CAA de Paris, conclusions du rapporteur public sur l'affaire n° 94PA01688

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Sur la décision

Référence :
CAA
Juridiction : Cour administrative d'appel
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 8 novembre 1993
Précédents jurisprudentiels : CE 30 octobre1970, GDF, Rec. p. 626
CE GDF, 30 octobre 1970, Rec. p. 625

Texte intégral

N° 94PA01688
COMMUNE DE SAINT-DENIS
Audience du 11 janvier 1996 […]
CONCLUSIONS de Mme X, Commissaire du Gouvernement
La COMMUNE DE SAINT-DENIS (Seine Saint-Denis) par un contrat signé le 10 avril 1957 a chargé la société de distribution de chaleur de Saint-Denis (SDCSD) de réaliser la distribution urbaine de chaleur et lui en a concédé l’exploitation. Ce document a été refondu en un document unique signé le 24 septembre 1987 qui a prolongé la concession jusqu’au 30 septembre 2013.
La société de distribution de chaleur de St-Denis a dans ces conditions installé un réseau de distribution de chaleur sous les voies publiques affectées à la circulation urbaine.
Un arrêté préfectoral du 19 décembre 1984, prorogé le 4 décembre 1989 pour 5 ans, a déclaré d’utilité publique la construction d’une ligne de tramway en site propre entre Saint-Denis et Bobigny dont le futur exploitant est la Régie autonome des transports parisiens. La réalisation de cette opération nécessite un réaménagement total de l’ensemble de la plate-forme des voies communales concernées par le tracé qui emprunte essentiellement la nationale 186.
La société de distribution de chaleur de St-Denis a accepté de modifier ses réseaux pour les rendre compatibles avec les dispositions relatives au projet de tramway mais a refusé de prendre en charge le coût des travaux et elle a sollicité de la commune le versement d’une indemnité compensatoire de 4.738.000F. Devant le refus de cette dernière, elle a saisi du litige le tribunal administratif de Paris qui, par jugement du 9 novembre 1993, a fait droit à sa demande, aux motifs que les travaux liés à la création d’un site propre pour tramway n’avaient pas pour objet l’amélioration de la voirie urbaine mais l’intérêt de la commune et des riverains à disposer de ce mode de transport et qu’ils ne constituaient pas une opération d’aménagement conforme à la destination de la voirie.
La COMMUNE DE SAINT-DENIS relève régulièrement appel de ce jugement.
Elle prétend que celui-ci serait irrégulier pour n’avoir pas visé son mémoire en défense ni analysé ses moyens. Le jugement notifié à la commune est une copie qui ne comporte pas, comme c’est l’usage, l’intégralité des visas. Seule la minute du jugement contient l’intégralité des visas et l’analyse des moyens et la commune ne soutient pas qu’ils en sont absents. Le moyen soulevé n’est donc pas fondé.
Sur le fond les principes ont été dégagés par l’arrêt de section du Conseil d’Etat, ministre de l’équipement et de l’aménagement du territoire c/ Cie française de raffinage, Rec.p. 62, avec les conclusions de M. Y aux CJEG mai 1981 p.63.
Ainsi le bénéficiaire d’une autorisation temporaire d’occupation du domaine public doit supporter sans indemnité les frais de déplacement et de modification des installations qu’il a aménagées sur le domaine lorsque ce déplacement est la conséquence de travaux entrepris dans l’intérêt du domaine occupé et que ces travaux constituent une opération d’aménagement conforme à la destination de ce domaine.
Par cette décision le Conseil d’Etat a entendu rappeler que l’existence d’un ouvrage nouveau est seulement l’indice, mais non le signe certain ni exclusif que les travaux dépassent le cadre d’une opération conforme à la destination du domaine. Puis d’une décision postérieure : GDF/EDF du 6 décembre 1985, Rec. p. 361, il ressort que le critère de l’ouvrage nouveau ne joue pratiquement plus aucun rôle pour déterminer les droits à indemnité des occupants du domaine public.
Les deux critères dégagés par l’arrêt du 6 février 1981 s’appliquent aux occupants du domaine public quel que soit leur titre: titulaire d’une autorisation d’occupation ou occupant contractuel tels que les concessionnaires de voirie (CE GDF, 30 octobre 1970, Rec. p. 625).
Ces mêmes critères ont été rappelés par la section des travaux publics du Conseil d’Etat dans l’avis n° 346 685 qu’elle a rendue le 23 janvier 1990 à la demande au ministre de l’équipement et du ministre des postes et télécommunications à propos du même projet que celui de l’espèce: la réalisation d’un site propre pour tramway entre Saint-Denis et Bobigny mais plus particulièrement en ce qui concerne les emprises de RN 136 et les frais de déplacement du réseau de télécommunications.
Aux termes de cet avis, la réunion des deux critères n’ouvre pas droit à indemnité sauf conventions contraires.
Et pour l’opération en cause la réponse de la section des travaux publics est la suivante : « L’installation en site propre d’un tramway, dans l’emprise de la RN 186 entre Saint-Denis et Bobigny, a pour objet et aura pour effet de faciliter la circulation et le transport des usagers sur cette voie publique. D’autre part, si le régime juridique des chemins de fer s’applique aux tramways, l’opération envisagée est destinée à permettre l’implantation des rails de tramways sur la voie routière et l’insertion de ce mode d’utilisation de la voie dans la circulation. Par suite elle est conforme à la destination du domaine public routier et entreprise dans l’intérêt de ce domaine. Dès lors, le service dont dépendent les canalisations de télécommunications dont les travaux en cause nécessitent le déplacement ne saurait juridiquement prétendre au remboursement des dépenses provoquées par ce déplacement ».
Cette solution est transposable au litige qui vous est soumis qui concerne l’emprise des voies publiques communales et non celle de la nationale 136 que le tracé du tramway rejoint à l’intérieur de la COMMUNE DE SAINT-DENIS.
Toutefois, il convient d’examiner les stipulations du cahier des charges annexé à la convention de concession conclue entre la commune et la société de distribution de chaleur de St-Denis.
L’article 29-1 relatif aux ouvrages concédés sous le domaine public du concédant stipule que le déplacement des ouvrages concédés situés sous la voie publique sera opéré aux frais du concessionnaire lorsqu’il est requis dans l’intérêt de la voirie.
Cet article n’est pas contraire à la jurisprudence applicable mais il ne retient qu’un de ses critères ; celui de la conformité de l’opération à la destination du domaine public n’étant ni inclus ni exclu expressément par le cahier des charges.
Ainsi seul le critère de l’intérêt de la voirie devra vous retenir et la réponse à y apporter est tranchée, comme nous venons de le dire, par l’avis de la section des travaux publics du Conseil d’Etat.
Les motifs du jugement du tribunal administratif de Paris n’apparaissent donc pas fondés et c’est à tort qu’il les a retenus pour accorder une indemnisation à la société de distribution de chaleur de Saint-Denis.
Par l’effet dévolutif de l’appel, vous êtes saisis de l’autre moyen soulevé par cette société devant le tribunal administratif. Elle a invoqué qu’elle n’avait pas pu prendre en considération la construction de la ligne de tramways ni pu prévoir d’assumer la charge financière relative aux travaux de déplacement des canalisations.
En droit un tel moyen est rejeté par la jurisprudence dès lors que les travaux, quelle que soit leur importance, sont exécutés dans l’intérêt de la circulation et de la voirie et ne comportent pas la création de voies nouvelles (CE 30 octobre1970, GDF, Rec. p. 626).
Le moyen invoqué manque d’ailleurs en fait puisque le dernier avenant, n° 7, à la convention de concession a été signé le 24 septembre 1987 soit postérieurement au premier arrêté préfectoral déclarant les travaux de la ligne de tramway en site propre d’utilité publique et qu’en 1987 les travaux étaient donc normalement prévisibles par les parties.
Si vous me suivez vous accueillerez les conclusions de la commune appelante. N’étant pas partie perdante elle ne peut pas être condamnée au titre de l’article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel. Sur le fondement de ces dispositions et dans les circonstances de l’espèce, nous vous proposerons qu’il n’y a pas lieu de condamner la société intimée à l’égard de la COMMUNE DE SAINT-DENIS.
La commune de Saint-Denis a présenté des conclusions tendant au sursis à l’exécution du jugement sur le fondement de l’article R.125 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel statuant sur les conclusions à fin d’annulation du jugement, vous n’aurez pas à vous prononcer sur de telles conclusions.
Par ces motifs nous concluons :
- à l’annulation du jugement du 9 novembre 1993 du tribunal administratif de Paris et au rejet de la demande de la société de distribution de chaleur de Saint-Denis.

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