Cour administrative d'appel de Versailles, 6 juin 2013, n° 11VE04175

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Versailles, 6 juin 2013, n° 11VE04175
Juridiction : Cour administrative d'appel de Versailles
Numéro : 11VE04175
Décision précédente : Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, 17 octobre 2011, N° 1102347

Texte intégral

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL

DE VERSAILLES

N° 11VE04175


Mme B Z-A


Mme Y

Président


M. Lenoir

Rapporteur


Mme Agier-Cabanes

Rapporteur public


Audience du 23 mai 2013

Lecture du 6 juin 2013

__________

Code PCJA : 60-01-02-02

60-02-03-02-01

60-01-03

60-02-05

Code Lebon : C

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La Cour administrative d’appel de Versailles

2e Chambre

Vu la requête, enregistrée le 17 décembre 2011, présentée pour Mme B Z-A demeurant XXX à Berneuil-en-Braye (Oise), par Me Derveaux, avocat ; Mme Z-A demande à la Cour :

1° d’annuler le jugement n° 1102347 du 18 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande de condamnation de la commune de Chars (Val-d’Oise) ;

2° de condamner la commune de Chars à lui verser une somme de 242 441 euros majorée des intérêts de droit en réparation du préjudice subi ;

3° de mettre à la charge de la commune le versement d’une somme de 4 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

— il existe un lien de causalité entre la transmission d’informations erronées par la commune et le préjudice qu’elle a subi ;

— la commune a commis une faute dans l’usage des pouvoirs qui lui sont reconnus par l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales afin de faire cesser les dommages affectant son habitation ;

— la commune ne saurait s’exonérer au motif de ses faibles moyens ;

— les différents chefs du préjudice qu’elle a subi permettent de fixer le montant de celui-ci à une somme de 242 411 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 avril 2012, présenté pour la commune de Chars qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de Mme Z-A le versement d’une somme de 2 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient que :

— c’est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la parcelle en cause ne relevait pas du domaine public de la commune ;

— c’est à bon droit que les premiers juges ont estimé qu’il n’y avait pas de lien entre le préjudice subi par l’intéressée et la délivrance d’un certificat d’urbanisme mentionnant que la propriété en question ne se situait pas dans une zone de carrière ;

— il n’y a eu aucune carence fautive de sa part y compris en ce qui concerne le relogement de l’intéressée ;

— elle n’a pas non plus commis de faute en ne recourant pas à la procédure d’expropriation prévue par la loi Barnier dès lors que le coût de l’expropriation était supérieur à celui des travaux confortatifs ;

— le chiffrage du préjudice de la requérante n’est aucunement justifié ;

Vu les nouveaux mémoires, enregistrés le 31 janvier 2013 et le 17 mai 2013, présentés pour Mme Z-A qui maintient ses conclusions initiales par les mêmes moyens ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 10 mai 2013, présenté pour la commune de Chars qui maintient ses conclusions à fin de rejet de la requête ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 23 mai 2013 :

— le rapport de M. Lenoir, président assesseur,

— les conclusions de Mme Agier-Cabanes, rapporteur public,

— les observations de Me Derveaux pour Mme Z-A,

— et les observations de Me Sarfati de la SCP Inter-Barreaux Barbier-Frenkian pour la commune de Chars ;

Connaissance prise de la note en délibéré présentée par Mme Z-A le 24 mai 2013 ;

1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que Mme Z-A a acquis, le 9 octobre 1998, une maison de 5 pièces située XXX à Chars (Val-d’Oise), à proximité immédiate d’une falaise de calcaire creusée de galeries ayant servi de carrières puis de champignonnières ; qu’à la suite de deux affaissements du terrain situé au sommet de cette falaise survenus le 16 février 2001 et le 24 mars 2001, le maire de Chars a, par un arrêté en date du 24 mars 2001 pris sur le fondement des articles L. 2212-1 et suivants du code général des collectivités territoriales en raison des risques d’éboulements, enjoint aux occupants de la maison en question d’évacuer celle-ci sans délai ; qu’en exécution de cet arrêté, Mme Z-A et sa famille ont alors déménagé à Berneuil-en-Braye (Oise) ; que ce n’est qu’après la réalisation, à partir du mois de juillet 2006, des travaux de confortement de la falaise que la requérante a été autorisée, par un arrêté du maire de Chars en date du 18 décembre 2006, à réintégrer son logement ; que, par une lettre en date du 17 octobre 2005 adressée au maire de Chars, Mme Z-A a demandé à la commune de l’indemniser du préjudice résultant de cette situation et de ces décisions, préjudice qu’elle évaluait alors à une somme de 229 945 euros ; qu’il n’a pas été répondu à cette demande ; que la requérante relève appel du jugement en date du 18 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Chars à raison des différents préjudices qu’elle estimait avoir subis du fait de l’affaissement de la falaise et des différentes décisions prises par la commune de Chars ; que l’intéressée limite cependant sa critique du jugement attaqué au rejet par le tribunal des moyens qu’elle avait invoqués en première instance afin de mettre en jeu la responsabilité de la commune à raison du caractère erroné des informations figurant dans la note de renseignements signée par le maire de Chars le 30 juillet 1998 et à raison de la carence de ce même maire en ce qui concerne l’utilisation des pouvoirs qu’il tient de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

S’agissant de la responsabilité de la commune à raison des mentions figurant dans la note de renseignements du 30 juillet 1998 :

2. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que, par un acte de vente en date du 9 octobre 1998, Mme Z-A a acquis la maison mentionnée ci-dessus qui était précédemment la propriété de M. et Mme X, ces derniers ayant eux-mêmes acquis cette propriété par une vente conclue le 25 septembre 1991 avec la commune de Chars, précédent propriétaire ; qu’était annexé à l’acte de vente du 9 octobre 1998 un document émis par la commune intitulé « attestation » mentionnant différents renseignements concernant la situation de la propriété au regard des prescriptions d’urbanisme, qui indiquait, en particulier, que la propriété en question n’était pas située dans une zone de carrière ; qu’en indiquant ainsi à l’intéressée, préalablement à l’achat de la propriété en question, que celle-ci n’était pas située dans une zone de carrière alors qu’elle ne pouvait ignorer, compte tenu des mentions figurant dans l’acte de vente du 25 septembre 1991 qu’elle avait elle-même conclu, que la parcelle servant d’assiette à cette propriété était régie par une servitude d’utilité publique propre aux zones de carrière et que le sous-sol était susceptible de comporter des vides souterrains, la commune a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à raison des renseignements erronés ainsi communiqués à Mme Z-A ;

3. Considérant, cependant, qu’il ressort des pièces du dossier, notamment des plans et photos qui y figurent, que la requérante était nécessairement informée, au moment où elle a acquis la propriété en cause, de ce que celle-ci était située à proximité immédiate d’une falaise ; qu’elle avait, par ailleurs, été également informée, par le paragraphe E du chapitre « urbanisme » figurant en deuxième partie de son acte de vente, que cette même propriété était située dans le périmètre de consultation de l’inspection générale des carrières ; que, par suite, Mme Z-A ne démontre pas que sa décision d’acquérir la propriété en cause a été essentiellement motivée par la circonstance que celle-ci ne se trouvait pas dans une zone de carrière et qu’elle aurait donc été trompée, du fait de la production de la note de renseignements mentionnée plus haut, sur la consistance réelle du bien vendu ainsi que sur les risques encourus du fait de la présence de la falaise ; qu’elle n’est, dès lors, pas fondée à soutenir que le préjudice résultant pour elle de l’impossibilité d’occuper sa propriété durant cinq années et demi serait directement la conséquence de la production de la note annexée à l’acte de vente du 9 octobre 1998 ; que, par suite, sa demande d’indemnisation à raison de la faute commise par la commune du fait des mentions figurant dans cette note doit être rejetée ;

S’agissant de la responsabilité de la commune à raison d’une carence de son maire dans l’exercice des pouvoirs qu’il tient de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales :

4. Considérant qu’aux termes de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : « La police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment: (…) 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que (…) les éboulements de terre ou de rochers (…) de pourvoir d’urgence à toutes les mesures d’assistance et de secours et, s’il y a lieu, de provoquer l’intervention de l’administration supérieure (…) » ;

5. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier qu’informé des risques d’éboulement résultant de l’effondrement d’anciennes carrières transformées en champignonnières, le maire de Chars a, le 24 mars 2001, pris un arrêté enjoignant aux occupants de l’immeuble habité par Mme Z-A et sa famille de procéder immédiatement à l’évacuation des lieux, ce qu’a fait l’intéressée en s’installant provisoirement chez un membre de sa famille ; qu’ainsi qu’il a été précisé plus haut, le maire a abrogé cet arrêté par une décision du 18 décembre 2006 ; que la commune a fait établir, en avril 2001, un dossier décrivant les travaux nécessaires pour conforter la falaise et prévenir tout effondrement ; que la circonstance que les travaux nécessaires n’aient été finalement exécutés qu’au cours du deuxième semestre 2006, si elle peut être de nature à engager la responsabilité de la commune en sa qualité de propriétaire de la falaise à l’origine des éboulements, laquelle appartient au domaine privé de la commune, n’est pas, en revanche, de nature à engager la responsabilité de la commune à raison de la carence de son maire à prendre les mesures nécessaires pour prévenir les risques encourus par les habitants de la maison appartenant à la requérante ; qu’en effet, le maire était fondé, d’une part, à prendre les mesures de protection de la famille de Mme Z-A telles qu’elles sont prévues par son arrêté du 24 mars 2001 dès lors que le péril représenté par les éboulements de la falaise n’était pas contesté, et d’autre part, à n’abroger cet arrêté qu’à compter de l’achèvement des travaux de confortation de la falaise, seuls susceptibles d’écarter tout risque pour les occupants de la maison ; que, par suite, la requérante n’est pas fondée à soutenir que le maire de la commune de Chars aurait commis une faute dans l’exercice des pouvoirs qu’il tient de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales précité de nature à engager la responsabilité de la commune ;

6. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que Mme Z-A n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu’aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. » ;

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Chars le versement à Mme Z-A de la somme demandée par cette dernière au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, par ailleurs, et dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de Mme Z-A le versement à la commune de Chars de la somme que cette dernière demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme Z-A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B Z-A et à la commune de Chars.

Délibéré après l’audience du 23 mai 2013, où siégeaient :

Mme Y, président de la Cour ;

M. Bouleau, président de chambre ;

M. Lenoir, président assesseur ;

Lu en audience publique, le 6 juin 2013.

Le rapporteur, Le président,

H. LENOIR M. Y

Le greffier,

A. LAVABRE

La République mande et ordonne au préfet du Val-d’Oise en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier,

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