Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 27 octobre 2010, 318709

  • Indemnisation de la perte de la valeur vénale de l'animal·
  • Responsabilité de la puissance publique·
  • Évaluation du préjudice·
  • Décès d'une jument·
  • Réparation·
  • Jument·
  • Valeur vénale·
  • Animaux·
  • Justice administrative·
  • Éleveur

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Réparation du préjudice résultant du décès d’une jument à la suite d’un accident dans un haras. L’indemnisation de la perte de valeur vénale de l’animal inclut l’intégralité des bénéfices de toute nature que l’animal était susceptible d’apporter à son propriétaire – dont les possibilités de naissances de poulains et de gains aux courses. Par suite, il ne peut y avoir d’indemnisation spécifique de la perte de chance de réaliser un gain en procédant à la vente d’un poulain dont le propriétaire de la jument escomptait la naissance.

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Sur la décision

Référence :
CE, 7e et 2e ss-sect. réunies, 27 oct. 2010, n° 318709, Lebon T.
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 318709
Importance : Mentionné aux tables du recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Cour administrative d'appel de Nantes, 9 avril 2008
Identifiant Légifrance : CETATEXT000022973497
Identifiant européen : ECLI:FR:CESSR:2010:318709.20101027

Sur les parties

Texte intégral

Vu le pourvoi, enregistré le 22 juillet 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M. Jean-François A, demeurant … ; M. A demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêt du 10 avril 2008 par lequel la cour administrative d’appel de Nantes a, à la demande du ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt, réformé le jugement du tribunal administratif de Caen en date du 25 janvier 2007 et ramené à 31 000 euros la somme due par l’Etat en réparation du préjudice subi par M. A suite à la chute et au décès de sa jument Lafayette au haras de Saint Lô ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit aux demandes d’indemnisation présentées en première instance et en appel ;

3°) de mettre la somme de 4 000 euros à la charge de l’Etat au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de Mme Agnès Fontana, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

— les observations de Me Foussard, avocat de M. Jean-François A,

— les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Foussard, avocat de M. Jean-François A ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A, qui exerce la profession d’éleveur de chevaux, a conduit sa jument Lafayette au haras de Saint-Lô en vue de la faire saillir ; que lors de son séjour au haras, le 14 juin 1999, la jument a été victime de plusieurs chutes entraînant de graves lésions ne laissant d’autre issue que l’euthanasie de l’animal ; qu’en l’absence de réponse à sa demande d’indemnisation du préjudice subi, M. A a présenté au tribunal administratif de Caen des conclusions aux fins d’indemnisation sur le fondement de la faute commise par le service public des haras ; que par un jugement du 25 janvier 2007, le tribunal administratif a accordé à l’éleveur une indemnisation de 51 000 euros au titre du préjudice subi par l’éleveur en raison de la faute commise par le haras de Saint-Lô qui avait fait évoluer l’animal sur un sol anormalement glissant ; que sur appel du ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche et appel incident de M. A, la cour administrative d’appel de Nantes, tout en confirmant l’existence d’une faute commise par les haras et le lien de causalité entre ladite faute et le préjudice subi par M. A, a, par l’arrêt attaqué du 10 avril 2008, ramené l’indemnisation à 31 000 euros en retranchant de la valeur vénale de l’animal, la somme à laquelle le tribunal avait évalué le préjudice né de la privation, pour le propriétaire, de la possibilité d’obtenir et de vendre un troisième poulain de sa jument ;

Considérant qu’en cas de décès accidentel d’une jument imputable à une faute du service du haras auquel son propriétaire l’avait confiée en vue de la faire saillir, la valeur vénale de l’animal après saillie, qui sert de base à l’indemnisation, doit être regardée comme déterminée de manière à inclure l’intégralité des bénéfices de toute nature que ladite jument était susceptible d’apporter à son propriétaire au cours de son existence ;

Sur la régularité de l’arrêt :

Considérant, en premier lieu, que la cour administrative d’appel s’est suffisamment expliquée sur les raisons pour lesquelles elle n’entendait pas porter, sur la valeur vénale de l’animal et sur le préjudice moral subi par l’éleveur, une appréciation différente de celle du tribunal administratif ; qu’ainsi M. A n’est pas fondé à se plaindre que l’arrêt serait insuffisamment motivé sur ces points ;

Considérant, en second lieu, qu’ainsi qu’il a été dit, la valeur vénale de la jument inclut l’ensemble des bénéfices que son propriétaire était en droit d’en attendre, y compris les gains issus de ses possibles succès futurs à la course d’obstacles ; qu’il en résulte que la cour n’était pas tenue de statuer explicitement sur les conclusions d’appel par lesquelles M. A demandait l’indemnisation de ce chef de préjudice, dès lors que l’aptitude de la jument à entreprendre une carrière sportive avait déjà été prise en compte dans l’établissement de sa valeur vénale ; que M. A n’est ainsi pas fondé à soutenir que la cour aurait, en omettant de statuer sur ces conclusions, insuffisamment motivé son arrêt ;

Sur le bien-fondé de l’arrêt :

Considérant, en premier lieu, qu’ainsi qu’il a été dit, la valeur vénale de la jument décédée a été déterminée en sorte d’inclure l’ensemble des bénéfices de toutes sortes que son propriétaire pouvait en attendre ; que M. A n’est ainsi pas fondé à soutenir qu’en rejetant ses conclusions tendant à l’indemnisation spécifique de la perte de chance de réaliser un gain en procédant à la vente d’un troisième poulain dont il escomptait la naissance, élément qui doit être regardé comme inclus dans la valeur vénale de l’animal, la cour aurait commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier ;

Considérant, en second lieu, que M. A n’a pas versé au dossier de pièces attestant l’exposition effective de dépenses résultant tant des conséquences du sevrage anticipé du poulain que des contraintes qui en ont découlé pour lui ; que dans ces circonstances, la cour a pu, sans dénaturer les pièces du dossier, juger que les conclusions susmentionnées n’étaient accompagnées d’aucun justificatif probant ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter le pourvoi ;

Sur les conclusions aux fins d’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme demandée par M. A à ce titre soit mise à la charge du ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. A et ses conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.


Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-François A et au ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche.

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Textes cités dans la décision

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