CAA de VERSAILLES, 5ème chambre, 9 juin 2016, 14VE03702, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Versailles, 5e ch., 9 juin 2016, n° 14VE03702
Juridiction : Cour administrative d'appel de Versailles
Numéro : 14VE03702
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Montreuil, 29 octobre 2014, N° 1404167
Identifiant Légifrance : CETATEXT000033368625

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le Musée de l’air et de l’espace a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d’ordonner à l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » la restitution, à ses frais, des six appareils prêtés par convention du

26 octobre 2003, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de ladite association la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1404167 du 30 octobre 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a, d’une part, enjoint à l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » de restituer au Musée de l’air et de l’espace les pièces de collection objets du bulletin de dépôt « D 04/08 » du 26 octobre 2003, dans le délai de deux mois suivant la notification du jugement, sous peine du versement, passé ce délai, d’une astreinte de 100 euros par jour de retard et, d’autre part, mis à la charge de ladite association la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 31 décembre 2014, l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY », représentée par Me Brey, avocat, demande à la Cour :

1° d’annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée par le Musée de l’air et de l’espace devant le Tribunal administratif de Montreuil ;

2° de mettre à la charge du Musée de l’air et de l’espace la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— le tribunal administratif a commis une erreur de droit et une erreur d’appréciation en lui ordonnant de restituer les objets litigieux alors qu’elle ne s’opposait pas à leur restitution ; elle a proposé à l’administration, dans un courrier du 12 septembre 2013, de rapatrier au Bourget avant la fin de l’année l’avion Hunter, l’hélice et la planche de bord, d’échanger les avions Vautour et Gloster Meteor contre un MIG 17 Polonais restauré à neuf début 2012 ou, à défaut d’accord, de racheter ces deux avions ; par un courrier du 28 novembre 2013 faisant suite au refus opposé par le Musée à la précédente proposition, elle a offert de remettre en état les avions Vautour et Gloster Meteor et de restituer l’avion Hunter, l’hélice et son tableau de bord ainsi que l’avion Mystere IV après l’hiver ;

 – les premiers juges ont commis une erreur de droit et une erreur d’appréciation en prononçant une injonction alors que l’administration avait le pouvoir d’assurer l’exécution de sa décision en récupérant d’office les objets litigieux ;

 – le tribunal administratif a commis une erreur d’appréciation en ne se prononçant pas sur l’état de conservation des objets litigieux dès lors que l’administration a refusé de renouveler la convention pour ce motif alors que ceux-ci ne souffrent d’aucune détérioration ;

 – à titre subsidiaire, les premiers juges ont commis une erreur d’appréciation en fixant à deux mois le délai d’exécution de l’injonction prononcée à son encontre alors que la restitution des appareils nécessite une organisation logistique importante.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mars 2015, le Musée de l’air et de l’espace conclut au rejet de la requête et à ce qu’il soit mis à la charge de l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de la défense ;

 – le code général de la propriété des personnes publiques ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

 – le rapport de M. Le Gars,

 – les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public,

 – et les observations de Me A… pour le Musée de l’air et de l’espace.

1. Considérant que le Musée de l’air et de l’espace a mis en demeure, à plusieurs reprises à compter du 25 mai 2010, l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » de lui restituer plusieurs objets de collection mis à disposition de cette dernière depuis 1988, en vue de leur exposition au public, en vertu de bulletins de dépôt renouvelés en dernier lieu par une convention signée le 18 novembre 2004 ; que cet établissement public national à caractère administratif a saisi le Tribunal administratif de Montreuil d’une demande tendant à ce qu’il soit ordonné à ladite association de lui restituer les pièces de collection objets du bulletin de dépôt « D 04/08 » du 26 octobre 2003 ; que, par un jugement du 30 octobre 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a ordonné à l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » de restituer au Musée de l’air et de l’espace les pièces de collection objets de ce bulletin de dépôt, dans le délai de deux mois suivant la notification du jugement, sous peine du versement, passé ce délai, d’une astreinte de 100 euros par jour de retard ; que l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu’aux termes de l’article R. 3413-62 du code de la défense : « Le musée de l’Air et de l’Espace est un établissement public national à caractère administratif doté de la personnalité civile et de l’autonomie financière placé sous la tutelle du ministre de la défense. Cet établissement a pour mission d’assurer la conservation et l’enrichissement des collections de l’Etat ainsi que la présentation au public du patrimoine historique et culturel national dans le domaine de l’aéronautique et de l’espace. Le musée conserve des matériels aéronautiques et spatiaux, de toutes nationalités, en raison de leur valeur historique, scientifique ou technique. » ; qu’aux termes de l’article R. 3413.67 de ce code : " Les objets appartenant aux collections du musée de l’Air et de l’Espace peuvent être prêtés pour des expositions temporaires à caractère culturel organisées en France ou à l’étranger par des personnes publiques ou des organismes de droit privé à vocation culturelle agissant sans but lucratif. / Ils peuvent également faire l’objet d’un dépôt en vue de leur exposition au public : (…) / 2° Dans les musées dépendant de fondations et d’associations ; (…) / Les prêts et dépôts doivent faire l’objet d’une convention comportant une clause de maintien en état des objets de collection concernés. » ; qu’aux termes de l’article R. 3413-69 du même code : « Le dépôt est accordé pour une durée maximale de cinq ans, renouvelable dans la même forme. Les prêts et les dépôts sont, à tout moment, révocables lorsque les conditions définies aux articles R. 3413-67 et R. 3413-68 ne sont plus respectées par les bénéficiaires. » ; qu’enfin, aux termes de l’article L. 2112-1 du code général de la propriété des personnes publiques : « Sans préjudice des dispositions applicables en matière de protection des biens culturels, font partie du domaine public mobilier de la personne publique propriétaire les biens présentant un intérêt public du point de vue de l’histoire, de l’art, de l’archéologie, de la science ou de la technique, notamment : (…) 8° Les collections des musées » ;

3. Considérant que s’il n’appartient pas au juge administratif d’intervenir dans la gestion d’un service public en adressant des injonctions à ceux qui ont contracté avec l’administration, lorsque celle-ci dispose à l’égard de ces derniers des pouvoirs nécessaires pour assurer l’exécution du contrat, il en va autrement quand l’administration ne peut user de moyens de contrainte à l’encontre de son cocontractant qu’en vertu d’une décision juridictionnelle ; qu’en pareille hypothèse, le juge du contrat est en droit de prononcer, à l’encontre du cocontractant, une condamnation, éventuellement sous astreinte, à une obligation de faire ;

4. Considérant, en premier lieu, que l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » soutient que le Musée de l’air et de l’espace n’était pas recevable à demander au juge administratif de prononcer à son encontre une injonction de restituer les objets qui lui ont été prêtés dans le cadre de la convention de dépôt conclue le 18 novembre 2004 dès lors qu’il disposait des pouvoirs nécessaires pour obtenir le même résultat ; que, toutefois, il est d’une part constant qu’aucun renouvellement de cette convention n’est intervenu depuis le 17 novembre 2006, date de son expiration, faute d’accord exprès en ce sens et qu’ainsi, la requérante ne détenait aucun titre pour conserver et exposer au public les objets litigieux qui relèvent du domaine public mobilier de l’État ; que, d’autre part, aucun texte ou principe jurisprudentiel n’autorise l’administration à pénétrer sur une propriété privée afin de procéder, sans le consentement de l’association, à la saisie des appareils et équipements aéronautiques mis à sa disposition ; qu’ainsi, le Musée de l’air et de l’espace, qui ne disposait d’aucun moyen de contrainte à l’encontre de l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » pour obtenir la restitution de ces biens, était recevable à demander au juge du contrat d’ordonner cette restitution ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » affirme qu’elle avait accepté de restituer les objets litigieux et que le Musée de l’air et de l’espace a refusé ses propositions ; qu’il résulte, toutefois, de l’instruction, notamment des courriers adressés entre le 25 mai 2010 et le 17 juillet 2013, que l’administration a indiqué à la requérante que la convention de dépôt conclue le 18 novembre 2004 était expirée et lui a demandé, en conséquence, la restitution des quatre avions, de la planche de bord et de l’hélice, objets de ladite convention ; que si la requérante a proposé, à compter d’un courrier en date du 12 septembre 2013, de restituer l’avion Hawker Hunter F4 N°ID644, l’hélice tripale Curtiss et le tableau de bord équipé spécifique à l’avion F100D, il résulte de l’instruction que cette proposition n’a pas été respectée ; que, par la suite, l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » s’est bornée à réitérer ses offres d’échange ou d’achat des avions SNCASO so4050-II N Vautour N°304 et Gloster Meteor NF 11 N°24 et de restauration de l’avion Mystère IV A N°47, alors que le musée les avait expressément rejetées dès le 13 novembre 2013 et n’était nullement tenu d’y faire droit ; que, dans ces conditions, l’intéressée ne saurait sérieusement soutenir que la non restitution des objets en cause ne lui serait pas imputable ;

6. Considérant, en troisième lieu, que l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » soutient que l’état de conservation des objets litigieux ne pouvait justifier la demande de restitution de l’administration ; que, toutefois, l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » n’établit pas, ni même ne soutient, avoir demandé le renouvellement de la convention de dépôt des objets litigieux ; que le Musée était ainsi fondé à en exiger la restitution dès lors que l’association requérante ne disposait plus d’aucun titre pour conserver les objets en litige quels que soient leur état ou les conditions de conservation ; qu’en tout état de cause, elle a elle-même admis, en particulier dans le courrier du 28 novembre 2013, que plusieurs des appareils nécessitaient une restauration ; que, dès lors, l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal lui a ordonné de restituer les pièces de collection objets du bulletin de dépôt « D 04/08 » du 26 octobre 2003 ;

7. Considérant, enfin, que, si l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » soutient que le délai d’exécution de deux mois de l’injonction prononcée est trop court, elle n’apporte aucune précision et ne produit aucun élément justificatif à l’appui de cette affirmation ;

8. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Montreuil a fait droit à la demande du Musée de l’air et de l’espace ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu’être rejetées ; qu’en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la requérante la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par le Musée de l’air et de l’espace et non compris dans les dépens ;


DÉCIDE :


Article 1er : La requête de l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » est rejetée.

Article 2 : l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » versera au Musée de l’air et de l’espace la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions du Musée de l’air et de l’espace tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l’ASSOCIATION « LES AMIS DU MUSEE DU CHATEAU DE SAVIGNY » et au Musée de l’air et de l’espace.


Délibéré après l’audience du 6 mai 2016, à laquelle siégeaient :

Mme Signerin-Icre, président de chambre,
M. Le Gars, président assesseur,
M. Pilven, premier conseiller.


Lu en audience publique, le 9 juin 2016.


Le rapporteur,

J. Le GarsLe président,

C. Signerin-IcreLe greffier,

S. NebbahLa République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier,

2

N° 14VE03702

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