Cour administrative d'appel de Versailles, 13 février 2014, n° 11VE02582

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Versailles, 13 févr. 2014, n° 11VE02582
Juridiction : Cour administrative d'appel de Versailles
Numéro : 11VE02582
Décision précédente : Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, 2 mai 2011

Sur les parties

Texte intégral

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL

DE VERSAILLES

N° 11VE02582


M. Y X


M. Le Gars

Président


M. Pilven

Rapporteur


Mme Besson-Ledey

Rapporteur public


Audience du 16 janvier 2014

Lecture du 13 février 2014

__________

Code PCJA : 39-06-02-005

Code Lebon : C

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La Cour administrative d’appel de Versailles

5e Chambre

Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2011, présentée pour M. Y X, architecte, demeurant XXX à XXX, par Me Tirel, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1° à titre principal, d’annuler le jugement nos 0600450-0601442 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 3 mai 2011 et de rejeter les demandes de l’Office public de l’habitat de la Seine-Saint-Denis tendant à sa condamnation solidaire avec la société Raimond, son assureur Axa France venant aux droits d’Axa Courtage Iard et la société de contrôle technique Socotec ;

2° à titre subsidiaire, que la société Raimond, son assureur Axa France et la société Socotec le garantissent de toute condamnation prononcée à son encontre ;

3° de mettre à la charge de l’Office public de l’habitat de la Seine-Saint-Denis le versement d’une somme de 4 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

— le coût des travaux de reprise rendus nécessaires à la suite de défauts d’exécution lors de leur mise en œuvre ne peut être imputable qu’à la seule entreprise Raimond pour un montant de 24 862,15 euros TTC ;

— le coût des travaux de reprise consécutifs à la mise en œuvre du bardage Acantha, posé selon l’avis technique Ardal 202, ne peut lui être imputé dès lors que l’expert relève qu’il a été trompé par le fabricant Caréa Façades concernant l’incorporation du procédé Acantha dans l’avis technique Ardal 202 et propose de ne retenir sa responsabilité qu’à hauteur de 5 % ;

— la société Raimond ne l’a pas alerté sur le caractère inadapté de l’utilisation de l’avis Ardal 202 et n’a pas vérifié si cet avis avait fait l’objet d’un additif concernant le matériau Acantha ; la société Socotec n’a pas indiqué explicitement l’inexistence des avis techniques en cause ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2011, présenté pour la société Raimond, par Me Puget, avocat, qui conclut au rejet de la requête et demande :

— de fixer la réception des travaux au 31 janvier 2002 ;

— d’annuler le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en ce qu’il l’a condamnée au titre de désordres liés à la mise en œuvre du matériau Acantha selon le procédé technique Ardal 202 et de ne retenir à son encontre qu’une condamnation au titre de défauts d’exécution pour un montant de 24 682,15 euros TTC ;

— de confirmer la condamnation de l’Office public de l’habitat de la Seine-Saint-Denis à lui payer les sommes de 116 524,05 euros TTC au titre du règlement du marché et de 7 899,58 euros TTC au titre des frais d’expertise ;

— de faire courir les intérêts à compter du 16 janvier 2003 ;

— de condamner M. X à la garantir en cas de condamnation à son encontre ;

— de mettre à la charge de M. X la somme de 10 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

— la réception doit intervenir à la date d’achèvement des travaux, soit le 31 janvier 2002, et non à la date d’apparition des désordres relatifs au matériau Acantha comme le préconise l’expert ;

— la réception des travaux ne pouvait dépendre de la production d’un avis technique ou d’un constat de traditionnalité dès lors que le CCTP impose l’utilisation de deux types de matériaux et que l’avis technique mentionné par l’article 6.3.3 du CCTP n’est rendu obligatoire que dans le cas de matériaux différents de ceux imposés par le maître d’ouvrage ; qu’en imposant un matériau dépourvu d’avis technique, le maître de l’ouvrage doit être regardé comme ayant renoncé à demander cet avis qui, par ailleurs, est dépourvu de valeur juridique ;

— les mesures conservatoires n’étaient pas utiles et leur coût ne peut lui être imputé ;

— s’agissant du matériau Acantha, aucune évolution n’ayant été relevée depuis la constatation des désordres primitifs, elle ne peut être condamnée qu’au titre de la réparation de ces premiers désordres ; s’agissant du matériau Bardeaudal, les défauts sont uniquement d’ordre esthétique et l’office public d’habitat n’a sollicité aucune condamnation à ce titre ;

— aucune responsabilité ne peut être retenue à son encontre dès lors que le maître d’ouvrage a imposé les matériaux en cause ;

— elle ne peut assumer, s’agissant du matériau Acantha, que le coût des travaux de reprise correspondant à des défauts ponctuels d’exécution, pour un montant de 24 682,15 euros TTC, et non le coût d’une mise en conformité des travaux selon un procédé technique adapté ;

— le cabinet X porte une part de responsabilité dans la survenue des désordres dès lors qu’il n’a vérifié ni que les matériaux mentionnés au CCTP ne disposaient d’aucun avis technique, ni que l’avis Ardal 202 permettait la mise en œuvre de ces matériaux ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 novembre 2011, présenté pour la société Socotec, par Me Draghi-Alonso, avocat, qui conclut à l’annulation du jugement attaqué et à l’absence de responsabilité de sa part dans la survenue des désordres constatés ; elle demande en outre que la société Raimond et M. X la garantissent en cas de condamnation à son encontre et que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de l’office public de l’habitat et de M. X sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

— elle a rempli ses obligations de prévention des aléas techniques et n’avait aucune obligation de rechercher l’existence ou l’inexistence d’un avis technique ;

— elle a demandé à plusieurs reprises la production de cet avis à la société Raimond et a émis, en l’absence d’avis technique, un avis défavorable sur l’emploi des matériaux utilisés ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 mars 2012, présenté pour la société Axa France, venant aux droits d’Axa Courtage Iard, par Me Lhumeau, avocat, qui conclut, à titre principal, à l’incompétence des conclusions dirigées à son encontre et demande, à titre subsidiaire, que :

— la réception judiciaire ne soit pas fixée à une date antérieure à celle proposée par l’expert judiciaire, du 30 septembre 2004 ;

— les non conformités ayant donné lieu à des travaux de réfection soient regardées comme des réserves à la réception ;

— les garanties prévues au contrat « RC plus entreprise » ne puissent jouer dès lors que les désordres pour lesquels sa garantie est recherchée n’ont pas un caractère de gravité de nature à porter atteinte à la solidité de l’ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination, que les mesures de protection provisoires étaient inutiles et que la société Raimond n’est pas responsable de travaux réalisés sans avis technique préalable ;

— la société Raimond la garantisse en cas de condamnation à son encontre ;

— soit mise à la charge de toute partie perdante la somme de 3 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 mai 2012, présenté pour l’Office public de l’habitat de Seine-Saint-Denis, par Me Bénard, avocat, qui demande que :

— la réception des travaux soit fixée au 30 septembre 2004 ;

— le solde du marché soit fixé à la somme de 81 331,68 euros TTC ;

— le montant de son indemnisation soit porté à la somme de 150 240,45 euros TTC, comprenant les travaux de reprise pour un montant de 100 269,94 euros TTC, et des mesures conservatoires pour un montant de 49 970,51 euros TTC ;

— la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la société Raimond, de la société Socotec et de M. X en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 17 juillet 2012, présenté pour la société Raimond qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu l’ordonnance, en date du 5 avril 2013, du président de la 5e Chambre, fixant la clôture d’instruction au 23 mai 2013 ;

Vu la lettre, en date du 3 janvier 2014, par laquelle la Cour a informé les parties que l’arrêt était susceptible d’être fondé sur un moyen relevé d’office tiré de ce que la situation des parties formant un appel provoqué n’est pas aggravée et que les conclusions portant sur la demande de mise hors de cause au titre de la responsabilité solidaire forment un litige distinct de celles portant sur les appels en garanties et qu’ainsi ces conclusions sont irrecevables ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d’œuvre confiées par les maîtres d’ouvrage publics à des prestataires de droit privé ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 16 janvier 2014 :

— le rapport de M. Pilven, premier conseiller,

— les conclusions de Mme Besson-Ledey, rapporteur public,

— et les observations de Me Blairon, substituant Me Lhumeau, pour la société Axa France ;

1. Considérant que, par acte d’engagement du 1er mars 2000, l’Office départemental d’habitations à loyers modérés de la Seine-Saint-Denis, aux droits duquel vient l’Office public de l’habitat (OPH) de la Seine-Saint-Denis, a confié à la société Raimond l’exécution du lot n° 1 « traitement des éléments opaques de façades » d’un marché de travaux d’isolation de la cité « Le Belvédère » au Pré-Saint-Gervais ; que la maîtrise d’œuvre a été confiée à M. X, architecte, et le contrôle technique à la société Socotec ; que la réception des travaux a été refusée par le maître de l’ouvrage par un courrier du 31 janvier 2003 ; qu’à la suite de la constatation, au mois de janvier 2003, de désordres sur les façades ayant fait l’objet des travaux du lot n° 1, un expert, désigné sur demande de l’OPH de la Seine-Saint-Denis par ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 25 septembre 2003, a rendu son rapport le 14 mars 2005 ; que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a été saisi, d’une part, d’une demande de la société Raimond, tendant à fixer la réception des travaux au 31 janvier 2002 et à condamner l’OPH de la Seine-Saint-Denis à lui payer le solde du marché et, d’autre part, d’une demande de l’OPH tendant à condamner la société Raimond, son assureur la société Axa Courtage Iard, M. X et la société Socotec à procéder aux travaux de reprise sur les plaques de façades dans un délai de six mois à compter du jugement, et à lui verser la somme de 49 790,51 euros en remboursement des mesures conservatoires de protection préconisées par l’expert et mises en place à la cité « Le Belvédère » ; que le tribunal a prononcé, par jugement du 3 mai 2011, la réception judiciaire des travaux au 31 janvier 2003 avec réserves, a condamné l’OPH à payer à la société Raimond la somme de 116 524,05 euros au titre du solde du marché et a condamné solidairement la société Raimond, M. X et la société Socotec à payer à l’OPH la somme de 148 699,11 euros TTC au titre de la réparation des désordres et de l’indemnisation des mesures conservatoires ; que M. X forme régulièrement appel de ce jugement en demandant sa mise hors de cause et que la société Raimond et la société Socotec le garantissent totalement en cas de condamnation ; que la société Raimond demande que M. X la garantisse en cas de condamnation à son encontre, que la réception judiciaire soit fixée au 31 janvier 2002 et que sa condamnation soit ramenée au plus à la somme de 24 682,15 euros TTC ; que la société Socotec demande à être mise hors de cause et que la société Raimond et M. X la garantissent en cas de condamnation à son encontre ; que l’OPH demande que la réception judiciaire soit fixée au 30 septembre 2004, que la somme allouée à la société Raimond au titre du solde du marché soit ramenée à 81 331,68 euros TTC et que celle qui lui a été allouée au titre de la réparation des désordres constatés et des mesures conservatoires soit portée à 150 240,45 euros TTC ;

Sur la date de réception judiciaire :

2. Considérant que si, en appel, l’OPH ne conteste pas que les travaux de bardage litigieux étaient matériellement achevés le 31 janvier 2003, elle soutient que, dans la mesure où ces travaux n’ont pas été exécutés suivant les prescriptions du CCTP, la réception judiciaire ne pouvait pas être fixée à cette date ; qu’ainsi, elle demande à la Cour de fixer la date de réception judiciaire au 30 septembre 2004, date à laquelle les travaux de reprise des désordres constatés par l’expert judiciaire ont été portés à sa connaissance ;

3. Considérant qu’aux termes de l’article 6.3.3 du CCAP : « En complément de l’article 23 du CCAG, il est précisé que l’emploi des procédés, produits ou matériaux non traditionnels ne peut être admis que sur présentation par le titulaire de l’avis technique du CSTB » ; que l’article 4.2 du CCTP intitulé : « Règles générales » prévoit que : « a) matériaux et procédés traditionnels : les fournitures et ouvrages seront fixés et exécutés conformément aux règles de l’Art. Ils respecteront les prescriptions des normes Afnor, cahiers DTU, et règles de calcul DTU. / b) Matériaux et procédés nouveaux : les matériaux et procédés non traditionnels, préalablement agréés par le maître de l’ouvrage et le maître d’œuvre, devront : / – soit bénéficier d’un avis technique favorable de la commission spécialisée [du CSTB] / – soit avoir bénéficié d’une enquête spécialisée d’un organisme agréé, et dans ces deux cas, bénéficier d’un accord pour emploi de la commission technique des assurances. / La mise en œuvre de ces matériaux et produits devra être effectuée conformément aux prescriptions techniques figurant dans ces avis. / Les frais nécessaires pour l’obtention d’un avis technique, d’un essai, ou d’une enquête auprès d’un organisme ou laboratoire agréé seront à la charge de l’entreprise » ; qu’il résulte des stipulations de l’article 1.6 du CCTP que le bardage minéral devait être réalisé avec des « dalles de type Aspara ou Acantha de chez Sofama » [nouvellement dénommée Caréa Façades] et de l’article 2.9.1 du CCTP intitulé « principe de pose », que le matériau Acantha serait posé selon le principe décrit à l’avis technique Ardal 202 ;

4. Considérant qu’il résulte des conclusions de l’expertise judiciaire qu’aucun équivalent n’existait au matériau Acantha utilisé par la société Raimond, qu’il s’agissait d’un matériau ou procédé « nouveau » et que l’ensemble des mentions techniques figurant dans le CCTP concernant le bardage minéral de type Acantha correspondaient intégralement à celles du procédé Ardal 202 ; qu’à la date à laquelle le marché a été conclu, la société Caréa Façades, fournisseur de ce matériau, n’avait pas obtenu d’avis technique spécifique au matériau Acantha de la part du Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) ; qu’en effet, après avoir initialement demandé en décembre 1999 un « additif » dans l’avis technique Ardal 202, ce dont le maître d’œuvre était au courant, cette société a présenté le 3 février 2000, eu égard aux différences existant entre les deux matériaux, une demande d’avis technique propre au matériau Acantha ; que cet avis technique « Acantha » n’a d’ailleurs été délivré que le 8 février 2003, soit postérieurement à l’achèvement des travaux et au refus de réception opposé par le maître d’ouvrage le 31 janvier 2003 ; qu’ainsi, le maître d’ouvrage ne pouvait subordonner la réception des travaux à la production par l’entreprise de l’avis technique spécifique au matériau Acantha en vertu de l’article 6 du CCAP, avis qui n’existait encore ni à la date de la signature du contrat, ni à celle d’achèvement des travaux, ni à la date du refus de réception opposé par l’OPH ; que, pour fixer cette date de réception au 30 septembre 2004, l’OPH ne saurait donc pas davantage arguer de ce que société Raimond n’a pas, en l’absence d’un avis technique favorable du CSTB, produit une enquête spécialisée d’un organisme agréé et un accord pour emploi de la commission technique des assurances ; qu’enfin, eu égard à la nature et au caractère ponctuel des différents désordres, il ne résulte pas de l’instruction que les travaux de bardage effectués par la société Raimond aient été inachevés au 31 janvier 2003, ou qu’ils n’aient pas été en état d’être reçus ; que l’OPH n’est par suite pas fondé à soutenir que c’est à tort que les premiers juges ont prononcé la réception judiciaire avec réserves à cette date et non au 30 septembre 2004 ;

Sur la responsabilité dans les désordres constatés :

5. Considérant, d’une part, qu’il résulte de l’instruction que les désordres constatés sur le bardage de type Acantha ont pour origine, d’une part, des défauts d’exécution imputables à la société Raimond et, d’autre part, la pose de ce matériau selon l’avis technique Ardal 202, qui s’est révélé inadapté, notamment en raison de différences d’épaisseur entre le matériau Acantha et le matériau Ardal 202 avec pour conséquence des phénomènes de dilatation et de reptation des plaques ; que le tribunal administratif a retenu la responsabilité solidaire de la société Raimond, de M. X et de la société Socotec au titre de la réparation de ces désordres pour un montant de 98 728,60 euros TTC ; que M. X soutient qu’il ne peut lui être reproché de ne pas avoir vérifié la validité du procédé Ardal 202 pour la mise en œuvre du matériau Acantha dès lors que, comme l’expert judiciaire l’a lui-même relevé, la société Caréa Façades l’a induit en erreur en indiquant que le matériau Acantha ne devait faire l’objet que d’un simple additif à l’avis technique Ardal 202 et qu’elle ne l’a pas informé avoir déposé, à compter du 3 février 2000, une demande d’avis technique spécifique au matériau Acantha ; que, toutefois, si l’expert judiciaire relève en effet que la société Caréa Façades doit être regardée comme le principal responsable à hauteur de 85 % des désordres constatés, il est constant que la responsabilité contractuelle de cette société, liée par un contrat de droit privé à la société Raimond, ne pouvait et n’a d’ailleurs pas été recherchée par l’OPH de la Seine-Saint-Denis devant le tribunal administratif ;

6. Considérant, d’autre part, que la mission de maîtrise d’œuvre confiée à M. X par l’OPH de la Seine-Saint-Denis portait sur l’assistance au maître d’ouvrage pour la passation des contrats de travaux, l’examen de leur conformité au projet d’exécution et la direction de l’exécution des travaux ; que les études d’avant-projet sommaire et définitif consistaient notamment, en vertu de l’article 13 du décret du 29 novembre 1993 susvisé, à définir les matériaux utilisés pour des travaux de réhabilitation ; que M. X ne pouvait se borner, pour la rédaction du cahier des clauses techniques particulières (CCTP), à se fonder sur la circonstance qu’une demande d’additif à l’avis Ardal 202 était en cours d’instruction en ce qui concerne le matériau Acantha pour imposer la pose de ce matériau selon les modalités retenues dans l’avis technique Ardal 202 ; que ce matériau était par ailleurs dépourvu d’équivalent ; qu’il appartenait à M. X, soit de s’assurer auprès du fabricant que ce matériau disposait, au minimum avant la date de signature du marché passé avec la société Raimond, d’un avis technique spécifique ou d’une adaptation de l’avis à partir de celui relatif au matériau Ardal 202, soit, en raison des incertitudes relatives au procédé technique de mise en œuvre, de conseiller au maître de l’ouvrage de renoncer à l’utilisation de ce matériau ; qu’en outre, M. X s’est abstenu de vérifier, en cours d’exécution du marché, si les connaissances techniques avaient évolué et si, par suite, cet avis technique qu’il avait mentionné dans le CCTP pouvait être utilisé pour le matériau Acantha ; que M. X n’est ainsi pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a retenu sa responsabilité dans la survenue des désordres constatés lors de la mise en œuvre du matériau Acantha ;

Sur le surplus de l’appel incident de l’OPH de la Seine-Saint-Denis :

7. Considérant que l’OPH demande que le montant des travaux de reprise soit porté à la somme de 100 269,94 euros TTC ; que dans son rapport, l’expert judiciaire a évalué le montant des travaux de reprise à la somme de 98 728,60 euros TTC en se fondant sur un devis non contesté de l’entreprise Raimond ; que si l’OPH soutient que l’entreprise Irec, chargée de procéder aux travaux de reprise, a évalué le coût de ces travaux à la somme de 100 269,94 euros TTC, il n’apporte aucune précision sur la nature des travaux de reprise qui auraient fait l’objet d’une sous-évaluation par l’expert judiciaire ; que, dès lors, sa demande tendant à l’augmentation de la somme arrêtée par le tribunal administratif au titre de la réparation des désordres constatés à la suite de la pose du matériau Acantha doit être rejetée ;

Sur les appels en garantie :

8. Considérant, en premier lieu, que, comme l’a jugé à bon droit le tribunal administratif, il n’appartient qu’aux juridictions de l’ordre judiciaire de connaître des actions tendant au paiement de l’indemnité d’assurance due par un assureur au titre de ses obligations de droit privé et à raison du fait dommageable commis par son assuré, et ce alors même que l’appréciation de la responsabilité de cet assuré dans la réalisation du fait dommageable qui lui est imputé relèverait de la compétence du juge administratif ; que, dès lors, les conclusions de M. X tendant à ce que la société Axa France le garantisse en cas de condamnation doivent être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

9. Considérant, en deuxième lieu, comme précisé aux points 5 et 6 du présent arrêt, que les désordres liés à l’utilisation de l’avis Ardal 202, qui s’est révélé inadapté pour la pose du matériau Acantha, trouvent leur origine, pour partie, dans les fautes du maître d’œuvre qui, pour la rédaction du cahier des clauses techniques particulières, ne s’est pas assuré de l’existence d’un avis technique spécifique au matériau Acantha mais s’est au contraire fondé sur un avis technique inadapté ; que, par ailleurs, la société Raimond ne conteste pas être responsable de fautes dans l’exécution des travaux de la pose du matériau Acantha ; qu’il appartenait, en outre, à ladite société, ainsi que le relève d’ailleurs l’expert judiciaire, d’attirer l’attention du maître d’ouvrage et du maître d’œuvre sur l’absence d’avis technique propre au matériau Acantha ou d’émettre des réserves sur le procédé de pose du matériau recommandé ; que, par suite, M. X qui n’apporte aucune justification de nature à modifier la répartition des responsabilités arrêtée par le tribunal administratif n’est pas fondé à demander à être entièrement garanti par la société Raimond ; que réciproquement les conclusions en appel incident de la société Raimond à fin d’être entièrement garantie par M. X doivent être rejetées ;

10. Considérant, en troisième lieu, que si, pour les motifs susmentionnés au point 9, la demande de M. X tendant à être entièrement garanti par la société Socotec doit également être écartée, en revanche, il résulte de l’instruction qu’il n’entrait dans les compétences de la société Socotec que de réclamer au maître d’œuvre et au maître d’ouvrage les avis techniques prévus au CCTP et non d’identifier les avis techniques nécessaires ou de s’assurer de leur existence même ; qu’ainsi en émettant un avis défavorable à l’utilisation du matériau Acantha en l’absence d’un avis technique valide, la société Socotec a rempli ses obligations ; qu’elle est, par suite, fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a retenu qu’elle était tenue de garantir M. X à hauteur de 10 % des condamnations solidaires prononcées par ledit jugement ; que, pour les mêmes motifs, elle est fondée à demander, dans le cadre d’un appel incident, que M. X la garantisse des condamnations solidaires prononcées par ledit jugement ; qu’il y a lieu de fixer cette garantie à hauteur de 55 % des condamnations susmentionnées à son encontre ;

Sur les appels provoqués présentés par la société Raimond, la société Socotec et l’OPH de la Seine-Saint-Denis :

11. Considérant, s’agissant des demandes relatives aux responsabilités encourues, que le présent arrêt n’a pas pour effet d’aggraver la situation de l’OPH de la Seine-Saint-Denis, de la société Raimond et de la société Socotec ; que, par suite, les conclusions d’appel provoqué dirigées à l’encontre de l’OPH de la Seine-Saint-Denis tendant, pour la société Raimond, à ce que sa responsabilité ne soit que partiellement reconnue et que la date de réception des travaux soit fixée au 31 janvier 2002 et tendant, pour la société Socotec, à son absence totale de responsabilité doivent être rejetées ; que les conclusions de l’OPH de la Seine-Saint-Denis dirigées à l’encontre de la société Raimond et tendant à ce que le solde du marché soit ramené à la somme de 81 331,68 euros TTC ne sont pas recevables, en l’absence de recevabilité de l’appel provoqué de la société Raimond ; que, s’agissant des demandes en appel en garantie, le présent arrêt n’ayant pas pour effet d’aggraver la situation de la société Socotec, les conclusions d’appel provoqué relatifs aux appels en garantie qu’elle dirige à l’encontre de la société Raimond ne sont pas recevables et ne peuvent qu’être rejetées ;

Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que l’OPH de la Seine-Saint-Denis, la société Raimond, son assureur la société Axa France et la société Socotec n’étant pas les parties perdantes, M. X n’est pas fondé à demander que soit mise à leur charge une somme sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu’il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. X la somme de 1 000 euros à verser à la fois à la société Raimond, à son assureur la société Axa France, à l’OPH de la Seine-Saint-Denis et à la société Socotec au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Les conclusions de M. X dirigées à l’encontre de la société Axa France sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 3 : M. X est condamné à garantir la société de contrôle technique Socotec à hauteur de 55 % des condamnations prononcées par l’article 2 du jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 3 mai 2011. La société de contrôle technique Socotec est déchargée de toute garantie à l’égard de M. X à raison des condamnations solidaires prononcées à son encontre.

Article 4 : Les conclusions d’appel incident de l’OPH de la Seine-Saint-Denis et de la société Raimond et les appels provoqués de l’OPH de la Seine-Saint-Denis, de la société Raimond et de la société de contrôle technique Socotec sont rejetés.

Article 5 : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 3 mai 2011 est réformé en ce qu’il a de contraire au présent arrêt.

Article 6 : M. X versera à la société Raimond, à son assureur la société Axa France, à la société de contrôle technique Socotec et à l’OPH de la Seine-Saint-Denis la somme de 1 000 euros, chacun, au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. Y X, à l’Office public de l’habitat (OPH) de la Seine-Saint-Denis, à la société Raimond, à la société de contrôle technique Socotec et à la société Axa France.

Délibéré après l’audience du 16 janvier 2014, à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président ;

M. Pilven, premier conseiller ;

Mme Margerit, premier conseiller ;

Lu en audience publique, le 13 février 2014.

Le rapporteur, Le président,

J.-E. PILVEN J. LE GARS

Le greffier,

C. THEUIL

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier,

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Cour administrative d'appel de Versailles, 13 février 2014, n° 11VE02582