Cour de cassation, Chambre criminelle, 5 juin 2019, 18-84.350, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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www.cabinetaci.com · 20 juin 2021

Complicité d'infraction : conditions et répression COMPLICITÉ D'INFRACTION : CONDITIONS ET RÉPRESSION L'article 121-7 du Code pénal prévoit que le complice d'un crime ou d'un délit est : « la personne qui sciemment, par aide ou assistance, en a facilité la préparation ou la consommation » ou « qui par don, promesse, menace, ordre, abus d'autorité ou de pouvoir aura provoqué à une infraction ou donné des instructions pour la commettre. » Il s'agit donc d'une aide à la commission de l'infraction apportée par une tierce personne : le complice apparaît comme un coopérant qui, sans …

 
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Sur la décision

Référence :
Cass. crim., 5 juin 2019, n° 18-84.350
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 18-84.350
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Douai, 5 juin 2018
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000038629806
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2019:CR00952
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Sur les parties

Texte intégral

N° H 18-84.350 F-D

N° 952

SM12

5 JUIN 2019

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

— M. F… L…,

contre l’arrêt de la cour d’appel de DOUAI, 9e chambre, en date du 6 juin 2018, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 11 janvier 2017, n°16-80.557), pour diffusion de messages violents, pornographiques ou contraires à la dignité, perceptibles par un mineur et appels téléphoniques malveillants, l’a condamné à huit mois d’emprisonnement avec sursis, cinq ans d’interdiction professionnelle, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 10 avril 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. de Larosière de Champfeu, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lavaud ;

Sur le rapport de M. le conseiller DE LAROSIÈRE DE CHAMPFEU, les observations de SARL CABINET BRIARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général SALOMON ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, du protocole n° 7 annexé à cette convention, des articles 111-4, 121-3, 222-16, 227-24 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ainsi que du principe ne bis in idem ;

« en ce que l’arrêt attaqué, d’une part, a déclaré M. L… coupable de diffusion de messages violents, pornographiques ou contraires à la dignité, accessibles à un mineur ainsi que d’appels téléphoniques malveillants réitérés et, d’autre part, a prononcé sur les intérêts civils ;

« aux motifs propres qu’en ce qui concerne l’infraction prévue par l’article 227-24 du code pénal, il résulte de l’article 227-24 du code pénal, en vigueur au moment des faits, que constitue une infraction délictuelle le fait de diffuser un message violent, pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine, lorsque ce message est susceptible d’être vu ou perçu par un mineur ; que le caractère pornographique d’un message écrit doit être apprécié en fonction de l’état d’évolution des moeurs à une époque définie et dans un lieu déterminé, de l’évolution du langage mais également en fonction du public auquel il s’adresse ; qu’en l’espèce, il est constant que, le 10 janvier 2014, M. L…, qui était en présence de I… Y…, E… D… et X… K… dans un véhicule poids-lourd, a, au cours d’un cours de conduite, adressé, depuis la ligne de son téléphone mobile, entre 15 heures 02 et 16 heures 01, seize (16) messages de type SMS à destination de la ligne de téléphone mobile d’B… S… ; qu’il est également constant que M. L…, d’une part, a intentionnellement adressé ces messages à l’attention d’B… S…, qui n’avait pas connaissance du numéro de la ligne téléphonique de celui-ci, dans le but de tester sa fidélité à I… Y…, d’autre part, savait qu’B… S… était une mineure âgée de quinze ans révolus ; qu’enfin, il est constant qu’B… S… a vu les messages qui lui avaient été adressés depuis la ligne de téléphone mobile de M. L…, nonobstant la circonstance que les premières réponses à ces messages avaient été rédigées par un tiers, M. T… O… ; que le premier message adressé par M. L… à B… S…, à savoir « (…) Kan on se voi pr senvoyer en fair ? », constitue une invitation à avoir des rapports sexuels ; que les messages suivants, à savoir « Non je ne me branle pas (…) », « tu as une bouche à pipe »," « Domage!!! avec ton petit cul tu aurais eu du plaisir », et « tps pis/je baiserai ton mec », décrivent, eu égard aux termes employés, des comportements de nature lubrique ; que ces messages font ainsi référence à la représentation précise et gratuite d’actes sexuels qui, dès lors qu’ils sont, comme en l’espèce, exprimés en termes obscènes et adressés à l’attention d’une mineure, constituent des messages à caractère pornographique, au sens de l’article 227-24 du code pénal ; que la circonstance que M. L… aurait rédigé certains de ces messages sous la dictée de I… Y… est sans incidence sur l’élément intentionnel de l’infraction ; que de même, la circonstance que M. L… aurait, selon ses déclarations, compris que les réponses à ses messages n’étaient pas de la main d’B… S…, est sans incidence sur l’élément matériel de l’infraction, dès lors qu’en envoyant ces messages sur la ligne de téléphone mobile d’une mineure, ceux-ci étaient nécessairement « susceptibles » d’être vus par ladite mineure, au sens de l’article 227-24 du code pénal ; que dans ces conditions, compte-tenu de la circonstance que les messages litigieux ont un caractère pornographique et dès lors que ceux-ci ont été vus par une mineure, l’infraction prévue par les dispositions de l’article 227-24 du code pénal est constituée ; que la culpabilité de M. L… sera donc confirmée ; qu’en ce qui concerne l’infraction prévue par l’article 222-16 du code pénal, il résulte de l’article 222-16 du code pénal, en vigueur au moment des faits, que constitue une infraction délictuelle le fait de procéder à des appels téléphoniques malveillants réitérés en vue de troubler la tranquillité d’autrui ; que le caractère malveillant et réitéré des appels téléphoniques, qui incluent les messages de type SMS, se déduit de leur répétition, du contexte dans lesquels ils ont été reçus par le destinataire et de leur contenu qui vise à troubler la tranquillité de celui-ci ; qu’il est constant que, le 10 janvier 2014, entre 15 heures 02 et 16 heures 01, M. L… a adressé à B… S… seize (16) messages de type SMS, dont le contenu de certains présentait un caractère pornographique, dans le seul but de tester sa fidélité à I… Y… ; qu’il est également constant que la réception de ces messages a provoqué chez B… S… un malaise au point de dénoncer les faits à la direction de l’établissement scolaire ; qu’ainsi, en transmettant et en persistant à transmettre ces messages à B… S…, qui était alors en salle de permanence au lycée professionnel de Bapaume, alors même que les réponses qui lui étaient adressées, en termes vulgaires ou insultants, l’invitaient à cesser l’envoi de ceux-ci, M. L… a, compte-tenu du but avoué desdits messages, intentionnellement chercher à nuire à l’intéressée ; que dès lors, les messages adressés par M. L… présentaient un caractère malveillant et réitéré en vue de troubler la tranquillité d’B… S…, au sens de l’article 227-16 du code pénal ; que les faits qui procèdent de manière indissociable d’une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu à deux déclarations de culpabilité de nature pénale, fussent-elles concomitantes ; que toutefois, un fait unique peut constituer un concours idéal d’infractions et ainsi recevoir plusieurs qualification spéciales différentes, dès lors que celles-ci ne présentent pas entre elles une incompatibilité et sont susceptibles d’être appliquées concurremment en cas d’atteintes à des valeurs sociales distinctes ; que l’infraction prévue par l’article 222-16 du code pénal réprime une atteinte aux personnes dont la seule victime est, en l’espèce, B… S…, l’intérêt protégé étant celui de l’intégrité physique et mentale de la victime ; qu’en revanche, l’infraction prévue par l’article 227-24 du même code réprime un comportement de nature à troubler l’ordre public, en portant atteinte à la moralité de personnes mineures et/ou en étant susceptible de les mettre en péril ; que les valeurs sociales protégées par les articles 222-16 et 227-24 du code pénal étant distinctes, le comportement de M. L… constitue, dès lors, un concours idéal d’infractions ; que dans ces conditions, M. L… sera déclaré coupable des deux infractions mentionnées dans la prévention ; que la relaxe de M. L… de toute poursuite pour la commission de l’infraction prévue par l’article 222-16 du code pénal sera donc infirmée » ;

« et aux motifs adoptés qu’ il résulte des débats et du dossier que M. L… était, au moment des faits, professeur dans l’établissement fréquenté par B… S… ; qu’à l’occasion d’un cours avec trois de ses élèves, M. L… se prêtait au « jeu » proposé par le petit ami de la victime, lequel consistait à lui envoyer des messages à caractère sexuel pour tester sa fidélité ; que l’ensemble des messages a été produit en procédure par la victime, son contenu n’étant pas contesté par le prévenu ; qu’il résulte de l’audition de l’ensemble des protagonistes qu’B… S… était choquée dès le premier message reçu, qu’elle transmettait son téléphone à un de ses amis qui poursuivait la conversation via SMS avec cet interlocuteur inconnu sans se dévoiler ; qu’à l’audience, après avoir été muté par décision administrative du 3 juin 2014 dans un établissement du Nord, M. L… continuait à reconnaître les faits tout en prétendant ne s’agir que d’un jeu et réfuter qu’B… S…, âgée d’alors 16 ans, ai pu être choqué par ses propos « puisque les jeunes disent bien pire » ; que ses déclarations à l’audience démontrent que le prévenu n’a toujours pas perçu le caractère déplacé de son comportement vis à vis d’une de ses élèves et ce alors qu’il est en position de donner un cours à d’autres élèves (

) ; qu’il résulte des éléments du dossier que les faits reprochés à M. L… sous la prévention de diffusion de message violent, pornographique ou contraire à la dignité accessible à un mineur, faits commis le 10 janvier 2014 à Bapaume sont établis ; qu’il convient de l’en déclarer coupable et de le condamner, compte tenu de son absence d’antécédents mais de son positionnement problématique à l’audience, à une peine de huit mois d’emprisonnement entièrement assorti du sursis et à une amende délictuelle de 500 euros » ;

« 1°) alors que des faits qui procèdent de manière indissociable d’une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le même prévenu, à deux déclarations de culpabilité ; que la cour d’appel a jugé que les faits poursuivis sous la qualification d’appels téléphoniques malveillants réitérés n’avaient causé préjudice qu’à leur destinataire, B… S…, tandis que les mêmes faits, poursuivis sous la qualification de diffusion de messages violents, pornographiques ou contraires à la dignité accessibles à un mineur, troublaient plus généralement l’ordre public ; qu’un tel motif étant cependant impropre à justifier une double déclaration de culpabilité, toute infraction créant nécessairement un tel trouble, et après avoir pourtant constaté que les faits poursuivis étaient les mêmes, à savoir l’envoi de seize SMS à B… S…, la cour d’appel ne pouvait se prononcer comme elle l’a fait sans violer le principe ne bis in idem ;

« 2°) alors, en tout état de cause, que la loi pénale est d’interprétation stricte ; que la pornographie consiste en la représentation minutieuse de choses obscènes, dans la seule intention de provoquer l’excitation sexuelle ; qu’elle se distingue de la simple formulation de propos à connotation ou à signification sexuelle, fût-ce en des termes propres à heurter la sensibilité ; que les messages cités par l’arrêt attaqué, s’ils revêtaient une signification sexuelle et pouvaient apparaître crus ou vulgaires, ne comportaient, pour autant, aucune représentation minutieuse d’actes sexuels ; qu’en les identifiant à des messages à caractère pornographique, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

« 3°) alors, par ailleurs, que le délit d’appels téléphoniques malveillants réitérés n’est caractérisé que si les appels téléphoniques en cause ont présenté un caractère malveillant ; que pour déclarer le prévenu coupable du délit d’appels téléphoniques malveillants et réitérés, l’arrêt attaqué retient que le caractère malveillant des messages SMS se déduit de leur répétition, du contexte dans lequel ils ont été reçus par la destinataire et de leur contenu visant à troubler la tranquillité de la mineure ; qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher en quoi les messages émis caractérisaient la volonté du prévenu de nuire à la jeune fille, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision ;

« 4°) alors, enfin, que ne constituent pas des appels réitérés, au sens de l’article 222-16 du code pénal, les SMS échangés dans le cadre d’un dialogue ; qu’il ressort des commémoratifs de l’arrêt attaqué (pages 5 et 6) qu’à la suite du premier message de M. L…, B… S… a poursuivi la conversation par SMS avec l’expéditeur, et que c’était dans le cadre de cette conversation que M. L… avait envoyé d’autres messages ; qu’une telle situation n’était pas constitutive d’appels réitérés ; qu’en jugeant le contraire, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

Sur le moyen, pris en sa première branche :

Vu le principe ne bis in idem ;

Attendu que les faits qui procèdent de manière indissociable d’une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le même prévenu, à deux déclarations de culpabilité de nature pénale, fussent-elles concomitantes ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué que, le 10 janvier 2014, M. L…, professeur dans un lycée professionnel, a envoyé des messages SMS à caractère sexuel à une élève de son établissement, âgée de quinze ans ; qu’il a été poursuivi, devant le tribunal correctionnel, d’une part, pour diffusion de messages violents, pornographiques ou contraires à la dignité accessible à un mineur, délit prévu et puni par l’article 227-24 du code pénal, et, d’autre part, pour appels téléphoniques malveillants et réitérés, entrant dans les prévisions de l’article 222-16 du même code ; que, pour le déclarer coupable de ces deux infractions, en raison de l’envoi des mêmes messages, la cour d’appel expose qu’un fait unique peut recevoir plusieurs qualifications pénales différentes, si elles ne présentent pas d’incompatibilité entre elles et qu’il est porté atteinte à des valeurs sociales distinctes ; qu’elle ajoute que l’article 222-16 précité protège la seule atteinte à l’intégrité physique et mentale de la victime, alors que l’article 227-4 réprime un comportement de nature à troubler l’ordre public en portant atteinte à la moralité de personnes mineures ;

Mais attendu qu’en prononçant ainsi, alors qu’il résultait de ces propres constatations que les deux infractions précitées dont le prévenu a été reconnu coupable procédaient, de manière indissociable, d’une action unique caractérisée par une même intention coupable, la cour d’appel a méconnu le principe susvisé ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs, et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres griefs du premier moyen, ni sur le second moyen de cassation proposé :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Douai, en date du 6 juin 2018, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Douai et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq juin deux mille dix-neuf ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

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