CAA de Paris, conclusions du rapporteur public sur l'affaire n° 07PA01764

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA
Juridiction : Cour administrative d'appel

Texte intégral

07PA01764 M. Y –Mme X
Lecture du 18 décembre 2007
Conclusions de Mme Françoise REGNIER-BIRSTER, Commissaire du gouvernement
Cette affaire porte sur les modalités du contrôle prévu à l’article L. 131-10 du code de l’éducation en cas d’instruction d’enfants soumis à l’obligation scolaire dans leur famille. Outre une enquête de la mairie visant à s’assurer des raisons de cette instruction et la compatibilité de celle-ci avec leur état de santé et les conditions de vie de la famille, il doit y avoir, au moins une fois par an, une vérification de ce que l’enseignement assuré est conforme au droit de l’enfant à l’instruction tel que défini à l’article L. 131-1-1 alors en vigueur du même code. Ce contrôle prescrit par l’inspecteur d’académie a lieu, selon la loi, notamment au domicile des parents de l’enfant. M. B Y et Mme C X font instruire leur fille Margot âgée de dix ans, à leur domicile depuis l’année scolaire 2003-2004 ainsi que maintenant leur deuxième fille âgée de six ans. Pour l’année scolaire 2005-2006, l’inspectrice de l’éducation nationale a fixé le lieu du contrôle non au domicile des parents – comme l’année précédente – mais dans les locaux de l’inspection académique et informé les parents de ce qu’elle souhaitait entendre la jeune Margot seule, ce qui a suscité une forte opposition des parents, pourtant informés du risque de saisine du procureur de la République en en cas de persistance de leur refus. M. Y et Mme X ont saisi le Tribunal administratif de Paris afin d’obtenir l’annulation de la décision contenue dans la lettre du 24 avril 2006 rejetant leur demande visant à ce que le contrôle ait lieu à leur domicile et en présence des parents et l’annulation de la circulaire n° 99-070 du 14 mai 1999 du ministre de l’éducation nationale relative au renforcement du contrôle de l’obligation scolaire ainsi qu’une injonction au ministre d’effectuer le contrôle prévu à leur domicile.
Estimant d’une part, que les conclusions dirigées contre la circulaire étaient irrecevables, d’autre part que la décision n’était entachée d’aucune illégalité externe ou interne, le Tribunal a rejeté leurs demandes. L’appel ne porte que sur le rejet des conclusions à fin d’annulation de la décision du 24 avril 2006. S’agissant de la circulaire du 14 mai 1999, M. Y et Mme X se bornent à invoquer son illégalité à l’appui de leur demande d’annulation de la décision du 24 avril 2006.
Nous vous précisions qu’une demande de suspension de la décision du 24 avril 2006 avait également été formée. Elle a été rejetée par une ordonnance du juge des référés.
La régularité du jugement est contestée par les requérants qui font valoir qu’ils avaient articulé un moyen tiré de l’incompétence négative de l’auteur de l’acte, l’inspecteur d’académie ayant refusé de fixer lui-même les modalités du contrôle et qu’en se bornant à relever que, conformément aux dispositions de l’article L. 131-10 du code de l’éducation, le contrôle de l’instruction à domicile était prescrit par l’inspecteur d’académie qui n’avait pas à s’en acquitter en personne, les premiers juges auraient omis de statuer sur ce moyen. Mais les requérants s’ils ont longuement développé le moyen tiré de l’incompétence de l’inspectrice de l’éducation nationale, n’ont pas, dans leurs écritures de première instance, et contrairement à leurs déclarations, soulevé le moyen tiré de l’incompétence négative de l’auteur de l’acte.
Ils font également valoir que les premiers juges auraient entaché leur jugement de contradictions de motifs en relevant que l’opposition des parents portait sur les seules modalités pratiques du contrôle tout en estimant que cette opposition remettait en cause la mise en œuvre effective du contrôle et, par là même, son principe. Mais ce faisant, les premiers juges n’ont nullement entaché leur décision de contradiction de motifs : « en considérant que M. Y et Mme X s’opposaient au contrôle de l’instruction à domicile de leur fille, l’inspecteur d’académie n’a pas commis d’erreur de fait ; qu’en effet, si l’opposition des parents portait sur les seules modalités pratiques du contrôle, elle remettait en cause la mise en œuvre effective de celui-ci, et donc son principe même ». Ils auraient également entaché leur jugement de contradictions de motifs en admettant que la décision du 24 avril 2006 prêtait à confusion après en avoir dénié le caractère ambigu. Ce faisant, M. Y et Mme X nous paraissent faire une lecture tendancieuse du jugement. En effet, les premiers juges n’ont pas parlé d’absence de caractère « ambigu » de la décision attaquée : ils ont répondu au moyen tiré de l’absence de motivation en précisant que si la motivation en droit ne faisait explicitement apparaître qu’une référence à la circulaire, cette mention était suffisante, dès lors que la circulaire renvoyait aux dispositions légales. Ensuite, dans le 6e considérant, ils ont répondu au moyen tiré de l’exception d’illégalité de la circulaire, en indiquant que, même si la rédaction de la décision pouvait– sur ce point – prêter à confusion, celle-ci reposait, non sur la circulaire, mais sur les dispositions légales qu’elle interprète.
Vous ne pourrez dès lors que rejeter les moyens portant sur la régularité du jugement.
La recevabilité de la demande devant les premiers juges est contestée par le ministre de l’éducation nationale qui fait valoir, comme l’avait fait le recteur devant le tribunal, qu’à la date de son enregistrement – le 29 septembre 2006 -, la requête était devenue dépourvue d’objet dans la mesure où, à cette date, les requérants avaient renouvelé leur déclaration de volonté d’instruire leur fille dans leur famille pour l’année scolaire 2006-2007 ; que le certificat prévu par l’article R.131-2 du code de l’éducation leur avait été délivré et une nouvelle inspection diligentée en février 2007; il ne vous précise toutefois pas si cette inspection a eu lieu au domicile ou dans les locaux de l’administration. Mais quoiqu’il en soit, ceci n’a privé d’objet la demande des requérants devant le Tribunal qui portait sur l’inspection de 2006.
S’agissant de la légalité de la décision du 24 avril 2006, les requérants invoquent d’abord le défaut de motivation. Ce moyen n’est pas susceptible de prospérer, la décision contenue dans la lettre du 24 avril 2006 qui ne portait que sur le lieu de l’entretien et la nécessité d’un entretien avec l’aînée des enfants sans les parents n’entrant pas dans les décisions devant être motivées au sens de la loi du 11 juillet 1979 : contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne s’agit ni d’une décision restreignant les libertés publiques, ni subordonnant l’octroi d’une autorisation à des conditions restrictives ou imposant des sujétions.
Les requérants reprennent également le moyen, déjà soulevé devant le Tribunal administratif, tiré du vice de procédure, l’administration n’ayant pas accusé réception de leur déclaration d’instruction à domicile pour l’année 2005-2006, ainsi que l’article R. 131-2 du code de l’éducation lui en fait obligation. Mais cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée étant au demeurant précisé que le contrôle mis en œuvre, l’a été plus de sept mois après le début de l’année scolaire 2005-2006, et non « sans délai » ainsi qu’il est prévu en cas de défaut de déclaration d’instruction. M. Y et Mme X soulèvent également l’incompétence de l’auteur de la décision, moyen qui comporte 2 branches :
. d’une part, il n’appartiendrait qu’à l’inspecteur d’académie lui-même d’effectuer le contrôle, . d’autre part, il n’appartiendrait qu’à ce dernier, et non à un simple inspecteur de l’éducation nationale, d’en déterminer les modalités.
Le texte est toutefois clair : l’inspecteur d’académie a la responsabilité du contrôle, mais il ne l’exerce pas lui-même : il l’ordonne et peut ainsi le faire exécuter par des inspecteurs de l’éducation nationale placés sous son autorité : « L’inspecteur d’académie doit /…/ faire vérifier que l’enseignement assuré est conforme au droit de l’enfant à l’instruction /…/ ; puis : « ce contrôle prescrit par l’inspecteur d’académie a lieu .. ; »
S’gissant de la deuxième branche du moyen, il ne ressort absolument pas du dossier que l’inspecteur d’académie n’ait pas déterminé lui-même les modalités du contrôle même si ce dernier a expliqué aux parents dans une lettre répondant leur courrier adressé à l’inspectrice chargée du contrôle que c’était à cette dernière d’établir le lieu le plus opportun pour l’inspection. En répondant lui-même aux parents, l’inspecteur d’académie a montré que loin de se désintéresser de cette question pourtant mineure, il assumait toutes les responsabilités tout en leur rappelant que le choix des modalités du contrôle ne leur appartenait pas.
Les requérants soutiennent également que la décision est entachée d’une erreur de fait car ils n’auraient jamais refusé le principe du contrôle de l’enseignement, mais seulement formé une demande relative aux modalités du contrôle. Mais dans sa décision, l’inspecteur d’académie n’a pas indiqué que les requérants se refusaient au contrôle, mais qu’ils ont refusé de se rendre dans les locaux de l’inspection pour que leur fille Margot se prête à l’évaluation prévue.
En vous demandant de constater l’inexistence ou l’illégalité de la circulaire du 14 mai 1999, les requérants soulèvent l’exception d’illégalité de cette dernière qui présenterait un caractère impératif et serait contraire à la loi qu’elle est censée explicitée, ainsi qu’à l’article 371-1 du code civil et à la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.
Publiée au BO de l’Education nationale du 20 mai 1999, cette circulaire est devenue définitive. Il nous paraît bien difficile de lui reconnaître un caractère impératif. Contrairement à ce que les requérants soutiennent la circulaire n’ajoute pas à la loi en expliquant que le législateur a voulu que le contrôle ne se déroule pas exclusivement au domicile des parents, en indiquant, en l’absence de précision de la loi sur ce point, que le contrôle pouvait avoir lieu en présence ou non des parents, et en informant les services qu’en cas d’opposition de la famille au déroulement du contrôle, l’inspecteur d’académie serait fondé à saisir le procureur. L’article L. 131-10 dispose en effet en son 4e alinéa : « Ce contrôle prescrit par l’inspecteur d’académie a lieu notamment au domicile des parents de l’enfant » et l’article L. 131-9 « l’inspecteur d’académie saisit le procureur de la République des faits constitutifs d’infraction aux dispositions du présent chapitre ». En l’absence de caractère impératif de la circulaire, les requérants ne sont pas recevables à en invoquer l’illégalité.
Vous ne pourrez, par suite, que confirmer le jugement du tribunal administratif de Paris. Nous ajoutons, même si nous ne vous proposons pas d’infliger aux requérants une amende pour recours abusif, que la requête de M. Y et Mme X nous paraît présenter, par bien des aspects, un caractère abusif.
Par ces motifs, nous concluons :
Au rejet de la requête de M. Y et Mme X, y compris les conclusions aux fins de frais irrépétibles.

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