CAA de TOULOUSE, 2ème chambre, 30 décembre 2022, 21TL00894, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Toulouse, 2e ch., 30 déc. 2022, n° 21TL00894
Juridiction : Cour administrative d'appel de Toulouse
Numéro : 21TL00894
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Sur renvoi de : Conseil d'État, 10 avril 2022
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 28 août 2023
Identifiant Légifrance : CETATEXT000046930345

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A B a demandé au tribunal administratif de Montpellier :

1°) d’annuler la décision du 9 janvier 2019 par laquelle le maire de Castelnau-le-Lez a refusé de reconnaître l’imputabilité au service de l’accident dont elle a été victime le 27 février 2018, ensemble le rejet de son recours gracieux du 25 mars 2019 ;

2°) d’enjoindre à la commune de Castelnau-le-Lez de reconnaître l’imputabilité au service de son accident et de la placer en congé pour accident de travail depuis lors, de lui verser son plein traitement et d’assumer la prise en charge de ses frais médicaux sous un délai de dix jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Castelnau-le-Lez la somme de 2 000 euros à son profit au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1902368 du 30 décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du 9 janvier 2019 par laquelle le maire de Castelnau-le-Lez a refusé de reconnaître l’imputabilité au service de l’accident subi par Mme B le 27 février 2018, ensemble le rejet de son recours gracieux, a enjoint au maire de Castelnau-le-Lez de reconnaître l’imputabilité au service de l’accident du 27 février 2018 subi par Mme B, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de la commune de Castelnau-le-Lez le versement à Mme B de la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 6 mars 2021 et le 22 novembre 2021, sous le n° 21MA00894 au greffe de la cour administrative d’appel de Marseille, puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d’appel de Toulouse sous le n° 21TL00894, et un mémoire enregistré le 25 juillet 2022, la commune de Castelnau-le-Lez, représentée par Me Gely, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du 30 décembre 2020 ;

2°) de rejeter la demande de Mme B devant le tribunal administratif de Montpellier ;

3°) de mettre à la charge de Mme B la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S’agissant de la régularité du jugement :

— il est entaché d’un vice de procédure et d’une violation du principe du contradictoire en l’absence de communication du mémoire de Mme B du 23 novembre 2020, en méconnaissance de l’article R. 611-1 du code de justice administrative ;

— il est entaché d’erreurs de fait et d’erreur de droit au regard des dispositions de l’article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, et d’erreur manifeste d’appréciation en ce que le tribunal a considéré que le comportement de Mme B n’est pas constitutif d’une faute ou d’une circonstance particulière détachant l’accident du service au regard du comportement de l’intéressée pendant l’entretien du 27 février 2018 ;

S’agissant de l’effet dévolutif de l’appel :

— le moyen tiré du défaut de motivation du courrier du 25 mars 2019 est inopérant ;

— les autres moyens invoqués ne sont pas fondés ;

S’agissant de la demande d’exécution du jugement :

— elle doit rejetée en raison de l’exécution complète et effective au regard de la période d’imputabilité définie par le jugement ;

— au surplus, le Conseil d’Etat a opéré un revirement de jurisprudence quant à l’imputabilité au service des entretiens professionnels dans sa décision du 2 septembre 2021 n° 440983.

Par des mémoires, enregistrés les 26 mars 2021 et 8 juin 2022 dans la présente instance, Mme B, représentée par la SCP VPNG et associés, demande, sur le fondement de l’article L. 911-4 du code de justice administrative, d’enjoindre à la commune de Castelnau-le-Lez de reconnaître l’imputabilité au service de son accident du 27 février 2018 et de la placer en congé pour accident de travail jusqu’à la date de consolidation et d’assumer la prise en charge de ses frais médicaux, dans un délai de 10 jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de la commune le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

— l’arrêté du 18 février 2021 ne saurait être regardé comme correspondant à une exécution complète du jugement du 30 décembre 2020 dès lors que la période retenue de prise en charge au titre de l’accident de service est largement inférieure à la durée réelle des séquelles et des soins imputables à celui-ci ;

— la contestation du bien-fondé du jugement dans le cadre d’une procédure d’exécution est inopérante.

Par une ordonnance en date du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d’Etat a attribué à la cour administrative d’appel de Toulouse le jugement du recours de la commune de Castelnau-le-Lez.

Par ordonnance du 19 septembre 2022, la clôture d’instruction a été fixée au 5 octobre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

— la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

— le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure,

— les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

— et les observations de Me Bernon substituant Me Gely, représentant la commune de Castelnau-le-Lez.

Considérant ce qui suit:

1. Mme B, cadre de santé de 1ère classe exerçant les fonctions de directrice de la crèche «   » à Castelnau-le-Lez depuis le 4 juillet 2011, a été placée en arrêt maladie à compter du 27 février 2018, après un entretien avec ses supérieures hiérarchiques. Elle a demandé au tribunal administratif de Montpellier d’annuler la décision du 9 janvier 2019 par laquelle le maire de Castelnau-le-Lez, après avoir recueilli l’avis de la commission de réforme, a refusé de reconnaître l’accident survenu le 27 février 2018 comme imputable au service, ensemble le rejet du recours gracieux qu’elle a présenté. Par un jugement du 30 décembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du 9 janvier 2019 ainsi que le rejet du recours gracieux, et a enjoint au maire de Castelnau-le-Lez de reconnaître l’imputabilité au service de l’accident du 27 février 2018 subi par Mme B. La commune de Castelnau-le-Lez relève appel de ce jugement. Mme B a demandé à la cour l’exécution du jugement du tribunal.

Sur le bien-fondé du motif d’annulation retenu par le jugement attaqué :

2. Aux termes de l’article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans ses dispositions applicables au litige : « I.- Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, () / Le fonctionnaire conserve l’intégralité de son traitement jusqu’à ce qu’il soit en état de reprendre son service ou jusqu’à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l’accident. () / II – Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu’en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d’une activité qui en constitue le prolongement normal, en l’absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l’accident du service. ».

3. Constitue un accident de service, pour l’application des dispositions précitées, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l’occasion du service, dont il est résulté une lésion ou une affection physique ou psychologique, quelle que soit la date d’apparition de celle-ci. Sauf à ce qu’il soit établi qu’il aurait donné lieu à un comportement ou à des propos excédant l’exercice normal du pouvoir hiérarchique, lequel peut conduire le supérieur hiérarchique à adresser aux agents des recommandations, remarques, reproches ou à prendre à leur encontre des mesures disciplinaires, un entretien, notamment d’évaluation, entre un agent et son supérieur hiérarchique, ne saurait être regardé comme un événement soudain et violent susceptible d’être qualifié d’accident de service, quels que soient les effets qu’il a pu produire sur l’agent.

4. Pour annuler la décision du 9 janvier 2019 par laquelle le maire de Castelnau-le-Lez a refusé de reconnaître l’imputabilité au service de l’accident déclaré par Mme B comme étant survenu le 27 février 2018, les premiers juges ont estimé que l’entretien mené à cette date avec ses supérieures hiérarchiques constituait un évènement traumatique qui était à l’origine d’un état dépressif réactionnel, et qu’il n’existait pas de circonstance particulière permettant de détacher du service la survenance de cet évènement. Il ressort des pièces du dossier que, le 16 février 2018, un parent d’élève a adressé un courrier à la supérieure hiérarchique de Mme B pour se plaindre du comportement de cette dernière. Ce courrier faisant suite à trois précédentes plaintes d’autres parents d’élèves en date des 19 décembre 2016, 15 juillet 2017 et 11 décembre 2017 reprochant à Mme B son comportement à leur encontre, notamment son agressivité et son manque de tact. L’intéressée a été convoquée à un entretien, le 23 février 2018, par ses supérieures hiérarchiques. Mme B a exposé avoir été confrontée à une mise en accusation sans pouvoir exprimer sa position et avoir été dévalorisée dans sa posture professionnelle. Elle a produit une attestation de son mari ainsi que des documents médicaux de son médecin traitant et du médecin de prévention, faisant état des difficultés rencontrées dans l’exercice de ses fonctions et d’un syndrome anxio-dépressif marqué dans un contexte de difficultés au travail. Le rapport d’expertise du médecin psychiatre rendu le 2 juillet 2018 confirme que l’intéressée a mal vécu l’entretien du 27 février 2018 et qu’elle a présenté un état anxio-dépressif réactionnel avec un stress relativement aigu pendant quelques jours, sans que cet entretien avec sa hiérarchie ne puisse toutefois être considéré comme un fait brutal et traumatisant. Si les échanges ont pu être vifs lors de cet entretien, alors notamment que Mme B a réfuté l’ensemble des manquements reprochés par les parents de certains enfants et s’est montrée dans l’incapacité d’engager un dialogue avec ses supérieures, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier, notamment des rapports hiérarchiques établis les 3 et 4 avril 2018, que des propos excédant l’exercice normal du pouvoir hiérarchique aient été tenus par ses supérieures directes lors de l’entretien du 27 février 2018. Dans ces conditions, alors même que la commission de réforme a émis un avis favorable à la demande de Mme B, l’entretien du 27 février 2018 ne peut être regardé comme un évènement soudain et violent présentant le caractère d’un accident de service.

5. Il résulte de ce qui précède que la commune de Castelnau-le-Lez est fondée à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif de Montpellier s’est fondé sur la méconnaissance des dispositions énoncées à l’article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires pour annuler la décision du 9 janvier 2019.

6. Toutefois, il appartient à la cour administrative d’appel, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par Mme B devant le tribunal administratif.

Sur les autres moyens soulevés en première instance :

7. En premier lieu, Mme B ne peut utilement soutenir que la décision de rejet de son recours gracieux en date du 25 mars 2019 est insuffisamment motivée, dès lors que la décision du 9 janvier 2019 comporte les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement.

8. En deuxième lieu, aux termes de l’article 16 du décret du 30 juillet 1987 pris en application de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans ses dispositions alors applicables : « () la commission de réforme () est obligatoirement consultée dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions de l’article 57 de la loi du 26 janvier 1984 / () La commission de réforme n’est pas consultée lorsque l’imputabilité au service d’une maladie ou d’un accident est reconnue par l’administration. La commission de réforme peut, en tant que de besoin, demander à l’administration de lui communiquer les décisions reconnaissant l’imputabilité. ».

9. S’il résulte des dispositions citées au point précédent que la commune de Castelnau-le-Lez n’était pas tenue de consulter la commission de réforme si elle entendait reconnaître l’imputabilité au service de l’accident déclaré par Mme B, la circonstance qu’elle ait consulté cette commission avant de se prononcer sur la demande de l’intéressée ne saurait être de nature à révéler qu’elle entendait rejeter ladite demande quand bien même l’avis émis serait favorable.

10. En troisième lieu, il y a lieu d’écarter, pour les motifs énoncés au point 4, les moyens tirés de l’erreur de fait et de l’erreur de droit dont serait entachée la décision du 9 janvier 2019 en raison de l’absence d’intervention violente d’un élément extérieur constaté lors de l’entretien du 27 février 2018.

11. Il résulte tout de ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner les moyens invoqués concernant la régularité du jugement, que la commune de Castelnau-le-Lez est fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé les décisions du 9 janvier 2019 et du 25 mars 2019, lui a enjoint de reconnaître l’imputabilité au service de l’accident de la requérante et a mis à sa charge le versement à Mme B de la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Castelnau-le-Lez, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Mme B.

13. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de Mme B une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Castelnau-le-Lez au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E  :

Article 1er : Le jugement n° 1902368 du tribunal administratif de Montpellier en date du 30 décembre 2020 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B devant le tribunal administratif de Montpellier est rejetée.

Article 3 : Mme B versera à la commune de Castelnau-le-Lez une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Castelnau-le-Lez et à Mme A B.

Délibéré après l’audience du 13 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 décembre 2022.

La rapporteure,

A. Blin

La présidente,

A. Geslan-Demaret La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au préfet de l’Hérault en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.

N°21TL00894

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