Cour de Cassation, Chambre civile 1, du 10 mars 1993, 91-15.774, Publié au bulletin

  • Personnes apportant leur concours à la création d'une œuvre·
  • Contribution à l'établissement des premières éditions·
  • Contribution à l'élaboration des premières éditions·
  • Propriété littéraire et artistique·
  • Constatations suffisantes·
  • Œuvre de collaboration·
  • Œuvre préexistante·
  • Œuvre composite·
  • Détermination·
  • Droit moral

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

°

Une cour d’appel qui a constaté l’existence d’une contribution d’un auteur à l’élaboration des premières éditions d’un guide, a pu estimer que ce concours permettait de lui attribuer un droit sur l’ensemble de l’oeuvre réalisée en commun par lui-même et les autres coauteurs, en la qualifiant d’oeuvre de collaboration.

L’incorporation d’une oeuvre de l’esprit dans une oeuvre composite ne prive pas l’auteur de l’oeuvre préexistante de son droit d’en poursuivre ou d’en reprendre librement l’exploitation.

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Sur la décision

Référence :
Cass. 1re civ., 10 mars 1993, n° 91-15.774, Bull. 1993 I N° 105 p. 70
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 91-15774
Importance : Publié au bulletin
Publication : Bulletin 1993 I N° 105 p. 70
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 19 mars 1991
Textes appliqués :
2° : 2° :

Code de la propriété intellectuelle L113-2 al. 2, L113-4

Loi 57-298 1957-03-11 art. 9, al. 2, art. 12

Dispositif : Cassation partielle.
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000007029739
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Sur les parties

Texte intégral

Attendu qu’en 1974 les époux Y… ont publié, sous le titre « Paris pas cher », un guide de la capitale, dont la page de garde portait la mention « avec la collaboration de Bernard X… », qui en avait rédigé plusieurs articles ; que cet ouvrage fit l’objet de deux rééditions en 1975 et 1977, la seconde ne comportant plus le nom de M. X… ; qu’à la suite du dépôt de bilan de leur éditeur les époux Y… ont, en juin 1980, autorisé les époux X… à poursuivre seuls la publication du guide par les soins de la société « M. A. Editions » et moyennant rétrocession d’une fraction des redevances d’auteur ; qu’en 1989 les époux X… ont conclu avec la société Flammarion un nouveau contrat d’édition, à l’exécution duquel les époux Y… se sont vainement opposés ; qu’à la suite de plusieurs instances l’arrêt attaqué (Paris, 20 mars 1991) a, pour débouter les époux Y…, énoncé un certain nombre de propositions ; 1°) que les époux Z… sont seuls propriétaires du titre « Paris pas cher » ; 2°) que dans ses éditions 1974, 1975 et 1977 le guide litigieux est une oeuvre de collaboration, dont les époux Y… et M. B. X… sont les coauteurs ; 3°) que l’édition 1990 est une oeuvre composite, propriété des époux X…, qui l’ont réalisée en y incorporant, avec l’accord des époux Y…, le guide originaire édité en 1974, 1975 et 1977, oeuvre préexistante ; que la cour d’appel a ajouté que les époux Y… ne pouvaient reprendre, comme ils prétendaient le faire, l’exploitation de cette oeuvre préexistante, dès lors qu’ils n’offraient pas d’indemniser préalablement les époux X… conformément à l’article 32 de la loi du 11 mars 1957, relatif au droit de repentir ou de retrait ; que les époux Y… se sont pourvus en cassation uniquement en ce que l’arrêt a qualifié l’oeuvre préexistante d’oeuvre de collaboration, puis a fait application de l’article 32 de la loi du 11 mars 1957 ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que pour reprocher à l’arrêt d’avoir déclaré M. X… coauteur des trois premières éditions du guide « Paris pas cher », les époux Y… soutiennent, en premier lieu, que la cour d’appel n’a pas répondu à leurs conclusions selon lesquelles la mention « avec la collaboration de » ne suffisait pas à caractériser la qualité de coauteur ; qu’ils ajoutent, en second lieu, que cette même indication ne constitue pas une divulgation de l’oeuvre sous le nom ainsi mentionné, de sorte que l’article 8 de la loi du 11 mars 1957 était sans application en l’espèce ; qu’enfin la disparition du nom de M. X… dans l’édition de 1977 démontrait qu’il n’avait jamais eu la qualité de coauteur ;

Mais attendu que, sans faire application de la présomption posée par l’article L. 113-1 du Code de la propriété intellectuelle (article 8 de la loi du 11 mars 1957), la cour d’appel, qui n’était pas tenue de répondre aux arguments rappelés par le moyen, a constaté l’existence d’une contribution de M. X… à l’élaboration des premières éditions du guide et a pu estimer que ce concours permettait de lui attribuer un droit sur l’ensemble de l’oeuvre réalisée en commun par lui-même et les époux Y… ;

D’où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen, pris en ses deux premières branches :

Vu les articles L. 113-2, alinéa 2, et L. 113-4 du Code de la propriété intellectuelle (article 9, alinéa 2, et 12 de la loi du 11 mars 1957) ;

Attendu que l’incorporation d’une oeuvre de l’esprit dans une oeuvre composite ne prive pas l’auteur de l’oeuvre préexistante de son droit d’en poursuivre ou d’en reprendre librement l’exploitation ;

Attendu que la cour d’appel, qui a souverainement relevé que, dès 1980, les époux Y… avaient donné leur consentement à la réalisation d’une oeuvre nouvelle incorporant le guide dont ils sont coauteurs, en a déduit à tort qu’ils n’étaient plus autorisés à poursuivre ou à reprendre l’exploitation de cette oeuvre préexistante sans respecter les conditions du droit de retrait institué par l’article 32 de la loi du 11 mars 1957 (L. 121-4 du Code de la propriété intellectuelle), texte qui n’aurait pu trouver application que dans l’hypothèse où, révoquant leur autorisation, ils auraient interdit aux époux X… de poursuivre l’exploitation de leur oeuvre composite ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du second moyen ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a dit que les époux Y… ne pouvaient, sans indemniser préalablement les époux X…, reprendre l’exploitation de l’oeuvre préexistante dont ils sont coauteurs, l’arrêt rendu le 20 mars 1991, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée.

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