Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 27 avril 2011, 327764

  • Bénéfices industriels et commerciaux·
  • Impôts sur les revenus et bénéfices·
  • Revenus et bénéfices imposables·
  • Détermination du bénéfice net·
  • Théorie du risque excessif·
  • Acte anormal de gestion·
  • Contributions et taxes·
  • Règles particulières·
  • Placement financier·
  • Principe

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

C’est au regard du seul intérêt propre de l’entreprise que l’administration, à qui il n’appartient toutefois pas de se prononcer sur l’opportunité du choix arrêté par une entreprise pour la gestion de sa trésorerie, doit apprécier si les placements auxquels celle-ci a procédé correspondent à des actes de gestion commerciale normale. Cet intérêt n’est pas méconnu lorsqu’une entreprise se livre à des opérations financières dans des conditions présentant pour elle un caractère avantageux. Il en va autrement si, compte tenu des circonstances dans lesquelles il intervient et de l’objet qu’il poursuit, un placement financier excède manifestement les risques qu’un chef d’entreprise peut, eu égard aux informations dont il dispose, être conduit à prendre, dans une situation normale, pour améliorer les résultats de son entreprise.

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Commentaires12

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Deloitte Société d'Avocats · 28 mars 2019

La théorie de l'acte anormal de gestion n'avait jusqu'alors jamais fait l'objet d'une définition au sein même d'un arrêt du Conseil d'Etat. Depuis son irruption dans les cours administratives françaises au milieu du 20e siècle, ce concept n'a cessé d'être redéfini dans les conclusions de plusieurs éminents rapporteurs publics (anciennement dénommés commissaires du gouvernement). Le commissaire du gouvernement Poussière proposait dès 1965 une des premières définitions de la notion : « vous réputez acte de gestion anormal celui qui met une dépense ou une perte à la charge de l'entreprise, ou …

 

Deloitte Société d'Avocats · 17 octobre 2016

Dans une décision de principe, le juge l'abandonne dans une très large mesure en précisant que c'est au regard du seul intérêt propre de l'entreprise que l'Administration doit apprécier si des opérations correspondent à des actes relevant d'une gestion commerciale normale. La théorie du risque excessif est une construction prétorienne du juge qui tendait à permettre à l'Administration de remettre en cause, sur le terrain de l'acte anormal de gestion, une opération qui, bien que de prime abord conforme à l'intérêt de l'entreprise, était susceptible d'entrainer des conséquences négatives …

 

Taj Société d'Avocats · 17 octobre 2016

Dans une décision de principe, le juge l'abandonne dans une très large mesure en précisant que c'est au regard du seul intérêt propre de l'entreprise que l'Administration doit apprécier si des opérations correspondent à des actes relevant d'une gestion commerciale normale. La théorie du risque excessif est une construction prétorienne du juge qui tendait à permettre à l'Administration de remettre en cause, sur le terrain de l'acte anormal de gestion, une opération qui, bien que de prime abord conforme à l'intérêt de l'entreprise, était susceptible d'entrainer des conséquences négatives …

 
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Sur la décision

Référence :
CE, 8e et 3e ss-sect. réunies, 27 avr. 2011, n° 327764, Lebon T.
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 327764
Importance : Mentionné aux tables du recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Cour administrative d'appel de Paris, 11 mars 2009, N° 07PA00587
Précédents jurisprudentiels : [RJ1] Rappr. à propos d'une garantie de bonne fin, CE, 17 octobre 1990, Loiseau, n° 83310, p. 282.
Identifiant Légifrance : CETATEXT000023946437
Identifiant européen : ECLI:FR:CESSR:2011:327764.20110427

Sur les parties

Texte intégral

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 mai et 29 juillet 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la SOCIETE LEGEPS, dont le siège est 50 rue de Leibnitz à Paris (75018), représentée par son gérant en exercice ; la SOCIETE LEGEPS demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’article 1er de l’arrêt n° 07PA00587 du 12 mars 2009 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l’annulation de l’article 2 du jugement n° 0001398 du 11 décembre 2006 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés et de contribution à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l’année 1995 et des intérêts de retard correspondants ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit dans cette mesure à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, Auditeur,

— les observations de Me Le Prado, avocat de la SOCIETE LEGEPS,

— les conclusions de M. Laurent Olléon, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Le Prado, avocat de la SOCIETE LEGEPS ;

Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SOCIETE LEGEPS, qui exerce une activité dans le domaine de la sécurité et du gardiennage, a déposé le 31 mars 1994 une somme de 2 000 0000 F sur un compte ouvert dans un établissement bancaire au Vanuatu ; que cet établissement ayant été mis en liquidation judiciaire le 7 décembre 1995, la SOCIETE LEGEPS a constitué le 31 décembre 1995 une provision de 2 000 000 F visant à couvrir le risque de perte de la somme du même montant déposée sur le compte qu’elle détenait dans cet établissement ; qu’à l’issue d’une vérification de comptabilité portant sur les années 1994 et 1995, l’administration fiscale a réintégré la somme de 2 000 000 F dans les résultats de l’exercice clos le 31 décembre 1995 ; que la SOCIETE LEGEPS se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 12 mars 2009 de la cour administrative d’appel de Paris en tant qu’il a rejeté sa requête tendant à l’annulation de l’article 2 du jugement du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire d’impôt sur les sociétés à laquelle elle a en conséquence été assujettie au titre de l’année 1995 ;

Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu’il résulte des articles 38 et 39 du code général des impôts, dont les dispositions sont applicables à l’impôt sur les sociétés en vertu de l’article 209 du même code, que le bénéfice net est établi sous déduction des charges, comprenant notamment des provisions, supportées dans l’intérêt de l’entreprise ; que ne peuvent être déduites du bénéfice net passible de l’impôt sur les sociétés les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges étrangères à une gestion commerciale normale ; que c’est au regard du seul intérêt propre de l’entreprise que l’administration, à qui il n’appartient toutefois pas de se prononcer sur l’opportunité du choix arrêté par une entreprise pour la gestion de sa trésorerie, doit apprécier si les placements auxquels celle-ci a procédé correspondent à des actes de gestion commerciale normale ; que cet intérêt n’est pas méconnu lorsqu’une entreprise se livre à des opérations financières dans des conditions présentant pour elle un caractère avantageux ; qu’il en va autrement si, compte tenu des circonstances dans lesquelles il intervient et de l’objet qu’il poursuit, un placement financier excède manifestement les risques qu’un chef d’entreprise peut, eu égard aux informations dont il dispose, être conduit à prendre, dans une situation normale, pour améliorer les résultats de son entreprise ;

Considérant que, pour juger que l’administration devait être regardée comme établissant que le placement financier en litige constituait un acte étranger à une gestion normale insusceptible d’ouvrir droit à l’écriture d’une provision déductible du bénéfice imposable, la cour s’est fondée sur la circonstance que, bien que le placement de la somme de 2 000 000 F sur un compte ouvert dans une banque située au Vanuatu ait offert à la SOCIETE LEGEPS la possibilité de bénéficier d’une rentabilité élevée par rapport à celle offerte par les établissements bancaires français et d’obtenir auprès de celle-ci un montant de crédit important à un taux très bas pour financer un projet immobilier rentable, la société requérante ne justifiait pas que le montant de ce placement n’était pas disproportionné par rapport au montant de son chiffre d’affaires ; que, toutefois, la disproportion entre le montant du placement financier et le chiffre d’affaires de la société requérante ne saurait établir par elle-même que ce placement lui aurait fait courir un risque manifestement exagéré ; que, par suite, la cour a commis une erreur de droit ; que la SOCIETE LEGEPS est fondée pour ce motif à demander l’annulation de l’article 1er de l’arrêt qu’elle attaque ;

Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l’Etat le versement à la SOCIETE LEGEPS de la somme de 3 000 euros ;

D E C I D E :

--------------


Article 1er : L’article 1er de l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 12 mars 2009 est annulé.

Article 2 : L’affaire est renvoyée, dans la limite de la cassation ainsi prononcée, à la cour administrative d’appel de Paris.

Article 3 : L’Etat versera à la SOCIETE LEGEPS la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE LEGEPS et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l’Etat, porte-parole du Gouvernement.

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