Chambre disciplinaire de première instance de l'Ordre des médecins de Lyon, 20 octobre 2020, n° 2019.28

  • Ordre des médecins·
  • Médecine·
  • Plainte·
  • Instance·
  • Santé publique·
  • Acte·
  • Formation restreinte·
  • Témoignage·
  • Conseil régional·
  • Rhône-alpes

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CDPI_OM Lyon, 20 oct. 2020, n° 2019.28
Numéro(s) : 2019.28

Sur les parties

Texte intégral

CHAMBRE DISCIPLINAIRE DE PREMIERE INSTANCE

DE L’ORDRE DES MEDECINS

AUVERGNE-RHÔNE-ALPES

N° 2019.28

Conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins

c/ Dr Z X

Audience du 3 octobre 2020

Décision rendue publique par affichage le 20 octobre 2020

LA PLAINTE ET SON INSTRUCTION PAR LA CHAMBRE DISCIPLINAIRE

I. Le conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins, dont le siège est […]

l’Artisanat à Saint Priest en Jarez (42270), a, par délibération en date du 5 février 2019, décidé de saisir la chambre disciplinaire de première instance d’une plainte, qui a été enregistrée au greffe le

28 février 2019 sous le n° 2019.28, contre le Dr Z X, médecin spécialiste en médecine générale, inscrit au tableau de l’ordre des médecins, sous le n° RPPS 10003009551, et exerçant […]

[…].

II. Dans sa plainte, ainsi que dans les mémoires qu’il a présentés devant la chambre disciplinaire et qui ont été enregistrés au greffe les 28 février 2019 et 9 juillet 2020, le conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins demande qu’une sanction soit prononcée à

l’encontre du Dr X.

Le conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins expose que, par décision du

29 mars 2018, la Formation Restreinte du conseil régional Auvergne-Rhône-Alpes de l’ordre des médecins a suspendu le Dr Z X du droit d’exercer la médecine pour une durée de

6 mois, en raison de son inaptitude liée à un état de santé incompatible avec des actes de diagnostic et de soin. Cette décision était exécutoire et, comme il en avait le droit, ce médecin s’est fait, les 25 et

26 juillet 2018 et pour la période allant du 5 novembre au 12 décembre 2018, remplacer par sa fille,
Mme Y X, étudiante en médecine, titulaire d’une licence de remplacement. Cependant la caisse primaire d’assurance maladie (C.P.A.M.) a relevé différentes anomalies qui mettent en évidence un exercice irrégulier de la médecine par le Dr X à l’occasion de ces remplacements: ainsi Mme Y X a certifié par son nom et ses qualités des ordonnances dont elle n’est pas

l’auteur puisqu’elles comportent l’écriture de son père, elle a établi le même jour deux ordonnances pour un même patient avec des écritures différentes (la sienne et celle de son père), elle a établi un certificat médical d’accident du travail conjointement avec une autre personne, n’ayant pas rempli



CHAMBRE DISCIPLINAIRE DE PREMIERE INSTANCE

DE L’ORDRE DES MEDECINS

AUVERGNE-RHÔNE-ALPES

elle-même la première partie du formulaire, si bien que l''identité de la personne ayant effectué

l’examen clinique soulève un doute. Par ailleurs, la C.P.A.M. déclare avoir recueilli des témoignages de patients qui indiquent clairement que Mme Y X est systématiquement accompagnée de son père pour les consultations et les visites ; elle ajoute que les actes de mésothérapie ont tous été réalisés par le Dr X ; elle a dû lui réclamer une somme de 42 666,13 € pour la période allant du

12 avril au 12 novembre 2018.

Le conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins fait grief au Dr X d’avoir exercé irrégulièrement la médecine, manquant ainsi au principe de moralité, tel qu’énoncé à l’article

R. 4127-3 du code de la santé publique, et déconsidérant la profession de médecin au sens de l’article

R. 4127-31 du même code.

III. Le Dr X, auquel la plainte du conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins a été communiquée, a présenté devant la chambre disciplinaire des mémoires en défense, par l’intermédiaire de Me Matthieu Seingier, enregistrés au greffe les 3 avril et 2 septembre 2020 et il a été entendu le 23 septembre 2020 par le Dr K-L M, désigné comme rapporteur par décision du président de la chambre disciplinaire en date du 2 juillet 2020.

Il demande à la chambre disciplinaire de rejeter la plainte et de condamner le conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins à lui verser une somme de 4 000 € au titre de ses frais d’instance.

Il soutient que :

:A) la plainte est irrecevable à un double titre d’une part, selon l’article L. 4124-1 du code de la santé publique, la chambre disciplinaire s’est trouvée dessaisie après 6 mois, elle est donc incompétente, d’autre part, le procès-verbal de la réunion du conseil départemental de la Loire de

l’ordre des médecins ne permet pas de savoir si la séance s’est déroulée de manière régulière et les mémoires présentés comportent plus de reproches déontologiques que ceux qui ont fait l’objet d’un vote.

B) les griefs ne sont pas fondés pour les raisons suivantes : le conseil départemental n’explique pas en quoi il aurait manqué au principe de moralité ; il s’est borné à présenter sa fille à ses anciens patients et à assurer l’organisation et

l’administration du cabinet pour que sa fille puisse mieux se consacrer à l’exercice de la médecine;

sa présence ne peut être considérée comme « exercice » de la médecine; il n’a jamais effectué un acte de médecine; il a seulement conseillé sa fille pour un acte de mésothérapie;

2



CHAMBRE DISCIPLINAIRE DE PREMIERE INSTANCE

DE L’ORDRE DES MEDECINS

AUVERGNE-RHÔNE-ALPES

la répétition de l’indu par la C.P.A.M. ne prouve rien, les témoignages, qui n’ont pas été produits et sont indirects, non plus.

L’AUDIENCE:

eu lieu le Les parties ont été régulièrement averties de l’audience publique qui a

3 octobre 2020.

A cette audience, la chambre disciplinaire de première instance, assistée de Mme D, greffière en chef, a entendu : le rapport du Dr M ; les observations du conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins, représenté par le Dr Jean I Janowiak, président; les observations du Dr X, assisté par Me Seingier.

La défense a été invitée à prendre la parole en dernier.

LA DÉCISION :

Après avoir examiné la plainte du conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins, ainsi que les mémoires et pièces produits par les parties devant la chambre disciplinaire, et au vu du code de la santé publique, de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et du code de justice administrative :

CONSIDÉRANT CE QUI SUIT :

Sur la plainte du conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins :

1. Le conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins soutient qu’alors qu’il était interdit d’exercer pour raison de santé par décision du 29 mars 2018 de la formation restreinte du conseil régional de la région Rhône-Alpes de l’ordre des médecins, le Dr X, qui s’était fait remplacer à son cabinet, comme il en avait le droit, par sa fille, Mme Y X, étudiante en médecine, titulaire d’une licence de remplacement, s’est livré, sous couvert de ce remplacement, à un exercice irrégulier de la profession de médecin. Il estime que ce médecin a ainsi méconnu les articles

R. 4127-3 et R. 4127-31 du code de la santé publique.

2. Le Dr X soutient au contraire qu’il n’a jamais effectué un acte de médecine pendant la période en cause mais s’est borné à présenter sa fille à ses anciens patients et à assurer

3



CHAMBRE DISCIPLINAIRE DE PREMIERE INSTANCE

DE L’ORDRE DES MEDECINS

AUVERGNE-RHÔNE-ALPES

l’organisation et l’administration du cabinet ; il admet cependant avoir conseillé sa fille pour un acte de mésothérapie.

3. Lorsque, comme c’est le cas, les parties sont contraires en fait, il appartient au juge de rechercher dans le dossier les éléments susceptibles d’emporter sa conviction sur la matérialité des faits allégués.

4. Il résulte de l’instruction que la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire (ci-après « la

C.P.A.M. »), 1° a constaté, sur des ordonnances et certificats établis sous la signature de Mme Y

X, la présence de l’écriture du Dr X, 2°/ déclare avoir recueilli des témoignages de patients qui indiquent clairement que Mme Y X a été systématiquement accompagnée par son père pour les consultations et les visites, 3°/ affirme que les actes de mésothérapie ont tous été réalisés par le Dr Z X, 4°/ indique qu’elle a dû réclamer à ce médecin une somme indue de 42 666,13 € pour la période allant du 12 avril au 12 novembre 2018.

5. En premier lieu, la seule présence de l’écriture du Dr X sur des ordonnances ou certificats signés par sa fille ne suffit pas à prouver que celui-ci a décidé du contenu de ces documents, alors qu’il indique avoir, à ces occasions, assuré une simple activité de secrétariat.

6. En deuxième lieu, s’agissant de la présence du Dr X à des consultations et visites, alors que les témoignages allégués n’ont pas été produits, rien ne permet de mettre en doute que, comme l’affirme le Dr X, il s’est borné à présenter sa fille à ses anciens patients et à assurer le secrétariat.

7. En troisième lieu, alors qu’aucune des pièces du dossier n’est de nature à établir que des actes de mésothérapie auraient été réalisés par le Dr X, le fait que, comme il le reconnaît, il a conseillé sa fille à l’occasion d’un tel acte ne peut être regardé comme constituant par lui-même un acte médical.

8. En quatrième lieu, la seule circonstance que la C.P.A.M. a réclamé au Dr X une somme indue de 42 666,13 € pour la période allant du 12 avril au 12 novembre 2018 ne suffit pas à établir que celui-ci ait irrégulièrement exercé la médecine les 25 et 26 juillet 2018 et du 5 novembre au

12 décembre 2018, alors en outre qu’elle avait estimé à tort dans un premier temps qu’il n’avait pas le droit de se faire remplacer.

9. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus, aux points 5 à 8, qu’en l’espèce aucun élément ne permet d’établir le bien-fondé des allégations du conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins. Dans ces conditions, le doute devant bénéficier au médecin poursuivi, les griefs qu’il

4



CHAMBRE DISCIPLINAIRE DE PREMIERE INSTANCE

DE L’ORDRE DES MEDECINS

AUVERGNE-RHÔNE-ALPES

formule ne peuvent être retenus. Sa plainte doit, dès lors, être rejetée, sans qu’il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par le Dr X.

Sur les autres conclusions des parties :

10. Le Dr X demande qu’une somme de 4 000 € soit mise à la charge du conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins au titre des frais et honoraires qu’il a exposés au cours de l’instance engagée devant la chambre disciplinaire. Aux termes de l’article 75-1 de la loi du

10 juillet 1991: < Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même

d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. ». Il y

a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre, sur le fondement de ces dispositions, une somme de 1 500 € à la charge du conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins au titre des frais exposés par le Dr X dans la présente instance.

La chambre disciplinaire de première instance prend, en conséquence de ce qui précède, la décision suivante :

Article 1: La plainte du conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins est rejetée.

Article 2 : Le conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins versera au Dr X une somme de 1 500 € au titre des frais exposés et non compris dans les dépens

Article 3: La présente décision sera notifiée au conseil départemental de la Loire de l’ordre des médecins, au Dr Z X, au directeur général de l’agence régionale de santé Auvergne

Rhône-Alpes, au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Saint Etienne, au conseil national de l’ordre des médecins et au ministre chargé de la santé. Une copie en sera adressée à

Me Matthieu Seingier.

Délibéré, dans la même composition, à l’issue de l’audience où siégeaient :

M. Emmanuel du Besset, président de la chambre disciplinaire ;

Les E F G, H I J, A B et K-L

M, membres de la chambre disciplinaire.

5



CHAMBRE DISCIPLINAIRE DE PREMIERE INSTANCE

DE L’ORDRE DES MEDECINS

AUVERGNE-RHÔNE-ALPES

Le président de la chambre disciplinaire de première instance Auvergne-Rhône-Alpes de l’ordre des médecins, magistrat honoraire du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives

d’appel

Emmanuel du Besset

La greffière en chef

C D

La République mande et ordonne au ministre chargé de la santé en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

[…]

6

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Chambre disciplinaire de première instance de l'Ordre des médecins de Lyon, 20 octobre 2020, n° 2019.28