CAA de Paris, conclusions du rapporteur public sur l'affaire n° 07P00160

  • Décision implicite·
  • Rejet·
  • Demande·
  • Ressortissant·
  • Délivrance·
  • Contradiction de motifs·
  • Intimé·
  • Décret·
  • Avenant·
  • Date

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CAA
Juridiction : Cour administrative d'appel
Précédents jurisprudentiels : CE 10 août 2005 Maina, n° 260084
CE 28 juillet 1999 Majhoub n° 200701
CE 5 février 1990 Sad n° 87012
CE 5 mai 1999 Epoux Gazeau, n° 158216

Texte intégral

REQUETE : 07PA00160
REQUERANT : PP c/ M. X M. Y X, ressortissant tunisien né le […], qui est entré en France le 6 octobre 1989 sous couvert d’un visa de trente jours et prétend ne plus avoir quitté le territoire national, a essayé de régulariser sa situation ce qui a donné lieu à de multiples démarches infructueuses. Il a fini par saisir le TAP d’un REP enregistré au greffe de cette juridiction le 21 octobre 2003. Son mémoire introductif d’instance exposait qu’il avait sollicité la délivrance d’un TS par voie postale le 7 octobre 2002, sur le fondement du 3° et du 7° de l’article 12 bis de l’O du 2 novembre 1945, que le PP de Paris ne lui avait fait aucune réponse explicite et n’avait pas davantage répondu à la demande de communication des motifs de la décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de quatre mois sur cette demande. Il concluait de ce fait à l’annulation de cette décision.
Par une lettre datée du 22 octobre 2003, le VP de la 4e section du TAP l’a mis en demeure de régulariser sa demande dans un délai d’un mois en produisant la pièce justifiant la date du dépôt de sa « réclamation » (sic) ainsi qu’un timbre fiscal de 15 euros. Son conseil a répondu le 29 novembre 2003 en produisant le timbre fiscal et en faisant savoir que son client avait égaré l’accusé de réception de sa demande de TS du 7 octobre 2002 mais que le préfet l’avait bien reçue dès lors qu’une convocation avait été adressée à l’intéressé le 5 décembre 2002. Le TA a mis vainement le préfet en demeure de défendre le 1er décembre 2004 et une ordonnance de clôture d’instruction au 31 janvier 2005 a été signée par le président de la 6e section du TA. Le 17 janvier 2005, le conseil du demandeur a fait savoir au TA qu’il n’avait plus de nouvelles de son client.
L’affaire a ensuite sommeillé pendant plus de vingt mois sans évoluer et le TA a fini par l’audiencer le 6 octobre 2006. Les premiers juges ont estimé que le demandeur résidait habituellement en France depuis dix ans au 8 février 2003 et que le refus implicite de TS méconnaissait par suite les dispositions du 3° de l’article 12bis de l’O du 2 novembre 1945. Par leur jugement lu le 3 novembre 2006 ils ont donc annulé la décision implicite née selon eux le 8 février 2003. Ce jugement notifié le 22 novembre 2006 a réveillé le PP qui relève régulièrement appel le 15 janvier 2007.
Le préfet fournit en appel les explications qu’il aurait dû apporter aux premiers juges sur la situation de M. X. Il s’avère d’abord que l’intéressé a sollicité la délivrance d’un titre de séjour sur le fondement du 3° de l’article 12 bis le 19 septembre 2000 auprès de la préfecture de Seine Saint Denis mais le préfet de ce département n’y a pas fait droit par une décision en date du 27 février 2001 vraisemblablement devenue définitive. Le préfet lui même vous explique ensuite que l’intéressé s’est présenté spontanément à la préfecture le 21 octobre 2002 pour présenter une nouvelle demande de TS sur le même fondement et qu’il lui a remis une convocation pour le 5 décembre 2002, qui est d’ailleurs produite, en l’invitant à communiquer les pièces prouvant sa présence en France depuis 10 ans. Vous avez au dossier la fiche d’examen de situation administrative consécutive à cette convocation à laquelle l’intimé a déféré en produisant une pile de pièces qui n’ont pas convaincu le fonctionnaire les ayant examinées. Ce dernier envisageait de notifier au demandeur une IQF mais ceci n’a pas été fait. Le 25 février 2003, M. X a été de nouveau reçu en préfecture et il a rempli un formulaire de demande de TS car il avait produit un certificat médical daté du 24 février 2003 qui a conduit la préfecture à étudier sa situation sous l’angle de l’état de santé. Un avis favorable du médecin, chef du service médical de la PP, a entraîné ensuite la délivrance d’APS jusqu’à ce qu’un nouvel avis en date du 27 avril 2004, défavorable celui-là, provoque un refus de TS explicite, daté du 29 décembre 2004, qui n’est pas au dossier.
Le préfet conteste d’abord la régularité du jugement en lui reprochant une contradiction de motif. Les premiers juges ont en effet commencé par affirmer que le demandeur ne saurait utilement se prévaloir « à l’encontre de la décision implicite de rejet du préfet de police » des dispositions du 3° de l’article 12 bis de l’O du 2 novembre 1945, qui ne sont pas applicables aux ressortissants tunisiens depuis l’entrée en vigueur le 1er novembre 2003 du deuxième avenant à l’accord franco tunisien. Puis ils ont effectivement annulé la décision implicite attaquée pour violation du 3° de l’article 12bis de l’O du 2 novembre 1945.
Cette incroyable erreur de rédaction du jugement nous paraît difficile à neutraliser car les premiers juges ont bien clairement affirmé deux choses parfaitement contradictoires : que le moyen était inopérant et qu’il était fondé. Les conséquences que vous devez en tirer ne sont en revanche pas immédiatement évidentes. Une décision de Section du CE du 17 mars 1972, Dame Figaroli (L p224) évoque après avoir partiellement annulé un jugement de TA pour « contrariété de motifs » et « contradiction entre les motifs et le dispositif ». En revanche, une contradiction de motifs affecte le bien-fondé d’un arrêt de cour et non sa régularité externe (CE 5 mai 1999 Epoux Gazeau, n°158216, mentionné aux T du L pour cela). De même, la contradiction de motifs affectant une décision administrative relève de la légalité interne de cette dernière (CE 10 août 2005 Maina, n°260084, mentionné aux T du L pour cela). Les deux décisions les plus récentes nous incitent à penser que le jugement attaqué n’est pas irrégulier mais doit être censuré au fond.
Si vous nous suivez, vous resterez dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel.
Le préfet discute la recevabilité de la demande de PI en faisant valoir qu’il n’y a pas eu de décision implicite de rejet en date du 8 février 2003 susceptible d’être contestée devant le TA puisque le courrier daté du 7 octobre 2002 n’a jamais été reçu par ses services. Cela est vrai mais doit-on en déduire qu’il n’y avait pas de décision implicite de rejet contestable par la voie de l’EP ? Ce n’est pas notre opinion dès lors que le préfet admet lui-même que l’intimé s’est présenté en personne dans ses services le 21 octobre 2002 pour effectuer une demande de TS instruite dans les conditions que nous avons rappelées. Le préfet ajoute que M. X doit être regardé comme ayant renoncé à cette demande puisqu’il a sollicité la délivrance d’un TS sur un autre fondement au mois de février 2003. Cette analyse ne nous convainc pas : d’une part, un étranger peut parfaitement effectuer deux demandes de TS sur deux fondements différents sans qu’elles soient réputées exclusives l’une de l’autre, d’autre part, l’intimé, qui a cherché à connaître les motifs du rejet implicite de sa demande par une lettre du 15 juillet 2003, reçue par le préfet le 16 juillet, ne peut être regardé comme ayant renoncé à sa demande du seul fait qu’il a essayé d’obtenir un TS en raison de son état de santé.
Par ailleurs, nous n’avons trouvé au dossier aucun accusé de réception de sa demande de TS l’informant du délai au terme duquel une décision implicite naîtrait et des voies et délais de recours ouverts à son encontre, dans les conditions prévues par le décret du 6 juin 2001. Aucune tardiveté de la demande de PI ne peut dès lors être relevée d’office. A notre sens la demande formulée de l’aveu même du préfet le 21 octobre 2002 a bien fait naître quatre mois plus tard un DI de rejet en application de l’article 2 du décret du 30 juin 1946 dans sa rédaction résultant du décret n°2002-814 du 3 mai 2002 et l’intimé était recevable à l’attaquer le 21 octobre 2003.
A la date d’intervention de cette décision, l’avenant du 8 septembre 2000 à l’accord franco tunisien n’était pas encore applicable puisqu’il n’est entré en vigueur que le 1er novembre 2003 comme le prévoit le décret n°2003-976 du 8 octobre 2003 portant publication de cet avenant au JO du 16 octobre 2003 (p. 17609). Mais dans le silence de la version en vigueur de cet accord, le 3° de l’article 12 bis de l’O du 2 novembre 1945 était applicable à un ressortissant tunisien (CE 28 juillet 1999 Majhoub n°200701 aux T du L sur ce point).
Le préfet discute en appel le caractère probant des pièces produites par l’étranger pour prouver ses dix années de résidence habituelle en France depuis le mois de février 1993 car telle est la période à examiner compte tenu de la date de la décision implicite en litige. Le dossier peut prêter à hésitation mais nous vous inviterons à une certaine sévérité car il est certain que l’intimé a produit des bulletins de paye dont l’authenticité est plus que douteuse. Les seules pièces fiables produites en PI sont par suite en nombre et en qualité insuffisantes pour emporter la conviction et nous vous invitons à écarter au fond le moyen tiré de la violation du 3° de l’article 12 bis de l’O du 2 novembre 1945.
En revanche, il est constant que l’intimé a demandé le 16 juillet 2003 la communication des motifs de la DI de rejet sur le fondement de l’article 5 de la loi du 11 juillet 1979 et qu’il n’a reçu aucune réponse. Certes, cette demande a été en principe présentée après l’expiration du délai de recours contentieux ouvert contre cette décision mais comme nous vous l’avons dit ce délai n’avait pas couru faute d’avoir été indiqué. Le défaut de réponse entraîne l’illégalité de la décision implicite (voir par exemple CE 5 février 1990 Sad n°87012 aux T du L).
Le préfet n’est donc p as fondé à se plaindre de l’annulation prononcée en PI.
PCMNC au rejet du recours du PP de Paris.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
CAA de Paris, conclusions du rapporteur public sur l'affaire n° 07P00160