CAA de Paris, conclusions du rapporteur public sur l'affaire n° 12PA04091, 12PA04092, 12PA04093

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Sur la décision

Référence :
CAA
Juridiction : Cour administrative d'appel
Précédents jurisprudentiels : plaisanciers du 19 février 1988 n° 817167

Texte intégral

12PA04091 12PA04092 12PA04093
MINISTRE DE L’ECOLOGIE
Audience du 9 septembre 2013
Lecture du 23 septembre 2013
CONCLUSIONS de M. Jean-Pierre LADREYT, Rapporteur public
Le Conseil d’Etat a déjà eu l’occasion de statuer sur les conditions dans lesquelles doit se pratiquer cette activité sportive toujours en vogue qu’est le ski nautique et qui fut expérimentée la première fois en France en 1920 sur le lac d’Annecy.
A l’occasion d’une décision Association des propriétaires riverains et plaisanciers du 19 février 1988 n°817167, la Haute Juridiction, après avoir écarté les arguments tendant à restreindre cette activité pour des raisons écologiques d’atteintes à la flore et à la faune, a en effet considéré que le préfet de la Dordogne n’avait pas suffisamment tenu compte ni de la tranquillité des riverains ni des droits des usagers d’autres sports nautiques en autorisant tous les jours la pratique de ce sport sur le plan d’eau de Trémolat-Mauzac-Cales du 1er mai au 30 octobre.
En matière de police administrative, qu’elle s’applique en matière d’environnement ou en matière de pratique sportive, tout est en effet question d’équilibre et selon la formule consacrée par le commissaire du gouvernement Corneille dans ses conclusions sous l’arrêt Baldy du 10 août 1917, « la liberté est la règle et les restrictions de police l’exception ».
Le préfet du Val-de-Marne semble avoir fait sienne cette devise en prenant un arrêté en date du 10 juillet 2008 réglementant la pratique du ski nautique sur le plan d’eau de Bonneuil qui a abrogé un précédent arrêté du 16 juin 1975 qui autorisait cette pratique tous les jours sur une zone d'1,2 km et en l’interdisant cette fois les mercredi et samedi après-midi et le dimanche matin.
Cette restriction n’a toutefois pas été du goût des associations favorables à la pratique de ce sport, notamment l’association la glisse de la Marne et le club nautique du plan d’eau de Bonneuil, qui ont obtenu du Tribunal administratif de Melun l’annulation de cet arrêté par trois jugements du 3 juillet 2012 dont le MINISTRE DE L’ECOLOGIE relève régulièrement appel devant vous.
Les premiers juges ont en effet considéré que les divers motifs avancés par le ministre pour justifier de cette restriction n’étaient pas suffisamment étayés.
Ces trois requêtes, qui portent sur une problématique identique, feront l’objet de conclusions communes.
Vous pourriez vous étonner tout d’abord de l’annulation prononcée par les premiers juges puisqu’à la différence de la décision du Conseil d’Etat que nous évoquée, le préfet du Val de Marne a procédé avec un certain esprit de modération puisque la pratique du ski nautique est permise tous les jours de la semaine de 9 heures du matin jusqu’à 21 heures sauf les mercredis et samedis après midi et le dimanche matin.
Le sous-préfet de Nogent sur Marne qui a veillé à l’élaboration de cet arrêté sous l’autorité du préfet du Val de Marne estime qu’il est parvenu à un bon compromis entre les parties en présence, et notamment entre les associations sportives utilisant le plan d’eau et les collectivités territoriales intéressées et se plaint de ce que les premiers juges aient trouvé bon de rompre le bel équilibre auquel il était parvenu après avoir engagé les consultations nécessaires.
Il n’existe pas encore, à notre connaissance, si vous nous permettez cette pointe d’ironie, de principe général du droit relatif à la liberté de pratiquer de tous temps du ski nautique et la position médiane adoptée par le préfet semble, a priori, être assez équilibrée.
Toutefois, nous l’avons dit, dans un domaine où le principe est la liberté et la restriction l’exception, il vous revient d’apprécier la pertinence des arguments avancés par le ministre pour justifier des limitations temporelles qu’il a retenues et qui rendent plus difficiles l’exercice de cette activité sportive, notamment pour les enfants de ce département, les demi-journées soumises à interdiction étant très prisées par les établissements scolaires.
Or, en l’espèce, force est de constater que les arguments présentés par les services de l’Etat pour justifier l’interdiction de pratiquer le ski nautique au cours de ces après-midi ou matinée manquent quelque peu de pertinence.
Le ministre avance en effet des raisons tenant tout à la fois à la tranquillité des riverains, à la sécurité des pratiquants des autres disciplines sportives et à la protection de l’environnement.
Il indique qu’il souhaite favoriser les sports de circulations douces, le canoë et l’aviron, dont la pratique est moins dommageable pour l’environnement puisqu’elle n’engendre pas d’effets de batillage, c’est-à-dire de remous sur les berges que la pratique du ski nautique ne manque pas de provoquer en perturbant ce refuge d’écosystèmes remarquables que constitue la rivière de la Marne à l’endroit de la presqu’île de Saint Maur où se situe la zone de vitesse du plan d’eau de Bonneuil.
Toutefois, les éléments produits par l’administration pour justifier de sa position apparaissent assez minces.
Il s’agit notamment d’une étude réalisée à l’initiative de l’agence portuaire de Bonneuil du Port autonome de Paris sur les effets de batillage du ski nautique.
Il semble toutefois plus résulter de cette étude que le Port de Paris souhaiterait avoir les mains libres pour réaménager les berges à cet endroit en se débarrassant de l’activité du ski nautique que d’un véritable motif de préservation de l’environnement.
De même, si l’Etat avance des motifs louables tenant à la sécurité des pratiquants des autres disciplines nautiques, force est de constater que la séparation des plans d’eau est maintenue pour chaque discipline et qu’une bande de 20 mètres est neutralisée pour des fins de passage de transit et de continuité de la voie d’eau.
Si l’Etat fait état des nuisances que feraient courir aux riverains la pratique du ski nautique, aucune plainte n’émane des riverains et cette partie de la Marne n’est pas une zone touristique puisqu’elle est située le long d’une zone industrielle où des camions ne cessent de transporter des tonnes de gravats.
Les préoccupations de sécurité devraient plutôt conduire l’autorité administrative à concentrer ses efforts, par exemple, sur le contrôle de l’interdiction de circulation des jets skis.
Au total, les éléments présentés par l’Etat à l’appui de ces restrictions nous semblent insuffisamment solides pour justifier de leur bien-fondé.
Dès lors que les motifs justifiant ces restrictions apparaissent infondés, vous ne pourrez que confirmer le jugement attaqué sans que vous soyez tenus, en application du principe de l’économie des moyens, de statuer sur l’autre motif d’annulation retenu par les premiers juges et tiré de la contrariété de l’arrêté préfectoral avec les dispositions de l’article 21 de l’arrêté ministériel du 20 décembre 1974 qui interdisait la pratique simultanée de plusieurs activités nautiques sur les mêmes couloirs d’un plan d’eau.
Vous pourrez toutefois constater à cet égard, le cas échéant, que l’arrêté préfectoral de 2008 en permettant le transit sur une bande de 20 mètres pouvant être utilisée par les pratiquants du ski nautique est susceptible de poser un problème de sécurité lorsque l’on sait que la vitesse des skieurs atteint les 60 km/h et que leur arrivée subreptice peut surprendre les pratiquants des autres activités nautiques.
Et PCMNC : – sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par les parties intimées, au rejet de la requête du MINISTRE DE L’ECOLOGIE qui sera condamné à verser une somme de 1 500 euros à chacune des parties en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

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