 2° au 5° groupe, de 22h30 à 7h, sur certaines voies du 13e arrondissement de Paris ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu’à l’appui de leur demande de première instance, Mme X et autres soutenaient, notamment, que le préfet de police n’était pas compétent pour prendre l’arrêté attaqué ; que le tribunal ne s’est pas prononcé sur ce moyen, qui n’était pas inopérant ; que, par suite, son jugement est entaché d’une omission à statuer et doit, par suite, être annulé ;

3. Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme X et autres devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet de police :

4. Considérant que les requérants ont, en leur qualité de résident du quartier de la butte aux Cailles et, pour certains d’entre eux, de propriétaires d’établissements ou de commerces qui servent ou vendent des boissons alcooliques, intérêt à agir contre l’arrêté attaqué ; que la fin de non-recevoir opposée à leur demande par le préfet de police doit, par suite, être écartée ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

5. Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : « La police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : (…) / 2° Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes et disputes accompagnées d’ameutements dans les rues, le tumulte excité dans les lieux d’assemblée publique, les attroupements, les bruits, les troubles de voisinage, les rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 2512-13 de ce même code : « Dans la commune de Paris, le préfet de police exerce les pouvoirs et attributions qui lui sont conférés par l’arrêté des consuls du 12 messidor an VIII qui détermine les fonctions du préfet de police à Paris et par les textes qui l’ont modifié ainsi que par les articles L. 2512-7, L. 2512-14 et L. 2512-17. / Toutefois, dans les conditions définies par le présent code et le code de la santé publique, le maire de Paris est chargé de la police municipale en matière de salubrité sur la voie publique, des bruits de voisinage ainsi que du maintien du bon ordre dans les foires et marchés. Les services correspondant à ces missions sont mis à la disposition de la mairie de Paris par l’Etat. » ; que selon l’article L. 3332-15 du code de la santé publique : « 1. La fermeture des débits de boissons et des restaurants peut être ordonnée par le représentant de l’Etat dans le département pour une durée n’excédant pas six mois, à la suite d’infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements. Cette fermeture doit être précédée d’un avertissement qui peut, le cas échéant, s’y substituer, lorsque les faits susceptibles de justifier cette fermeture résultent d’une défaillance exceptionnelle de l’exploitant ou à laquelle il lui est aisé de remédier. / 2. En cas d’atteinte à l’ordre public, à la santé, à la tranquillité ou à la moralité publiques, la fermeture peut être ordonnée par le représentant de l’Etat dans le département pour une durée n’excédant pas deux mois. Le représentant de l’Etat dans le département peut réduire la durée de cette fermeture lorsque l’exploitant s’engage à suivre la formation donnant lieu à la délivrance d’un permis d’exploitation visé à l’article L. 3332-1-1. »

6. Considérant, d’autre part, que dès lors que l’exercice de pouvoirs de police administrative est susceptible d’affecter des activités de production, de distribution ou de services, la circonstance que les mesures de police ont pour objectif la protection de l’ordre public ou, dans certains cas, la sauvegarde des intérêts spécifiques que l’administration a pour mission de protéger ou de garantir n’exonère pas l’autorité investie de ces pouvoirs de police de l’obligation de prendre en compte la liberté du commerce et de l’industrie et les règles de concurrence ; qu’il appartient au juge de l’excès de pouvoir d’apprécier la légalité de ces mesures de police administrative en recherchant si elles ont été prises compte tenu de l’ensemble de ces objectifs et de ces règles et si elles en ont fait, en les combinant, une exacte application ;

7. Considérant, que par arrêté n° 2011-00400 du 31 mai 2011, le préfet de police a, sur le fondement des dispositions de l’article L. 2512-13 du code général des collectivités territoriales et du code de la santé publique, interdit la consommation de boissons alcooliques sur le domaine public, sauf dans les parties de ce domaine régulièrement occupées par des restaurants et débits de boissons titulaires des autorisations nécessaires, de 16h à 7h, ainsi que la vente à emporter de boissons alcooliques du 2e au 5e groupe, de 22h30 à 7h, à l’intérieur d’un périmètre délimité par le boulevard Blanqui entre les rues Barrault et XXX, au motif que « des troubles et des nuisances sont occasionnés par des personnes consommant de l’alcool, sur le domaine public, dans certaines voies du 13e arrondissement, qu’il a été établi qu’un certain nombre d’infractions et d’actes de violence commis dans ce secteur sont directement liés à la consommation d’alcool et que la vente à emporter de boissons alcooliques, particulièrement en période nocturne, peut être à l’origine de tels comportements et constitue un facteur générateur de troubles à l’ordre et à la tranquillité publics » ;

8. Considérant, qu’alors même que le maire de Paris est compétent en matière de police administrative s’agissant des bruits de voisinage, le préfet de police tient des pouvoirs de police générale et spéciale dont il dispose, en vertu des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales et du code de la santé publique, le pouvoir de prendre les mesures nécessaires pour faire cesser les troubles à l’ordre public et à la tranquillité publique liés à la présence sur la voie publique, à proximité de certains restaurants et débits de boissons, de personnes consommant des boissons servies par ces établissements ;

9. Considérant, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier, et en particulier du rapport en date du 18 mars 2011 adressé par le commissaire divisionnaire du 13e arrondissement au directeur de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne et de la lettre du 2 mai 2011 adressée au maire du 13e arrondissement par le préfet de police, qui ne sont corroborés par aucune autre pièce du dossier, que des infractions et actes de violence directement liés à la consommation d’alcool auraient été constatés, durant l’année qui a précédé l’arrêté attaqué, dans le périmètre couvert par l’interdiction litigieuse ; que, dès lors, l’arrêté attaqué est, à cet égard, entaché d’erreur de fait ;

10. Considérant, par ailleurs, que la seule existence de nuisances sonores résultant de la fréquentation de certains restaurants ou débits de boisson du quartier, dont se sont plaints certains riverains, n’est pas de nature à justifier la mesure d’interdiction contestée, eu égard, d’une part, au champ d’application matériel et géographique et à la portée de cette interdiction et, d’autre part, à la circonstance que, s’agissant de nuisances sonores provenant exclusivement d’établissements précisément identifiés, le préfet de police pouvait notamment mettre en œuvre les pouvoirs de police spéciale qu’il tient des dispositions de l’article L. 3332-15 du code de la santé publique ;

11. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ;

Sur les dépens :

12. Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de faire droit aux conclusions des requérants tendant à ce que l’Etat supporte la charge de la contribution pour l’aide juridique prévue par les dispositions de l’article R761-1 du code de justice administrative applicables à la date d’introduction de la requête ;

Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par les requérants et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1111976/3-3 du 29 juin 2012 du Tribunal administratif de Paris et l’arrêté n° 2011-00400 en date du 31 mai 2011 du préfet de police de Paris sont annulés.

Article 2 : La contribution pour l’aide juridique acquittée par Mme X et autres est mise à la charge de l’Etat en application de l’article R. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : L’Etat versera à Mme X et autres une somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

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