CAA de VERSAILLES, 5ème chambre, 4 mars 2021, 19VE00312, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Versailles, 5e ch., 4 mars 2021, n° 19VE00312
Juridiction : Cour administrative d'appel de Versailles
Numéro : 19VE00312
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Versailles, 25 novembre 2018, N° 1603228
Dispositif : Satisfaction partielle
Identifiant Légifrance : CETATEXT000043240311

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B… C… a demandé au tribunal administratif de Versailles de prescrire avant-dire droit une expertise afin d’examiner son état de santé et évaluer ses préjudices, d’annuler les décisions implicites rejetant sa demande de protection fonctionnelle et d’aménagement de son poste de travail, de condamner la commune de Dampierre-en-Yvelines à lui verser une somme de 200 000 euros assortie des intérêts légaux capitalisés, somme étant provisoire en cas d’expertise et définitive en l’absence d’expertise, d’enjoindre à la commune de saisir la commission de réforme afin d’étudier ses droits à allocation temporaire d’invalidité, de reconstituer sa carrière en lui versant les traitements qui lui sont dus et en reconstituant ses droits sociaux et de retraite, et de mettre à la charge de la commune de Dampierre-en-Yvelines les dépens et la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1603228 du 26 novembre 2018, le tribunal administratif de Versailles a condamné la commune de Dampierre-en-Yvelines à verser à M. C… la somme de 5 300 euros tous intérêts échus, en réparation de ses préjudices, et mis à la charge de la commune de Dampierre-en-Yvelines une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés respectivement les 28 janvier 2019, 18 janvier 2021 et 1er février 2021, M. C…, représenté par Me E…, avocate, demande à la cour :

1°) d’ordonner, avant-dire droit, une expertise afin d’étudier son état de santé et d’évaluer ses préjudices ;

2°) d’annuler ce jugement en tant qu’il a limité la condamnation de la commune de Dampierre-en-Yvelines à la somme de 5 300 euros ;

3°) de condamner la commune de Dampierre-en-Yvelines à lui verser la somme de 200 000 euros en réparation de ses préjudices, assortis des intérêts au taux légal et de la capitalisation, cette somme étant chiffrée provisoirement en cas d’expertise et définitivement en l’absence d’expertise ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Dampierre-en-Yvelines les entiers dépens et la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

—  les premiers juges ont commis une erreur de droit, une erreur manifeste d’appréciation et dénaturé les pièces du dossier ;

- le jugement attaqué est entaché d’une omission à statuer, dès lors que les premiers juges ne se sont pas prononcés sur la discrimination liée à son handicap ;

- la commune de Dampierre-en-Yvelines a commis une faute en refusant de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle, dès lors qu’il a été victime de harcèlement moral et physique en subissant des agissements discriminatoires liés à son handicap et son engagement syndical, en étant l’objet d’isolement, de contrôles incessants et d’insultes de la part du maire et de son adjoint ; il a par ailleurs subi des retenues injustifiées sur son traitement, une baisse de notation injustifiée, et fait l’objet de sanctions également injustifiées ;

- il a fait l’objet d’un management inapproprié fautif ; les agissements dont il a fait l’objet ont excédé le cadre de l’exercice normal du pouvoir hiérarchique ;

- la commune a également commis une faute en ne procédant pas à l’aménagement de son poste de travail ;

- ces fautes, qui engagent la responsabilité de l’administration, lui ont causé des préjudices qui doivent être réparés à hauteur de la somme de 200 000 euros.

— ---------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

—  la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

—  le rapport de M. A…,

- les conclusions de Mme Sauvageot, rapporteur public,

- les observations de Me E…, pour M. C…, et celles de Me D…, pour la commune de Dampierre-en-Yvelines.

Une note en délibéré, enregistrée le 18 février 2021, a été présentée pour la commune de Dampierre-en-Yvelines.

Considérant ce qui suit :

1. M. C…, né le 4 avril 1964, a été recruté par la commune de Dampierre-en-Yvelines le 1er juin 2001 en qualité d’agent non titulaire afin d’exercer les fonctions de chauffeur de car scolaire. Il a été nommé agent d’entretien stagiaire le 1er juin 2002, puis titularisé dans ce cadre d’emplois le 1er juin 2003. L’intéressé a été affecté à l’entretien des bâtiments, voiries et espaces verts de la commune à compter du 29 août 2011. Par un courrier daté du 26 décembre 2015, M. C… a demandé au maire de la commune de Dampierre-en-Yvelines le bénéfice de la protection fonctionnelle pour des faits de harcèlement moral, l’organisation d’une enquête administrative, la saisine de la commission de réforme au sujet d’un accident de service survenu le 26 mars 2015, et la réparation des préjudices résultant de ces faits ainsi que d’un second accident de service survenu le 17 août 2015. Ces demandes ont été rejetées par le maire de la commune le 10 mai 2016. M. C… relève appel du jugement du 26 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Versailles a limité la condamnation de la commune de Dampierre-en-Yvelines à la somme de 5 300 euros.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal n’a pas répondu au moyen, qui n’était pas inopérant, tiré de ce que M. C… a été victime d’une discrimination liée à son état de santé et son handicap. Par suite, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens d’irrégularité soulevés par le requérant, celui-ci est fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d’un défaut de réponse à un moyen et qu’il doit être annulé pour ce motif en tant qu’il statue sur les conclusions indemnitaires de M. C….

3. Il y a lieu, pour la cour, d’évoquer et de statuer immédiatement sur ces conclusions susmentionnées.

Sur l’indemnisation des préjudices résultant du harcèlement physique et moral, de la discrimination, de l’absence d’adaptation du poste de travail et du dépassement du cadre de l’exercice normal du pouvoir hiérarchique :

4. D’une part, aux termes des dispositions de l’article 6 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " (…) Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses, de leur origine, de leur orientation sexuelle ou identité de genre, de leur âge, de leur patronyme, de leur situation de famille ou de grossesse, de leur état de santé, de leur apparence physique, de leur handicap ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race. / Toutefois des distinctions peuvent être faites afin de tenir compte d’éventuelles inaptitudes physiques à exercer certaines fonctions. (…) Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l’évaluation, la notation, la discipline, la promotion, l’affectation et la mutation ne peut être prise à l’égard d’un fonctionnaire en prenant en considération : 1° Le fait qu’il a subi ou refusé de subir des agissements contraires aux principes énoncés au deuxième alinéa du présent article ; 2° Le fait qu’il a formulé un recours auprès d’un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire respecter ces principes ; 3° Ou bien le fait qu’il a témoigné d’agissements contraires à ces principes ou qu’il les a relatés. (…) « . Aux termes de l’article 6 quinquies de cette loi : » Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (…) « . Aux termes de l’article 11 de cette même loi : » Les fonctionnaires bénéficient, à l’occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d’une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire. (…) La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l’occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. (…) ". Ces dispositions établissent à la charge de l’administration une obligation de protection de ses agents dans l’exercice de leurs fonctions, à laquelle il ne peut être dérogé que pour des motifs d’intérêt général. Cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l’agent est exposé, mais aussi d’assurer à celui-ci une réparation adéquate des torts qu’il a subis. La mise en oeuvre de cette obligation peut notamment conduire l’administration à assister son agent dans l’exercice des poursuites judiciaires qu’il entreprendrait pour se défendre. Il appartient dans chaque cas à l’autorité administrative compétente de prendre les mesures lui permettant de remplir son obligation vis-à-vis de son agent, sous le contrôle du juge et compte tenu de l’ensemble des circonstances de l’espèce.

5. Il appartient à l’agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral, lorsqu’il entend contester le refus opposé par l’administration dont il relève à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d’en faire présumer l’existence. Il incombe à l’administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d’apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu’il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d’instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu’ils sont constitutifs d’un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l’agent auquel il est reproché d’avoir exercé de tels agissements et de l’agent qui estime avoir été victime d’un harcèlement moral. En revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l’existence d’un harcèlement moral est établie, qu’il puisse être tenu compte du comportement de l’agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui. Le préjudice résultant de ces agissements pour l’agent victime doit alors être intégralement réparé.

6. D’autre part, il appartient au juge administratif, dans la conduite de la procédure inquisitoire, de demander aux parties de lui fournir tous les éléments d’appréciation de nature à établir sa conviction. Cette responsabilité doit, dès lors qu’il est soutenu qu’une mesure a pu être empreinte de discrimination, s’exercer en tenant compte des difficultés propres à l’administration de la preuve en ce domaine et des exigences qui s’attachent aux principes à valeur constitutionnelle des droits de la défense et de l’égalité de traitement des personnes. S’il appartient au requérant qui s’estime lésé par une telle mesure de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer une atteinte à ce dernier principe, il incombe au défendeur de produire tous ceux permettant d’établir que la décision attaquée repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La conviction du juge, à qui il revient d’apprécier si la décision contestée devant lui a été ou non prise pour des motifs entachés de discrimination, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d’instruction utile.

7. M. C… soutient qu’il a été victime, à compter de mars 2014, de faits constitutifs de harcèlement physique et moral, ainsi que de discriminations liés à son handicap et à son engagement syndical, en étant l’objet d’isolement, de contrôles incessants et d’insultes de la part du maire et de son adjoint. Il fait également valoir qu’il a subi des retenues infondées sur son traitement et une baisse de notation injustifiée, qu’il a fait l’objet de sanctions également injustifiées, et que la commune a refusé de procéder à l’aménagement de son poste de travail. Il soutient enfin que ces agissements, qui excèdent en tout état de cause le cadre de l’exercice normal du pouvoir hiérarchique, sont à l’origine des deux accidents de service dont il a été victime les 26 mars 2015 et 17 août 2015.

8. En premier lieu, il ne ressort d’aucune des pièces du dossier que M. C… aurait, comme il le soutient, rencontré des difficultés pour bénéficier des décharges syndicales auxquelles il avait droit. En particulier, il ne résulte pas de l’instruction que le maire de la commune de Dampierre-en-Yvelines aurait tenté de faire obstacle à l’octroi de la décharge syndicale dont l’intéressé a bénéficié du 21 novembre 2014 au 31 décembre 2014.

9. En deuxième lieu, si le requérant fait valoir que le service de médecine préventive, dans deux avis des 3 avril 2012 et 25 juin 2013, a préconisé une activité professionnelle excluant le port de charges lourdes, le travail en hauteur ou sur terrain en pente, il ne résulte pas de l’instruction que la commune aurait, comme il le soutient, « sciemment aggravé » ses problèmes de santé en lui imposant délibérément des conditions de travail plus pénibles à partir de l’année 2014, en dépit de ces recommandations. A cet égard, si le requérant produit trois certificats médicaux établis les 20 novembre 2014, 1er juin 2015 et 28 octobre 2015 par son médecin traitant, lequel fait état de ses problèmes de santé et présente des préconisations concernant l’aménagement de son poste de travail, ces documents ne sont pas de nature à établir ses allégations. En outre, si la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées a reconnu au requérant le 9 octobre 2014 la qualité de travailleur handicapé et si l’intéressé soutient sans être contredit en avoir informé le maire de la commune lors d’une réunion qui se serait tenue dans un climat tendu le 19 décembre 2014, il ne résulte pas de l’instruction que l’administration aurait, en dépit de cette reconnaissance, aggravé les conditions de travail de l’intéressé au cours de l’année 2015. En outre, les préconisations formulées le 19 février 2015 par le service de médecine préventive ont conduit l’administration à modifier de façon détaillée la fiche de poste du requérant le 12 mars 2015, laquelle prohibe la station debout prolongée, le port de charges d’un poids supérieur à 10 kg, le travail dans des conditions mettant en jeu l’équilibre (terrain accidenté), et l’utilisation des seuls engins à moteur de la commune qui, compte tenu de leur ancienneté, sont inconfortables. Si M. C… soutient que l’administration lui a interdit de manière injustifiée l’utilisation de tous les véhicules communaux, cette allégation est contredite par la fiche de poste susmentionnée et n’est par ailleurs pas établie par les autres pièces du dossier. De même, les attestations produites par l’intéressé, qui se bornent pour l’essentiel à indiquer qu’il aurait été vu, à plusieurs reprises en 2015, travaillant seul avec un chariot et sans véhicule, ne permettent pas à elles seules d’établir que la commune de Dampierre-en-Yvelines aurait refusé de respecter les préconisations susmentionnées de la fiche de poste et que l’intéressé aurait été victime d’une discrimination liée à son handicap. Si les certificats établis les 4 septembre 2015 et 19 novembre 2015 par le chirurgien orthopédiste ayant opéré le requérant mentionnent que l’aggravation de l’état de santé de ce dernier résulte du non-respect par son employeur des préconisations de la médecine du travail, ces affirmations reposent sur les seules déclarations de l’intéressé et ne permettent pas d’établir que la commune de Dampierre-en-Yvelines aurait refusé de procéder à l’aménagement de son poste de travail. Enfin, il ne résulte pas de l’instruction, et des éléments exposés ci-dessus, que les deux accidents de service dont M. C… a été victime les 26 mars 2015 et 17 août 2015 résulteraient d’agissements fautifs de la commune de Dampierre-en-Yvelines.

10. En troisième lieu, la circonstance que le requérant aurait été vu travaillant seul à plusieurs reprises en 2015, ainsi que l’indiquent les attestations qu’il produit, n’est pas de nature à établir qu’il aurait été quotidiennement isolé dans l’exercice de ses fonctions et qu’il n’aurait jamais reçu l’assistance nécessaire au bon accomplissement de ses fonctions.

11. Enfin, M. C… soutient, comme en première instance, qu’il a fait l’objet d’insultes et de menaces de la part du maire de la commune et de l’adjoint en charge des agents techniques, qu’il a subi en 2014 une baisse de sa notation qui doit être regardée comme une sanction déguisée, qu’il a fait l’objet de sanctions et de retenues sur salaire infondées, et qu’il a été mis fin sans motif valable au remboursement de son forfait téléphonique. Toutefois, ces allégations, qui ne comportent aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l’argumentation développée devant le tribunal, ne sont pas de nature, pour les motifs retenus à juste titre par les premiers juges, à faire présumer l’existence d’une discrimination ou d’un harcèlement moral. Il ne résulte pas davantage de l’instruction que les agissements de l’administration auraient dépassé le cadre de l’exercice normal du pouvoir hiérarchique.

12. Il résulte de ce qui précède que si M. C… a présenté un syndrome anxio-dépressif à partir de mai 2014, les éléments de fait produits par l’intéressé ne sont pas susceptibles de faire présumer l’existence d’agissements répétés de harcèlement moral au sens des dispositions précitées de l’article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983, ou d’une discrimination liée à son handicap ou à son activité syndicale. En outre, ces éléments ne permettent pas d’établir que le cadre de l’exercice normal du pouvoir hiérarchique aurait été méconnu par l’administration ou que l’administration aurait commis une faute en refusant l’aménagement de son poste de travail. Ainsi, M. C… n’est pas fondé à invoquer l’existence d’une faute de l’administration. Ses conclusions indemnitaires fondée sur l’existence d’une telle faute doivent ainsi être rejetées.

Sur l’indemnisation des préjudices résultant des accidents de service :

13. Compte tenu des conditions posées à leur octroi et de leur mode de calcul, la rente viagère d’invalidité et l’allocation temporaire d’invalidité doivent être regardées comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l’incidence professionnelle résultant de l’incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions qui instituent ces prestations, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l’obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu’ils peuvent courir dans l’exercice de leurs fonctions. Ces dispositions ne font en revanche obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l’invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d’une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l’emploie, même en l’absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu’une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l’ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l’accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l’état d’un ouvrage public dont l’entretien lui incombait.

14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. C… n’est pas fondé à solliciter l’indemnisation des préjudices résultant des accidents de services dont il a été victime les 26 mars 2015 et 17 août 2015 sur le fondement de la faute de l’administration.

15. En deuxième lieu, les préjudices résultant de l’accident de service du 26 mars 2015 ne sont pas établis ni même décrits, la commission de réforme ayant d’ailleurs estimé dans son avis du 30 juin 2016 que l’état de santé de l’intéressé était considéré comme guéri le 4 mai 2015, sans séquelle indemnisable.

16. Enfin, il résulte notamment du rapport médical du docteur Gabard du 20 juin 2016 et de ses rapports des 6 mai 2019 et 16 octobre 2019 produits pour la première fois en appel, que M. C… a enduré du fait de l’accident du 17 août 2015 une gêne temporaire de grade III pendant deux mois, de grade II pendant deux mois, puis de grade I jusqu’à la date de consolidation fixée au 19 décembre 2018, ainsi que des souffrances d’une intensité de 3,5/7 et un préjudice esthétique temporaire d’une intensité de 1/7. Il sera fait une juste appréciation de ces préjudices en les évaluant, tous intérêts échus, respectivement à 1 500 euros, 3 000 euros et 800 euros. En outre, saisi en dernier lieu par la commune, le médecin qui a examiné M. C… a finalement retenu un déficit fonctionnel permanent (DFP) de 23,5 % en tenant compte d’une dégradation psychique de 15 % dans son rapport du 16 octobre 2019 après avoir fixé ce poste à 13 % dans son rapport du 6 mai 2019. Dans les circonstances particulières de l’espèce, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en l’évaluant, tous intérêts compris, à la somme de 20 000 euros. En outre, l’intéressé est fondé à obtenir une indemnité de 500 euros correspondant aux frais de l’examen médical réalisé à sa demande par le docteur Garbard le 6 mai 2019, dès lors qu’elle est utile à la solution du litige. En revanche, si le requérant soutient que son état de santé a nécessité l’assistance d’une tierce personne, il ne l’établit pas par les pièces versées au dossier, et en particulier les rapports médicaux susmentionnés. De même, le préjudice d’agrément, le préjudice esthétique permanent, le préjudice moral et les troubles dans les conditions d’existence résultant de l’accident de service du 17 août 2015, invoqués par le requérant, ne sont pas établis par les pièces versées au dossier.

17. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’ordonner une expertise médicale, que M. C… est fondé à demander la condamnation de la commune de Dampierre-en-Yvelines à lui verser une somme de 25 800 euros tous intérêts compris, en réparation de ses préjudices résultant de l’accident de service du 17 août 2015.

Sur les frais de l’instance :

18. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice font obstacle à ce qu’il soit mis à la charge de M. C…, qui n’est pas la partie perdante, la somme que la commune demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de faire droit aux conclusions de M. C… fondées sur ces mêmes dispositions en mettant à la charge de la commune une somme de 1 500 euros au titre des frais de l’instance.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1603228 du 26 novembre 2018 du tribunal administratif de Versailles est annulé en tant qu’il statue sur les conclusions indemnitaires de M. C….

Article 2 : La commune de Dampierre-en-Yvelines est condamnée à verser à M. C… une somme de 25 800 euros tous intérêts compris.

Article 3 : La commune de Dampierre-en-Yvelines versera à M. C… une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de M. C… est rejeté.

Article 6 : Les conclusions de la commune de Dampierre-en-Yvelines présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

N° 19VE00312 2

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