CAA de PARIS, 9ème chambre, 25 avril 2019, 17PA03065, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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CMS Bureau Francis Lefebvre · 24 février 2021

Précisions du Conseil d'Etat sur la caractérisation d'un établissement stable pour les agents dépendants, et plus particulièrement sur leur « pouvoir d'engager ». En présence d'un agent dépendant, œuvrant en France pour une société étrangère, la question se pose de savoir à partir de quand cet agent est considéré comme engageant cette société étrangère, caractérisant alors un établissement stable. Retenant le caractère automatique et purement formel de la signature par la société étrangère, le Conseil d'Etat, dans une décision Conversant[1], caractérise ainsi l'existence, en France, d'un …

 

www.actu-juridique.fr · 17 décembre 2019
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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 9e ch., 25 avr. 2019, n° 17PA03065
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 17PA03065
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 11 juillet 2017, N° 1505147/1-1
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000038420177

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Google Ireland Limited a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge de la cotisation minimale de taxe professionnelle qui lui a été assignée au titre de l’année 2009 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1505147/1-1 du 12 juillet 2017, le Tribunal administratif de Paris a fait droit à sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 septembre 2017 et 30 novembre 2018, le ministre de l’action et des comptes publics demande à la Cour d’annuler le jugement n° 1505147/1-1 du 12 juillet 2017 du Tribunal administratif de Paris et de remettre à la charge de la société Google Ireland Limited l’imposition et les pénalités dont les premiers juges ont prononcé la décharge.

Il soutient que :

— le critère d’assujettissement à la cotisation minimale de taxe professionnelle est l’exercice d’une activité professionnelle en France ; une entreprise peut être assujettie à cet impôt sans disposer d’immobilisations sur le sol français, contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal administratif ;

 – en l’espèce, la société Google Ireland Limited exerce une activité professionnelle en France, où elle exploite une entreprise, au sens de l’article 209, I, du code général des impôts, en vendant des espaces publicitaires à des clients français ;

 – en tout état de cause, la société Google Ireland Limited dispose en France d’immobilisations affectées à cette activité de vente d’espaces publicitaires.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 31 janvier 2018 et 27 décembre 2018, la société Google Ireland Limited conclut au rejet de la requête du ministre et demande que soit mis à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— à titre principal, les moyens soulevés par le ministre ne sont pas fondés ;

 – à titre subsidiaire, l’administration aurait dû inclure dans les consommations de biens et services en provenance de tiers, à prendre en compte pour le calcul de la valeur ajoutée tel que défini par le II de l’article 1647 B sexies du code général des impôts, la fraction des redevances censée être versée par son établissement stable français à la société Google Netherlands Holdings BV.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. Dalle,

 – les conclusions de Mme Mielnik Meddah, rapporteur public,

 – et les observations de M. A… et de M. B…, pour le ministre de l’action et des comptes publics, ainsi que de Me Meier, avocat de la société Google Ireland Limited.

Considérant ce qui suit :

1. L’administration fiscale a diligenté en 2010, 2011 et 2012 différents contrôles à l’encontre de sociétés du groupe Google. A l’issue de ces opérations, elle a estimé que la société de droit irlandais Google Ireland Limited, dont le siège est à Dublin, exerçait en France à titre habituel une activité professionnelle de vente de publicité par l’intermédiaire d’un établissement stable. Elle a en conséquence assujetti cette société, au titre de l’année 2009, à la cotisation minimale de taxe professionnelle, à concurrence de la valeur ajoutée attribuée à cet établissement. Le ministre de l’action et des comptes publics relève appel du jugement du 12 juillet 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a déchargé la société Google Ireland Limited de cette imposition.

2. Aux termes de l’article 1447 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l’année en litige : « La taxe professionnelle des entreprises est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée ». Aux termes de l’article 1467 du même code, dans sa rédaction applicable à l’année d’imposition en litige : " La taxe professionnelle a pour base : 1° Dans le cas des contribuables autres que [les titulaires de bénéfices non commerciaux] : a) la valeur locative (…) des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle (…) « . Selon l’article 1473 du code, dans sa rédaction applicable à l’année d’imposition en litige : » La taxe professionnelle est établie dans chaque commune où le redevable dispose de locaux ou de terrains, en raison de la valeur locative des biens qui y sont situés ou rattachés et des salaires versés au personnel (…) « . Aux termes de l’article 1647 E du code général des impôts, alors en vigueur : » I. La cotisation de taxe professionnelle des entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 7 600 000 euros est au moins égale à 1,5 % de la valeur ajoutée produite par l’entreprise, telle que définie au II de l’article 1647 B sexies. Le chiffre d’affaires et la valeur ajoutée à prendre en compte sont ceux de l’exercice de douze mois clos pendant l’année d’imposition ou, à défaut d’un tel exercice, ceux de l’année d’imposition ". La taxe professionnelle et la cotisation minimale de taxe professionnelle, qui résulte de la différence arithmétique entre une fraction de la valeur ajoutée produite au cours d’une année par le redevable et le montant de la cotisation de taxe professionnelle qu’il a acquittée au titre de la même année sur la base des déclarations qu’il a établies l’année précédente, sont les deux composantes d’un même impôt.

3. Le groupe Google, qui exploite un moteur de recherche sur Internet, propose en outre un service payant, « AdWords », permettant à tout annonceur, par référencement préalable d’un ou plusieurs mots-clés, de commander l’apparition à l’écran, lorsque la requête adressée par un internaute au moteur de recherche contient ce ou ces mots-clés, d’un lien promotionnel accompagné d’un bref message publicitaire, cette annonce s’affichant, en partie latérale ou supérieure de l’écran, en supplément des résultats générés spontanément par le moteur de recherche. Ce service payant de référencement est facturé à l’annonceur à raison de chaque clic d’internaute sur le lien promotionnel, son prix prenant également en compte le coût maximal par clic que l’annonceur a déclaré être prêt à assumer. Plusieurs annonceurs pouvant sélectionner les mêmes mots-clés, un système automatisé d’enchères effectue en temps réel la sélection et l’ordre d’affichage des annonces en concurrence, déterminés notamment en fonction du coût maximal par clic, du nombre de clics antérieurs sur les liens concernés ainsi que de la qualité des annonces telle qu’évaluée par Google. Le service « AdWords » est proposé aux annonceurs selon deux modalités, « OSO » (Online Sales Organization) et « DSO » (Direct Sales Organization), la première destinée aux clients souhaitant élaborer eux-mêmes, en ligne, leurs campagnes publicitaires, la seconde incluant un service d’assistance assuré par des salariés de la SARL Google France, destiné à aider les annonceurs, ou leurs agences de publicité, à utiliser au mieux le produit « AdWords ». L’administration a estimé que la société Google Ireland Limited devait être assujettie à la cotisation minimale de taxe professionnelle dès lors qu’elle exerçait en France, à titre habituel, une activité professionnelle non salariée, au sens des dispositions précitées de l’article 1447 du code général des impôts, consistant à vendre, par l’intermédiaire de la SARL Google France, le produit « AdWords » aux clients français ayant choisi la modalité « DSO ».

4. Un contrat de prestations de services (« Marketing and Services Agreement ») a été conclu le 16 mai 2002 entre la société américaine Google Inc. et la SARL Google France. Le 1er juillet 2004, ce contrat a été cédé par Google Inc. à la société Google Ireland Limited. Aux termes de ce contrat, la SARL Google France fournit à la société Google Ireland Limited " tous les services, les conseils, les recommandations et l’assistance requis par [cette dernière] société dans le cadre des activités de soutien au marketing et à la vente pour les services [de recherche] Internet fournis [en France] « . Ces services incluent » les opérations de marketing et la démonstration des services Internet de la Société [Google Ireland Limited] « , la SARL Google France » assist[ant] également [cette dernière] dans l’analyse du marché et l’analyse stratégique, y compris l’analyse de clients potentiels auxquels les services Internet peuvent être vendus « . L’article 2.1. dudit contrat stipule par ailleurs : » Lors de la fourniture de l’assistance de soutien à la vente, [la SARL Google France] comprend et convient qu['elle] n’a pas le pouvoir d’engager la Société [Google Ireland Limited], d’agir comme mandataire ou représentant autorisé à agir en tant que mandataire pour le compte ou au nom de la Société [Google Ireland Limited], ou de signer tout contrat ou accord au nom de la Société. Plus spécifiquement, [la SARL Google France] ne négociera pas de contrats ou de licences pour le compte de la Société [Google Ireland Limited] ni n’acceptera de commandes pour le compte de [cette dernière] ".

5. D’une part, il ne résulte pas de l’instruction que la société Google Ireland Limited aurait disposé en France d’immobilisations, tout au moins de locaux, autres que ceux dont disposait la SARL Google France pour les besoins de sa propre activité de prestataire de services, telle que définie par l’accord de marketing et de services du 16 mai 2002.

6. D’autre part, si le ministre invoque la présence en France de matériels informatiques, tels que « switch routeurs », « backbones » et des travaux de raccordement entre des sites en France abritant des centres de données, la société Google Ireland Limited soutient sans être contredite et sans qu’aucune des pièces du dossier permette de mettre en cause cette affirmation que ces équipements, seulement destinés à améliorer la vitesse de connexion au réseau des utilisateurs français, ont un caractère auxiliaire aux centres de données et aux serveurs hébergeant le moteur de recherche Google, lesquels ne sont pas situés en France mais ailleurs dans le monde, aux Etats-Unis notamment. Or il n’apparaît pas, et le ministre ne soutient pas, que la société Google Ireland Limited aurait un contrôle quelconque sur ces serveurs et centres de données et qu’elle les utiliserait matériellement pour la réalisation des opérations qu’elle effectue, qui consistent à commercialiser les services Google dans la zone Europe Moyen-Orient Afrique.

7. Dans ces conditions, la société Google Ireland Limited, qui ne dispose pas d’immobilisations en France pour les besoins d’une activité professionnelle de vente de publicité, ne peut être assujettie à la cotisation minimale de taxe professionnelle, en tout état de cause, en admettant même qu’elle exerce, à titre habituel, une activité professionnelle non salariée, au sens des dispositions précitées de l’article 1447 du code général des impôts, du fait, notamment, qu’elle aurait effectué dans ce pays des opérations formant un cycle commercial complet.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l’action et des comptes publics n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a prononcé la décharge de l’imposition et des pénalités en litige. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de l’Etat la somme demandée par la société Google Ireland Limited au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête du ministre de l’action et des comptes publics est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Google Ireland Limited au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Google Ireland Limited et au ministre de l’action et des comptes publics.

Délibéré après l’audience du 28 mars 2019 à laquelle siégeaient :
M. Jardin, président de chambre,
M. Dalle, président assesseur,
Mme Stoltz-Valette, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 25 avril 2019.

Le rapporteur, Le président,

D. DALLE C. JARDIN

Le greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l’action et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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N° 17PA03065

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